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'SM4
BULLETIN
DE LA
COMMISSION DES ANTIQUITÉS
BULLETIN
DE LA
COMMISSION Dhs ANTIQUITÉS
DB LA
SEINE-INFÉRIEURE
TOME VI
— 1882 à 1884 —
TiOUECX
IMI'RIMKRIK KSFKRANCK CAGNlAKl)
Rues Jeanne-d'Arc, 88, et des Basiuge, 5
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9 •
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PROCÈS-VERBAUX
DE LA
COMMISSION DES ANTIQUITÉS
DE LA SEINE-INFÉRIEURE
PENDANT L'ANNÉE 1882
■^^^
SÉANCE DU 25 JANVIER 188a
La séance ouvre à deux heures, sous la présidence
de M. de Beaurepaire, vice-président.
Présents : MM ..Paul Baudry, le marquis de Blos-
seville, Bouquet, le docteur Ernest Guérouh, Lefort,
Tabbé Robert, l'abbé Tougard et Brianchon, secrétaire-
adjoint.
Absent et excusé : M. Sauvageot.
Le procès-verbal de la séance du 1 5 décembre 1 88 1
est lu et adopté.
— La correspondance imprimée comprend :
Comité archéologique de Senlis, Comptes-rendus
et Mémoires, 2* série, t. VI, année 1 880 ; — Mémoires
de la Société des antiquaires du Centre, 1881,9* ^^^' i
— Société des antiquaires de la Morinie^ Cartulaires
de l'église de Térouanne, publiés par Th. Duchet
et A. Giry.
M. de Beaurepaire donne lecture d'une lettre de
M. Paul Le Cœur, architecte, en date du 22 janvier
courant, qui motive les retards apportés dans Taché-
vement du porche de Téglise de Ry.
Les travaux du menuisier étaient subordonnés à
ceux du sculpteur. Ce dernier, ayant fait une chute au
Théàtre-des-Arts, s^est vu forcé de surseoir à l'exécu-
tion des sculptures qui ont été terminées trop tard
pour être posées avant l'hiver. Ce retard, du reste, est
un mal pour un bien, puisqu'il a permis au bois neuf
de jouer, et de produire les gerçures qui disparaîtront
au moyen de flipois introduits de force, comme cela
se tait habituellement.
Aussitôt que la saison le permettra, M. Le Cœur
donnera des ordres pour la reprise des travaux, qui
devront, dès lors, s achever promptement et dans les
meilleures conditions.
« Croyez, M. le Vice-Président, dit en terminant
M. Le Cœur, que j'ai tout intérêt à terminer le plus
tôt possible une œuvre de restauration à laquelle j'ai
donné tous mes soins. »
Ces explications de M. Le Cœur, jugées satisfai-
santes par M. de Beaurepaire, obtiennent également
l'assentiment de la Commission.
— Notre collègue, M. Lefort, architecte en chef du
département, donne lecture d'un Rapport détaillé sur
r agrandissement du Palais de Justice de Rouen,
dont la teneur suit :
Au moment où les travaux d'agrandissement du Palais
de justice sont en pleine activité, il ne sera peut-être pas
sans intérêt de jeter un coup-d'œil en arrière et de rap-
peler brièvement les phases diverses qui ont précédé la
période d'exécution.
C'est au mois d'août 1879 que le Conseil général, sur
la proposition de M. Limbourg, préfet du département.
3
reconnaissait, à la suite d*une visite sur place, la com-
plète insuffisance, on peut même dire l'inconvenance des
locaux affectes aux services du tribunal de première
instance de Rouen.
Au mois d'avril 18B0, le projet d'agrandissement, pré-
sente par Tarchitecte du département, était approuvé par
le Conseil général. — Ce projet s'étendait non seulement
sur remplacement de Fancien tribunal, mais empruntait
encore 1000 mètres environ à la place Verdrel ou du
Marché-Neuf, située à Touest du Palais et appartenant h
la ville. La rétrocession au département de cette portion
de terrain communal ne devint définitive qu'à la suite
d'un acte d'échange conclu, en juillet 1880, entre la ville
et le département. Ce dernier donnait comme compensa-
tion le jardin et les dépendances de Thôtel de la première
présidence.
Pendant les négociations auxquelles donnait lieu cet
acte d'échange, le projet recevait l'approbation du Ministre
des Beaux-Arts et celle de la Commission des monuments
historiques : de telle sorte qu'au mois d'août 1880, le
Conseil général, en adoptant les mesures financières néces-
saires, permettait de commencer sans retard les travaux ;
il témoignait ainsi de la manière généreuse dont il dotait
les services départementaux, et de l'intérêt si vif qu'il porte
aux arts de Normandie.
Le 20 septembre suivant, M. le Maire de Rouen remet-
tait au département le terrain cédé par la ville, et dès le
lendemain les terrassiers commençaient les fouilles : on
était entré dans la période d'exécution.
Le 1 1 août 1880, les travaux avaient été mis en adjudi-
cation. Les entrepreneurs adjudicataires étaient :
MM. Lefebvre et fils, de Rouen, pour la terrasse et la
maçonnerie ; Baudet, Donon et C»«, de Paris, pour la serru-
rerie; Menut'Gallet,d'Elbeuf,pour la peinture et la vitrerie;
Bcrson, de Rouen, pour la couverture et la zinguerie;
Mesureur et Monduit, de Paris, pour la plomberie d'art.
Les sculpteurs soumissionnaires ont été :
MM. Despois de Folleville, Fouchcr, Chcdeville, Bonei
père, Bonet (Léopold), Bonet (Félix), Devaux, Corbcl,
Billiard, Bonet (Edmond), Guilloux père, Gautier et Jean.
Les statuaires de la tour d'horloge ont été :
MM. Gaudran, Guilloux fils, Peynot.
Le 7 septembre, M. Brière, de Rouen, était déclaré
adjudicataire des travaux de menuiserie.
Tels sont les entrepreneurs à Taide desquels nous espé-
rons mener à bonne fin Tédifice aujourd'hui largement
commencé.
La profondeur des fondations atteint, sans la dépasser, la
moyenne prévue au devis. Le bon sol (un tuf, mélange
d'argile et de silex) s'étend sous toute la surface des con-
structions, a une profondeur de 4" 5o environ, rue Saint-
Lô, et de 5™ 5o, rue aux Juifs, avec une pente régulière
(celle de la vallée), de Tune à l'autre rue. Le sol, d'allu-
vion et de remblais, laissait passer de place en place de
forts suintements d*eau, dont le ciment et le béton ont fini
par avoir raison. Ces suintements provenaient sans doute
de l'ancien lit de la Renelle, ruisseau qui servait d'égout
h la source Gaalor et qui a été supprime lors de la création
des rues Jeanne-Darc et Thiers.
Les pluies de novembre 1880 détrempaient les terres
coupées par les fouilles, et des étayements d'une résistance
considérable ont été indispensables pour éviter des ébou-
lements et les accidents qui en auraient été la consé-
quence; la maçonnerie, hourdée en mortier de chaux
hydraulique et ciment, s'élevait rapidement; le travail,
pendant un mois, était poussé jour et nuit; et le i5 dé-
cembre 1880, quand arrivèrent les grands froids (17°),
les murs étaient assez élevés pour maintenir les terres, et
des contre-murs en planches, garnis de sable, établis le long
de leurs deux parements, les protégeaient contre la gelée.
Enfin une couche de o"* 5o de sable était superposée au
radier de béton. Ces précautions ont été efficaces : à la
reprise des travaux, après la gelée, le 20 janvier 1881, pas
une pierre n'avait souffert du froid.
Les travaux ont été activement menés pendant toute
Tannée 1881, et aujourd'hui, 20 janvier 1882, les maçon>
neries sont achevées et les sculptures finies jusqu'à hau-
teur de la corniche inclusivement. Toutes les gargouilles
sont en place; la pose du comble va commencer incessam-
ment. On taille ou on sculpte en ce moment les parties
supérieures, telles que lucarnes, balustrades, étage de
rhorloge, pignon occidental, dont nous espérons voir la
pose achevée le 3o avril prochain.
Les terrassements exécutés sur la place Verdrel ont sup-
primé une fontaine, très lourde de dessin et d'exécution,
construite à la fin du siècle dernier, située au centre de
la place, et dont la disparition ne laisse aucun regret dans
l'esprit de personne. Un aigle tenant une guirlande a été
déposé au jardin Sainte-Marie et en provient.
Cette fontaine avait remplacé un édicule^ surmonté de la
statue de Louis XV, élevé en 1 722, lequel succédait lui-
même à une fontaine construite en iSqS.
OBJETS TROUVÉS DANS LES FOUILLES
Les fouilles du nouveau tribunal ont été pratiquées
dans un sol de remblai relativement moderne pour les
trois premiers mètres. Quelques caves provenant des mai-
sons de l'ancien quartier des Juifs y ont été rencontrées ;
la construction n'en semblait pas antérieure au xv« siècle.
Les couches inférieures du sol étaient constituées, sur une
grande surface, par une sorte de compost noir et rempli
d'ossements d'animaux. La rue Massacre, ancien empla-
cément de la moitié des boucheries de la ville, se prolon-
geait jusque-là, et ce furent les fosses où étaient enfouis
les détritus animaux que les terrassiers ont mis à décou-
vert. Ces restes de fosses ont été trouvés principalement
entre la rue Percière et la rue du Tambour, sur une ligne
parallèle à la rue Jeanne-Darc. I-a profondeur moyenne
au-dessous du sol actuel de la place en était d'environ
5 mètres.
En ÙLce de la première lucarne de la salle des pas-perdus
(façade longitudinale ouest), du côte de la rue Saint- Lô,
les terrassements ont mis à découvert une fondation, très
probablement romaine, de 3 mètres de largeur, sur i™ 1/2
de hauteur et d'environ i5 mètres de longueur. Cette fon-
dation était massive, très compacte et admirablement bien
conservée; la mine seule, avec beaucoup de peine, parvint
à la disjoindre. Le mortier, constitué par de la chaux et du
sable très pur, était vitrifié, à la suite d'une véritable com-
binaison chimique de chaux et de silice. Les pierres cal-
caires de la côte Bihorel, sans doute, avaient participé à
cette combinaison dans le voisinage du mortier, et acquis
de ce fait très remarquable un supplément de dureté très
considérable.
La direction est-ouest de cet îlot de blocage est assez
intéressante. On sait, en effet, que la première enceinte
gallo-romaine de la ville a été retrouvée place des Carmes
et rue des Fossés-Louis- VI II (ainsi nommée parce que ce
roi fit don à la ville de l'emplacement des fossés romains),
dans l'enclave Saint-Lô, et avec la même direction, assez
inexplicable, puisque ces directions parallèles ne sont
pas dans le prolongement l'une de l'autre. D'autre part, le
caractère romain de la structure nous paraît certain pour
la maçonnerie en question. L'enceinte devait, par suite,
rejoindre ces deux directions en coupant l'emplacement
occupé aujourd'hui par Thôtel de la première présidence,
peut-être même, en suivant la rue de la Poterne, englober
la fondation retrouvée par nous, et, aussitôt après (puis-
qu'elle existait près de ta rue Massacre), changer de
direction et descendre à la Seine.
Nous avons l'honneur de déposer sur le bureau diffé-
rents objets trouvés près de cette fondation : plusieurs
pièces de monnaie très frustes et dont il semble difficile de
reconnaître l'effigie exacte ; une coupelle et des fragments
en terre dite de Samos : un vase et un fragment de terre
grise. Ces objets semblent d'origine romaine ou gallo-
romaine.
Nous y joignons d'autres objets de date postérieure, et
dont quelques-uns paraissent mériter une étude complète
de la part de personnes plus compétentes que nous. Nous
proposons en particulier à votre bienveillante attention un
sceau du xui^ siècle, fort curieux, de forme doublement
ogivale, avec figurine au centre et l'exergue : Sigilium
Matllis " sur le bord. La figurine est celle d'un religieux
vêtu de la cape et de la tunique et tenant un livre dans les
deux mains. La gravure en est fine, et tout l'ensemble
d'un beau caractère.
L'époque mérovingienne semble représentée par une
rondelle gravée, des perles de colliers en os, ainsi que par
un peigne dont la monture est gravée d'oves grossières.
Nous attribuons au commencement du xvic siècle un
robinet de cuivre et plusieurs cruches ou fragments de
pots en terre, recouverts d'un enduit rouge ou jaune, avec
dessins en creux, et inscriptions en lettres encore gothi-
ques; l'une d'elles, très lisible, est : • Penser à la mort,
pauvre sot. > — Le vase et les filets en relief ont été Êibri-
qués au tour; les dessins en creux ont été faits assez gros-
sièrement, d'ailleurs, à la main. La panse du vase est di-
Corée de bâtons rompus et de raies de cœur. Un autre
vase, plat, porte au fond gravé le monogramme du Christ
et l'inscription : • Le votre (suis). • Deux autres cruches
dont la forme n'est pas sans élégance et l'origine un peu
antérieure, sont revêtues d'une décoration qui n'est pas,
comme la précédente, empruntée aux ornements de l'ar-
chitecture : elle est constituée par des points saillants, en
forme de perles, disposés suivant des dessins géométriques,
la plupart circulaires, ingénieux et d'un bon effet.
Une figurine de i3 centimètres de hauteur environ,
mutilée, en poterie vernissée, peut être attribuée à la
même époque.
8
Si nous nous sommes un peu étendu sur ces poteries,
c'est qu'elles sont peut-être le commencement de cette
fabrication rouennaise qui, un siècle et demi plus tard,
devait briller d'un si vif éclat.
Il est à remarquer que les objets de cette époque trou-
vés au Palais, bien que vulgaires, portent une décoration
inspirée des idées, nouvelles en art, de la Renaissance : ces
idées avaient pénétré partout et inspiré la fabrication
même des ustensiles les plus ordinaires.
D'autres pièces de monnaie ont été trouvées dans les
remblais, tout à fait modernes : la plus ancienne d'entre
elles n'est pas antérieure à Henri IV ; elles sont déposées
sur le bureau. Les ouvriers ont trouvé également une
collection de trente ou quarante jetons ou faux liards.
Cette falsification devait être assez commune, si Ton en
croit la locution populaire : c Faux comme un jeton. »
La démolition des bâtiments du xvnic siècle a fait décou-
vrir la plaque commémorative de la pose de la première
pierre. Cette plaque est ainsi conçue :
€ L'an 1739, le 14 du mois de juillet, la première pierre
c de ce bâtiment a été posée par haut et puissant seigneur
c messire Geoffroy Mace Camus de Pontcarré, chevalier,
c seigneur de Pontcarré, baron de MafHiers, Monssoul et
« Bethemont, seigneur de Villaine, Quinquempoix, Ar-
« pentigny et autres lieux, conseiller du Roy en tous ses
< conseils, maître des requêtes honoraire de son hôtel et
« premier président du parlement de Normandie.
t Du Dessein de P. Jarry, architecte du Roy. •
Elle a été déposée au Musée d'Antiquités.
Le sieur Jarry, notre confrère du siècle dernier, dont il
est question sur cette plaque, n*avait pas un très grand
respect de l'oeuvre de ses prédécesseurs : quelques gar-
gouilles du Palais étaient ruinées par le temps, disait-il,
— il en fit scier cinq. — Il avait conçu le projet de rempla-
cer la galerie de pierre, tombée dans une longueur de
soixante pieds, par une balustrade en fer carré; il est
heureux qu'il n'ait pu mettre son idée à exécution.
Aussi devons-nous avouer que la nature de son talent
nous est peu sympathique; et si le peu de valeur de son
œuvre ne nous avait déjà délivré de tout remords pour la
démolition que nous en avons dû faire, les détails qui pré-
cèdent suffiraient, pensons-nous, pour nous en débarras*
ser complètement.
La destruction des bâtiments modernes a amené la sup-
pression de la maison de justice. Les inculpés, les préve*
nus, les accusés, n'habitent plus les cachots humides et
malsains où ils subissaient, innocents ou coupables, par le
seul fait du mauvais état des constructions, une aggrava-
tion de douleur et de châtiment. Les services de la justice
ont dû être déplacés également; ils ont été provisoire-
ment installés dans Thôtel de la première présidence, et
aussi au rez-de-chaussée de la salle des pas-perdus. Ce
rez-de-chaussée a été aménagé : tous les murs inutiles à
la stabilité de la construction, et qui y avaient été accu-
mulés pour satisfaire aux circulaires administratives de
plusieurs siècles sur l'installation des prisons, ont été sup-
primés. L^aération des salles ne peut que se bien trouver
d'une semblable mesure, utile également à l'assainisse-
ment des murs. Ce travail nous a permis la reconstitution
d'une salle de gardes, qui servira d'entrée aux voitures
cellulaires. Cette salle, avec sa grande cheminée du temps
et la retombée de ses voûtes sur un pilier central, est d*un
réel intérêt. C'est un exemple de la facilité avec laquelle
on savait autrefois, à l'aide des plus simples moyens, obte-
nir un saisissant résultat artistique.
Un fait singulier se produit fréquemment dans les édi-
fices de cette époque : les précautions à prendre pour la
stabilité des constructions sont moins rigidement obser-
vées que les lois intuitives de l'art.
Ainsi, les travaux d'appropriation exécutés sous la salle
des pas-perdus nous ont révélé une négligence véritable-
ment incroyable des premiers constructeurs. Ceux-ci, en
10
effet, se sont contentés (nous Pavons vu par des sondages
pratiques près de la rue aux Juifs, aussi bien que près de
la rue Saint-Lô) d'abattre, en 1499, les maisons de Sigot
et de la Palette et les deux du Petit-Dourdonne, pour
l'acquisition desquels les gens de justice avaient été impo-
sés de 1000 livres. Ils n'ont aucunement, dans l'établis-
sement de leurs murs de refend, cherché un sol de bonne
qualité : les caves des maisons primitives ont été rem-
blayées, et les murs construits sur un béton appuyé sur ces
remblais. Ceux-ci en se tassant ont amené des mouve-
ments qui ne se sont pas fait attendre. En i5o2, des ex-
perts signalaient les désordres survenus dans les pignons,
rue Saint-Lô et rue aux Juifs (les lézardes de ce dernier y
sont encore apparentes). Ce qui nous étonne, c'est que
ces pignons, bien que consolidés en i5o2, soient encore
debout. Le tassement des remblais situés sous le béton a
produit un vide qui atteint quelquefois 70 centimètres, et
le béton, ainsi que les maçonneries supérieures, s'appuie
uniquement sur les murs des maisons rasées, lesquels
murs coupent d'une façon fort irrégulière le vide provenant
du tassement du remblai^ et ne sont pas situés le moins du
monde sous les murs supérieurs du Palais.
D'ailleurs, quand nous avons cherché à raccorder avec
les assises du monument ancien celles de la construction
nouvelle, il nous a été impossible de le faire, les dénivel-
lations provenant des tassements étant générales, irrégu-
lières et atteignant parfois plus de 3o centimètres.
Cette situation n'offre d'ailleurs rien d'inquiétant pour
le présent; les mouvements qui pouvaient se produire
sont bien finis; — et si des voitures trop pesamment
chargées ne viennent pas détruire l'équilibre actuel par
des trépidations violentes, il y a tout lieu de croire que
cet équilibre se perpétuera pendant des siècles encore.
Nous croyons néanmoins devoir signaler l'utilité qu'il y
aurait à interdire d'une manière permanente la circu-
lation des voitures lourdes dans l'étroite rue aux Juifs ;
II
c'est de ce côté, en effet, que le mal est le plus grand.
Doit-on rendre le maître de F œuvre, le modeste inconnu
créateur d'une merveille, responsable d'une telle négli-
gence? Nous ne le pensons pas. Uexiguité des ressources
mises chaque année à sa disposition, le manq<ue d'indcpen-
dance, de considération et d'autorité morale, attestes par
Tanonymat opiniâtre qui le poursuit dans toutes les pièces
ou actes qui devraient le désigner, les tracasseries et les
jalousies violentes qui ont existé entre la ville, qui payait
la grande majorité de la dépense, la magistrature et la
royauté, qui y contribuaient un peu et en profitaient le
plus, expliquent la difficulté de cette situation et les incon-
vénients pratiques qui en résultèrent.
Ces inconvénients, nous espérons ne pas les connaître :
le département, la magistrature et la ville sont en complet
accord et se prêtent le plus entier et le plus dévoué con-
cours. Trente et une années suffisaient à peine pour four-
nir au maître ancien les ressources qui devaient lui per-
mettre de terminer son œuvre de génie. L'architecte
moderne, plus favorisé, espère achever sa construction
en trois années au plus. Il est secondé par des entre-
preneurs d'élite et soutenu par toutes les sympathies. Le
concours de toutes les bienveillances n'est pas trop pour
diminuer notre appréhension ; nous sentons combien le
voisinage est redoutable, et nous éprouvons pour nous-
méme la vérité de cette parole de Fontenelle : c II est
des gens auxquels on succède, mais qu'on ne remplace
pas. >
Il est vrai que loin de chercher à remplacer, nous n'avons
qu'une ambition : compléter, ainsi qu'aurait pu le faire
l'architecte du xvt^ siècle, vivant à notre époque, et chargé
d'exécuter le complément de son Palais.
Ce complément coûtera i,85o,ooo francs.
Le Palais ancien avait coûté 3oo,ooo livres en i53i,
époque à laquelle il était considéré comme suffisamment
terminé, dont 90,000 livres environ pour la grande salle
12
des Procureurs. (Registre secret du Parlement, cité par
Floquet.)
Si Ton tient compte du pouvoirde l'argent, les 3oo,ooo liv.
équivaudraient à 1,800,000 fr. aujourd'hui, d'après les tra-
vaux de M. Natalis de Wailly sur les variations de la livre
tournois.
Or, la partie achevée en i53i comprenait la salle des
pas-perdus, la salle des assises jusqu*à la tourelle du centre
de la cour inclusivement, ainsi que le rez-de-chaussée de
la partie à droite de cette tourelle. La construction de
cette partie, faite actuellement, ne dépasserait pas sensi-
blement ce chiffre de 1,800,000 fr. Or, le perfectionnement
des voies et moyens de communication depuis le xvi^ siècle
a diminué d'une manière considérable le prix de revient
des matériaux. Comme ceux-ci viennent sensiblement des
mêmes carrières, situées dans la vallée de TOise, il en
résulte que l'énorme diminution du prix des transports a
amélioré d'autant les salaires et la main-d'œuvre dans une
proportion qui ne serait pas moindre de 80 0/0, ce dont
il est impossible de ne pas se féliciter.
L'ancien Palais a été construit d'une manière qui se
rapproche beaucoup du mode dit aujourd'hui en régie. Les
matériaux étaient fournis par la ville, et amenés à pied
d'œuvre t le plus près que faire se pourra, » dit le devis de
1499, rapporté par Robert le Lieur. Roger Ango recevait
en octobre iSog le payement d'une somme de 1,906 livres
4 sous 6 tournois pour ouvrages par lui fait faire au Palais
de justice, depuis Pâques jusqu'à la Saint-Michel.
Roger Ango, et ses fils Robert et Richard étaient donc
les régisseurs comptables de la ville, — pour employer une
locution administrative moderne. — Étaient-ils aussi les
auteurs du projet? Rouland le Roux, l'architecte, ou,
comme on disait alors, le maître des œuvres de la cathé-
drale (l'auteur du tombeau des Cardinaux d'Amboise et
du grand portail de Notre-Dame) a certainement, comme
juré, mesuré des pierres apportées de Saint -Leu, en i5o9,
i3
pour la construction du Palais de justice : auquel des deux
sommes-nous redevables du monument qui nous occupe ?
Le grand homme qui a doté Rouen et son pays de ce
splendide édifice est encore anonyme; il est triste de penser
que s'il eût vécu en Italie, les cites à Tenvi se dispute*
raient T honneur de lui avoir donné naissance, et son nom
serait célébré partout. Les anciens rendaient un culte au
dieu inconnu ; si Fart mérite un culte, qu'il nous soit per-
mis d'apporter ici à Tartiste inconnu le modeste témoi-
gnage de notre religieuse admiration.
La Commission remercie M. Lefort d^une page his-
torique qui marquera -dans ses archives, et examine
avec intérêt les objets, provenant des fouilles, si curieux
à différents titres, tels que : un peigne mérovingien^ un
pichet rouge à engobe gravée du xve siècle, avec Tîns-
cription rapportée ci-dessus, une terrine rouge de la
même époque, aussi à engobe gravée, présentant au
fond le monogramme du Christ — J H S — et, sur
le marli, cette inscription — JE VOSTRE S VIS (i)
— et surtout le très beau sceau matrice ovale du
xiii« siècle, de MATLLIS, dont M. Gouellain nous
avait fait admirer le surmoulage dans une précédente
séance (2).
Toutes ces reliques du vieux Rouen sont destinées
au Musée d'antiquités.
Il est à remarquer qu'on n^a rien trouvé qui eût
rapport aux Juifs dans ce quartier qui portait leur
nom (3) et qu'ils habitèrent pendant au moins trois
(i) Cf. Catalogue du Musée d'Antiquités de Rouen y par Tabbé
Cochet, 1875, p. 59.
(2) Séances de la Commission des Antiquités.
(3) Cf. Rues et places de Rouen, verbo le Clos aux Juifs, par
Nicétas Périaux, p. ii^'i^o.
14
cents ans, du xi« au xiv^ siècle, depuis Philippe !«' jus-
qu'à Philippe-ie-Bel.
— Sous le titre d^ Analyse partielle de la correspon-
dance imprimée offerte à la Commission des anti-
quités, dans sa séance du iS décembre i88i, le
secrétaire-adjoint donne l'indication de ce qui, dans
cette Correspondance^ se rapporte aux Normands ou
à la Normandie.
— M. de Beaurepaire donne lecture de la notice
suivante relative au Prieuré de Saint-Michel, sur la
côte Sainte-Catherine de Rouen>
Je ne sais si près de nous on trouverait aisément un
lieu plus propre à faire saisir les différences des temps
que cette côte de Sainte-Catherine, que nous avons tous
plus d'une fois parcourue, soit pour satisfaire notre curio-
sité d'archéologues, soit pour nous procurer le plaisir d'un
des points de vue les plus variés et les plus intéressants
qu'on puisse imaginer. Cette côte qui domine la ville,
qu'on ne gravit pas sans peine, n'a cependant présente
qu'un faible obstacle aux entreprises de nos ingénieurs.
La montagne ne s'est pas montrée plus rebelle que le
fleuve voisin. Comme lui, elle a dû se prêter au passage
des rapides locomotives. A sa base, et presque au niveau
des prairies de Sotteville, une route souterraine la tra-
verse de part en part, pendant qu'un chemin large et
facile, récemment tracé, serpente autour de ses hauteurs,
autrefois réputées inaccessibles. Ses flancs, du côté de
Saint-Paul, ouverts, au siècle dernier, pour la confection
de la grande route de Rouen à Paris, ont été, du haut en
bas, et sur une grande profondeur, entames pour fournir
les matériaux nécessaires aux constructions de la cité, et
ce sol factice, h l'aide duquel récemment on a rétréci le
lit delà Seine et on lui a imposé de nouvelles rives. Ainsi
l'on a vu des pentes verdoyantes qui descendaient autre-
î5
fois jusqu'à la berge du Heuve, remplacées par des falaises
abruptes, assez semblables à celles du rivage de la mer le
long du pays de Caux. Combien nous voici loin de ces
temps où c'était une affaire sérieuse pour nos échevins
d'indiquer au jeune roi Louis XI II le chemin qu'il devait
suivre pour faire son entrée dans sa bonne ville de Rouen ( i ),
sans risque pour sa personne et pour son train I où Colbert,
devant l'opposition inconsidérée des échevins dt cette
même ville, renonçait au projet qu'il avait conçu de faire
ouvrir un grand chemin par les hauteurs de Bonsecours (2)!
où, en plein siècle de Louis XIV, on signalait sur le
chemin de Paris, à quelques lieues de nous, de grandes
fondrières où s'abîmaient les voitures et les voyageurs (3)!
Malheureusement, si bienfaisant qu'il soit, le progrès ne
saurait s'accomplir sans quelques pertes plus ou moins
fâcheuses. Comme nos plaintes, toutes platoniques, ne
sauraient rien entraver ni faire tort à personne, on nous
pardonnera cette expression timide d'un regret : Qu'est
devenu le temps où sur cette côte, aujourd'hui inha-
bitée, on voyait se dresser les murailles crénelées et le
donjon d'une citadelle royale, mentionnée au bas de tant
(i) Voir les délibérations de la vîlls de Rouen 161 7. On crai-
gnait que rhonneur de la ville ne se trouvât compromis, si
Louis XIII venait par la porte Martainville. Il fallut, aux abords
de Rouen, améliorer les routes et jeter des ponts sur la rivière
d'Aubette.
(2) Voir cette lettre dans les Annales des Ponts-et-Chaussées.
« Le roi n'entendait pas faire le bien des Rouennais en dépit
d*eux. »
(3) Voir les Plumitifs du Bureau des finances de Rouen. « Sur
le grand chemin royal du Pont-Saint-Pierre, qui conduit de
Rouen à Écouis, Andely, Vernon, Mantes, Magny, Gisors, grands
précipices causés par les inondations... Entre Téglise de Saint-
Nicolas du Pont-Saint-Pierre et THermitage, précipice de 5 pieds
de profondeur et 3o pieds de largeur... personnes noyées; il y
en tofnb2 journ:llemcnt... » Commission nommée, 29 oct. 1659.
ï6
d*ordonnances de nos rois? où une abbaye célèbre était
abritée dans cette enceinte fortifiée ? où l'on rencontrait à
mi-côte une église plus modeste dans ses proportions,
dédiée à S. Michel, le patron des lieux élevés ? La côte
Sainte- Catherine, que Ton appelait autrefois le AfonN^e-
Rouen^ a perdu de son cachet pittoresque; elle n'a rien
conservé de son aspect monumental. Plus de château,
plus d'abbaye, plus d'église! II ne lui reste que ces
grands mouvements de terrain qui indiquent les prépara-
tifs des sièges, et qui subsisteront longtemps encore, tant
!a terre a été creusée profondément. Elle n'offre absolu-
ment rien de religieux, à moins de reconnaître ce carac-
tère au cimetière, qui fut relégué là, peu d'années avant la
Révolution, comme dans une solitude, par un sentiment
jusqu'alors inconnu, et qui était déjà comme un signe de
temps nouveaux et d'une société nouvelle.
De ces trois établissements que je viens de nommer, le
seul dont je me propose de vous entretenir, est le prieuré,
non qu'il présente plus d'intérêt que les autres (c'est le
contraire), mais parce qu'il ne demande qu'une notice de
peu d'étendue. Il me suffira de l'appeler succinctement
quelques particularités relatées par D. Pommeraye, dans
son Histoire de l'abbaye de Saint-Ouen, en y mêlant ce
que j'ai pu découvrir, çà et là, dans des documents négligés
par cet auteur, ou postérieurs à l'époque où il vivait.
Il n'est pas douteux que le prieuré de Saint-Michel, dit
plus tard le prieuré du Mont-Gargan, n^existât antérieu-
rement à io3o, date assignée à la fondation de Tabbayede
Sainte-Catherine. La pièce la plus ancienne où il en soit
fait mention est une charte du duc Richard II, par laquelle
ce prince confirme aux moines de Saint-Ouen t montem
Sancti'Michaelis cum ecclesia et pratis ad eam pertinenti^
bus sub fluvium Rodebec quant dédit Rodulphus qui prœ-
uominabatur Torta ».
Vers le temps de l'abbé Nicolas de Normandie, qui fut
fils et frère de nos ducs, et qui gouverna l'abbaye de
î;
Saint-Ouen dans la seconde moitié du xi° siècle, une dame
de Pavilly (de Palliaco), nommée Odda, du consentement
de Hugues, son fils (i), donna aux moines de Saint-Ouen
et spécialement à ceux d'entre eux qui desservaient l'église
de Saint-Michel du Mont-de-Rouen, 60 acres de bois à
Normare (2), la masure (ïun nommé Valentin et une autre
masure qui avait été donnée en gage à Bernard de Blo-
ville, et dont on venait de faire le rachat, au moyen de
fonds fournis par le prieur de Saint-Michel. Cette dona-
tion, suivant un usage alors assez commun, fut déposée,
ainsi que le marque la charte, sur l'autel du prieuré
Ce fut dans l'église de Saint-Michel que furent déposées,
en attendant que l'archevêque Guillaume Bonne-âme en
fît la translation solennelle en Tabbaye de Saint-Ouen, les
reliques de S. Romain et de S. Godard, que ce même abbé
Nicolas avait obtenues des moines de Saint-Médard de
Soissons.
En 1142, un autre abbé de Saint-Ouen, Rainfroi,
s'étant démis pour raison de santé, de la dignité abbatiale,
se retira au prieuré de Saint-Michel, où il vivait encore
avec le titre de prieur en 1 1 5o.
Ce sont là des documents authentiques qui donnent
déjà une idée assez favorable de Tantiquité du prieuré de
Saint-Michel, mais ils ne nous apprennent rien de sa fon-
dation, qu'il faudrait faire remonter à une époque bien
plus reculée, si l'on en croyait une inscription qu'on
voyait au xvn^ siècle, dans la chapelle Saint-Michel, et
dont Pommeraye nous a conservé le texte :
(i) La famille de Pavilly possédait de grands biens près de la
côte de Sainte-Catherine, notamment un fief, dit plus tard
le fief d'Esneval.
(2) Normare est le nom d'un hameau, encore aujourd'hui con-
nu. C'était autrefois le nom d'un bois d'une assez vaste étendue.
Tout le plateau entre le Mesnil-Esnard et TAndelle paraît avoir
été occupé par des forêts.
2
t8
« Je suis Clovis le premier Roy chrétien
Qui ay fondé ceste dévote place,
Semblablement ay fondé Saint-Ouen.
Entre les deux n'y a pas grande espace.
Je régnois lors par la divine grâce
L*an quatre cens quatre vingts et quatre ans.
Priez Dieu pour moy, qu'il efi'ace
Tous mes péchez et ceux de mes enfons. »
« Il y a grande apparence, ainsi que le fait observer le
savant bénédictin, que, comme le poète s'est trompé en
ce qui concerne Tabbaye de Saint-Ouen, dont il attribue
la fondation à Clovis, il n*a pas mieux rencontré à Tégard
de Téglise de Saint-Michel. » Toutefois, sans reporter
aussi loin la fondation de ce prieuré, Pommeraye conjec-
ture qu'elle a dû suivre de bien près celle du Mont-Saint
Michel au péril de la mer, qui eut lieu, après l'apparition
de l'archange S. Michel à S. Aubert, évêque d'Avranches,
en l'an 709.
Sans prendre le moins du monde parti pour ce rimeur
anonyme, vraisemblablement du xvi^ siècle, dont l'asser-
tion nous doit être à bon droit suspecte, je me permettrai
de faire remarquer que ce n'est pas lui qui a créé la
légende; il n'a fait que la suivre : elle existait longtemps
avant lui, et elle était si bien admise, qu'elle est rapportée
de la manière la plus positive dans un mandement des-
tiné à une grande publicité, puisqu'il devait être lu par
tous les cures du diocèse à leurs paroissiens, et que son
objet était de solliciter les aumônes des fidèles pour la
restauration de la chapelle en question.
Ce document nous a paru intéressant par ce qui s'y
trouve relaté et aussi par la forme de sa rédaction. Nous
en donnons le texte d'après une copie du xvii^ siècle^ que
nous avons retrouvée dans les archives de l'abbaye de
Saint-Ouen.
c A tous bons Chrestiens qui au jour de jugement se
verront estre appeliez vrais fils et filles de Dieu, qui voul-
»9
liront aidier h réparer h digne et saincte chapelle de
mons. S. Michiel angre du Mont-de-Garguen, laquelle est
la première chapelle qui oncquesfut fondée en royaume de
France, en Tonneur et révérence de mons. S. Michel ; et la
fonda le roy Clovis, qui fut le premier roy chrestien qui
oncques fut en France, auquel Dieu envoya les ampoulles
de quoy il fut sacré par certain angre ; et pour la grâce
que Nostre Seigneur luy fist, il fonda ceste noble chapelle,
laquelle a esté des truite parle làict et occasion de la guerre,
par quoy toute bonne personne en doit avoir grant pitié.
Car c'est notre premier advénement que Téglise, par quoy
il n'est pas bon chrestien qui n'a pitié de Téglise et de la
destruction qui y a esté faicte, comme chacun sait, et
comme plusieurs personnes de loing et de près y viennent
réquérir grâces et merci à Dieu et à S. Michiel angre,
lequel est chevalier de Paradis et prévost de Paradis, con-
diteur et garde des âmes de tous ceuls qui ont en luy par-
faicte dévocion. Car oncque créature ne fut tant descon-
fortée, soit en adversité de mal, ou en péril de feu ou e:i
temptacion de Tennemy d*enfer, qu'ils niaient esté fort ei
hastivement secourus par luy. Car c'est celui qui se combat
contre Tennemy d'enfer et [est] avocat envers Nostre Sei-
gneur Jésus-Christ, par quoy tous ceus et celles qui ceste
grâce vouldront acquérir doivent avoir Téglise de mons.
S. Michiel pour recommandée. Et aussi nostre souverain
prélat, meu en pitié, nous mande à tous, curés et chappel-
lains, que nous vous recommandions la chappelle de mons.
S. Michiel, et que nous vous amonestions, de mot en mot,
la grand pitié et désolation d'icelle chappelle, et comme
en pitié et osmone il vous plaise à eslargir et envoier de
vos biens que Dieu vous a prestez en ceste mortelle vie,
soit cire pour enluminer la dite chappelle, ou or ou argent
entier, quassé ou rompu, pour aidier à reparer les reli-
quères et galices de lad. église, et aussi que le sainct ser-
vice divin y soit faict et accompli comme autrefois a esté.
Et à tous ceus et celles qui de leurs biens y envoyèrent,
20
nostre sainct père le pape, qui est Dieu en terre, leur
donne, pour le sauvement de leurs âmes les grâces et
pardons qui ensuivent, c'est assavoir : à la Nativité de la
Vierge Marie, ung an et xl jours de vray pardon ; à la
Saint-Ouen, ung an et xl jours; à la Saint-Nigaise, ung
an et xl jours ; à la dédicace de la dite église de Saint-
Ouen, ung an et xl jours de vray pardon, et par tous les
octaves ded. festes, ung an et xl jours de vray pardon.
Item, mons. le cardinal de Sainle-Crois de Jérusalem y a
donné, en la Nativité de N. S. Jésus-Christ, cent jours de
vray pardon; à la Nativité de la Vierge, cent jours de vray
pardon; à la Nativité de S. Jehan Baptiste, cenl jours de
vray pardon; à la S. Pierre et S. Paul, cent jours de
vray pardon ; à la S. Martin, cent jours de vray pardon ;
à la S. Ouen, cent jours de vray pardon. Item, tous les
bienfaiteurs de mons. S. Michiel sont associez à mort et à
vie, eulx et tous leurs amis, mors ou vifs, en toutes les
messes, prières et oraisons qui sont et seront jamais faictes
en l'abbaye de mons. S. Ouen de Rouen et en toutes les
églises dépendantes d'icelle. Sy en faictes tant, tous et
toutes, que Dieu et mons. S. Michiel vous en saichent grey,
et que devant Dieu, au jour périlleux, il soit vostre advo-
cat et escu contre Tennemi d'enfer ; et de Dieu soit-il
benoist que bien y fera ! »
Le nom du cardinal de Sainte-Croix permet de dater ce
document à quelques années près. Ce prélat n'a pu oc-
troyer des indulgences pour la restauration du prieuré de
Saint-Michel, qu'en vertu de ses fonctions de légat du
Saint-Siège, qu'il exerça en France au temps de la domi-
nation anglaise. Les guerres auxquelles il est fait allusion
sont précisément celles qui s'engagèrent entre l'Angleterre
et la France sous Charles VI et sous Charles VII, et prin-
cipalement ce siège, aussi long que meurtrier, que Rouen
eut à soutenir, en 141 2, contre l'armée de Henri V. Ces
mots, la grand pitié de la chapelle^ sont bien de la langue
de cette triste époque. Ils nous rappellent cette exprès-
21
sion touchante, par laquelle Jeanne d'Arc expliquait son
héroïque résolution, et indiquait le motif de son sublime
dévouement : « La grand pitié qui était au royaume de
France! •
Les termes de ce mandement nous autorisent à penser
que si la chapelle avait été pillée et endommagée, elle
n'avait pas cependant été démolie, puisqu^l n*est pas fait
allusion à des travaux de reconstruction.
Les guerres de religion lui furent plus funestes. Il est
certain qu'elle fut jetée bas par les protestants en i562,
puisque, peu de jours après que Charles IX eut repris la
ville de Rouen sur le prince de Condé, le prieur de Saint-
Michel s'adressait au Parlement, et lui demandait restor
d'une somme de 7,000 1. t. sur les gens de la nouvelle
religion, qui avaient démoli, rasé et abattu l'église et les
maisons du prieuré.
A peine reconstruite, elle se vit en butte à de nouveaux
orages, à l'époque de la Ligue, lorsque l'armée royale,
commandée par Henri IV, vint mettre le siège devant la
ville de Rouen. Je serais porté, cependant, à supposer
qu'elle ne fiit pas démolie, parce que, dans les premières
années du xvii* siècle, on trouve un devis des travaux à
faire à l'église Saint- Michel, et que ce devis a trait, non
pas à une reconstruction, mais à une augmentation de
l'édifice. On devait démolir le pignon du côté de l'autel,
prolonger l'église de dix-huit pieds, en donnant à la par-
tie nouvelle deux travées, comme à la partie conservée.
Les murs devaient être faits «de caillou biset et chaîne de
pierre, avec deux ovales de pierres de taille, une de chaque
côté, l'une et l'autre de deux pieds de diamètre. Ces murs
devaient avoir trois pieds d'épaisseur à leur base, afin
d'être en état de résister aux coups de vents et à la pous-
sée des voûtes qui devaient être de pendant, avec branches
d'ogive et pierres du Val-des-Leux, le tout couvert de
caillou biset à double lit de ciment, avec un enduit de
ciment de deux poyces d'épaisseur par dessus le caillou.
22
à moins que l'entrepreneur ne préférât les couvrir de pierre
du Val-des-Leux, de la plus dure que faire se pourrait. »
On laissait à l'entrepreneur la faculté d'employer aux tra-
vaux, les matériaux du fort Sainte-Catherine, démoli par
ordre du Roi, sur les réclamations des États de Norman-
die.
Je doute fort que ce travail ait été exécuté, parce que
Pommeraye, qui écrivait en 1662, nous apprend que, de
son temps, c le prieuré était réduit à une petite chapelle
bastie de pierre de taille, de douze pieds en carré, i ce qui me
paraît être, à en juger par les dimensions, la chapelle indi-
quée sur un plan assez informe joint au devis que je
viens de citer. On voit par ce plan que cette chapelle se
terminait par un double pignon, qu'il n'y avait qu'une
porte à cette chapelle, près du pignon, dans le mur laté-
ral, du côté du chemin qui montait à la côte Sainte-
Catherine.
Le temporel de ce prieuré ne fut jamais bien considé-
rable. Il comprenait quelques rentes au faubourg Martain-
ville, dans les villages de Pierreval, d'Icquebeuf, du Mes-
nil-Esnard, dans les hameaux du Faulx et de Normare,
les dîmes de la paroisse et des moulins de Cailly. Pendant
longtemps, le fief de Montigny, près Saint-Martin-de-
Boscherville, appartint à ce prieuré ; il fut vendu, en iSoj,
à Guillaume la Vieille, grènetier de Rouen, pour un prix
qui prouve combien peu de chose ce pouvait être qu'un
fief. Un autre fief sans importance, situé aux paroisses de
Saint-Pierre et de Notre-Dame de Franqueville, fut éga-
lement vendu, en 1577, à un bourgeois de Rouen. Le re-
venu, en 1578, ne dépassait pas i5o 1. On l'évaluait à
800 1. vers le milieu du siècle dernier.
Pendant un assez long espace de temps, le prieuré du
Mont-Saint-Michel fut administré directement par les reli-
gieux de l'abbaye de Saint- Ouen. Plus lard, il redevint
un bénéfice régulier, auquel était nommé un des moines
de cette abbaye.
23
J'ai essaye d'établir la liste des prieurs. Je n*ai pu
retendre au-delà des premières années du xvc siècle, ni
arriver à toute la précision de dates désirable.
Voici ceux dont j'ai retrouvé les noms :
Dom Bertrand Le Blanc, dernier mai 1408. (Tabellion,
de Rouen j reg. 9, fo 181, reg. 14, f» Si v^.)
Robert de Beaunay, 22 mars 1422 — 2 mars 1432.
Thomas Marie, bachelier en théologie, 5 avril 1437 —
27 mars 1448.
Richard Quesnel, bailli de Saint-Ouen, 2 juillet 1479.
Nicole de la Fosse, 1479 — ^ ^^^ '49>'
Roger Louvel, bachelier en théoL, 24 nov. 1492 — 1499.
Anseaulme Du Fay, juin 1 5o6.
Dom Pierre de Rouves, à partir, de 1 5o6. Il était en
même temps prieur de Chambray.
Dom Michel de Rouves. Il fut pourvu du prieuré sur
la résignation de Pierre de Rouves, le 3o octobre 1546.
Il se qualifiait encore prieur de Saint-Michel en i35o.
On trouve, avec le titre de prieur, un nommé Nicole
Le Port, du 27 mai i55i à i552 ; un nommé Coignard, de
i555 à 1557. Michel de Rouves reparait comme prieur de
i558 à 1578. Il était en même temps maître de Tœuvre de
Saint-Ouen.
Guillaume Hazard, du 10 septembre iSôy à 161 5. Après
la mort de Hazard, Jean Thomas, religieux profès de
Saint-Denis en France, se fit nommer par Tabbé de Saint-
Ouen au prieuré de Saint-Michel, en vertu d'un induit
accordé à M* Charles Barentin, conseiller d'État. Il en
jouit quelque temps. Je ne sais pour quel motif, en i632,
le titre lui en fut contesté par un concurrent, Jean de la
Forge, sous-prieur de Saint-Ouen. Le procès fut porté au
Conseil d'Etat et se termina, suivant toute vraisemblance,
heureusement pour ce dernier, puisque c'est lui que nous
voyons porter le titre de prieur du Mont-Saint-Michel de
i632 à juillet 1646, époque de sa résignation en faveur de
Jean de Brétignières.
24
Jean de Brétignières, tiers chantre cenelier de Saint-
Ouen, nommé en cour de Rome, sur la résignation de
Jean de la Forge, 1 2 des calendes de juillet 1646, obtint
des lettres de provision à l'archevêché, le 1 2 novembre de
cette année, et conserva ce prieuré jusqu'en 1664, époque
où, se sentant malade, il résigna à son tour en faveur de
Pierre Tesson. Ayant survécu à celui-ci, il se fit de nou-
veau pourvoir à ce bénéfice par l'abbé de Saint-Ouen.
Louis Fremonty docteur de Sorbonne, religieux de Saint-
Benoît, est cité avec le titre de prieur de Saint- Michel le
5 décembre 1671. Le 19 octobre 1674, il permute avec
Claude Dufresne, religieux profès de Sainte-Foi de Lon-
gueville, trésorier de Cluny, qui lui abandonna son
prieuré de Notre-Dame-de-Grâce, au diocèse d'Amiens.
Dufresne était encore prieur de Saint-Michel en 1689.
Pommeraye remarquait qu'à l'époque où il écrivait
(1612), le prieuré de Saint-Michel du Mont-Gargan était
le seul de tous les bénéfices de Saint-Ouen qui fût demeuré
en règle. On voit par les noms des prieurs qu'il nous reste
à citer, qu'il n'en fut pas ainsi jusqu'à la fin. Après
Dufresne, nous trouvons en effet comme prieurs, des
prêtres séculiers, présentés par l'abbé de Saint-Ouen et
nommés à seule fin de leur assurer un revenu sans grande
charge. Ce furent :
Jean-Baptiste-Etienne Duhamel, abbé d'Aubignac, con-
seiller au Parlement de Normandie, chanoine de Rouen,
i3 juillet 1693- 1729.
Charles- Félix Galéan de Gardagne, licencié en droit
canon, de la Faculté de Paris, prieur de Saint-Martin de
Crécy, 1 741-1760.
Thomas de Kennedy, licencié en théologie de la Facul-
té de Paris, prêtre du diocèse de Cassel, chanoine de
Cambray, 1760-1790.
Bien que le prieuré ne fût plus qu'un bénéfice, la dévo-
tion, s'il faut en croire Dom Pommeraye, se serait conser-
vée dans la chapelle, et même s'y serait accrue t par le
25
. zèle de quelques personnes de pictc et de mérite qui ve-
noient souvent révérer S. Michel, dans cet édifice sacré,
que Ton pouvoit dire avec certitude (ce sont ses propres
expressions) le plus ancien de tous ceux du diocèse, qui
sont dédiés à ce prince des Anges. >
Le jour de Saint-Michel, des religieux de Saint-Ouen
allaient y célébrer le service divin € au milieu d'une grande
multitude de peuple qui s'y rendait de toutes parts. > Il
paraît, par un récit de miracle du xv« siècle, qu'on y por-
tait anciennement le corps de S. Romain, et il est à pré-
sumer que cet usage était fort ancien, puisque, dans un
texte de 1 1 5o, cité par Pommcraye, on mentionne les
oblations faites par les fidèles, en ce même lieu, aux fêtes
S. Michel et S. Romain.
Ajoutons à ces jours, ceux de S. Marc, du Vendredi-
Saint et du mercredi des Rogations. En 1447, il s'engagea
un procès entre le prieur et les gardes et maîtresses du
métier de cirerie en menue œuvre. Ceux-ci prétendaient
avoir droit de vendre leurs chandelles aux alentours du
prieuré, spécialement sur le chemin ou sente menant de
Rouen à Saint-Michel, et de Saint-Michel à la chapelle
Sainte-Catherine, qu'ils disaient être chemin royal, tan-
dis que le prieur soutenait qu'il appartenait au territoire
de son église. L'affaire se termina par un accord conclu
entre eux, devant le lieutenant-général du bailli, aux termes
duquel < les chiriers et chirières pouvoient vendre leurs
chandelles au dessous du prieuré, près de la mare ou
citerne d'icellui, et sur le chemin ou sente sus-indiquée,
aux jours de dimenche jusqu'à l'eure que on heurte
premièrement prime en l'église Nostre-Dame de Rouen,
et semblablement le vendredi aouré et le mercredi de la
sepmaine des Rogations jusqu'à none. > Le procureur du
Roi, Robert Lermite, protesta contre cet accord et fit 'des
réserves formelles en faveur du Roi, auquel il disait que
le chemin en question appartenait. Je ne saurais dire si
c'était celui que je vois désigné, dans des titres de la même
26
époque, sous les noms de ruelle du Roulle ou côte de
l'Arquet, et que Ton indique comme aboutissant au som-
met de la montagne et comme la ligne de séparation des
paroisses de Saint- Paul et de Blosville. Une autre sente
servait de limite entre les terres de Saint-Michel et celles
de Sainte-Catherine :.elle longeait un clos entouré de murs
dit le clos Freschet, sur lequel était de temps immémorial
une croix, déjà citée sous le nom de croix Freschet, dans
une charte de 1277. Ces chemins aboutissaient^ vers le bas,
à des marches en pierre souvent mentionnées sous le nom
de degrés, et qui étaient un reste de ce long escalier que
le fameux Enguerrand de Marigny, en i3i2, au temps de
sa prospérité, avait fait établir à grands frais, pour accéder
du bas de la côte à l'entrée du monastère de Sainte -
Catherine. C^était par là que montaient les processions de
toutes les paroisses de Rouen, le mercredi des Rogations,
la veille de l'Ascension et de la délivrance du prisonnier.
Là, comme à Saint-Gervais, la prédication se faisait en
plein air. Lorsque l'église Sainte-Catherine eut été démo-
lie, les processions prirent une autre direction. I^ station
se fit d*abord à Saint-Vivien, par souvenir de l'ancienne
route, et enfin à Saint-Nicaise, comme cela a lieu encore
aujourd'hui.
D'après Pommeraye, il y aurait eu autrefois, dans ce
prieure, plusieurs beaux bâtiments qui accompagnaient
l'église, « ce qui se prouve, dit-il, par l'éloge de Dom
Renault Du Quesnay, qui, après avoir esté élu abbé (i 1 39),
y alla coucher avec son train qui n'étoit pas petit. »
En 1378, il n'est pas douteux que le prieuré ne fût
encore habité, puisqu'il est question de gages de servi-
teurs, de dépenses de bouche, etc.
En i555, Jean Coignard, prieur de Saint-Michel, loue le
prieuré de Saint- Michel du Mont-Gargan à Robert Le
Mercier, prêtre de la paroisse de Saint-Jcan-de-la-Neu-
villc, lequel prit, en conséquence, le titre de vicaire du
prieuré. Le bailleur se réserva une chambre, dans laquelle
27
Vantique abbé de Valmoni, naguère prieur de Pavilly,
aurait droit de se loger lui et son train. Le preneur s'en-
gagea à faire dire chaque dimanche de Tannée une messe
au dit s', à Theure accoutumée, et une autre messe le
samedi, à entretenir les cordes pour la sonnerie de la
cloche, à fournir le luminaire requis, à recevoir les reli-
gieux de Saint-Ouen et à leur fournir bois de chauffage
et de cuisine, linge, lits, couverture et vaisselle, aux jours
des Rogations, de S. Michel et de S. Marc.
Mais, dans un bail du 4 décembre 1 5()4, le prieur, en
louant le prieuré, n'obligeait le fermier qu'à fournir un
homme pour conduire les chevaux employés à porter à
somme les matériaux nécessaires à la réparation de la toi-
ture de la chapelle. La terre louée consistait en deux acres
et demie de terre labourable et en deux clos proches de
la chapelle.
Au xviiic siècle, il n'y avait plus de maison attenante à
l'église, et les terres étaient louées à un propriétaire voisin
M. Jacques Levavasseur, négociant à Rouen.
Ce fut lui qui se rendit acquéreur, le 20 décembre 1791,
par un prix de 2,900 l., de la chapelle et des quatre acres
de terre qui en dépendaient. La Nation s'en était emparée
à la suite de la suppression des Communautés religieuses.
Ainsi finit une des plus anciennes chapelles du diocèse.
Il n'en reste pour en indiquer l'emplacement que la base
d'une croix que nous avons vue encore pourvue de son
fût, il y a quelques années.
Après cette lecture, M. Bouquet demande la parole
pour en confirmer et compléter certains passages.
Notre confrère fait observer qu'il est bien vrai que
Henri IV ne put causer aucun dommage au prieuré de
Saint-Michel, lors du siège de Rouen en 1 591-1592,
car il ne put jamais dépasser ni enlever les bastions et
la courtine du vieux fort de l'abbaye de Sainte-Cathe-
rin e, situés à Tautre extrémité de la montagne^ vers Test.
28
Il dit aussi qu'il exista, entre Tabbaye et ce prieuré,
un fort du nom de Montgommery, élevé en i562,
lorsque ce capitaine défendit Rouen contre Tarmée de
Charles IX. Il porte même, dans le plan de Valdory,
le nom de « Fort de Saint-Michel. »
De l'autre côté du prieuré, sur le versant méridio-
nal de la montagne, d*après une vue de Rouen faite
vers 1 58o, et tirée d'une cosmographie allemande, il
existait un clos entouré de murs et planté d'une vigne,
dont on voit très distinctement les ceps. Ce clos se
prolongeait sur la partie delà montagne que l'on en-
tama, vers 1 69 î , pour faire la chaussée jetée sur le Pré
aux Loups, entre l'église Saint-Paul et le quai de
Paris.
C'est une nouvelle preuve que la vigne était cultivée
à Rouen, et il faut l'ajouter à celle qu'on tire du nom
de « Côte de la Vigne », donné à une côte placée le
long de la route de Darnétal, entre le cimetière monu-
mental et l'église de Long- Paon.
M. Bouquet se souvient d'avoir vu, rue du Haut-
Mariage, entre la rue du Mont-Gargan et la rue Pré-
fontaine, dans le voisinage de la première, les vestiges
des degrés construits par Enguerrand de Marigny, et
par lesquels on descendait de la côte Sainte-Catherine
à TAubette. M. Chéruel en a parlé dans son Histoire
de la commune de Rouen.
M . de Blosseville demande si l'on sait à quelle époque
a disparu le dernier vestige de l'abbaye de Sainte-
Catherine, que l'on a vu si longtemps se dresser au
sommet de la côte. M. Bouquet répond que ce fut à la
fin dedécembre 1870, pendant l'occupation prussienne.
Il a consigné le fait avec quelques détails dans la
Revue de la Normandie, et ce fut le dernier article de
29
cette Revue, où Tauteur a introduit un chronogramme
rappelant ces deux faits contemporains :
Omnia in hiscecidere locis : non faxa superstant (i).
Un membre ajoute que M. Sarrazin a donné, en
même temps, un dessin de ce pan de muraille et des
ruines de Tabbaye de la côte Sainte-Githerine dans la
même Revue (2),
A quatre heures et demie la séance est levée.
Le Secrétaire- Adjoint y
Brianchon.
(i) Tout8*e8t effondré en ces lieux : il n*y reste plus pierre
sur pierre.
En réunissant les lettres numérales de ce vers chronogramme,
on trouve la date de 1870.
oMnIa lu his CeCIDere LoCIs : non saXa sVpenunt.
My 1000; D, 5oo; trois C, 3oo; L, 5o ; X, 10; V, 5; cinq 1,5.
MDCCCLXVmiI^iSyo.
(2) Revue de la Normandie, t. X, année 1870, p. 753-756.
3o
SÉANCE DU 10 MARS 1882
La séance ouvre à deux heures, sous la présidence
de M. de Béaurepaire, vice-président.
Présents : MM. Paul Baudry, de Bellegarde, Biiliard,
le marquis de Blosseville, Maillet du Boullay, Bouquet,
de Girancourt, de Glanville, Gouellain, Le Filleul
des Guerrots, d'Iquelon, Lefort, Pelay, Tabbé Robert,
Tabbé Tougard, et Brianchon, secrétaire-adjoint.
Absents et excusés : MM. le vicomte d'Estaintot,
secrétaire, le docteur Ernest Guéroult, de la Londe et
Sauvageot.
Le procès-verbal de la dernière séance, en date du
25 janvier 1882, est lu et adopté.
— La correspondance imprimée comprend :
Annales de la Société historique et archéologique
de Château'Thierry, années 1879-1880; — Société
des antiquaires de la Morinie, Bulletin historique,
3o* année, nouvelle série, i20« liv., octobre, novembre
et décembre 1881 ; — Bulletin de la Société des anti-
quaires de l'Ouest^ 4* trim. de 1881 ; — Album
Caranda (suite) . Les fouilles de Breny (Aisne) , 1 880.
Envoi de M. Frédéric Moreau, père.
Sur la proposition de M. le Vice-Président, qui fait
observer que c'est pour la quatrième fois déjà que le
département de la Seine- Inférieure est l'objet des
splendides attentions archéologiques de M. Moreau,
en souvenir particulier sans doute de Pabbé Cochet,
dont il se glorifie d'être, à yb ans, devenu Télève, le
secrétaire-adjoint est chargé par la Commission d'adres-
ser au généreux donateur de Y Album Caranda ses
félicitations et ses remercîments.
3i
— M. de Beaurepaire donne communication des
lettres suivantes :
La première, en date du 24 février 1882, émane du
Ministre de l'instruction publique et des beaux-ans et
annonce que la 20« réunion des Sociétés savantes aura
lieu à la Sorbonne au mois d'avril prochain.
Une seconde lettre de M. Mantz, directeur général
des beaux-arts, relative au même objet.
— Dans une lettre du 26 février 1882, M. Lebreton-
Deshayes, maire de Graville-Sainte-Honorine, expose
à M. le Président de la Commission des antiquités que
le mur de soutènement de la partie ouest du cimetière,
très rapproché du bas de Téglise et dernièrement
reconstruit^ s^est écroulé de nouveau ;qu*une délibéra-
tion du Conseil municipal du 19 février, constatant
cette fâcheuse situation, vient d^étre transmise à M. le
Préfet avec plan et devis à l'appui, et que si^ par impos-
sible, la commune de Graville restait, en cette circons-
tance, abandonnée à ses seules ressources, elle ne verrait
d'autre moyen de sortir de difficulté que de demander
à M. le Préfet l'autorisation de transférer, dans une
autre partie du cimetière, les tombes dont Passiette est
continuellement menacée, et d^abandonner ainsi le
monument à une ruine certaine.
M. le Vice-Président résume la question. Le mur
de soutènement de la partie ouest du cimetière de Pab-
baye, situé à droite du grand escalier^ s'étant affaissé
au commencement de Tannée dernière, une somme de
3,5oo francs, sur l'avis conforme de la Commission des
antiquités, a été accordée par le département pour sa
reconstruction (i). A peine relevé, ce mur s^est écroulé
(i) V. Séances de la Commission des antiquitcs des 24 juin
et 28 octobre 1881.
32
de nouveau. Il y a là un fait non seulement regret-
table, mais anormal, qui résulte peut-être d'un vice de
construction.
Le secrétaire-adjoint répond que précisément ce vice
de construction a été reconnu dans Pexpertise qui a eu
lieu, et que la commune de Graville est bien résolue
d^exercer son recours en garantie, à défaut de Tarchi-
tecte lui-même, décédé depuis rachèvementdes travaux,
sur les héritiers. Cette réclamation est trop juste pour
qu'il n'y soit pas fait droit, dans un temps plus ou
moins éloigné, mais il ne faut pas oublier que, en
attendant, la reconstruction du mur est urgente, qu'il
y a connexité entre la conservation du cimetière et celle
du monument, et d^ailleurs que, en raison des sacrifices
considérables qu'elle s^est imposée, surtout depuis dix
ans, pour Tentretien de la vieille abbaye et de ses
dépendances, la commune de Graville-Sainte-Hono-
rine se recommande d'une manière toute particulière à
la sollicitude de la Commission.
Examen fait du plan, et sans nier l'intérêt qui s'at-
tache à Péglise de Graville, plusieurs membres sont
d'avis que la relation alléguée entre le terre-plein du
cimetière et le mur de Téglise n'existe pas.
Elle existe, réplique le secrétaire-adjoint, au moins
par voie de conséquence, et si Ton transporte les tom-
bes de cette partie du cimetière dans une autre, comme
le fait craindre M. le Maire, et qu'on abandonne les
terres à leur inclinaison naturelle, on arrivera vite à ce
double résultat de compromettre l'église en découvrant
ses fondations et de fermer à Tancien cloître et au pres-
bytère leur chemin d'accès.
La réfection d'un mur de cimetière, observent
d'autres membres, est une charge exclusivement com-
33
munale, étrangère de sa nature aux attributions de la
Commission.
Sans prendre de décision pour ou contre, la Com-
mission estime que, en l'état, ce qu'il y a de mieux à
faire, pour elle, c'est d'attendre, et pour l'administra-
tion de Graville-Sainte-Honorine , de revendiquer
l'application de la garantie.
— M. le Vice-Président donne lecture d'une lettre
du Conseil de fabrique de la paroisse de Saint-Paul de
Rouen, dont le résumé suit :
Des réparations urgentes ont été exécutées, il y a deux
ans, à l'ancienne église Saint-Paul, servant actuelle-
ment de sacristie. Ces réparations ont été faites sous la
direction de Tarchitecte de la ville de Rouen, aux frais
de la ville et du département. Le crédit voté n'a pas
été épuisé. Dès 1879, le Conseil de fabrique avait
signalé l'utilité qu'il y avait à réparer la toiture du
vieil édifice au moyen du reliquat de fonds disponible,
mais, avant qu'on eût eu le temps de faire les démar-
ches nécessaires, l'exercice s'est trouvé clos.
Aujourd'hui, considérant, d'une part, le fâcheux
état de la toiture de l'ancienne église Saint-Paul, où
la solidité des voûtes est compromise par l'infiltration
des eaux ; de plus, la nécessité de remédier à une lézarde
qui existe au mur qui sépare la nef d'une petite cha-
pelle annexe de la sacristie ;
Le Conseil de fabrique demande qu'on affecte à ces
réparations urgentes la somme restée disponible sur le
chiffre alloué précédemment au nom du département.
Pour ne pas retarder la réalisation des travaux, la
fabrique prendrait la place de la ville, c'est-à-dire
qu'un tiers de la dépense lui resterait.
En conséquence, la dépense totale étant évaluée à
3
34
i,200 francs, si la Commission départementale voulait
bien allouer 900 francs, la fabrique prendrait le sur-
plus de la dépense à sa charge.
Après en avoir délibéré, la Commission est d'avis de
recommander tout particulièrement à la bienveillance
de M. le Préfet une demande qui a pour objet la con-
servation d'un des plus curieux et assurément du plus
ancien monument de la ville de Rouen.
Extrait de la présente délibération sera transmis à
M. le Préfet par les soins du secrétaire-adjoint.
— La parole est à M. Maillet du Boullay pour di-
verses communications.
La première concerne la proposition faite par un
sieur Guionnet d'offrir, au Musée départemental d'an-
tiquités, un groupe d'animaux en bois sculpté, exécuté
par son frère, mon en 1875, et sur lequel notre con-
frère demande Tavis de la Commission.
Tout en laissant à l'honorable directeur du Musée
sa complète liberté d'action, et pour répondre unique-
ment à la question qui lui est posée, la Commission
estime que l'oeuvre dont il s'agit étant, par sa nature,
étrangère aux objets conservés dans le Musée d'anti-
quités^ ne saurait y être admise et trouverait mieux sa
place au Musée de peinture et de sculpture de notre
ville.
Notre confrère a reçu les restes gallo-romains et
mérovingiens, découverts à Alincourt en 1880-1881,
qui lui ont été expédiés de Lillebonne par M. Duval,
le 5 mars courant. Il ne dira rien aujourd'hui de cet
envoi, si ce n'est qu'il le trouve assez important pour
en faire l'objet d'un rapport spécial à la prochaine
séance.
Enfin, M. Maillet du Boullay a été assez heureux
35
pour retrouver d'admirables fragments de bois sculpté
déposés au poste de police de Saint-Sever, et provenant
d'une maison du xvi« siècle, démolie à Rouen, rue de
la Grosse-Horloge, pour Touverture de la rue Jeanne-
d'Arc, et décrite par M. De la Quérière. Aussitôt, dans
un rapport adressé à M. le Maire de la ville de Rouen,
notre confrère a sollicité de Fadministration muni-
cipale la concession de ces fragments artistiques au
Musée d'antiquités.
M. Pelay demande si la reconstruction de cette
vieille maison ne serait pas le meilleur moyen d^en
conserver les restes.
M. Maillet du BouUay répond que la réédification
ne pourrait avoir lieu qu^aux frais de la ville ou du
Musée, dont les deux budgets sont, l'un trop chargé,
l'autre trop limité, pour permettre de songer à une re-
constitution qui serait d'ailleurs, en raison des pièces
absentes ou endommagées, presque impossible.
M. le Vice-Président félicite M. Maillet du Boullay
et ajoute que la Commission fait des vœux pour le suc-
cès de ses négociations.
— M. Brianchon donne lecture à la Commission
d''une suite aux quelques vieilles maisons de Caudebec-
en^Caux, par M. le docteur Guéroult, qui achève, avec
la plume^ ce que M. Lesage avait commencé avec le
crayon.
MANOIR DE LA PLAKQUETTE
Cette note concerne une maison dessinée par feu
M. Lesage, et qui subsistait encore, il y a vingt-quatre ans,
place de ia Planquette^ n^ 12.
Elle touchait,vers rorient, a rhôtellerie dite de Henry IV
dont j'ai parle précédemment.
36
Elle se composait d'un pignon en pierre de taille, don-
nant, au nord, sur la place ou rue de la Planquette.
Le rez-de-chaussée offrait, à droite, une porte à cintre
surbaissé; à gauche, deux fenestrelles carrées, avec grilles.
Le premier étage était éclairé par une belle ogive à
double baie, divisée perpendiculairement par un meneau
épais, que surmontait un trèfle; quatre autres ouvertures
plus petites donnaient du jour dans le grenier. De chaque
côté, à la base du pignon, était placée une gargouille.
La cour peu spacieuse, où Ton accédait par le corridor
de rentrée septentrionale, séparait le corps de logis d'une
seconde habitation, située au midi, avec vue sur la Seine.
L'ensemble du logement accusait le style de transition
du xui« au XIV® siècle.
La mention la plus ancienne que j'aie pu me procurer
de ce manoir m'a été fournie par la sentence rendue le
10 mars i453, par Jean Hovard, bailli de Caux; il adjuge
cette maison à Guillaume des Hais, écuyer, s^ du Boscgue-
roult, pour se payer d'une rente de cent sols avec arrérages
à lui dûs, par un certain Jean Poisson, bourgeois de Cau-
debec, propriétaire de la dite habitation.
Les titres la désignent ainsi : t Un fonds de terre avec
hostel et jardin planté^ qui fut et appartint à feu Denis
Ancelf aïeul de Jean Poisson (i); le tout se pourporte et
ex tend de long en lay, jouxte d'un costé Guillaume de
(i) Celui-ci, ainsi que le rapporte le registre ms. de la fabri'
qui de Notre-Dame-de-Caudebec, p. 26, s'était engagé par con-
trat devant les notaires de Caudebec, le 10 octobre 1407, «pour
5o sols, un plat d'oubliés, et les œufs dûs à Vabbate de Saint-
Wandrille, à la charge de pater 5 sols à lad, fabrique, en dimi-
nution desd. 5o sols, »
Le 7 septembre 1412, Denis Âncel acquitte 46 sols en à-compte
desd. 5o sols, et, le 7 octobre 1465, un acte constate « que les
d. 5 sols ont été aumosnés par Denis Ancel, afin d'être enterré
avec sa femme en moustier, qui est le bas de Véglise N,'D, de
Caudebec. »
3?
Pinchemont^ d'un bout le canel de Seyne, les murs de lad.
ville séants dessus, d'austre costé, Thomas Boudiery d'aulx
tre bout la rue du prieuré et pavement du Roy. »
A la mort de Guillaume des Hais, son fils, Gille, écuyer,
hérita de l'immeuble, lequel passa, après son décès, à ses
héritiers. En i5i6, c'étaient, d'une part : Robert des Hais,
sr de Saint-Luc, son second fils ; d'autre part : Olivier des
Hais, sr de Boscgueroult, et Gille des Hais, s' de Tour-
nebu, les petits-fils de Guillaume (i) et enâmts de des
Hais, l'aîné.
Ils le vendirent d'un commun accord, le 24 août i5i6,
moyennant 3oo 1., à Guillaume Le Veaultre, lieutenant du
bailli de Caux. Cet immeuble est indiqué au contrat
comme assis en la ville de Caudebec, rue de la Planquette^
mais les voisins n'étaient plus les mêmes. C'étaient Robert
Baqueler, écuyer, et les enfants de Richard des Hais ei
d^Isabelle de Pinchemont, sa femme.
Le 17 septembre i558, Marguerite Le Veaultre, héri-
tière de Guillaume Le Veaultre, épouse de Guillaume
Varin, demeurant à Ectot-les-Baons, délaissa cette pro-
priété pour le prix de i,3oo 1. tournois et 20 escus d'or, à
Me Jacques Grieu, sr de Hocqueville, conseiller avocat du
Roi au siège présidial de Caudebec.
On la signalait alors comme étant bornée, à l'orient, par
noble homme Michel Baqueler, sr de Sorent et de Calle-
tot, vicomte de Caudebec; à l'occident, par Pierre Pai-
sant (2), prêtre, et par la rivière d'Ambion ; au midi, par
(i) Le ms. de la fabrique de Caudebec, loc. civ., apprend,
p. 35, que le prénommé Guillaume des Hais, sieur du Boscgue-
roult, par contrat devant les notaires de Caudebec, le 1 5 décem-
bre 1451, « avait fieffé par i3 livres de rente une maison appe-
lée Vécu de France, seize en la grande rue de la ville. »
(2) Était-il le fils de Pierre Faisant, « lequel trespassa le
22^ iour dejuing, Van 1482, » et dont on lit Tépitaphe devant
l'autel de la Ste Vierge, dans Téglise de Rançon-les-Caudebec-
en-Caux ?
38
les murailles de la ville et le fleuve de Seyne ; au septen-
trion, par la place de la Planquette,
Jacques Grieu, ]e nouveau propriétaire, laissa l'héritage
à son fils, Michel Grieu, qui mourut jeune après avoir
légué ses biens à son oncle, Isembart Grieu.
Ce dernier vendit, le 6 octobre 1574, moyennant i,5oo'
1. tournois, à M» Pierre Isnel, s^ de Soreng, avocat royal
au présidial du bailliage de Caux, la maison en question,
dont les abornements étaient restes les mêmes, sauf à
l'ouest, où ils sont formés par Nicolas Deschamps et par
l'hôtel Sainte^ Anne,
Elle appartenait, en 1680, à Angélique Isnel, femme de
Charles Desmares, chevalier, domicilié à Valliquerville, et
fille d'Adrien Isnel, s^ de Veules, conseiller au bailliage
de Caudebec.
Le 10 janvier 1680, elle fut vendue par dame Angélique
Isnel, pour 2,400 1. tournois, à M« André Le Gras,
avocat.
Celui-ci, le 1 3 mars i683, la revendait 3,3oo 1. à Me Jean
Le Maistre, avocat au parlement de Rouen.
Le 22 novembre 1749, Marguerite Le Maistre, seule
fille de Michel-Alexandre Le Maistre, président, lieutenant
civil et criminel au bailliage, siège présidial à Caudebec,
arrière-petite-fille d'André Le Gras, cédait pour 2,5oo 1.
à Mo André Pécuchet, conseiller du Roi, président en
l'élection de Caudebec, y demeurant, le logis assis place
de la Planquette,
Ce logis était alors borné, à Test, par les héritiers de Jean
Marpeley, président en l'élection de Caudebec, et par ceux
de Christophe Dallet, greffier à la dite élection ; à Touest,
par Pierre Guéret, marchand tanneur, et par la rivière
d'Ambion.
Le 27 octobre 1 784, Pierre Alexandre Eléonore Fenestre
de Hotot (i), sr du Mont-au-Roux, la Chevauchée, etc.,
(i) Louis XVI lui accorda, à pareille date, par brevet, la per
39
conseiller au bailliage présidial de Caux, prcsident en
rélection de Caudebec, et dame Anne-Françoise Pécuchet,
son épouse, fille et unique héritière d'André Pécuchet,
abandonnent, moyennant 12,000 livres, le logis précité à
Me Louis-FrançoiS'Romain Lemarchand, conseiller pro-
cureur du Roi, au bailliage présidial de Caudebec. Il était
fils du président au bailliage de Caudebec ; il épousa Marie-
Anne- Charlotte Comare, et mourut le i«r juillet 18a 5 (i).
Le 5 octobre iSSq, le manoir de la Planquette fut
acheté des héritiers du procureur Lemarchand, moyennant
12,000 fr., par M. Robert- Nicolas Le Féburc, chevalier
de la Légion d'Honneur. Trois mois plus tard, il le reven-
dit pour pareille somme (en conservant, toutefois, une por-
tion de jardin en £Eiçade sur le quai) , a M« Pierre- Eugène
Desbois, notaire honoraire, maire de Caudebec et conseil-
ler de Tarrondissement dTvetot.
A son décès, la maison passa à sa veuve, Françoise-
Eugénie Lebret.
Le i5 juillet 1857, celle-ci la vendit à M. Alexandre-
Emile Drouet, ancien maître-tanneur, rentier à Caudebec,
actuellement possesseur de Timmeuble, à qui je dob la
communication des documents qui m'ont permis de rédi-
ger cette notice.
mission de démolir, sur une longueur d'environ 92 pieds, la par-
tie des murs de la ville, en face de sa propriété.
(i) De leur union sont issus François-Xavier Lemarchand,
domicilié en la commune de Bocasse- Val-Martin, et Marie-Fran-
çoise-Louise Lemarchand, mariée à M. Barthelemy-Claudc
Auzanet, chevalier de Saint-Louis.
Us eurent cinq enfants : Barthelemy-Edouard Auzanet, aussi
chevalier de Saint-Louis ; Barthelemy-Raoul Auzanet, conseiller
à la cour d'appel de Rouen, chevalier de la Légion d'Honneur ;
Marie-Edwige, épouse de M. de Mathouville; demoisellea
Alexandrine et Annette-Télasie Auzanet.
Les Auzanet portaient : de gueules, à la croix pattée d'or,
cerclée de gueules formant tau au milieu j qui est Au^^anet.
40
M. Drouet aurait voulu faire réparer cette maison, mais
elle était dans un tel état de vétusté qu'il fut forcé, à son
grand regret, de la démolir en i858.
L'année suivante, fut édifice, dans le goût de la Renais-
sance, la jolie maison qui remplace Tancien manoir de la
Planquette.
HOSPICE SAINTE- AN NE
L'enclave, située quartier de la Planquette et appelée,
avec ses dépendances, Sainte-Anne^ provient de la géné-
reuse donation faite, au xvi<^ siècle, par le sieur Jehan
Houel (i), bourgeois élu de Caudebec, d'une propriété
pour l'établissement d'un hôpital en cette ville.
Le 22 février i533, Jehan Houel adresse aux habitants
de Caudebec une requête ainsi conçue : c Considérant
l'urgence de Maison-Dieu afin de logier et allimenter les
pauvres manants de la paroisse, qui, par maladie, fai-
blesse, antiquité, sont contraints de mendier leur pain
sur places publiques en charité et pitié, etc. » Houel offrait
f ung manoir, hostel, maison, cours, jardins édifRcs, telles
qu'ils sont et se pourportent de long en lay, assis en la
ville de Caudebec, joignant d'un costé la muraille de lad.
ville; d'austre costé, la rivière d'Ambion; d*un bout la for-
teresse de la Mordière, et d'austre bout les hoirs de Robert
le Dun, maintenant Robert Lestaigre, à la charge de 40
sols de rente fontière, dûs à maistre le Dun, prestre,
afHn que les paulvres membres de J. C, qui sont logiez
en lad. Maison-Dieu, puissent à chacun dimanche vaquer
à office-messe perpétuelle dite à toujours, à huit heures
(i) II était, j*ai lieu de le supposer, neveu de Jehan Houel,
natif de Caudebec, y demeurant en 1498, et qui fît, en Téglise
N.-D., une fondation de messes vers i5o9, octobre, afin d'ob-
tenir sépulture « soubs la clef pendante de la voûte de la grande
chapelle, »
Il occupa en qualité de prêtre, la cure du Tronq, près le Neuf-
bourg.
4»
du matin, en la chapelle ou oratoire qui pourra estre cons-
truit en lad. maison de Dieu.
c Suppliant le s^ Jehan Houel, MM. les curé, vicaire,
gens d'église, officiers du Roy desservir lad. église, accô-
der à la donation, et prester ayde, affin que led. couvent
soit parfait et augmente. »
— Le i«r mai i533, roffre de Jehan Houel est agréée.
En vertu de Tentérinement de cette requête, les juges,
tenant les assises de Caudebec du 28 avril i534, confir-
ment Tœuvre de donation de Jehan Houel et s'accordent
pour demander quatre religieuses, sœurs de Saint- P>an-
çoisy destinées au service de l'asile hospitalier.
— Un acte notarié, en date du 2 août i538, à Caudebec,
constate le contrat des dons faits par Jehan Houel, con-
sistant en divers bâtiments, lui appartenant et affectes à
la création, à la fondation de l'hospice Sainte-Anne, f en
f Vhonneur de Dieu le Père, du Fils et du S. Esprit, de
« la glorieuse Vierge Marie ^ mère de grâce et de miséri-
€ corde, de Madame Sainte Anne, mère de lad. Vierge^
• de tous benoists saints^ sainctes du Paradis,,, etc., etc. »
Le même contrat rappelle le dépôt sous seing privé, en
date du 22 février 1 533, et paraphé par grand nombre d'ha-
bitants, savoir : entre autres, discrète personne maistre
Clément, vicaire du dit Caudebec, Pierre de Rebot, cha-
pelain du S. Esprit, Roger Nette, chapelain de N.-D., etc. ;
Nicolle des Mares, échevin, NicoUe le Dun, prêtre; hono-
rable homme Guillaume Le Veaultre, lieutenant en la
vicomte de M. le bailli de Caux ; Robert Baqueler, sei-
gneur de Vertot, lieutenant-général du vicomte de Caude-
bec; Jehan Lefébure, vicomte de Maulévrier, lieutenant-
général du capitaine de Caudebec; Roger Le Preux,
contrôleur du grenier à sel de cette ville et trésorier de
Téglise.... etc.
La donation de Jehan Houel, après délibéré des bour-
geois notables précités, fut c escrite che^ les tabellions de
Caudebec pour registrer, »
42
— Trois pièces manuscrites sur papier, datées des
3o janvier 1544, 6 février 1649, 3o avril i553, font con-
naître l'état des rentes dues par divers à l'Hôtel-Dieu de
Caudebec; la nomination d'un syndic-procureur pour le
recouvrement des biens des pauvres ; le chiffre des sommes
encaissées par le receveur de THôpital Sainte-Anne et les
devis en marché pour la construction du corps de maison
commencé à Tobjectif du susdit refuge humanitaire.
— Un certificat délivré le 21 juin i556, par les habi-
tants et manants de Caudebec, atteste : qu'il y a en cette
localité un Hôtel-Dieu fondé par Jehan Houel^ sous le
vocable Sainte-Anne.
L'emplacement et une fraction du logis qu*il occupait se
voient encore. Il se composait d'un grand corps de bâti-
ment en pierres et briques, oblong, en forme de parallélo-
gramme.
Le rez-de-chaussée, percé au milieu d'un vaste corridor,
surmonté extérieurement de la statue patronale de Sainte-
Anne^ qui y subsiste, était éclairé, comme à Tunique étage,
par quatre fenêtres carrées.
Le corridor énoncé, se dirigeant du nord au sud, divi-
sait deux salles spacieuses ; celle sise à Touest, servait aux
malades, lesquels au moyen d'un huis, « pouvaient de leur
lit, ouVr dire, célébrer la messe ; au-dessus estaient héber-
géez les femmes de Thôpital et serviteurs d'icelles; » au
bout, du même côté, s'élevait la chapelle ou oratoire ac-
tuellement détruit.
L'autre salle, à Test, était réservée aux cuisines et au
logement séparé du chapelain ou prieur (i). Il y avait un
(i) Les noms de deux chapelains sont seulement conservés :
10 Charles Saulmont, prêtre, clerc de l'église de Caudebec en
1584 c^ ^^^ chapelain de 1692 à 1604, d'après les registres des
comptes delà fabrique, prieur de la chapelle Sainte-Anne. 11 fut
inhumé dans le cimetière Saint-Maur, le seul alors à Caudebec ;
20 Jehan Chopart, clerc de l'église de 1608 à 161 5, prêtre en lad.
église, de 16 18 à i63o.
43
trésorier et un régent-gouverneur de l'asile. Jehan Houel
remplit pendant sa vie ce dernier poste.
— Suivent plusieurs parchemins du xvii^ siècle, en
grande partie illisibles et de médiocre intérêt, concernant
des règlements et procédures.
— Le 3i mai i683, François Lemonnier, cure de Cau-
debec, remontre à haut et puissant seigneur M. le Bailli de
Caux que les capitaines, gouverneurs et maires se sont
emparés de la Maison Sainte^Anne sans aucun droit ni
titre légitime, depuis environ 5o ans.
Les pauvres ont été prives par cette usurpation de jouir
des biens inaliénables en leur faveur, dont les autorités les
ont dépouillés, en les convertissant à autre usage.
Le suppliant conjure M. le Bailly qu'il lui plaise de re*
mettre les indigents en possession de leur demeure.
— Plusieurs réclamations se succédèrent sans succès;
en 1G84 et 1686, elles furent adressées directement au Roi
qui les prit en considération, ainsi qu'il appert de ses let-
tres patentes sur parchemin, scellées d*un grand cachet en
Jehan Chopart était chargé, de 1620 à 1637, d^assister les ma»
lades du mal contagieux. Il s*y distingua notamment dans la
terrible épidémie, en i636, laquelle jeta tellement Tépouvante
dans Caudebec que la plupart des habitants s*enfuirent de la
ville. Quatre prêtres moururent de la contagion^ du 1 8 juillet au
12 octobre. Le même mois on compta 184 décès!... Jehan Cho*
part, pour se tenir plus à portée de soulager les malades, alla
s^installer dans une maison vide au cimetière Saint-Maur et
proche la chapelle de cette nomination.
On trouve à ce sujet d'intéressants détails dans les registres du
temps, à l'église et à la mairie. (Y., aux archives départementales,
la liasse G. 1364.)
Par testament, daté du xi novembre 1668, Jehan Chopart
demande à être inhumé dans le cimetière Saint-Maur, « soubs la
tombe de Me Charles Saulmont, feu son prédécesseur. » Ce vœu
ne fut pas exaucé, car on l'enterra dans Péglise N.-D. de Cau-
debec.
44
cire brune. (Voir les documents manuscrits, déposés à
rhôtel-de-ville de Caudebec.)
— Le cahier no 2 3 des délibérations municipales relate,
à la date du 22 février 1753, que t le s^ Gallois de Maquer-
ville, frère de Jehan- Louis- Gaspard Gallois, chevalier, sei-
gneurde Maquerville, Cai.idu, Âmpenois, Bourg- Baudouin,
Perriers-sur-Andelie, conseiller du Roi en ses conseils, son
premier avocat général en sa Cour des Comptes, aydes et
finances de Normandie, lieutenant de Sa Majesté au gou-
vernement des ville et château de Caudebec, maire de
Rouen et vice-président de l'Académie royale des sciences,
belles-lettres, gouverneur de Caudebec en 1755, réclamait
la maison Sainte-Anne pour son logement, comme étant
le CHATEAU DE CAUDEBEC, ce quî, ayant excité le bureau à
faire rechercher dans les anciennes archives dudit Hôtel
Sainte-Anne, t il s*y est découvert pièce vieille, authen-
« tique de plus de deux cens ans^ signée par deux cens
« habitans (i), où il est justifié que la maison dont il
« s^agit a esté aumônée par un sieur Houel pour servir
€ d* Hôpital et Hôtel-Dieu aux malades de ceste ville et
tfauxbourgs seulement, oit il devait demeurer quatre reli-
« gieuses de Saint-François afin de soigner les malades et
« qu'il jr avait une chapelle dédiée sous le titre de Sainte-
« Anne, dans laquelle se célébrait la messe les dimanches et
« fêteSy pour lesd, nécessiteux; c'est à la connaissance de
« la plupart des habitans que la ceste chapelle existait
« encore en ijôo »
Les lettres-patentes de Louis XV, de 1 767, confirmant
le décret de Louis XIV ci -dessus, permettent la vente delà
maison de santé Sainte-Anne et autorisent sa translation,
rue des Capucins, à Thospice de Caudebec, auquel elle est
aujourd'hui réunie.
— M. Lefort présente quelques observations au sujet
(i) J'en ai précédemment analysé la teneur : vide supra p. 41»
contrat d\x 22 février i533.
45
d^une fouille qui vient d être faite à cinq mètres de
profondeur rue Saint-Lô, à Tangle nord-ouest de la
salle des Pas-Perdus du Palais.
A cette profondeur, et sur une largeur de trois
mètres, le côté interne de la fondation du mur romain
a été mis à jour. La contexture du mortier, son iden-
tité avec la maçonnerie découverte un an auparavant,
place Verdrel, ne laisse pas de doute sur la nature ro-
maine de la maçonnerie.
Cette fondation, qui est celle du mur d^enceinte de
la ville, était orientée de Touest à Test, se dirigeant du
centre de la place Verdrel au centre du jardin de l'hô-
tel de la Présidence, très approximativement.
La première enceinte de Rouen, reconnue il y a un
siècle place des Carmes et rue des Fossés Louis VIII
[côté sud), est donc déterminée sur une petite mais
nouvelle portion de son parcours.
M. Lefort fait hommage à la Commission d'une
photographie représentant, après son achèvement, la
façade ouest du Palais de Justice de Rouen, aujour-
d'hui en cours d'exécution.
Etant admis le nouveau vestige de première enceinte
de Rouen, précisé par M. Lefort, M. de Beaurepaire
observe que Téglise de Saint-Martin-su r-Renelle, oti
Grégoire de Tours rapporte que Mérovée et Brunehaut
cherchèrent asile, se serait trouvée en dehors de cette
enceinte.
A propos de la communication de M. Lefort,
M. Bouquet fait observer qu'elle sert à confirmer et à
rectifier un passage de Dom Toussaint Duplessis, qui
dit, dans sa Description de la Haute-Normandie ,
que « la première enceinte de Rouen était marquée par
une ligne tirée le long de la rue de TAumône, depuis
46
le pont de Robec jusqu'à la Poterne. De la Poterne, il
fallait tirer une seconde ligne par le Marché-Neuf en
rasant le Palais, et par la rue Massacre jusqu'à la rue
aux Ouës ; de là, tirer une troisième ligne jusqu'à la
Calende au travers de PHôtel-Dieu, et la continuer
jusqu^à Peau de Robec. Robec faisait la quatrième
ligne (i) ».
M. Bouquet ajoute qu'on a rencontré des vestiges de
murailles romaines au pont de Robec, à Tabbaye de
Saint-Amand, à l'hôtel de France, dans le prieuré de
Saint-Lô. Ceux que M. Lefort vient de retrouver, sous
le pignon du Palais de Justice, prouvent que la ville
n'avait pas, sous les Gallo-Romains, la forme d'un
rectangle parfait, mais qu'il fallait tirer une diago-
nale du prieuré de Saint-Lô à la Poterne, place
vide appartenant aux religieux de Jumièges, sur
laquelle on édifia la Chambre de la Tournelle en
1609. Le Palais de Justice, sur le Marché-Neuf,
en 1470 (date de l'ouvrage, de Dom Duplessis),
n'avait pas la façade qui vient d'être démolie sur la
place Verdrel. Elle fut terminée seulement en 1761,
pour la plus grande partie (2).
La forme d'un « carré oblong, » donné à notre ville
par Dom Duplessis, se rapporterait, d'après lui, « au
premier duc Rollon, » et non à l'époque gallo-
romaine, de sorte que ce qu'il appelle « la première
enceinte » serait en réalité « la seconde, d puisqu'il
dit que, « à partir du v« siècle, les murs de la ville
s'étendirent quelque temps après du côté du nord jus-
(i) Description de la Haute-Normandie, par Dom Toussaint
Duplessis, t. II, p. 6.
(2) Dictionnaire indicateur et historique des rues et places de
Rouen, par Nicétas Périaux, p. 423.
47
qu'auprès de Saint- Martin-sur-Renelle. » La confu-
sion naît de ce qu'il place le terrain appelé « la
Poterne » beaucoup trop bas, à un endroit où elle
notait pas, et qu'il supprime Tenceinte gallo-romaine
remplacée par une simple rue allant de l'archevêché
jusqu'au Gros Horloge (i).
L'existence de cette enceinte gallo-romaine est donc
constatée aujourd'hui, d'une façon incontestable, sur
un cinquième point de son parcours, par la décou-
verte de M. Lefort (2).
— M. le Vice-Président donne lecture de deux
notices relatives, la première, au projet de Henri IV,
d'étendre la ville de Rouen du côté de Saint-Sever,
et la seconde, au droit de vingt et une paroisses d'en-
voyer leurs lépreux à la maladrerie du Mont-aux-
Malades.
I
AGRANDISSEMENT DR LA VILLE DE ROUEN, DU COTÉ
DU FAUBOURG SAINT-SEVER
Ce qu'on appelait le faubourg Saint-Sever a pris, depuis
le commencement de ce siècle, un développement si con-
sidérable et si constant, qu'il est à prévoir que le Rouen
de la rive gauche finira par balancer le Rouen de la rive
droite, le vieux Rouen, le Rouen des monuments histo-
riques et des souvenirs.
Au xvie siècle, ce faubourg était encore assez peu popu-
(i) Description de la Haute^Normandie, t. II, p. 5 et 6.
(2) Cf. Histoire delà ville de Rouen, par Farin, t. II, p. 87. —
Description de la Haute-Normandie, par Dom Toussaint Duples-
sis, t. II, p. 5 et 6. — Dictionnaire des rues et places de Rouen,
par Nicétas Périaux, p. 58 et 4a 3. — Les origines de Rouen d'ch-
près Vhistoire et Varcheologie, par M. l'abbé Cochet, p. 41-52.
48
ieux. Une partie de son territoire était rattachée à des
paroisses de l'intérieur de la ville, telles que Saint-Mar-
tin-du-Pont, Saint- Etienne-des-Tonneliers et Saint-Eloi,
circonstance à première vue assez étrange. Je ne saurais
me l'expliquer qu'en admettant qu'à une époque ancienne
la Seine paraissait plus aisée à traverser que les prairies
qui avoisinaient la chaussée et qui interceptaient les com-
munications entre les rives dû fleuve et Téglise du fau-
bourg.
Un des projets de Henri IV fut de fevoriser l'extension
de la ville de Rouen du côté de Saint-Sever. Il avait re-
connu que la vieille cité étouffait dans son ejiceinte de
murailles, qu'il lui fallait de l'espace et de la lumière. Les
délibérations des échevins font mention du projet du Roi,
mais sans faire bien clairement connaître si les Rouennais
y étaient favorables ou défavorables. 11 m'a paru intéres-
sant, afin de provoquer des recherches sur ce sujet, de
donner le texte de deux ordonnances du Bureau des
finances relatives au projet de Henri IV.
« 4 nov. i6o3. Sur la requeste présentée par Michel
Pochon^ Michel Duhen et Pasquet Le Genevoys, maîtres
massons en la ville de Rouen, tendant affîn de leur estre
faict taxe de la somme de 1 5o escus sol pour leur peynes,
sallaires et vaccations d'avoir, suivant le vouUoir et inten-
tion de S. M., et le commandement verbal qu'ilz auroient
reçeu de Monsieur le marquis de Rosny, et depuis à eulz
réitérez par Mgr le duc de Montpensier (i), vacqué par
l'espace de deux mois, tant à prendre les mesures du faulx-
bourg de ceste ville, scitué hors le pont, parroisse Saint-
Sever, que pour dresser le plan et desseings de l'augmen-
tation de ville que S. M. désire faire bastir du costé droit
dudit faulx-bourg, et oultre pour avoir par eulx mis et em-
ployé, durant xii jours, quatre hommes pour leur ayder à
(i) Henri de Bourbon, duc de Montpensier, gouverneur de
Normandie.
49
prendre les mesures dudit faulx-bourg, qu'ils auroient paie
à leurs frais,
< Se retireront les supliantspar devers Monsieur le mar-
quis de Rosny, par le commandement duquel ils ont
dressé le plan de lad. augmentation de ville, pour leur
estre pourveu sur lad. taxe, suivant le voulloir et inten-
tion du Roy, et députeront l'un d'entre eux pour parler
audit sr marquis et fiaiire veoir autant (i) dudit plan, pour
faire lequel voiage, et en attendant que taxe leur soit
faicte de leur vacation, leur sera payé par M^ Nicollas
Sergent, receveur, la somme de 60 L qui lui sera passée
et allouée par tous qu'il appartiendra, rapportant, etc. (2).»
« 10 nov. i6o3. Sur la requeste présentée par Jérôme
Cairel, bourgeois de Rouen, contenant que, par comman-
dement de Mgr de Montpensier de se tenir prest pour
aller avecques luy en court pour, en sa présence, faire
entendre au Roy ce que S. M. désire sçavoir pour l'advan-
cement de l'augmentation de la ville du costé des faulx-
bourgs de Saint-Sever, à quoy désirant obéyr, il nous pleust
ordonner qu'il luy sera dellivré quelques deniers pour
subvenir aux frais dudit voiage,
c Est ordonné au suppliant, pour les causes contenues
en lad. requeste, la somme de 90 1. t., laquelle luy sera
payée par M« Nicollas Sergent, receveur, des deniers tant
ordinaires qu'extraordinaires de sa recette, sans diffi-
culté (3). i
Il est certain que ce projet ne reçut pas son exécution,
pas plus que celui d'abréger la distance entre Rouen et
Paris en redressant le lit du fleuve. Toutefois Saint-Sever
doit conserver quelque reconnaissance à la mémoire de
Henri IV.
Ce fut à partir du règne de ce prince que ce faubourg
(1) Copie.
(2) Archives de la Seine-Inférieure, C. 1121.
(3) Ibid.yC. 1122.
5o
tendit à devenir le quartier manufiaicturier de Rouen. Une
verrerie royale y fut établie en 1606 ; cette même année,
une Compagnie hollandaise y fut appelée pour y inau-
gurer la fabrication des toiles fines. Ces deux établisse-
ments furent vus de mauvais œil par les bourgeois de
Rouen, mais nous, que l'intérêt particulier n'aveugle pas,
nous ne pouvons manquer de reconnaître qu'ils font
grand honneur au gouvernement de Henri IV ainsi qu'à
l'administration de Sully.
II
NOTES SUR LES LÉPREUX
On sait que vingt-et-une paroisses avaient droit d'en-
voyer leurs lépreux à la maladrerie du Mont-aux-Malades.
L'entrée de cet asile de la douleur n'était pas, pour ces
malheureux, absolument gratuite ; mais s'ils étaient indi-
gents, c'était une obligation, pour leur paroisse, de leur
venir en aide. Un contrat passé devant les tabellions de
Rouen, 3 fév. 1478, fait connaître ce que chaque lépreux
avait coutume d'apporter. C'étaient :
c Un bon lit fourni de 3 paire de draps de lé et demy ;
2 oreilliers; 2 queuvre-chiefz ; 2 couvertures; 20 aulnes
de touailles; 18 aulnes de doubliers; 2 paire de chemises;
6 escuelles d'estain ; 6 saulciers ; 4 platz ; 6 cuilliers de
lacton; i salliere; i pot d'estain et unechoppine; 3 ha-
naps, l'un d'argent, pesant 6 onches, l'autre de madré, et
l'autre de cailler, bons et suffisans ; 3 paelles d'arain ;
2 pot de cuivre ; 1 bachin et i pot laveur; i trevet;
I greil; icroqàchar; 2 bouquets; i crameillée; 1 hache;
I paelle de fer ; i leschefrite ; i broque de fer ; i mortier;
i pestel ; i kalit ; 2 paire de robes ; 2 chapperons ; 2 paire
de chausses de drap brun ou gris ; 2 paire de souUiers ;
1 coffre ou huche, bon et suffisant ; pour le prieur, 62 sous
1 denier ; pour le portier et pour les varlets, 5 sous, »
Quelques objets de ce mobilier doivent être notés : les
51
hanaps d'argent, de madré et de cailler. On peut remar-
quer que le mot paire était autrefois invariable au singu-
lier et au pluriel, par souvenir de la forme latine.
Cette fourniture, que le prieuré réclamait comme obli-
gatoire, donna lieu à une contestation entre les religieux
et les paroissiens de Saint-Jean de Rouen, lorsqu'une des
paroissiennes de cette église, Perrecte Deshays, c entéchée
de la maladie de lèpre, i y fut envoyée en conséquence
d'une sentence de Fofficialité.
Cette femme était pauvre, ses parents et ses amis Té-
taient aussi. Les paroissiens, à la charge desquels elle re-
tombait, combattirent les prétentions des religieux. Le
débat se termina par un accord aux termes duquel il fut
reconnu qu'à l'avenir, pour la réception de chaque malade
natif de la paroisse Saint-Jean, Tune des vingt-et-une pa-
roisses du droit du Mont-aux-Malades, comme on disait,
on fournirait les ustensiles ci-dessus déclarés, si le lépreux
était riche. Dans le cas contraire, les trésoriers et les pa-
roissiens en devaient être tenus quittes moyennant une
somme de 20 livres. Le paiement fait, si le malade était
trouvé avoir aucuns biens de plus grande valeur, les tré-
soriers devaient être restitués sur lesdits biens de la somme
qu^ils auraient payée, et le reste devait être laissé aux re-
ligieux.
La léproserie du Mont-aux-Malades était la plus célèbre
du diocèse, témoin cet auteur d'un libelle dif&matoire
poursuivi, en 1468, à Tofïîcialité de Montivilliers, pour
avoir ainsi qualifié un habitant d'Harfleur : c Jaloux,
mesel, plein de mesellerie, jaune comme saffren. Je vous
baudrey cloquette de frarie pour vous conduire jusques au
Mont de Rouen » ; à preuve encore deux documents que
nous fournissent les registres de la même officialité, et
que nous croyons à propos de faire connaître :
Johannes Dangomare^ alter thesaurariorum de Fonte-
neyOy non obstantibus ordinationibus per nos factis eidem,
quatinus duceret apud Rothomagum et Montent Lepro-
52
sorum lociy cum litteris nostris requisitoriiSy infra oc-
tavam, sut excommunicacionis et decem lihrarum turo-
nensium pénis, visitandi (causa)^ Johannem Le Tellier,
morbo lèpre suspectum, nihilominus contempnendo ordi-
nacionem et preceptum nostrum ac juridicionem pertur-
bandOf presumpsit ipsum Le Tellier visitari facere sine
litteris nostris, litteras condempnatorias domini officialis
Rothomagensis accipiendo, de quo fuit incarceratus per
spacium unius hore, et in exitu fecit emendam^ dequa sol-
venda pro eo fidejusserunt Oliverus Randou et Guilmetus
RandoUy quos promisit servare indempnes^ die xviia julii
anno millesimo quadringentesimo lxxxviiio. Taxatus
ad sommant xl solidorum. Solvit xx solidos. Domina
(rabbesse), donavit eidem residuum, die xiiii<3 maii anno
(l)xxxix®.
Cognito per nos, decanum et officialem Monasterii
VillariSy de negocio coram nobis introducto inter venera-
bilem virum dominum promotorem curie nostre^ ad de-
nunciationem Pétri BeaUfix et Bertauldi Avisse^ thesau -
rariorum modernorum parrochie de Octovilla, actorem,
ex una, et Johannem Hardi et Johannem Le Page^
alias Bas tard y de dicta parrochia, oriundos et morbo lèpre
suspectos denunciatoSy ex altéra partibus, visis per nos
relacionibus venerabilis viri Guillermi, prioris prioratus
de Monte^Leprosorum, de mandato venerabilis et cir-
cumspecti domini officialis Rothomagensis ^ ad requestam
nostram factis, ac per ipsum nobis transmissis^ juxta
qiias nostrum consenserunt audire decretum predicti
Hardi et Page, denunciatiy dicimus et declaramus ipsos
esse de dicto lèpre morbo tact os et in/ectos, pr opter ea a
sanorum consortio esse segregandos, prout, in quantum
possumus, segregamus, et, salvis dictorum (et) promotoris
expensis, . taxatione nobis in posterum reservata, ita pro-
nunciantes, Lata anno Domini millesimo quingentesimo
xviP, die veneris xxii» maii. Registrata,
Suivant une pratique qui paraît avoir été générale, c'é-
53
tait à l'official qu'il appartenait de constater la lèpre et
d'ordonner la séquestration de ceux qu'on prétendait en
être atteints ; la poursuite avait lieu constamment sur la
dénonciation des trésoriers de la paroisse où résidait le
lépreux, obligés à veiller, comme représentants de Tauto-
rite publique, pour le civil aussi bien que pour le culte, à
la sauvegarde des autres paroissiens. L'official ne se pro-
nonçait qu'après avoir pris l'avis de médecins et de chi-
rurgiens qu'il avait délégués pour faire la visite du malade,
et, dans le plus grand nombre de cas, il ne lui paraissait
pas nécessaire d'envoyer au Mont-aux-Malades chercher
Tavis de juges compétents.
Voici, à titre d'exemples, quelques sentences relatives à
des poursuites pour fait de lèpre.
In nomine Domini, Amen. Visa per noSy decanum et
officialem Monasterii- Villaris, relatione venerabilis et ho-
nestorum virorum magistri Michaelis Cornet^ presby"
teriy curie nostre advocati jurati et mediciy necnon Pétri
Gaultier et Nicolai Gieuffroy^ cirurgicorum ejusdem loci
Monasterii' VillariSf de consensu honestorum eciam viro-
rum Ludovici Fouet, Ludovici Guillart, Jacobi Basin^
atque Johannis Sauvage, modernorum thesaurariorum ec-
clesie parrochialis Sancti Martini de Harefloto, fada
de et super visitacione^ tactu et palpatione Perrine Dalby,
ejusdem parrochie, de morbo lèpre suspecte et calump-
niate, insequendo dictorum medici et cirurgicorum rela-
cionem, cui se retulit dicta Perrina^ dicimus et déclara^
ramus predictam Perrinam de hujusmodi morbo lèpre
fuisse et esse tactam et infectam et ob hoc a sanorum con-
sorciOj ne deterius inde contingat, segregandam esse et
segregari debere, ita pronunciantes viii* augusti mille-
simo quingentesimo quinto-decimo.
In nomine Domine, Amen, Visa per nos, decanum et
officialem Monasterii-VillariSy relacione venerabilis viri
magistri Michaelis Cornet^ presbyteri, mediciy ac Pétri
Gaultier, cirurgici, de mandato nostro, super palpatione
54
et visitatione Ricardi Coquerel senior is^ nunc in parrochia
de Octovilla commorantïSy de morbo lèpre suspecti^ facta
ad instantiam honestorum virorum Philippini Boyvin et
Johannîs Dupuis, thesaurariorum modernorum dicte par-
rochie de Octovilla^ insequendo dictant relacionentj cui se
retulerunt partes predicte ac nostrum audire decretum
consenseruntj dicimus et declaramus predictum Coquerel
non esse de dicto lèpre morbo in/ectum aut tactum et prO"
pterea a sanorum consorcio non esse segregandum, prout
nec segregamuSy ita pronunciantes^ etc, Lata die lune
XVII* martiianno Dominimillesimo quingentesimo decimo^
septimo.
In nomine Domini, Amen. Visa per nos^ decanum et
officialem Monasterii-Villaris^ relacione venerabilis viri
magistri Michaelis Cornet, presbyteri^ medici^ ac Nicolai
Gieffroy^ cirurgici, de mandato nostro, super palpatione
et visitatione Johanne Tanquerel^ parrochie Sancti Salva-
ioris, de morbo lèpre suspectey facta^ instante promotore
causarum officii curie nostre^ denunciantibusque Petro
Gaultier ac Petro Hemeri, thesaurariis predicte parro-
chie^ insequendo dictam relacionem cui se retulerunt par-
tes predicte etjuxta quam nostrum audire decretum con-
senseruntj dicimus et declaramus dictam Tanquerel esse
separandam et segregandam, prout, in quantum possu-
muSy segregamus, ita pronunciantes. Lata die mercurii
quarta mensis augusti anno Domini millesimo quingente-
simo decimo-septimo.
Ces sortes d'actes sont très communs pendant la pre-
mière partie du xyi^ siècle. Il est à remarquer que la pa-
roisse d'Octeville était celle des paroisses de l'exemption
de Montivilliers qui fournissait le plus de lépreux. On
peut encore remarquer qu'à cette époque beaucoup de
docteurs en médecine appartenaient à l'état ecclésias-
tique.
La lèpre étant constatée, il restait au pouvoir de ToiOfi-
cial de donner au malade la permission de rester en
55
dehors de la léproserie, pourvu qu'il pût être séquestre
des sains. C'est ce que prouve cet acte inséré dans un
Formulaire de l'abbaye de Fécamp.
Novembre 1 540. Dominus vicarius dédit facultatem et
licentiam Andrée Manisier^ se tenenti pro suspecta morhi
lepre^ in parrochia Sancti Stephani Fiscannensis commo^
rantij vivendi extra leprosariam in loco remoto ab aliis
domihus et non alias, ac in loco sacro ubi non fuerit homi-
num frequentatio per curât um suum, aut ejus vicarium^
aut aliquem per eum deputatum^ missam celebrari/aciendi^
atque ibidem aut etiam domi suCy interveniente infirmitatis
necessitate, sacramentum penitentie et eucharistie ab eo
recipiendi.
Pour comprendre ces mots : f Je vous baudrey (bail-
lerai) cloquette de frarie. ...» rapportés ci-dessus, il faut
se rappeler que la conduite du lépreux à la léproserie se
faisait avec les mêmes cérémonies qu*un enterrement, et
qu'on y convoquait tous ceux de la confrérie à laquelle
appartenait le lépreux.
Nous en trouvons un exemple dans les statuts de la
confrérie de Saint-Pierre, Saint-Paul, Saint-Nicolas, Saint-
Marcou et Saint-Éloi fondée en Téglise de Saint*Pierre-
le-Petity de l'exemption de Fécamp, au xvi« siècle :
« Item, se aucun des frères ou seurs estoit aprouvé mesel
en lad. ville et banllieue, le seroient tenus convoier jusques
à sa malladeriCi pourveu qu'elle ne seroit hors de lad.
ville et banllieue y le maistre et varlets portans leurs
sourplis et capperons vestus à toult la croix et bannière
et clochette, et sy luy feroit Ten semblable service comme
à ung trespassé en l'église où il seroit demourant en la
dicte ville et banllieue, comme dict est..., et sy seroit
ledict varlet tenu crier par les carfours comme pour ung
trespassé. > (i)
(i) Arch. de la Seine»lnférie\ire, G. 5238.
56
— M. Paul Baudry demande ce que c'était qu'un
édifice religieux indiqué sur un plan manuscrit, ap-
partenant à la bibliothèque de Rouen et levé en i Sg i .
Cet édifice, représenté à Touest par rapport aux château
et fortde Sainte-Catherine et à Téglise des religieux,
est indiqué avec la mention paroisse.
Quêtait cette « paroisse ? »
M. de Beaurepaire, quia étudié tout particulière-
ment ce point de notre histoire locale (i), pense que le
mot « paroisse » se rapporte ici au prieuré de Saint-
Michel, dont on verrait la chapelle avec un petit bâti-
ment y accolé. Cette chapelle, détruite en 1 562, était
donc réédifiée alors.
Le dessin signalé par M. Paul Btfudry est d'autant
plus précieux que, de la chapelle qu'il figure. Tannée
suivante il n'en restait rien. Nous lisons, en effet, dans
Nicétas Périaux, un paragraphe ainsi conçu :
« Vers ce même temps (1592), Henri IV avait or-
donné la démolition de l'église de Saint- Michel au
couvent du mont Sainte-Catherine. Elle fut remplacée
plus tard par une petite chapelle insignifiante, qui
tomba en ruines à la fin du xviii« siècle, pendant
l'époque révolutionnaire (2). »
— M. Gouellain fait passer sous les yeux des mem-
bres de la Commission un fiacon rond et plat, de o"^
07 de diamètre, en verre filigrane polychrome, orné
en son pourtour d'appliques de verre blanc, posées au
chalumeau, et se terminant par des pointes étirées à la
pincette. Cet objet est présenté à l'appréciation des
membres de la Commission pour avoir leur avis sur
son âge, son origine et sa destination.
(i) Voir séance du a5 janvier i88a.
(a) Histoire de Rouen, par Nicétas Périaux, p. 354.
^7
M. le Vice- Président déclare que c'est, à n'en point
douter, une tabatière, du genre de celles appelées
pigeassières dans le patois de la Basse-Normandie.
Cest aussi l'opinion de M. Gouellain qui a vu à Paris
dans la collection Garnault, réunie aujourd'hui au
musée de Limoges, une tabatière de la même forme,
en porcelaine de Chine, provenant du Palais d'Été,
sur Tune des faces de laquelle est peint un cadran de
montre. Voilà pour la destination.
Quant à Tâge et à l'origine, M. de Girancourt, dont
les savantes recherches sur les origines de la verrerie
sont connues, n^hésite pas à rapporter cette pièce au
xvii« siècle, et à la considérer comme un très intéres-
sant spécimen de verrerie française^ sinon normande.
A cette époque, en effet, nombre de privilégiés affir-
maient posséder le secret de la fabrication du verre à
lajaçon de Venise, et nous rencontrons fréquemment,
dans les collections, des échantillons de cette nature
qui ont une origine locale. Le verre est plus lourd,
moins transparent, et n'a pas l'élégance et la beauté des
pièces vénitiennes, malgré les éloges que ne craignent
point de s'adjuger les porteurs de privilèges.
En résumé^ M. de Girancourt estime que le flacon
présenté est un type très rare d'ancienne verrerie indi-
gène, avec émaux filigranes dans la masse, et dont on
peut reporter la fabrication au commencement du
xvïi« siècle.
A quatre heures la séance est levée.
Le Secrétaire-Adjoint ,
BRIANCHON.
58
SEANCE DU i«^ MAI 1882
La séance ouvre à deux heures, sous la présidence de
M. de Beaurepaire, vice-président.
Sont présents : MM. P. Baudry, Billiard, le marquis
de Blosseville, Bouctot, Bouquet, Brianchon, de Glan-
ville, l'abbé Loth, de Merval, Tabbé Tougard et le
vicomte d'Estaintot, secrétaire.
Excusés : MM. Gouellain, Guéroult, Lefort, Lor-
mier. Maillet du Boullay, Sauvageot et de Vesly.
M. Brianchon, secrétaire-adjoint, donne lecture du
procès-verbal de la séance du 10 mars, qui est adopté.
Rouen. Traces de murs gallo-romains. — A propos
de ce procès- verbal, M. Simon signale Inexistence, par
lui constatée, lors des fouilles nécessitées par les fon-
dations de l'hôtel d'Iquelon, place de THôtel-de- Ville,
d'un mur romain subsistante 4 met. 72 c. au-dessous
du niveau du sol actuel, et se présentant dans une
direction légèrement oblique, par rapport à la façade
de l'hôtel.
M. d'Estaintot hésite à penser que ces fondations
aient des rapports quelconques avec le mur d'enceinte
signalé aux environs du Palais-de-Justice. Des cons-
tructions romaines existaient évidemment en dehors
delà cité. La présence en a été constatée en face Téglise
Saint-Laurent, lors de la fondation de la maison de
M. Vaucquier du Traversain, et sans doute celles ren-
contrées sur remplacement de Thôteld^Iquelon étaient
des propriétés particulières.
La correspondance comprend :
Tables générales des vingt premiers volumes de la
59
Société archéologique du département de Constan*
tine, 20« vol., 1881 ; — Bulletin de la Société poly^
mathique du Morbihan, année 1880 ; — Bulletin de
la Société archéologique et historique de P Orléa-
nais, t. VII, no* 109, 1 10, 1 1 1 ; — Bulletin de la So-
ciété historique et scientifique de Soissons, t. X,
2« série; — Congrès archéologique de France,
47« session, 1881 ; -* Antiquités et Monuments du
département de P Aisne, par M. Edmond Fleury,
4« partie, 1882.
Indications relatives à la correspondance impri-
mée de la précédente séance. — M. Brianchon pré-
sente l'analyse des parties les plus intéressantes de
la correspondance imprimée, mentionnée au procès-
verbal du 10 mars^ et insiste tout spécialement sur les
documents mentionnés aux annales de la Société
historique et archéologique de Château^Thierry,
1879-1880, 2 vol. in-80, et notamment sur celles de
M. Frédéric Moreau, dont la suite de V Album Ca-
randa contient les découvertes les plus intéressantes,
fournies par les fouilles de Breny (Aisne), dans une
série de 1 1 planches que notre collègue décrit avec son
exactitude ordinaire. M. F. Moreau s^est signalé de-
puis 1873 par Pexploration de près de 10,000 tom-
beaux gallo-romains ou francs.
Allocation à l'Église Saint-PauL — M. le Prési-
dent donne communication d^une lettre par laquelle
M. le Préfet de la Seine-Inférieure informe la Com-
mission, à la date du 6 avril 1882, que la Commission
départementale^ dans sa séance du 27 mars, a alloué
un secours de 900 fir. à la fabrique de Péglise Saint-
Paul « pour la restauration de la vieille église de ce
6o
nom^ classée au nombre des monuments historiques».
Cette allocation répond au vœu exprimé par la Com-
mission des antiquités, dans sa séance du lo mars.
Blason des Montmorency, dans les fondations de
Véglise Notre-Dame-du-Havre. — Anciennes salles
ogivales sous le musée. — M. Rœssler a adressé la
note suivante relative à des fouilles récemment faites
à la base du clocher de Notre-Dame-du-Havre, et au-
dessous du musée.
Une exploration, habilement conduite, a permis de
reconnaître une petite salle sous le clocher de Notre-
Dame-du-Havre. Cette salle paraissait destinée à Técoule-
ment des eaux, en même temps qu'elle donnait de la
solidité à la base de la tour du clocher.
La pierre de fondation s'y est retrouvée. Autour de
reçu français des Montmorency on lit :
LA. PREMIERE. PIBRE. A. ASSIS.
DE. CESTE. TOVR. LE. BON. BARON.
DE. POSSEVLX. ET. 8Y. Y A. MIS.
SES. ARMES. DIGNES. DE. REGNON.
LAN. ZVC ZXX IZ . JE. DIS.
DV. MOY8. DAPVRIL. LE. XZl.
Cette pierre est transportée au musée du Havre.
Sous le musée on a procédé, vendredi dernier, à une
reconnaissance, consentie gracieusement par la munici-
palité du Havre, en faveur d'une grande publication histo-
rique entreprise par M. Alexis Lemâle.
La galerie Cochet est la plus basse de tout le musée.
On y a descellé la pierre donnant accès dans la grande
salle souterraine, bâtie sous le gouvernement de Villars
pour servir de citerne en cas de surprise. Sous Henri IV,
on n'avait pas oublié les circonstances du siège de 1 563 et
la nécessité où la garnison anglaise avait été réduite faute
d'eau douce.
6i
L'immense réservoir, qui s'étend encore sous la cour
d'honneur et une grande portion du musée, d'une rue à
Tautre, était si bien cimenté qu'on n'y a jamais constaté
d'infiltrations d'eau de mer. Les ogives et les piliers carrés
portant les nervures prismatiques, soutenant les voûtes à
arête, se reconnaissent surtout sous la cour, où les recon-.
structions de voûtes, vers 1842, étaient moins nécessaires
que dans les fondations du musée.
Quelques membres demandent si des caractères ar-
chitecturaux de la construction de la salle souterraine,
indiqués dans cette note, ne supposent une époque
sensiblement antérieure à la date de 1 563.
Décès de MM, de la Londe et Desmarest, membres
de la Commission, — M. de Beau repaire exprime les
regrets qu^a éprouvé la Commission de la perte de
deux de nos collègues, Pun, M. de la Londe, qui por-
tait un intérêt si vif à nos séances, et Tautre, M. Des-
marest, qui se promettait de faire profiter la Com-
mission des loisirs que devait lui donner sa retraite.
Notice sur V ancien château de Croisse t. — M. de
Glanville donne lecture d'une note intéressante sur
Tancien château de Croisset.
On ne possède, nous le croyons du moins, d'autre plan
du château de Croisset, commune de Canteleu, que la
gravure donnée par Gomboust, dans la bordure qui
encadre son plan de Rouen, daté de i655. Cette gravure,
par trop restreinte pour que l'on puisse apprécier les
détails et le style de l'architecture, paraît être du moins
d'une grande exactitude dans son ensemble.
Nous ne connaissons pas non plus de renseignements
écrits qui puissent jeter quelque lumière sur l'époque de
la 'construction ni sur l'histoire de ce monument.
En l'absence de tout autre document, nous avons pensé
62
qu'il ne serait peul-être pas tout à fait sans intérêt, pour
les membres de la Commission des antiquités de la Seine-
Inférieure, de faire passer sous leurs yeux une pièce
authentique, contenant quelques détails, malheureusement
incomplets, que le hasard m'a fait rencontrer dans des
papiers de famille. C'est le procès-verbal établissant l'état
de la terre et du château de Croisset, en 1 748, au moment
de la vente faite par messire Hyacinthe de Pardîeu, héri-
tier, sous bénéfice d'inventaire, de feu M . François-Alphonse
de Pardieu, son frère, écuyer, et seigneur de Croisset, au
sieur Jean-Baptiste Heutte, marchand, demeurant à
Rouen, rue Grand- Pont. Ce procès- verbal fut dressé par
maître Nicolas Royer, expert juré des bâtiments pour la
ville et ressort du Parlement de Rouen, assisté de maître
Louis-François Guilyot, greffier juré des mêmes bâtiments,
qui, partis chacun de leur domicile à Rouen, se transpor-
tèrent, le lundi sixième jour de mai 1748, au lieu de
Croisset, paroisse de Saint-Martin de Canteleu, en exécu-
tion d'une sentence du bailliage de ladite ville, pour dresser
procès-verbal des bâtiments, murs, talus, plantes et fossés
étant sur le fief, terre et seigneurie de Croisset, et des
matériaux et décombrements qui pouvaient rester de l'an-
cien château.
Le procès-verbal nous apprend que :
c Après chaque vacation, l'expert et son greffier se reti-
raient audit Croisset pour prendre leur réfection en l'au-
berge où pendait pour enseigne le Cceur d! amour ^ occu-
pée par la dame veuve Trugard. »
Nous avons extrait de ce long procès-verbal les quelques
détails intéressants qu'il renferme.
Le château de Croisset se composait de quatre corps de
logis, réunis ensemble par leurs angles, de manière à for-
mer une cour intérieure qu'on appelait la cour d'honneur.
Des quatre faces de cette construction, du côté de la cour,
deux avaient vingt-sept toises et quatre pieds de longueur ;
les deux autres n'en avaient que vingt-cinq, mesures prises
63
entre les murailles. Elles étaient toutes construites de la
même manière, en pierres de taille, provenant des car-
rières de Caumont et de Saint-Leu, jusqu'à une hauteur
de onze pieds, se terminant ensuite, dans la partie supé-
rieure, par une charpente qui tombait en ruine au moment
où le procès-verbal fut dressé, et n'avait qu'une très faible
valeur, au dire de l'expert, la construction étant faite en
bois de châtaigner à moitié pourri. Deux tourelles, égale-
ment en charpente de châtaigner, complétaient cet inté-
rieur ; elles étaient octogones, couvertes en ardoises et leur
amortissement se terminait par des épis en plomb.
Les façades extérieures, entièrement en pierres de
taille, provenant des mêmes carrières, étaient reliées entre
elles aux quatre angles par des tourelles cylindriques sur-
montées d'épis.
Tout cet ensemble était entouré d'un vivier ou étang
revêtu d'une maçonnerie en moellon avec chaînes de
pierres; un canal également maçonné, long de vingt-trois
toises, le faisait communiquer avec la rivière, qui, en cet
endroit, était bordée par un talus en pierre de bitte qui
avait quatre-vingt-quinze toises de longueur.
On franchissait Tétang, du côté de la rivière et du côté
de la côte de Canteleu, par deux ponts, composés chacun
de trois arches en maçonnerie, formant ensemble une lon-
gueur d'environ trente-six pieds sur dix de hauteur. Cette
mesure donne la largeur de l'étang.
Le pied des murs du château était porté sur un talus
de pierre dure en glacis, qui avait une hauteur de dix
pieds, en comprenant quatre pieds et demi de profondeur
dans l'eau de l'étang et cinq pieds et demi hors œuvre
jusqu'au niveau de la cour d'honneur.
Les deux ponts correspondaient à un même nombre de
portes, qui donnaient accès dans le château par un large
vestibule. Elles étaient flanquées chacune par deux élé-
gantes tourelles destinées autrefois à contenir des fours
pour cuire le pain et autres dépendances.
64
Les vantaux de ces portes, larges de huit pieds et demi
sur une hauteur de dix pieds, étaient composés de caissons
ou panneaux assemblés, en manière de parquet, dans de
fortes membrures, le tout en bois de chêne. Ils étaient
ferrés de quatre pentures roulant sur des gonds en cuivre
et fermés par des fléaux garnis de serrures, avec des gui-
chets à double charnières et fermant à clef.
Les aîtres ou appartements compris entre la £siçade
intérieure et l'extérieure avaient vingt-quatre pieds de
profondeur. Si on ajoute cette largeur de vingt-quatre
pieds, répétée deux fois, à la longueur des façades inté-
rieures que nous venons de donner, c'est-à-dire vingt-sept
toises et quatre pieds, plus quarante-huit pour les appar-
tements, et aussi pour Tépaisseur approximative de quatre
murailles, environ douze pieds, on trouve que le château,
à Textérieur, pouvait avoir deux cent vingt-cinq pieds, ou
soixante-quatorze mètres environ, de façade dans sa plus
grande longueur, et dans l'autre, c'est-à-dire vers la
rivière et vers la côte de Canteleu, soixante-neuf mètres
trente, sans compter la saillie des tourelles, mesures
qui accusent une construction de premier ordre et qui
paraissent en rapport avec le plan donné par Gomboust.
Dans l'intérieur de l'un des appartements, on remar-
quait une ancienne cheminée dont le manteau et les cor-
belets en fer méritaient d'attirer les regards.
Le procès- verbal signale, à peu de distance du château,
un colombier construit en chaînes de briques et de pierres
sur un plan octogone, portant dix pieds sur chaque face
et couronné d'un entablement en corniche avec une plate-
forme en rond point. Il était couvert en tuiles avec un
épi en plomb à l'amortissement.
Ce colombier existe encore ainsi que deux portes assez
intéressantes. La première, placée autrefois vis-à-vis l'une
des entrées de l'ancien château, se voit sur le bord du
chemin, tendant de Bapeaume à Croisset. Elle se compose
d'une arcade à plein cintre, élevée au milieu d'un mur en
65
demi-lune, long de six toises et construit, dans son pour-
tour, en briques, avec compartiments en bijet ou silex
noir, taillé au marteau, le tout surmonté d'une frise avec
chapiteaux et corniches sur les deux piliers.
L'autre grande porte, d'une construction analogue à la
première, mais plus richement ornée d'encadrements et
de profils d'architecture, figure fort honorablement, par
son aspect pittoresque, sur la petite place du village de
Croisset. Elle portait, dit-on, avant Tépoque de 1793, les
armes de France, sculptées sur un écusson, placé au fron-
ton de la grande arcade, qui occupe le milieu du monu-
ment. Ce qu*il y a de certain, c'est que Ton voit très bien
l'arrachement de crampons qui maintenaient en place un
écusson quelconque. Nous serions plus disposé à croire
que c'était celui du seigneur du lieu. Cependant une tra-
dition populaire voudrait que Henri IV ait logé- au châ-
teau de Croisset pendant le siège de Rouen, et l'on verrait
dans ce fait l'explication naturelle de la présence de l'écu
de France sur une des portes d'entrée. Mais où Henri IV
n'aurait-il pas loge en Normandie, si on en croyait la
légende ?
Dans la cour de ferme, dite de la bergerie, où était situé
autrefois le château de Croisset, on découvre, sans peine,
remplacement qu'il occupait, et une dépression, facile
à suivre, accuse les dimensions de l'étang et du canal
qui le mettait en communication avec la rivière.
Les matériaux du château, démoli par les nouveaux
propriétaires, ont servi à construire des bâtiments ruraux
d'une architecture assez remarquable.
Voici donc tout ce qui reste de cette antique demeure
grandiose et presque princière : Un colombier, deux
portes à moitié ruinées et le souvenir.
Nous devons a l'obligeance de M. Stéphane de Merval,
notre savant collègue, la liste des anciens seigneurs de la
châtellenie et plein fief de haubert de Croisset, dont on
retrouve la trace ; nous la donnons ici :
5
66
Un titre de i2o5, cité dans Thistoire de la maison
d*FIarcourt, porte qu'Amaury de Meull^nt, le plus ancien
seigneur de Croisset connu, en mariant sa fille Alisande
à Guillaume de Tancarville, lui donna en dot les terres et
seigneuries de Sahurs, Croisset et Bapeaume.
Alix de Tancarville, fille de Raoul, lors de son mariage
avec Robert Bertrand, baron de Briquebec, etc., reçut en
dot les seigneuries de Sahurs, Croisset^ Feuguerolles,
Oystreham, etc. (v. Histoire de la maison cTHarcourt).
Leur second fils, Guillaume Bertrand, prenait les titres
de vicomte de Fauguernon, sieur du Mesnil-Patry, de
Feuguerolles, de Sahurs, de Croisset, de Bapeaume, de
Courvandon, etc. Il était mort avant i32o et, dans la
généalogie de ses descendants, il n'est plus fiait mention
du titre de seigneur de Croisset, que Ton ne retrouve qu'à
la montre des nobles, tenue le troisième jour de juil-
let i486, par Pierre Rolin, lieutenant général du bailly
de Rouen, commissaire du roi, en laquelle comparait :
Pierre Le Clerc, sieur de Croisset, de Bouville et du
Grand-Quevilly.
Depuis cette époque jusqu'au mariage, en 1668, de
Suzanne Le Clerc, fille d'Alonce Le Clerc, sieur de Crois-
set, et de Suzanne de Bailleul, née à Croisset le 2 juil-
let 1647, *vec François- Alphonse de Pardieu, seigneur et
patron de Sain t-Denys-du- Val, la seigneurie de Croisset
appartînt à la famille Leclerc, puis à la famille de Pardieu.
qui la posséda pendant quatre générations.
François-Hyacinthe de Pardieu, mort le 22 juillet 1767,
eut, de Geneviève- Barbe Cavelier de Mocomble, six
enfants, tous baptisés à Cantelcu. C'est celui qui vendit le
château de Croisset à son frère, ainsi que nous Pavons
dit.
Alonce Le Clerc, député aux États de Normandie
en i583, dont il vient d'être question, était ce même
Alonce chez lequel fut transporté son cousin, François de
Civille, lorsqu'il fut blessé au siège de Rouen, ainsi qu'il
6;
le raconte dans ses Mémoires, réimprimés par la Société
des Bibliophiles normands
Le caveau funéraire de la famille Le Clerc était placé
sous le chevet de Téglise Saint- Vincent de Rouen.
Le i6 mars i5o5, Pierre Le Clerc, écuyer, seigneur
châtelain de Croisset^ de Quevilly, de Bouville et de Gaîl-
lardbois, fonda une messe en cette église de Saint- Vincent,
où ses prédécesseurs, avaient donné deux grandes vitres
peintes sur lesquelles leurs armes sont représentées. Elles
sont da^ur^ à trois lions naissants d'or^ armés et lampas-
ses de gueules^ les queues passées en sautoir^ à la bordure
engreslée de gueules,
M. Bouquet communique le renseignement suivant
sur les anciens sceaux de la vicomte de Gaillefontaine.
La châtellenie de Gaillefontaine resta dans la famille
d'Orléans- Longue ville depuis 1488 jusqu'en iSgS. Elle
possédait une haute justice, qui avait un sceau^ aux armes
de cette maison, pendant toute cette période. Il y avait le
grand et le petit sceau, et tous les deux étaient en argent,
portant les armes d'Orléans- Longueville, bande et le lam-
bel, et surmontés de la couronne comtale (sept perles),
avec une légende en lettres gothiques au pourtour. L'une
était : Le Grant scel aux causes de la Vicôté de Gaille-
fontaines, et l'autre : P. 5. (petit scel) de la Viconté de
Gaillefontaines. Le grand sceau a été longtemps porté ^
après la Révolution de 1789, comme breloque de montre,
par un habitant de l'arrondissement de Neufchâtel, de qui
M. Mathon, ancien bibliothécaire de cette ville, l'a racheté.
Mme la générale Hoche avait fait prendre une empreinte
de l'un et de Fautre, en cire rouge, à la prière de M. Bou-
quet, qui les croit assez curieuses pour en faire hommage
a la Commission.
Notice sur le domaine de la Motte, — Notre col-
lègue, M. Paul Baudry, dont le domaine de la Motte
68
a été récemment touché par l'expropriation, a extrait
de ses titres de propriété une note destinée à en retracer
la physionomie toute particulière.
La maison de La Motte, ou, comme on le dit quelquefois
beaucoup trop pompeusement, le château de La Motte,
qui avait autrefois pour voisinage le prieuré de Notre-
Dame -des- Prcs, entra, le 4 mai iSog, dans la famille
d'Harcourt, par la succession de Artut de Vierville.
En 1746, le célèbre chirurgien rouennais Le Cat en fit
l'acquisition, en même temps que celle d'une pièce de
terre y attenante, à charge de les tenir et relever de la sei-
gneurie d'Emendreville, par tous droits, devoirs seigneu-
riaux et rentes seigneuriales, et moyennant la somme de
5,5oo livres.
Cette petite propriété passa dans ma famille en 18 17 et
m'appartient personnellement depuis 1868.
C'est, dans son genre et dans sa simplicité relative, un
manoir curieux, avec l'avenue qui en décore l'entrée et
que je trouve citée dès l'année iGSg; avec sa vieille grange ;
avec un bâtiment à deux pignons, qui peut appartenir au
xvi« siècle; avec son jardin français, si r^re aujourd'hui;
avec ses rangées de tilleuls et ses charmilles, contempo-
raines peut-être de celles de Versailles, et dont le dessin,
habilement disposé, ne déshonorerait pas la main de Le
Nôtre, auquel on Ta quelquefois attribue, sans preuves,
du reste.
Cet immeuble, suivant l'expression contemporaine, n'a
pas seulement un intérêt quasi historique. Des souvenirs
intimes me le rendent cher : Je pourrais dire, en alté-
rant très peu les vers d'Andrieux à propos du meunier de
Sans-Souci :
Mon vieux père y mourut et mon fils y naquit ;
C'est mon Postdam, à moi.
Aussi, avec quel soin n'ai-je pas conservé cette sorte de
relique des temps passés! J'ai renouvelé les plantations à
69
mesure qu'elles disparaissaient. J'ai décoré la façade de
faïences, dont notre savant collègue, de regrettable mé-
moire, M. Desmarest, a brillamment reproduit le genre
dans sa maison de la rue Pouchet. J'y ai mis pour sus-
cription deux mots qui m'ont été gracieusement suggérés
par un autre de nos savants et aimables collègues,
M. Bouquet : Et mets et amicis, invitation de visite que
je reprocherai affectueusement à l'inspirateur de cette
devise de ne pas assez mettre en pratique.
Au moment où, cédant à la loi d*expropriation, qui
atteint tant de monuments rouennais, l'avenue extérieure
et une partie des charmilles de La Motte vont bientôt
céder la place aux rigueurs de l'alignement, excusez-moi,
Messieurs, d'être sorti des questions d'intérêt général et
de vous avoir un peu parlé j^ro domo med
J'ai eu l'occasion, il y a quelques années, de faire litho-
graphier l'extérieur de La Motte. Je vous demande la
permission de laisser dans nos cartons, si vous le jugez à
propos, un exemplaire de cet essai, dû a Varin.
Bolbec : chapelle Saint - Martin- du -Vivier. —
Cercueils gallo-romains, près Péglise Saint-Denis,
de Lillebonne. — M. Brianchon donne ensuite lecture
d^une notice sur la chapelle Saint-Martin-du-Vivier, à
Bolbec, et d'amulettes de M. Duval constatant la décou-
verte de deux cercueils de pierre dans le cimetière de
Saint-Denis, de Lillebonne.
LA CHAPELLE SAINT-MARTIN-DU- VIVIER, A BOLBEC
Le plus ancien monument de Bolbec, remontant au
xi« siècle, a été démoli le mois dernier. Je veux parler de
la chapelle romane de Saint-Martin-du-Vivier. Qu'il me
suffise de rappeler ici ce qu'en ont dit deux ou trois
auteurs, pour lui servir d'oraison funèbre.
Dans sa note sur Bolbec, dom Duplessis ne manque pas
de mentionner, au château de Fontaine- Martel, la cha-
pelle Saint-Martin. C'est, remarque le savant bénédictin,
le fief de Fontaines, demi-fief de haubert, relevant du
comté de Lillebonne, qui a droit de présenter à cette
chapelle (i). Selon un aveu du comte de Maulévrier, du
i5 février lôyS, le fief ou fiefferme de Fontaine-Martel,
près de Bolbec, relève du comté de Maulévrier.
D'après un aveu du i«r avril i6S5, le fief de Fontaines
s'appelait anciennement le fief de la Marche (2).
Le seul débris qui reste de ce château, — le château de
Fontaine-Martel, — dit à son tour Guilmeth, en i838,
est sa vieille chapelle, dédiée à saint Martin, laquelle, en
vertu d'une convention passée à Lillebonne en présence
de Guillaume-le-Conquérant et d'un grand nombre de
personnages illustres, par Hugues de Bolbec, et ratifiée
par Gautier Giffard, comte de Longueville et de Buckin-
gham, avait été cédée en 1078, avec le prieuré de Saint-
Michel, à l'abbaye de Bernay. Dans les derniers siècles,
c'étaient les seigneurs de Bolbec qui nommaient les des-
servants de cette chapelle. Elle fut pillée et dévastée par
les révolutionnaires en 1794 (3).
M. Collen-Castaigne, qui publiait^ un an plus tard,
c'est-à-dire en 1839, un Essai historique sur Bolbec, s'ex-
prime à peu près (p. 2 1) comme son devancier :
« On voit encore, dit-il, la vieille chapelle du château de
Fontaine-Martel, dédiée à saint Martin, et qui fut dévastée
et privée pour jamais de sa petite cloche en 1794 (4). »
(i) Cf. Archives de la Chambre des Comptes de Rouen.
(2) Dom T. Duplessis. Description de la Haute-Normandie,
1740, 1, 353.
(3) Aug. Guilmeth. Description géographique, historique^ mo-
numentale et statistique des arrondissements du Havre, Yvetot
et Neufchdtel, suivie de V Histoire communale des environs de
Dieppe (ire partie), arrondissement du Havre, canton de Bol-
bec, 6, 7 et 24. Paris, i838.
(4) Archives de la mairie de Bolbec.
Enfin, entre le château de Fontaine-Martel et le cime-
tière romain se voit encore, écrivait en 1871 l'abbé Cochet,
près d'un ancien vivier rebouché, une chapelle de Saint-
Martin, construite en tuf au xi^ siècle (i).
Ce tuf sortait de la vallée même, comme on a pu s*en
convaincre lors des travaux de rectification du chemin de
grande communication n^ 3o, de Bolbec à Caudebec, exé-
cutés en octobre 1871 (2).
C'est grâce à la sollicitude archéologique de M. Georges
Castaigne, parent de Thistorien de ce nom (3), que deux
statuettes en pierres coloriées et mutilées, dont Tune est
une Mater dolorosa, ont été réservées par MM. Hcrtel et
Glachant, entrepreneurs, et mises à notre disposition par
les propriétaires, MM. Léon Lemaître et René Desgené-
tais, pour être offertes à quelque musée. Les fouilles qui
ont eu lieu à cette occasion ont révélé la présence d'orne-
ments en assez grand nombre.
Un plan géométrique de la chapelle Saint-Martin-du-
Vivier, telle qu'elle existait au moment de sa démolition,
^ été dressé par les soins de M. Duveau, ingénieur civil,
et témoignera de la dernière pierre du vieux Bolbec dis-
paru aux archives de la Commission.
(i) L'abbé Cochet. La Seine^Jnférieure historique et archéo^
logique y 1864» p. 224. — Répertoire archéologique du départe-
ment de la Seine-Inférieure^ 1 871, col. 93.
(2) C'est à la base de la couche tuffeuse de la vallée de Fon-
taine, observe, dans son Histoire de Bolbec, M. Mauconduit, que
fut trouvée, par M. Alfred Lacaille, avec plusieurs autres fos-
siles, la magnifique urne de bos primigenius, qui forme aujour-
d'hui l'un des plus curieux objets de sa collection.
(3) CoUen-Castaigne. Essai historique et statistique sur la
ville de Bolbec, Rouen, 18^0
'^1
COPIE D UNE LETTRE DE M. DUVAL A M. BRIANCHON
DATÉE DE LILLEBONNE, 26 AVRIL 1882
Cher Monsieur,
Je viens de découvrir, en faisant fouir le gazon de mon
jardin pour le renouveler, deux cercueils francs, en forme
d'auge, près de l'endroit où j'en avais déjà retiré deux,
dont l'un d'une seule pierre, et tout près de deux autres
tombeaux en pierre, que M. Tabbé Cochet a visités avec
M. Paul Baudry. Ils sont restés en place et se trouvent
sous mon wellingtonia. Ils avaient déjà été fouillés, mais
ils sont entiers. Ceux que je viens de découvrir ont été
non seulement violés, mais les rebords ont été en partie
enlevés. Ils sont formés, comme la plupart des auges en
pierre, de deux morceaux. Celui dont la partie des pieds
manque à un mètre soixante de longueur, sur une largeur
presque égale aux deux extrémités, soixante-sept centi-
mètres sur cinquante-sept mesurée extérieurement.
La largeur aux pieds de l'autre, mesurée aussi extérieu-
rement, est de trente-huit centimètres. Seulement, le reste
manque.
Tout à côté existe un petit massif de maçonnerie ro-
maine en pierre de petit appareil, recouvert de briques de
trente-six centimètres sur vingt-neuf, sur lesquelles ne se
trouve pas le petit empâtement que nous avons remarqué
aux briques d'Alincourt et du théâtre. On y avait pratiqué
une entaille pour faire entrer l'angle d'une des auges. Il
repose sur un mur qui paraît se prolonger.
Ces sépultures se trouvent devant le porche de l'église,
vers l'endroit où était placée la croix du cimetière.
Veuillez agréer, etc.
Rouen : notice sur Vancien hôpital Saint - Vivien.
— M. de Beaurepaire communique une notice sur
Tancien hôpital Saint-Vivien ; elle est ainsi connue :
NOTICE SUR l'hôpital SAINT-VIVIEN, A ROUEN
Il existe à Rouen, près de l'église Saint- Vivien, une an-
cienne maison dont la destination, généralement oubliée,
nous paraît mériter d*être rappelée. Cétait un de ces éta-
blissements, comme il y en avait tant au moyen-âge, à une
époque où les hôtelleries étaient rares, où Thospitalitc
envers les pauvres passants était réputée Tune des princi-
pales œuvres de miséricorde ; comme il n'en restait pres-
que plus au dernier siècle, et comme il serait peut-être
à propos d'en fonder de nouveau aujourd'hui. Je veux
parler de l'hôpital Saint- Vivien qui fut établi vers le mi-
lieu du xiv« siècle, et dont la durée s'est prolongée jusqu'à
la Révolution.
Cet hôpital dut sa fondation à un bourgeois de notre
ville, nommé Jean Le Fèvre, lequel y fit placer treize lits
fournis, ut pauperes, claudi et débiles j honeste recipi valu-
rent, cubari et recolligi. Ce nombre treize n'avait pas, sans
doute, été pris au hasard. C'est le nombre des apôtres, en
y comprenant leur maître.
On a conservé les lettres du duc de Normandie, par les-
quelles il ordonne au bailli de Rouen de procéder à une
enquête sur le point de savoir si l'utilité publique était in-
téressée à ce que l'amortissement, sollicité pour cette
maison, lui fût accordé.
Ces lettres sont ainsi conçues :
« Jehan, ainsné fils du Roy de France, duc de Norman-
die et de Guyenne, conte de Poitou, d'Anjou et du Maine,
au bailly de Rouen ou à son lieutenant, salut. Comme
Jehan Le Fèvre, bourgois de Rouen, nous ait supplié que
une pièce de terre, contenant en lonc et en lé six perches
et quatre piez ou environ, en laquelle il a commencé à
ordener un hospital en la parroisse Saint- Vivien et y
mettre treize Hz pour recevoir et coucher les povres et y
faire une chapelle en laquelle ait deux prestres qui dores-
74
enavant facent le dyvin office, nous, en regart de pitié, et
pour estre participanz es bien&iz et oroisons que Ten fera
ou dit hospital et en la dicte chapelle, li voulsissions
admortir à Feuvre dessus dicte ; weillanz estre sur ce cer-
tiffîez plus à plain^ vous mandons que, appelé notre pro-
cureur et ceulz à qui il appartendra, vous vous enfourmiez
diligemment se, sans préjudice et dommage de nous et
d'autruy, nous li poions octroier ledit admortissement, et,
se aulcun préjudice ou dommage nous ou autre y poions
avoir, quel il soit, et l'information que vous en ferez nous
renvoiez stablement encloze sous votre seel, ou aus gens
de notre Conseil à Paris, afin que, ycelle veue, nous ou
nos dictes gens en puissions plus à plain ordonner ce que
bon nous semblera. Donné à Saint-Leu de Serens (i), le
xx^ jour de juillet Tan de grâce mil ccc quarante et nuef,
sous le seel ordené pour Teschiquier en Tabsence du grant.
Par vous, Mons^ Symon de Bucy (2). » Signé : Symon.
Bien que le texte ne nous en soit pas parvenu, il ne nous
paraît pas douteux que les lettres d'amortissement furent
accordées. On voit, en effet, que dès ce temps là on con-
sidérait rhôpital comme régulièrement fondé. Le lundi
après la saint Martin d'hiver i35o (3), il était approuvé
par lettres des vicaires généraux (4), agissant au nom de
(i) Saint-Leu-d'Essérent (Oise), arrondissement de Senlis, can-
ton de Creil.
(2) Simon de Bucy, premier président du Parlement de Paris,
mort en 1369.
(3) II novembre.
(4) Ces lettres commencent par ce préambule : « Cum dilectus
noster Johannes Fabri, burgensis Rothomagensis, salutem ani-
me suCf parentum , amicorum et benefactorum suorum deside-
rans, ac etiam eonsiderans quod qui celestis vite dulcedinemy in
quantum possibilitas admittit, perfecte cognoverity que amat in
terris libenter pro amore Jhesu Christi relinquit, cum in compas
rations ejus vilescant omnia, deserit habita, congregata disper-
gitf et in celestibus animus inardescit, n
-5
l archevêque, pour lors absent de son diocèse. On apprend
par ce document que Jean Le Fèvre avait préposé un
concierge à la garde et à la surveillance de cette maison ;
qu'il y avait affecté une rente de lo 1. à percevoir par les
mains des trésoriers de Téglise Saint- Vivien, auxquels il
remettait le soin de nommer à l'avenir le concierge, de le
salarier, et de le congédier, à l'occasion ; qu'il y avait, en
outre, établi deux chapelains perpétuels, qui devaient cé-
lébrer en l'église de Saint-Vivien, à un autel par lui fondé
ou à fonder (i), dix messes chaque semaine, h savoir: six
messes à VEsquelle de Notre-Dame ad scalam Beute
Marie (2), les autres à l'heure de prime, sans pouvoir
cependant administrer les sacrements, sinon avec le con-
sentement du curé. Les deux premiers chapelains avaient
été présentés par lui à Tarchevêque. . Mais il consentait
qu'à Tavenir la présentation fût faite par le curé et par
quatre trésoriers de la paroisse, lesquels devaient s'ad-
joindre, pour le choix à faire, sept personnes suffisantes de
la paroisse; le choix devait porter sur l'un des quatre clercs
matriculiers de l'église paroissiale, ou, si cela ne pouvait
avoir lieu, sur un clerc domicilié en la paroisse, et qui en
fût originaire. La fondation paraît avoir eu dès lors un
double but : la charité à l'égard des pauvres, l'accroissement
du culte divin en l'église paroissiale. Ce second objet fut sans
doute proposé, sinon même exigé, par le curé, Nicolas de
(i) Les lettres des vicaires parlent de la chapelle en des termes
qui font supposer qu'elle était érigée, et celles du curé, en des
termes qui font supposer qu'elle était à ériger. C'était la chapelle
Sainte-Quitaire ou Sainte-Aquitaire (Ste Quiterie, dont la fête se
célèbre le a a mai). On la cite comme ayant été fondée par Jean
Le Fèvre, dans un acte du tabellionage de Rouen, R. i3, f^ 56.
(2) VEsquelle de Notre-Dame, l'une des cloches de la cathé-
drale. Les sonneries de la cathédrale servaient de règle aux di-
verses églisss de la ville. Nous avons eu déjà l'occasion de faire
cette remarque à propos de la collégiale du Sépulcre. V» Ducange,
au mot skella, skillay squilla.
-6
Veris, chanoine de Rouen, que l'on voit approuver, à son
tour, cette fondation, le 17 novembre i35i.
Plus tard, Jean Le Fèvre laissa par testament une assez
forte somme d'argent, dont une partie (80 florins d'or à Técu
du coin du roi Jean) servit, le jeudi après la fête de Notre-
Dame, en septembre i359, au rachat d'une rente de 10 1.
pour laquelle un nommé Guillaume Ybert avait fleffé h
Jean Le Fèvre le terrain qui avait servi d'emplacement à
cet hôpital. Dans l'acte qui fut rédigé à cette occasion, le
fondateur est appelé 5ire Jean Le Fèvre (f). Ce titre de
sire, réservé à ceux qui avaient été honorés de charges
municipales, donne lieu de croire que le personnage en
question n'était autre que ce Jean Le Fèvre qui fut nommé
deux fois maire de Rouen, une première fois en i343, une
seconde fois, dix ans après.
Il avait dû mourir peu de temps avant le mois de
février i359, à en juger par les lettres d'amortissement
qui furent obtenues de Charles, fils aîné du roi de France,
régent du royaume, duc de Normandie et Dauphin de
Vienne, par un nommé Guillaume du Bec, bourgeois de
Rouen (Louvre lès-Paris, février i359). L'amortissement
comprenait Thôpital Saint- Vivien fondé par feu Jean Le
Fèvre, ainsi qu'une vide pièce donnée par le même Guil-
laume du Bec. Cette faveur avait été sollicitée au nom des
exécuteurs testamentaires de Jean Le Fèvre. Elle fut ac-
cordée par le Dauphin, comme duc de Normandie, en
considération des obligations que lui et le roi, son père,
avaient au requérant, ainsi qu'il est consigné expressément
( I ) « Satie veniens ad nos carissimus noster Johannes Fabri,
civis RothomagensiSf nobis, cum incensa cordis affectione sup-
pîicavit ut, cum ipse cupiens diem messionis extrême operibus
misericordie prevenire et talia seminare in terris^ que, Deo pro-
picio, post hujus vite ergastulum, cum multiplicato fructu recol-
ligere valent in celis, quoddam hospitale ad usum et opus Christi
pauperum in quibus dominus noster Jhesus Christus se pasci et
reflci in Euvangelio profitetur, in dicta parrochia erexerit, »
77
dans les lettres de concession : « Le dit Guillaume du Bec,
auquel nostre très chier seigneur et père et nous sommes
tenus pour certaines causes justes et raisonnables, dont il
n'ont oncques recompensacion, et encore est prest de nous
servir de son corps et de ses biens et de vivre et mourir
pour nous et notre droit et honneur garder à son povoir. »
U Hôpital de Saint- Vivien, aux termes de ces lettres, fut,
en même temps qu'amorti, exempté de toute juridiction
temporelle (i).
Vers 1430, un pieux bourgeois de Rouen, Jean Moni-
cault, donna aux pauvres de cet hôpital une rente de 5o I.,
et peu de temps après (14 janvier 1466), une maison adja-
cente à leur enclos. Le curé et les trésoriers de la paroisse
furent constitués les administrateurs de cette dotation nou-
velle, ainsi quMl était naturel, puisqu'ils étaient par les titres
de fondation les administrateurs de Thôpital. Pour se con-
former à la volonté du donateur, les paroissiens dési-
gnaient deux trésorières qui étaient chargées de percevoir
les rentes constituées sur des maisons à l'intérieur de
Rouen et qui devaient acheter, sur les fonds par lui don-
nés, pour 7 livres de bois par an, à savoir : dix mesures
de bûche de hêtre prise sur le quai, du prix de 5 sols la
mesure ; un quarteron de gloe de hêtre, du prix de i5 de-
niers la care ; deux milliers et demi de fagots de Préaux,
avec deux cents de bonnes bourrées. La distribution de-
vait s'en faire par leurs mains, aux pauvres de Thôpital, à
raison par nuit de deux bûches, quatre gloes, un fagot et
une bourrée, suivant le temps et le froid.
Le même Monicault avait fondé en Téglise Saint-Vivien,
(i) Cest probablement ce Guillaume du Bec dont il est ques-
tion dans un mandement de Charles V, du 19 mars 1364, par le-
quel il ordonne aux vicomtes de Rouen et de Montivilliers de
faire une enquête pour savoir si Guillaume du Bec, père de Ro-
billart du Bec, clerc, écolier à Paris, « estoit noble et estrait de
noble lignée. » V, M. Léopold Delisle, Mandements et actes di-
vers de Charles V, 1874, no 202.
78
à son intention, et à celle de sa femme et de ses amis, des
services religieux qui devaient être célébrés par les frères
de Notre- Dame-du-Carme, auxquels il était enjoint d'u-
ser des ornements de velours pers qu'il leur avait donnés.
Ces services étaient annoncés par la sonnerie d'une cloche
qu'on nommait encore, au xviii« siècle, la Mounicaude,
Louis XI, pendant son séjour à Rouen en 1467, permit
aux trésoriers de la paroisse de donner à Thôpital Saint-
Vivien c de 40 à 5o l. de rente amortie et à Dieu dédiée
hors fief noble, » à charge de payer au trésor royal 100 écus
d'or à titre de dédommagement. Dans les lettres d'amor-
tissement octroyées par le Roi, les trésoriers et les parois-
siens sont désignes comme ayant fait construire et édifier
eux-mêmes cette maison dans le but t d'y recueillir et d*y
héberger les povres de Notre-Seigneur, tant ceulx de la
ville qui n'ont de quoy vivre comme les forains passant
païs. » On y mentionne c qu'en icelui hospital ils avoient
pourveu de ornemens d'église pour y faire le service dyvin,
et aussi de litz et autres utensilles pour le recueil et service
desdits povres, et telement qu'ilz y estoient bien et honnes-
tement recueilliz, servis et pourveuz de leurs nécessitez,
et y estoit chacun jour fait et continué le service divin
bien et notablement, et avoient entencion de continuer de
bien en mieulz. » On voit qu'ils avaient encore déclaré
« que ledit hospital et hostel Dieu estoit grand et spacieux
et que les ornemens d'église, lits et utensilles et autres
choses nécessaires pour le service des povres estoient de
grand entretènement. » Comme dans cet acte, pas plus
que dans ceux que nous avons précédemment cités, il
n'est question de frais de nourriture, nous sommes très
porté à supposer qu'on se bornait, dans Thôpital Saint-
Vivien, à fournir aux pauvres le logement, le chauffage,
et tout au plus quelques secours en pain. Autrement un
seul concierge n'eût pas suffi.
On sait que le xvi« siècle fut une époque de décadence
pour tous les établissements hospitaliers. Tous souffrirent,
/VJ
la plupart furent ruinés, beaucoup disparurent, et jamais
pourtant il n'y eut plus de misères à soulager. L'hôpital
Saint- Vivien n'échappa pas à l'influence funeste qui se
Élisait partout sentir. Ses revenus modiques furent nota-
blement réduits par la dépréciation que subirent toutes les
rentes en numéraire à la suite de la découverte des mines
d'or de l'Amérique ; plusieurs maisons furent successive-
ment aliénées; la chapelle fut supprimée, et à la fin il ne
resta plus de l'œuvre du bon maire de Rouen, Jean Le
Fèvre, qu'une maison, où l'on offrait gratis le logis aux
pauvres passants, et une autre où résidaient les deux cha-
pelains de la chapelle Sainte-Qui taire.
L'administration de cet hôpital ainsi réduit était oné«
reuse aux trésoriers. Il leur fallut cependant, pour la con-
server, lutter contre le Bureau des pauvres valides, qui
voulait s'en emparer ; ils transigèrent : ils abandonnèrent
aux administrateurs du Bureau une partie des biens, no-
tamment une maison, située rue des Carmes, d'un loyer
de 25o 1., qui avait été donnée aux pauvres, en 1670, par
Laurent le Cornu, sieur d'Igoville, et par son frère le
chanoine. On leur laissa la maison à usage d'hôpital, par
cette considération qu'elle était affectée au logement des
ecclésiastiques qui desservaient la paroisse Saint-Vivien
(1686).
A leur tour, au siècle suivant, les trésoriers sollicitèrent
la suppression de l'hôpital. Ils prétendaient que c'était un
établissement dangereux, onéreux à la paroisse, contraire
aux intentions du gouvernement, à la volonté du Roi, qui
mettait alors tout en usage pour s'opposer aux courses
des pauvres vagabonds. C'était, à les en croire, exciter les
mendiants à quitter leur pays que de leur promettre hors
du bourg, du village qu'ils habitaient, un asile où pendant
deux jours ils étaient logés, couchés, chauffés gratuite-
ment. Que serait-ce, disaient-ils, si, dans chaque ville, il
se trouvait de pareils hospices ? c Tous les pauvres des
différentes paroisses ne seroient-ils pas continuellement
8o
errants, assures de trouver partout des hôtelleries chari-
tables, où ils seroient reçus, accueillis sans frais ni dé-
penses? > On n'écouta pas leurs plaintes; et Thôpital fut
maintenu avec la charge d'admettre les passants qui se
présenteraient, de les loger pendant deux nuits et de
leur fournir à chacun deux fagots, depuis la saint Michel
jusqu'à Pâques.
Le nombre de ces passants (étrangers, soldats, ouvriers
en quête de travail ou disant leur tour de France), était
assez considérable. II s'éleva souvent ù plus de quinze
cents par an.
Au xvii« siècle, il y avait, h l'hôpital Saint- Vivien, deux
dortoirs, l'un pour les hommes, avec neuf lits, l'autre pour
les femmes, avec quatre lits. Au xviiic siècle, il n'y avait
plus qu'un dortoir, où les hommes seuls étaient admis. On
mettait à la disposition des passants un réfectoire dont le
mobilier se réduisait à quelques objets indispensables, tels
c qu'une grosse table, deux grands sièges, deux pièces de
bois à seoir les pauvres, une cramillée à trois cramillons,
deux grands landiers ; > la pièce était ornée d'une image
de la sainte Vierge.
L'hôpital subsistait encore en 1792. Le 8 octobre de
cette année, l'architecte Louis Gilbert, à la réquisition
des administrateurs du Directoire du district de Rouen,
procéda à la visite et à l'estimation de la maison. Il cons-
tata qu'elle consistait en deux corps de logis, bornés, vers
le nord par la rue Saint- Vivien, vers le midi par divers
bâtiments appartenant au trésor de la paroisse, et par une
allée conduisant à Teau de Robec ; que le bâtiment sur la
rue Saint-Vivien, servant d'hôpital, présentait quarante
pieds de façade sur dix-huit de largeur dans œuvre, qu'il
contenait neuf lits pour les pauvres voyageurs, avec quatre
petites salles, dont une, ayant neuf pieds de long sur huit
de large, leur servait de chauffoir. Le même hôpital con-
tenait deux chambres pour le logement du chapelain et
du clerc de la paroisse, une autre pour le logement du
8i
concierge, une salle pour les assemblées du trésor de
Saint- Vivien, sans compter quelques portions de maison
baillées à loyer.
L*hôpital Sàint-Vivien, portant alors le n» 1 1 2 de la rue,
fut vendu, comme bien national, le 22 octobre 1793, à
Pierre- Adrien -Emmanuel Bonjour, pour le prix de
25,000 livres.
On peut s*étonner que les Administrateurs du district
de Rouen n'aient point respecté l'hôpital Saint- Vivien, à
raison de son but populaire et philanthropique, pour ne
pas dire charitable.
Mais si une chose doit surprendre, c'est qu'il eût sub-
sisté jusqu'à eux. Il avait, en efïet, survécu, pendant de
longues années, à tous les établissements hospitaliers du
même genre.
Je me bornerai à en citer quelques-uns : je n'irai pas
les chercher bien loin .
A Arques, l'hôpital Saint- Julien pour l'hospitalité re-
montait à une haute antiquité : il fut réuni à l'hôpital de
Dieppe par un arrêt du Conseil du 22 décembre 1674, et
par lettres patentes du mois de novembre 1695.
L'hôpital de Sainte-Foi-de-Longueville, établi dans le
même but, fut réuni à l'hôpital de Dieppe à la même
époque.
L'hôpital de Vaudreville, administré par un hospitalier,
pris parmi les religieux de Longueville^ avait aussi pour
objet l'hospitalité. Il en est question dans une charte de
II 80, conservée dans le Fonds du prieuré de Longue-
ville (1).
A Aumale, il y avait un hôpital pour les pauvres passants.
Ils pouvaient y loger une nuit. Il était sous l'invocation
de S. Nicolas. Il en est question dans des pièces du
xvi® siècle (2).
(i) Arch. de la S.-Infér., F. de Tlntendance et de Longueville.
(2) Arcli. de la S.-Inf., v. V Histoire d'Aumale, de M. Semichon.
6
82
A Caudebec, l'hôpital de Saint-Julien était originaire-
ment affecté au soulagement des pauvres étrangers et pas-
sants (i).
A Écouis, Enguerran de Marigny avait fondé un hôpital
sous l'invocation de S. Jean- Baptiste, où Ton recevait les
passants de Tun et de l'autre sexe dans deux corps de logis
séparés (2).
A Envermeu, en 1277, un nommé Michel Taupin et
Emmeline, sa femme, confrères des religieux de l'abbaye
du Bec-Helouin, attestent avoir fait construire, dans le
fief du prieuré dépendant de ce monastère, un hospice
pour les infirmes et les voyageurs et avoir affecté à son
entretien une rente annuelle de 1 5 livres tournois amor-
tie (3).
L'hôpital de Gaillefontaine, fondé, ou tout au moins
doté, par Mahaut de Saint-Paul, fut uni, en 1 369, à l'abbaye
de Bival, à charge d'y exercer l'hospitalité envers les pau-
vres passants, ce qui donne lieu de croire que tel avait été
l'objet primitif de la fondation (4).
A Gournay, sur la paroisse de S. Hildevert, du côté de
la Picardie, un hôpital avait été fondé, en 1634, pour y re-
cevoir uniquement les passants et les voyageurs (5).
A la fin du xiii<' siècle, Laurent le Chambellan, cheva-
lier, dont on conserve la tombe en l'église du Mont-aux-
Malades, avait fondé un hôpital, sous l'invocation de la
Madeleine, au Port-Saint-Ouen « pour cause de herbegicr
y chascune nuit dis et huit poures. > Il en confia la garde
(i) Arch. delà S.-Infér., F. de l'Intendance.
(2) Dom Touss. Duplessis, Description de la Haute Norman-
die, II, 33g.
(3) Arch. de la S.-Infér., F. du prieuré d'Envermeu.
(4) Ibid.^ F. de l'Intendance. Duplessis, Description de la
Haute'Normandie, 1, 118.
(5) Ibid., I, 29.
83
aux religieux de Bonport, qui devaient y faire dire la messe
trois fois par semaine (i).
Enfin, le 5 janvier 1 398, nous voyons Raoul Daniel et
Emmeline, sa femme, donner à l'évèque de Lisieux et a
ses successeurs une masure près du chemin du Roi et du
presbytère, au Petit-Couronne (2), pour y c establir et
édifïier une maison-Dieu ou ospital, ouquel seroient receus
et herbegiez les poures pèlerins et autres poures passans
par le païs (3). » .
Tous ces hôpitaux n'étaient plus connus au xvin« siècle :
à vrai dire, ils n*é talent plus aussi nécessaires; les routes
étaient sûres, les auberges très communes, et les pèleri-
nages n'étaient plus guère en honneur.
(i) Arch. de la S.-Infér., F. de Tarchevéché, lettres patentes
données à Vincennes, 20 décembre 1327.
.Cet hâpital ayant été démoli, des indulgences furent accordées
par les vicaires généraux du cardinal d'Estouteville à ceux qui
contribueraient de leurs aumônes à sa reconstruction. « Cum
igitur, sicut accepimus, hospitale ssu domus Dei beatorum An-
thonii, Remigii, Graciani, Celerini et Béate Marie Magdalenes
Portus Sancti Audoeni, decanatus de Piris, Rothomagensis dio-
cesis, ubi Christi pauperes, ibidem ex diversis mundi partibus
affiuentes, recolligi et hospitari et in suis necessitatibus refici, et
opéra misericordie adimpleri non possunt, nisi Christi fidelium
eleemosinis mediantibus, existât quamplurime demolitum, inten-
ditque magister sive administrator illius reedifficari ac procurare
refici, etc, » enjoint aux curés de recevoir les envoyés de l'hô-
pital, de les laisser prêcher leurs indulgences qui étaient de
quarante jours, 16 mars J477.
(2) Cette paroisse faisait partie de l'exemption de Lisieux.
(3) Raoul Daniel promettait, par le même contrat, « des bi'?ns
que Dieu lui presteroit et des aumosnes que les bonnes gens
lui vouldroient pour ce donner, de parfaire au plus tost une
Maison-Dieu. » U en retenait « l'administration et gouvernement
sa vie durant tant seulement, et par ce renonçoit à la propriété
et treffons dudit héritage pour lui et pour ses hoirs sans jamais
y demander ou réclamer aucune chose ; et à ce consenti sa dicte
femme. » Tabellionage de Rouen.
84
Vase gallo-romain trouvé à Envermeu, — M. le
Président a été informé par M. Partiot qu'un vase ro-
main en terre avait été trouvé à Envermeu, dans les
fouilles exécutées pour rétablissement du chemin de
fer d'Eu à Dieppe. Ce vase sera offert à M. le Préfet
pour le musée départemental.
M. d'Estaintot estime que la découverte de ce vase
doit indiquer la présence d'un cimetière gallo-romain ;
qu'il y aurait utilité à signaler ce fait à M. le Conser-
vateur du Musée des antiquités, en l'invitant à appli-
quer à des fouilles, dont les résultats paraissent devoir
être féconds, une partie des crédits prévus pour cet
objet par le budget départemental.
Cette observation est appuyée par M. Bouctot et
plusieurs autres membres de la Commission.
Cachet en jade. — M. Brianchon fait passer sous
les yeux de la Commission un petit talisman ou cachet
en jade ou chiste vert, long de o,o35, large de 0,0 1 3,
épais de 0,007, présentant à l'une de ses extrémités un
oiseau, à l'autre un ornement en forme d'entrelacs, et
sur des tranches latérales des lignes d'inscriptions dans
le genre de celles des cachets d'oculistes, mais qui sont
trop effacées par le frottement pour que la lecture en
soit possible.
La séance est levée à quatre heures.
Le Secrétaire y
Vicomte R. d'EsxAiNTOT.
85
SEANCE DU 10 JUIN 1882
La séance ouvre à deux heures, sous la présidence
de M. de Beaurepaîre, vice-président.
Présents : MM. P. Baudry, Biiliard, Bouquet,
Brianchon, Gouellain, Le Breton, Maillet du BouUay,
Rœssier et le vicomte d^Estaintot, secrétaire.
Excusés •'MM. Pelay, Sauvageot et Simon.
Le procès-verbal de la séance du i«r mai est lu et
adopté.
La correspondance imprimée comprend :
Mémoires de la Société nationale des Antiquaires
de France, t. XIII, 188© ; — Mémoires de la Société
archéologique de Langres, t. III, 1882 ; — Mémoires
de la Société académique d'Agriculture des Sciences,
Belles-Lettres et Arts du département de V Aube y
t. XVIII, 3« série, 1881; --' Bulletin de la Société
des Antiquaires de l'Ouest, i^' trim., 1882 ; — Bul-
letin de la Société des Amis des Sciences naturelles
de Rouen, année 1881 ; — Bulletin archéologique
et historique de la Société de Tarn-et- Garonne,
t. IX, 1881, 4« trimestre.
M. le Secrétaire de la Société royale des Antiquaires
de Londres^ par lettre du 1 5 mai 1 88 1 , accuse récep-
tion de la 2« livraison du t. V du Bulletin.
Monuments historiques. — Demande d'allocation
pour le clocher de Gainneville, — Avis favorable de
la Commission, — M. le Président a reçu de M. le
Préfet de la Seine-Inférieure un dossier relatif à une
demande d'allocation présentée par la commune de
Gainneville^ et applicable à la restauration du clocher
86
de Tégiise dudit lieu, classé au nombre des monuments
historiques.
La Commission, après avoir pris connaissance des
pièces du dossier, croit devoir recommander cette de-
mande à M. le Préfet de la Seine-Inférieure et à la
Commission départementale comme digne du plus vif
intérêt.
Église Saint-Jean d'Abtot, — Urgenc^ de répara-
tions, — M. Brianchon signale l'abandon dans lequel se
trouve cette intéressante église, et Turgence de complé-
ter les réparations déjà faites.
La Commission le charge, avec M. Rœssler, de
demander à un vitrier et à un plombier le devis des
travaux à faire pour remédier à Tétat de choses signalé
par lui.
M. d^Estaintot profite de la présence de M. le
Conservateur du Musée pour insister sur le vœu ex-
primé par la Commission à la dernière séance, de ten-
ter quelques fouilles au point révélé par la découverte
de vases gallo-romains dans la traverse d'Envermeu.
Fouilles de Lillebonne. — M. Maillet du BouUay
signale les résultats obtenus par les fouilles exécutées
à Lillebonne.
Les objets trouvés dans les fouilles exécutées à Lille-
bonne, à Tendroit dit le Manoir-d'AlIaincourt, peuvent se
diviser en objets romains et en objets mérovingiens.
Dans les premiers se trouvent principalement des débris
de marbres de différentes couleurs et provenances. Presque
tous sont des morceaux de moulures de profils variés. Un
des plus importants représente la base d'un pilastre
sculpté.
Environ quatre-vingts de ces morceaux sont classés et
87
placés dans une des cheminées de la salle de la mosaïque
du musée, par les soins de M. Billiard, aide-conservateur.
Il reste en réserve une certaine quantité de fragments
provenant de dallages ou de revêtements, de crépis en
plâtre ou en ciment de différentes couleurs. Ces derniers
sont en mauvais état.
J'ajouterai à cette nomenclature :
Un petit vase en terre grise assez fine;
Une partie de vase en terre rouge, malheureusement
cassé, orné de personnages drapés d'un très beau style;
Un fragment de coupe en verre blanc, avec une partie
d'inscription gravée au pointillé.
Dans les objets mérovingiens se trouvent :
Une hache;
Deux sabres;
Un long couteau;
Un autre de forme triangulaire avec son manche;
Un fauchard;
Un harpon;
Quatre vases en terre noire;
Deux vases en terre jaune.
Il est regrettable que, dans les conditions où ces fouilles
ont été faites, le monument entier n'ait pas pu être con-
servé. Malheureusement le terrain avait été acquis par
spéculation pour ouvrir une nouvelle voie bordée de
constructions modernes. J'ai dû me contenter d'obtenir,
avec les débris dont je viens de &ire la description, le plan
très exact du monument tel qu*il existait avant sa destruc-
tion. Lorsque ce plan, promis depuis longtemps par
M. Denize, ingénieur, conducteur des travaux, me sera
parvenu, je m'empresserai de le mettre sous les yeux de
la Commission.
J'adresse ici mes remerciements bien sincères à notre
honorable collègue, M. Brianchon, et à M. Duval, rece-
veur municipal à Lillebonne, pour leur intelligent con-
cours et pour les peines et soins qu'ils ont bien voulu
88
prendre en recueillant chez eux et en surveillant l'expédi-
tion des objets destinés au Musée départemental.
Maison en bois sculpté de la rue de la Grosse-^
Horloge. — M. Maillet du Boullay rend compte des
démarches faites près de la municipalité pour sauver les
restes de l'ancienne maison en bois sculpté delà rue de
la Grosse -Horloge, déposés dans les combles du corps
de garde de Saint-Sever, et la solution obtenue, dans la
séance du Conseil municipal du 19 mai^ en vertu de
laquelle ces boiseries sont abandonnées au Musée dé-
partemental.
M. Maillet du Boullay en a été informé officielle-
ment par une lettre de M. le Maire, en date du 2 juin.
Voici les détails des fragments, qui sont de ce chef
entrés au musée:
Un panneau avec médaillon de personnages en quatre
morceaux ;
Dix-sept fragments de moulures;
Cinq fragments de colonnes avec personnages et chapi-
teaux de la plus grande beauté ;
Onze colonnes sculptées de riches dessins;
Deux colonnes gothiques ne faisant pas partie du même
monument.
Il espère avoir une solution aussi favorable en ré-
ponse à la demande quUl a adressée pour les parties
sculptées de la charpente si curieuse de la maison (rue
Malpalu, n® 92) du xvi« siècle.
La Commission remercie M. du Boullay de ces ren-
seignements et ces heureux résultats.
M. Pelay promet de communiquer prochainement
les dessins des découvertes de la rue Tabouret.
M. Rœssler recommande à la Commission la publi-
cation relative au Havre, en ce moment en cours
89
d'impression, et fait appel aux connaissances spéciales
des Membres de la G)mmission pour lui révéler tous
les documents qui seraient à leur connaissance.
M. Le Breton signale une épreuve rarissime d'un
plan du Havre, actuellement en la possession de
M. Poupel, conservateur-adjoint du Musée Carna-
valet.
Ermenouville, — Dalles tumulaires du xiu^ siècle.
— M. d'Estaintot fait part de la découverte, à Er-
menouville, d'une pierre tombale qui, déplacée et
renversée, a longtemps servi de dalle extérieure à l'en-
trée de réglise démolie, et sur laquelle, en la retour-
nant, on aurait découvert les traces d'une inscription
constatant que celui dont elle recouvrait les restes au-
rait accompagné le roi saint Louis à Tunis.
Il espère en avoir bientôt la légende exacte, et Ta
spécialement recommandée à M. le curé d'Ermenon-
ville.
Le château (Tlmbleville et ses anciens seigneurs.
— Le même Membre lit une notice sur le château
d'Imbleville et ses anciens seigneurs.
Bigot, dans son manuscrit sur les paroisses du bailliage
de Caux; Farin, dans son histoire de Rouen, nous ont
conservé le souvenir d'une inscription qui décorait jadis
la façade d'un château élevé à Imbleville, sur les rives de
la Saâne, par Xavier de Dampierre, seigneur de Biville-
la-Baignard et du Vivier.
Cette inscription, aujourd'hui perdue, était ainsi conçue :
L'an de grâce 1491^ noble homme messire Zanon de
Dampierre, chevalier, sieur de Biville la Baignard
et autres seigneuries, fit édifier cette maison et etoit
pour lors sa femme, noble dame Marie de Gouvys ; leurs
hoirs feront leur devoir de prier pour eux.
90
Au-dessous étaient sculptées leurs armes; celles des
Dampierre : d'argent à trois carreaux de sable ; celles des
Gouvis : yairé d'argent et d'azur.
Nous avons cherché à reproduire par la photographie,
dont nous faisons hommage à la Commission, la physio-
nomie ancienne du château, qui n'a été conservé que du
côté de la rivière, et que des additions modernes ont pas-
sablement altéré; il est cependant facile de la recons-
tituer.
La façade est baignée dans un vivier communiquant
avec la Saâne ; elle est flanquée, au centre, d'une tourelle
hexagonale; à chaque angle, d'une tourelle cylindrique.
Les ailes élevées au delà de la tourelle sont une addition
moderne. L'ancien château finissait à la tourelle et sa
façade ouest était mouvementée par trois tourelles, au-
jourd'hui démolies, semblables à celles qui décorent sa
face est.
Les bâtiments de dépendances étaient contenus dans
une cour affectant la forme d'un carré long, entourée de
murs et défendus par des fossés pleins d'eau, alimentés
par la rivière; ils communiquaient avec la vallée par un
pont-levis, aboutissant à une porte flanquée de tourelles,
qui était, dit-on, à l'angle nord du parallélogramme; une
chapelle, élevée à l'angle est, et qui est aujourd'hui trans-
formée en bibliothèque, faisait pendant au massif de la
porte d'entrée.
Nous avons fait quelques recherches sur le fief, dont ce
château constituait le chef-mois, et sur les familles qui l'ont
successivement possédé.
Il y avait à Imbleville deux fiefe, tous deux relevant de
la châtellenie de Bacqueville; cependant l'état des fiefs
de i5o3 n'en mentionne qu*un seul; il était alors possédé
par le sieur de Hermanville, de la maison de Masquerel.
Cette famille en jouissait encore en i586, car j'ai
retrouvé dans les minutes du notariat de Longueville, à
la date du 19 mai 1 586, un acte d'échange où figure noble
9'
et puissant seigneur Charles de Masquerel, seigneur d*ïm-
bleville, Urville, Thiédeville, le Mesnil-Mascarel et
' Bréauté, demeurant audit lieu de Bréautc, paroisse de la
Chapelle-su r-Torc y.
Elle figure, d'ailleurs, des 1493, sur les comptes des
receveurs du comté de Longueville pour 3o sous de gré-
verie, dus à cause de ce fief d'Imbleville.
Leur dernier descendant possesseur d'Imbleville dut
être Charles de Mascarel, qui, le 20 août 1601, vendit ses
fiefs d'Imbleville, Thiédeville et Eurville à Charles Bau-
dry, avocat au Parlement.
Si Ton étudie la généalogie des Masquerel, l'une des
plus anciennes familles du pays de Caux, on trouve pré-
cisément une alliance qui explique la transmission de ces
seigneuries, celle de Jean H, seigneur de Herman ville,
allié à dame Philippe de Lindebeuf, dame d'Imbleville et
de Thiédeville. Cette alliance remonte au commencement
du xv* siècle.
Leur fils, Guillaume, que la généalogie fait vivre
vers 1396, fut également seigneur de Hermanville et
d'Imbleville; il épousa Catherine de la Heude, dame de
Bailleul et de la baronnie du Coudrai, au comté d'Eu.
Leur fils, Jean III, épousa successivement Isabeau de
Boessay, dont il n'eut enfants, et Jacqueline de Longroy,
dame du lieu.
Et c'est de lui que sortait Antoine de Masquerel, sei-
gneur de Hermanville et de Bailleul, dont parle l'état des
fiefs de i5o3, et qui épousa Jeanne de Dreux, dame de
Morainville.
Philippe de Lindebeuf, la femme de Jean Masquerel, se
rattachait évidemment aux deux Lindebeuf dont les ins-
criptions tumulaires sont citées dans Farin (t. II, p. 396),
et qui, par une assez heureuse exception, sont demeurées
respectées dans le chœur d'Imbleville, sur les caveaux où
dorment, encore inviolés, les restes de ceux dont elles
indiquent les noms. Farin les rapporte ainsi :
92
CY GI8T Madame Philippes de Lindbbeuf
Q.UI FUT FEMME DE M. JeaN DE LiNDEBBUF
QUI TRESPASSA l'aN DE GRACE I SQO.
Dieu ait son ame
CI GiST M. Jean de Lindebeuf, chevalier
(^ui trespassa l*an de grace l304.
Dieu ayt son ame
Ce qui apparaît encore des deux légendes, à moitié
engagées sous les bancs du chœur, permet de rectifier
l'orthographe de Farin; mais les deux dalles, celle de la
femme surtout, offrent un spécimen, admirablement con-
servé, du costume de la fin du xiii^ siècle.
L'église d'Imbleville a conservé des traces visibles de la
domination des Masquerel. Sur Tune des ouvertures laté-
rales du massif clocher de grès élevé au bas de la nef, celle
du nord, se voient placés sur la même ligne, près Tun de
l'autre, les deux écussons des Masquerel et des Dampierre.
Celui des Masquerel : à la fasce de diapré^ accompagnée
de trois roses de gueules posées 2 et i ; celui des Dam-
pierre : d'azur à trois losanges de sable brisé d'un lambel
de... pour indiquer la branche cadette.
C'est en effet une branche cadette des Dampierre qui
possédait l'autre fief d'Imbleville, appelé le fief du Vivier^
à cause sans doute de sa situation près de la rivière et qui
provenait d'un démembrement par parage du plein fief
d'Imbleville.
Toutefois, la généalogie des Dampierre ne fournit pas
de renseignements précis sur l'époque et les conditions dans
lesquelles le fief du Vivier entra dans cette famille (i).
(i) Le fief du Vivier fit évidemment partie de la succession de
Jean de Lindebeuf. Il fiit compris, en i3o5, dans le partage de
la succession de Regnaut ou Reginald de Lindebeuf, et tomba,
avec la terre de Lindebeuf, dans le lot de Taînée de ses deux
filles, mariée à Jean de Beuseville.
Guillaume de Lindebeuf, leur descendant, vendit Lindebeuf
en 1372. (V. M. Hellot, les Martel de Basqueville, note 248.)
Les Lindebeuf portant de gueules à trois marteaux d*or.
93
Celle qui est déposée à la bibliothèque de Rouen, —
aa.
p. 2 5, feit descendre au 7^ degré Zanon de Dampierre, le
constructeur du château du Vivier, de Guy de Dampierre,
comte de Flandres. Elle lui donne comme père Guillaume,
sieur de Biville-la-Baignard, qu'elle qualifie lieutenant
général en Normandie, et dont elle n'indique pas lalliance,
frère puiné d'Hector de Dampierre, conseiller et maître
d'hôtel du roi, et fils de Jourdain de Dampierre, panetier
de France, capitaine de Moullineaux et mari de Jeanne de
Villiers.
Ce Jourdain, petit-fils de Robert de Dampierre ou de
Flandres, aurait été apanage près d'Arqués et aurait
épousé Marie de Luxembourg, de la branche de Ligny.
Cette descendance des comtes de Flandres me paraît
assez problématique.
Un arrêt de l'échiquier de Saint-Michel, 1448» relatif au
partage de la succession du père de Guillaume de Dam-
pierre et de Jeanne de Dampierre, sa tante, entre ledit
Guillaume et Thomas Mulso, escuier, donataire de la
confiscation d'Hector de Dampierre, frère aîné de Guil-
laume, confirme cependant les certains de la généalogie.
On y voit que Guillaume de Dampierre avait été avan-
tagé, par son père, de la tierce partie des héritages qu'il
avait et possédait au temps de son trespas, et ce par acte
du i3 septembre 141 5; que, par suite, il avait droit aux
acquisitions faites depuis le décès de leur père par les
tuteurs des deux mineurs, et que, suivant partage du
24 octobre 1448, reçu par les tabellions de la vicomte de
Rouen, Thomas Mulso eut, pour la part d'Hector de
Dampierre, les fiefs de Dampierre, de Freulleville, de
MouUineaulx sur Longueville, et d'autres fiefs à Sauque-
ville , Fontaines - le - Dun , au Fresnoy et à Fulletot ;
Guillaume de Dampierre eut ceux de Biville la Baignard,
le Mesnil-Betas et Saint- Léonard du Fresne, et trois por-
tions de fiefs à Tôtes, à Crosville et à Sévis,
94
Seulement ce partage ne fait point mention du fief du
Vivier.
On voit toutefois, par Testimation du comté de Longue-
ville, en 1485, que, dès cette époque, le seigneur de Biville-
la-Baignard était seigneur du Vivier, et qu'il paya 20 sous
de grcverie au receveur du comté.
La généalogie des Dampierre donne pour fils à 2^non
et Marie de Gouvis, Philippe de Dampierre, allié à Gillette
Paisnel, fille du seigneur d'Angerville le Martel et de Jac-
queline Martel, dont la sœur, Marguerite Paisnel, porta la
seigneurie d'Angerville à Guillaume Le Roux, son mari,
seigneur d'Ouville-la-Rivière.
Pour petit-fils, Anthoine de Dampierre, seigneur de
Biville, allié à Masquarel, dans la descendance desquels cette
branche prit fin : leurs deux fils, Thomas et Christophe,
« venus eunuques au monde, 1 n'eurent pas de descendants.
Une de leurs sœurs, Charlotte de Dampierre, épousa
messire Jacques de Godeffroy, sieur d'Aunou et Clerville,
chevalier de Tordre du Roi, et son fils figura au contrat
de vente de la terre et du château du Vivier, consenti les
5 et 6 décembre iSgj, par Christophe de Dampierre, au
profit de Nicolas Baudry, avocat au parlement de Rouen,
qui, quelques années plus tard, se trouvait, par l'acquisi-
tion faite des Masquerel, possesseur de la totalité de la
terre d'Imbleville.
Ses descendants la possèdent encore aujourd'hui.
On trouve successivement :
Charles Baudry, conseiller au parlement en 1607, ^^^*^
à Madeleine Dambray;
Nicolas Baudry, mari de Charlotte Joas ;
Charles Baudry, mort en 1721, qui de Marie Deshom-
mets eut Nicolas-Charles Baudry, né en 1686, marié le
29 juin 17 14 à Marie Couture de Chamacourt, mort
m
en 1744 sans enfants, et Marie-Anne Baudry, mariée, le
22 novembre 1722, h François-Alphonse de Civille, sei-
gneur de Rames.
95
De cette union sortit entr*autres une fille, Marie-Angé-
lique de Civîlle, née le i3 novembre 1727, épouse de
Pierre-Eustache le Vigner, baron, haut justicier de Dam-
pierre.
Une de ses filles, Geneviève-Charlotte, épousa Alexandre
Marie- François Le Hayer, baron de Bimorel, conseiller
au Parlement, mort en 1 83 1 . Leur fils, Pierre-François Le
Hayer, baron de Bimorel, eut, de son mariage avec
M»e Antoinette-Sophie de Perier, une fille unique, Corinne-
Félicie Le Hayer de Bimorel, mariée, le 3 février 1841, à
M. de Folleville, aujourd'hui propriétaire du château
d'Imbleville.
Saint" Victor^r Abbaye. — Les imagiaires Lour-
det et Ma\eline, — Inscriptions du xvie siècle, —
M. de Beaurepaire signale une inscription à Textérieur
de Péglise de Saint -Victor -P Abbaye : elle est du
commencement du xvi» siècle et entoure un écusson :
Manet virtus post fanera. W donne lecture d'une
notice sur les sculpteurs Lourdet et Mazeline, et d*un
document constatant que les femmes étaient séparées
d'avec les hommes dans les églises au moyen-âge.
NOTES SUR LKS SCULPTEURS MICHEL LOURDET ET MAZELINE
Parmi les sculpteurs qui se firent un nom à Rouen, au
xvue siècle, il faut citer Michel Lourdet (i).
Cet artiste a déjà été mentionné, dans les travaux de
notre Commission, par notre collègue M. Stéphano de
Merval.
Michel Lourdet est signalé, comme sculpteur, dans les
Comptes de la cathédrale de Rouen, de 1603-1604. Le
chapitre le charge, en 1612, du travail des châsses de
(1) Un Michel Lourdet avait été lauréat pour le rondeau, au
Puy de Dieppe, en iSyS. Antiquités de Dieppe, d*Asselinne, pu-
bliées par M. Mich. Hardy, p. i8g.
96
l'église métropolitaine, notamment du reliquaire de Saint-
Sever. En 1629, il traite avec lui pour la peinture et pour
la dorure du plafond de la châsse de Notre-Dame.
En iSpg, Lourdet fait, pour 36o 1., une contretable
avec figures en bosse ronde qui lui est commandée par la
fabrique de Notre-Dame-de-la- Ronde.
En 1609, il exécute, pour l'église Saint-Maclou de Rouen,
un tabernacle et ciboire, enrichi de tableaux de peinture
plate en bosse, pour la décoration du grand autel du chœur.
Ce travail, spécifié dans un marché du 9 septembre 1609,
fut payé 5oo 1. à l'aide des deniers de la confrérie du Saint-
Sacrement.
En 161 1, la confrérie de Saint- Louis et Saint-Marcouf,
établie pour les merciers grossiers en Téglise de Saint-Jean
de Rouen, lui paya 54 1., c pour avoir taillé en bois de chêne
l'image de mons. S. Marcouf, avec le petit priant, ensemble
tant pour la dorure et Tentrepié que pour le poser au
chœur de lad. église. •
Le 14 juin 1620, Lourdet s'oblige envers le curé et
les trésoriers de Saint-Cande-le- Jeune, • à dresser et faire
mettre en leur église un grand corps de tableau en bois de
chêne, large de sept pieds sur la première base, et de neuf
pieds environ sur quinze à seize de hauteur, et de &ire
construire ledit ouvrage des figures et estofFes savoir :
Parchitecture et menuiserie conformes au modèle en papier
présenté par led. Lourdet. Au bas dudit ouvrage y devoit
avoir une forme de tabernacle, l'armoire non saillante sur
l'autel, avec les tailles, enrichissements et figures des anges
aux deux costés, trois testes de chérubins, les figures de
S. Cande et de S. Victor, deux anges aux deux costés des
colonnes, ces anges portant le nom de Jésus et la figure de
la Résurrection de N.-S., laquelle seroit posée au taber-
nacle en haut et feroit le couronnement de l'œuvre. »
Lourdet devait « faire peindre et vernir, en couleur de
bois brun, toute l'architecture de l'œuvre, dorer et enrichir
d'or par filets toutes les moulures, dorer tout à plain d'or
97
les chapiteaux de hautes et basses colonnes, les vases, tailles,
têtes de chérubins et figures, pour estre en représentation
de bronze doré, le tout le plus subtilement et curieu-
sement qu*ii pourroit adviser. • Il était aussi tenu de faire
et apprêter les panneaux et table de bois pour mettre les
tableaux en plate peinture, que devaient faire faire les tré-
soriers, aux dépens du trésor, tels que : la figure de N.-S.,
de la Vierge et celle de la Passion, et de placer cet ouvrage,
à ses frais, au grand autel de Saint-Cande, le tout prêt
pour Pâques 1621, moyennant 400 livres.
Le dernier septembre i63i, on le voit encore donner
quittance à Claude Fournier, écuyer, fils et héritier de
Claude Fournier, docteur es -droits, d*une somme de
3oo l. pour Touvrage qu'il avait exécuté conformément
aux termes d'un marché conclu le 28 janvier précédent,
et qui servit à la décoration de la chapelle des Fournier,
dans réglise des Carmes de Rouen (i).
La réputation de cet artiste s'était répandue assez loin.
On en trouve la preuve dans un autre contrat passé, le
12 février 1616, entre lui et les Cordeliers de Valognes,
pour la construction d'un grand corps en contretable d'au-
tel moyennant un prix de i,5oo l. (2).
Lourdet se qualifiait maître-peintre et sculpteur à Rouen.
Il était domicilié sur la paroisse Saint-Martin-du-Pont.
' Son fils Pierre, comme lui peintre et sculpteur, fit, en
réglise de l'abbaye du Mont-Saint-Michel, en 1645, le
grand crucifix, au-dessus de l'autel Saint-Michel, et les fi-
gures de S. Benoît, de St« Scholastique, avec deux anges
de bois doré. Il est à croire qu'il ne fit pas plus fortune
que son père, que nous voyons mourir dans la misère, à
l'âge de quatre-vingt-dix ans, et qui fut enterré par charité
dans le cimetière de Saint-Godard, le 4 mars 1676 (3).
(i) Tabellion, de Rouen.
(2) Tabellion, de Rouen.
(3) Actes de l'État civil.
98
Michel Lourdet s'était appliqué tout spécialement à la
confection de riches contretables suivant la mode du
temps.
Il n'est pas, sans doute, à désirer que cette mode re-
vienne, mais il n'est pas sans intérêt de conserver les con-
tretables qui nous restent, quand elles sont d'un bon goût,
et qu'elles ne masquent pas d'élégantes fenêtres.
Afin d'aider les archéologues à dater, avec quelque
sûreté, ce genre de construction, qui n*est point étranger
à Tobjet de l'archéologie, j'ai copié deux devis de contre -
tables, l'un de Lourdet, l'autre de Robert Mazeline (i). Je
pourrais en rapporter beaucoup d'autres, si je ne craignais
d'occuper trop longtemps votre bienveillante attention.
DEVIS DE LA CONTRETABLB DE SAINT-HERBLAND
l6l I
c Déclaration de chozes quy convient faire pour Téglise
et parroisse de Saint- Erblanc de Rouen, et que a entrepris
et s'est obligé vers Messieurs les curé, thésauriez et parois-
siens de la dicte églize Michel Lourdet, maître peintre et
sculpteur en ceste mesme ville, de leur faire, et ce pour la
feste de Pasques prochain, les chozes contenues en ce pré-
sent escript.
c En premier lieu y convient faire un tabernacle de
bon bois de chesne, et ce de la mesme structure et pro-
portion en son architecture, sculptures, tailles et enri-
chissements, ainsy qu'il estdémonstré au pourtraict dressé
et trassé par ledict Lourdet, la mesure et grandeur duquel
puist estre aizément recongnue par une ligne ou eschelle
marquée au bas d'icelluy desseing, où sont marquez les
piedz, demi-piedz et poulces, quy faict que l'on recon-
gnoist par icelle que ledit tabernacle aura, estant tout
(i) Je ne sais ce qu'il était à Pierre Ma2:line, né à Rouen en
i633, mort en 1708, dont quelques œuvres ornent encore la
galerie de Versailles.
99
monte, en sa plus grande haulteur six piedz et demy ou
environ, et de largeur et profondeur, suivant la propor-
tion et structure du plan dudit modelle, marqué au-dessoubz
d*icelluy desseing, par lequel Ton peult recongnoistre quy
convient y avoir des figures en bosse jusques au nombre de
neuf ou dix, savoir : la figure de Nosire-Seigneur sur
rhuisset du mitan, et sur chacun des huissetz des costez
une, à savoir telles que Ton me dira ; et dedans les petits
pavillons ou lanternes des costez sera, en Tun, la figure
de Melchîsédec, et, en Tautre, celle de S. Paul et, au
bas et segond estage de l'œuvre, seront les quatre évangé-
listes, et, en la lanterne de tout hault^ sera la figure de
Nostre-Seigneur ressuscité ou en son Assention, touttes les
autres menues œuvrages, comme anges, testes de chérubin
et aultres enrichissements, se peuvent assez recongnoistre
par icelluy pourtaict et dessein, estant icelle pièce, d'œuvre
peinte, dorée et estoffée de la mesme sorte que le taber-
nacle des Cordeliers ou Carmellistes de Rouen, ou mieulx
et plus riche, sy le fait faire ledict Lourdet, lequel nous a
promis et promet rendre icelle œuvre preste comme des-
sus, acomplye de touttes chozesgénérallement quelconques,
tant de menuiserye, sculpture, dorure, peinture, ferrure et
doublure, estant entendu que Testoffe de ladicte doublure
soit veloux, soit satin, sera par les ditz paroissiens fourni
et baillé audit Lourdet, lequel a encor, oultre ce que
dessus, promis par mesme moyen et s'y est obligé de des-
seoir, rehausser et raccommoder, et ce de piastre, l'histoire
du Jardin d'Ollivet, qui est de présent en la place où se
mettra ledit tabernacle, accommodant le mieulx quy pourra
l'architecture de l'ornement du tableau d'icelluy autel,
lequel ornement de piastre, après avoir été raccommodé
en ses ruptures, sera reblanchy ou peint de coulleur de
bois brun à huille et doré par filietz aux endroitz que
ledit Lourdet jugera y convenir; et ont lesditz thcsauriez
d'icelle cglize promis par semblable, pour le sallaire de
touttes ses chozes, payer audit Lourdet la somme de trois
4 . ••
too
centz livres et deux escus, pour le vin de ses aydes et corn-
paignons, lesquels leur seront donnez à la fin et livraison
et accomplissement dudict œuvre, de laquelle somme de
trois cents livres en a esté paie, et ce par advance, pour luy
aider aux fraitz d*icelle œuvrage la somme de cent livres
tournois, et le reste, montant à la somme de deux cents
livres t., â la fin, livraizon ou huit jours après l'accomplis-
sement dudict œuvrage ; lequel œuvrage sera faict sous
bonne et deue Visitation. Faict et arresté à Tissue de la
grande messe paroichial d'icelle parroisse, présence des
sieurs curé et trésoriers anciens et modernes dudict lieu, le
dimenche quatriesme jour de décembre mil vi^ onze.
c Signé : Michel Lourdet (i). *
DEVIS DE LA CONTRETADLE DE SAINT-MICHEL
1617
C J'ay soubsignc Robert Mazeline, sculpteur à Rouen,
confesse avoir faict marche, avec Monsieur le curé et Mes-
sieurs les trésoriers de la paroisse de Saint-Michel, de faire
un tabernacle en ladicte paroisse, proporcionné à la place,
sçavoir deux gradins dont la frise doit estre enrichie de
sculpture et un petit cors de tabernaque qui doit estre de
mesme auteur, pour mettre le Saint-Siboire, enrichi d'or-
nemens selon le modèle, et au dessous des dits gradins
sera faict deux anges qui doive tenir une façon d'urne
enrichie de feulle tout autour et profonde pour servir de
custode à esposer le Saint-Sacrement, à laquelle doit estre
une porte qui doit se démonter, quant on voudra, qui sera
ornée d'une figure de bas-relief; et, pour terminer la fin,
sera faict une fleur façon d^mpérialle, et derrière le tout
sera faict un fons façon de broderie pour cacher se qui se
trouvera de vide derrière, le tout bien travaillé, tant de
menuiserie que de sculpture, de bon bois de chesne bien
(i) Arch. de la S. Inf., F. de la fabrique de Saint-Herbland de
Rouen.
lOl
sec. Au regarde ladoreure, elle doit estre dorce par le
mesme ouvrier qui a doré la niche des Jacobins et de
mesme ort, le tout selon le modelle présenté auxd. Mes-
sieurs et acquesepté et que a acordé aud. entrepreneur
pour le prix et somme de quatre cens livres et un louis
d'ort pour le vin du marché. Faict ce premier novembre
mil vic soixante dix sept.
c Signé : Robert Mazelinb.
c Pour les augmentations feictes audit tabernacle a esté
accordé la somme de 22 livres, le 26 oct. 1678.
c Signature et quittance de Robert Mazeline pour une
somme de 533 livres, 28 nov. 1678.
« Signé : Robert Mazelinb. 1
DOCUMENT RELATIF A LA PAROISSE SAINT-GERVAIS DE ROUEN
On sait que dans bien des paroisses de la campagne, du
moins en Basse-Normandie et en Bretagne, les hommes
occupent, dans les églises, des places distinctes de celles
qui sont réservées aux femmes.
Il en était ainsi à Rouen autrefois. On en trouve la
preuve dans une sentence de Tofficialité, déposée aux
archives départementales, F. de Tofficialité de Fécamp, et
relative à des travaux de réparation et de reconstruction
en l'église de Saint-Gervais.
« Propositum fuerat contra ipsos parrochianos quod in
qualibet parrochiali ecclesia^ maxime civitatis et diocesis
Rothomagensis^ Christi fidèles audiendo servicium fieri et
celebrari, clerici in principali et digniore^ videlicet in can^
cello^ laici et bigami in mediocriy et mulieres in in/eriori,
videlicet in navi partibus sedere et se habere debebant et
consueveranty quodque in loco predicto S. Gervasii erat
solum pars superior, per modum cancelli^ que non suffis
ciebat aut sufficere poterat pro divino servicio fiendo. » On
reconnut qu'il était nécessaire de construire une nef en
I02
remplacement de celle qui avait existé autrefois et qui
vraisemblablement avait été détruite dans le temps du
siège de Rouen. La charte en question est de Tannée 1428.
M. Le Breton appelle Tattention de la Commission
sur une tombe circulaire d'enfant à Ambourville, près
Duclair ; il insiste sur la rareté de ce monument, quMl
se propose de décrire dans une des prochaines séances.
La séance est levée à quatre heures.
Le Secrétaire,
Vicomte R. d'EsTAiNTOx.
io3
SEANCE DU 26 JUILLET 1882
La séance ouvre à deux heures et demie, sous la
présidence de M. Hendlé, préfet de la Seine-Infé-
rieure.
Sont présents : MM. de Beaurepaire, vice-président;
Adeline, P. Baudry, Biliiard, Félix, Gouellain, Le
Breton, Lefort, Maillet du BouUay, de Merval, Pelay,
Tabbé Robert, l'abbé Tougard et de Vesly.
M. le Préfet exprime la satisfaction qu^il éprouve
d'avoir pu donner une preuve de ses sympathies pour
la Commission, en comblant les vides qui se sont faits
dans son sein, par la nomination de MM. le Conseiller
Félix et Adeline ; il est convaincu que leur présence
sera favorablement accueillie par leurs nouveaux col-
lègues, et il est heureux de venir les installer lui-
même dans leurs nouvelles fonctions.
Il se félicite, en même temps, de pouvoir faire, avec
les Membres de la Commission, connaissance com-
plète, en présidant la première séance réunie depuis
qu'il a l'honneur d'être appelé à l'administration du
département. M. le Préfet ajoute, en terminant:
« Toutes les fois que M. le Vice-Président appellera
mon attention sur un point intéressant^ mon concours
est acquis aux désirs de la Commission. »
M. le Préfet regrette que ses occupations ne lui per-
mettent pas d'assister au reste de la séance, et laisse à
M. le Vice-Président le soin de diriger la suite de la
discussion.
Le dépouillement de la correspondance imprimée
comprend :
Mémoires de la Société académique de Boulogne^
I04
sur 'Mer f t. X, XI, et XII; — Mémoires de la Société
savoisienne, t. XX ; — Bulletin de la Société des An-
tiquaires de Normandie, t. IX et X ; — Bulletin
historique de la Société des Antiquaires de la Mori^
nie y i2i« livraison; — Bulletin de la Société archéo-
logique et historique deVOrléanaiSy n^ 1 12, i«f trim.,
1882; — La Manufacture de Sèvres, d'après un
mémoire inédit du xvui® siècle, par G. Le Breton ; —
Notice sur la Société des Antiquaires de la Mori^
nie, par M. E. Dramard ; — Board of régents^ of
the Smithsonian institution /or theyeaer, 1880.
Arrêté de nomination de MM, Félix et Adeline,
— La correspondance manuscrite comprend Parrété de
nomination de MM. Félix et Adeline, pris par M. le
Préfet de la Seine-Inférieure, à la date du 12 juin
dernier, lequel est ainsi conçu :
Le Préfet de la Seine-Inférieure,
Vu les arrêtés préfectoraux des 21 février, i8 mars et
21 novembre 1881,
Sur la proposition de M. le Secrétaire général,
Arrête :
Art. ler. — M. Félix, conseiller à la Cour d'appel de
Rouen, et M. Jules Adeline sont nommés Membres de la
Commission départementale des antiquités de la Seine-
Inférieure.
Art. 2. — Expédition du présent arrêté sera transmis
aux intéressés pour leur servir de titre.
Saint'Martin^le-Gaillard, — Demande de clas-
sèment. — M. de Beaurepaire présente à l'examen de
la Commission une demande du Conseil municipal
de la commune de Saint-Martin-le-Gaillard» tendant
au classement, comme monument historique, de Té-
glise de cette commune.
io5
On lit dans la délibération le passage suivant :
Considérant qu'à part la beauté de son architecture et
de ses dimensions, qui en font un édifice remarquable et à
conserver, l'église de Saint-Martin, bâtie dans le style et
sur les plans des églises ogivales primitives, mais modifié au
xvi^ siècle, rappelle qu'à l'époque de l'invasion anglaise, sous
Charles VI et Charles VII, où la patrie n'éprouvait partout
ailleurs que défaites et humiliations, une poignée de Français
força les Anglais à lever le siège du château de Saint-Mar-
tin, et en brûla un certain nombre, réfugiés dans le chœur
de la grande église y reconstruit ensuite tel qu'il est avec
une partie du produit de la conquête des Canaries, que
consacra à ce travail le conquérant et roi de ces îles, Jean
de Bethencourt, seigneur de Saint-Martin-Ie-Gaillard ;
Que, sur quelques chapiteaux des colonnes de la nef sont
sculptées des scènes ou allusions à la conquête des Cana-
ries, ce grand fait du commencement de notre histoire
maritime, qui confirme en faveur des Français cet autre
grand fait d'armes.
Le Conseil demande, en outre, que le département
prenne à sa charge la réfection du grand ponail.
A l'unanimité, la Commission, sans avoir à se pro-
noncer sur Futilité du classement qui résulte de déci-
sions antérieures, estime qu'il y a lieu, préalablement
à toute décision, de demander un devis détaillé des
travaux à exécuter.
Acte de cette délibération sera transmis à l'autorité
préfectorale.
Rouen, Maison en bois sculpté; — Musée des an-
tiquités, — M. du Boullay fait part à la Commission
que M. le Maire de Rouen, par une lettre en date du
22 juillet 1882, Ta informé d'une délibération prise
par le Conseil municipal, à la date du 4 juillet précé-
dent, et autorisant la remise, au Musée départemental
io6
des antiquités, de la façade des maisons rue Malpalu,
no* 90 et 92.
Notre collègue fait passer sous les yeux de la Com-
mission une photographie qu^il a fait exécuter de ces
maisons dans Tétat actuel.
Fouilles (TAlincourt. Vase en terre de Samos, —
M. Billiard fait passer sous les yeux de la Commission
la restitution, opérée par ses soins, d'un très beau vase
fragmenté, en terre dite de Samos, provenant du ma-
noir d'Alincourt à Lillebonne.
M. Le Breton fait observer que cette appellation :
terre de Samos, est inexacte, et s^applique, dans Tes-
pèce, à unvased^une fabrication inférieure à celle des
vases méritant exactement cette dénomination, et dont
le centre de fabrication, au n* ou iii« siècle, paraît
avoir été Lezou, dans le Puy-de-Dôme,
M. d'Estaintot observe que le vase restitué par
M. Billiard présente la plus grande analogie avec le
vase des Dominicains du Havre, acheté Tannée der-
nière par le Musée.
Notice sur Pierre des Aubeaux. — M. de Vesly lit
une notice intéressante sur Pierre des Aubeaux, sculp-
teur rouennais, tirée des archives de l'église de Gisors.
Elle est ainsi conçue :
PIERRE DES AUBEAUX
La chapelle de TAssomption , même après l'agrandis-
sement de la fin du xv^ siècle, ne comprenait que trois
travées et s*arrétait par un mur droit en face du sanctuaire
de Péglise. Mais quand les travaux eurent renversé le mur
des sous-ailes du chœur, fait les absidioles, puis le reves-
tiaire, la confrérie résolut de reculer le sanctuaire de sa
lOJ
chapelle dans la rue jusqu'au niveau des nouvelles con-
structions, et de rendre sa chapelle digne des c grants et
somptueux ouvrages i qu'ordonnait la fabrique. Elle en-
voya Tun des pairs à Rouen pour traiter avec Pierre des
Aubeaux.
i5io-i5ii. — f Paie à Jehan Huet la despence faicte
pour messieurs les gouverneurs avecq raaistre Pierre des
.Aubeaux, tailleur de pierre, la somme de douze livres
parisis comme apert par l'ordonnance de mesdits sieurs
cy rendue, cy xu l. »
On met les maçons de l'église à l'œuvre :
i5!2-i3. — € Paie à maistre Robert Jumel, Jacques
Jumel, Colin Cocart, Jehan Chinard, Robin Revel et Jeh.
Ooulle, tous massons, la somme de soisante-onze livres
ung sol huit deniers parisis, pour par lesdits massons avoir
besongné pour la confrarie les mois de mars, avril, raay,
juin et juillet au précèdent du moyes d'aoust vcc et traize,
comme apert par lesdits mois et jours escripts en une
feuille de papier, signée desusdits, cy rendues, pour
ce cy Lxxi 1. i s. viii d. »
Les charpentiers couvrent la nouvelle église :
c Paie à Jehan Boutery, charpentier, la somme de
XXII 1. t. pour par ly avoir esté faict ung pavillon à deux
montans, et quérir toutes choses, lequel pavillon a esté
mis et assis sur la chappelle de la dite confrarie comme
plus à plain peult a paroi r par le marché, t
On commence les paiements à Pierre des Aubeaux :
c Paie à maistre Pierre des Aubeaux, tailleur d'yniages,
demeurant à Rouen, suivant entantemans du marché fsdct
avec luy par messieurs les gouverneurs, la somme de sept
vings dix huit livres dix sept sols deux deniers parisis,
comme il apert par les quittances dudit des Aubeaux cy
rendues et la dite somme de vu» xviii 1. xvii s. ii d.
parisis, paies audit des Aubeaux au précèdent de la my
aoust vcc et traize, pour ce cy. . vu» xvin 1. xvn s. ii d.
t Payé à Artus Gaucourd xii s. x d. parisis, pour le com-
io8
mandement de messieurs les gouverneurs pour par ledit
Gaucoufd avoir esté, le jour Sa int-Jehan- Baptiste vcc et
traize, à Rouen porter des lettres et xx I. audit des
Aubeaux, pour ce cy xii s. x d. >
Aux amortissements nous trouvons une note curieuse :
c Jehan Barat a donc, pour les amortisses de luy et de
Jehane sa femme, la somme de lxxvi s. parisis et x aulnes
de serviettes, lesquelles ont estes baillés à la femme Pierre
des Aubeaux pour son service, pour cecy lxxvi s. argent
et lesdites serviettes. »
En note il y a : « Led. procureur retire lesd. serviettes
et en rendra compte. »
Colette Le Brun d' Heudicourt ayant donné xxviii s. en
argent^ une nappe de toile de deux aulnes et demi^ etc. ;
pour son amortissement^ une note nous dit : * Lad. nappe
baillée au tailleur d'ymages, t le reste est aux mains du
procureur.
Les ouvriers de Pierre des Aubeaux viennent travailler
de leur métier et établir les fameuses images du Trépas-
sement :
• Paie à Pierre Monnier dit Fleurent, serviteur dudit
des Aubeaux, la somme de vingt livres parisis, pour par
ledit Monnier, Jehan de Rouen et Mathurin de Lourme
avoir besongné par cinquante jours aux anges du... et
mis sobz les figures assises en la chapelle de ladite con-
frarie, comme apert par la quittance dudit cy rendue pour
ce cy XX 1.
f Paie par le commandement de mons. le lieut., mons.
le recev. et mons. Tesleu, Gassot, Dupré, Jehan Labbé et
aultres frères, xvn s. parisis aux varlets dudit des Aubeaux,
pour leur vin de ce qu'il ont commencé à asseoir les
ymages, pour ce cy xvn s.
c Paie audit Monnier nii s. parisis, pour les couleurs
mises autour des figures, pour ce cy un s.
c Paie à Mathieu le Cousturier, charon, seize s. parisis,
pour par ledit avoir fait ung camion tout neuf pour porter
109
les pierres et ymages, comme apert par la quittance dudit,
cy réduit par ce cy xvi s. »
Jehan Thibault^ procureur, mourut sans avoir c baille
à maytre Pierre des Aubeaux » la somme entière de xx 1.
qu'il devait lui donner, il devait encore nii 1.
Enfin, aux deniers comptés et non reçus nous trouvons
la mention suivante :
« De Pierre des Aubeaux, maistre tailleur d'ymages, de-
meurant à Rouen, duquel est iaict recepte au chapitre des
amortisses à moytiers conte de la somme de sept livres
dix *sols parisis pour les amortisses de luy, Robine, sa
femme, et Loys Hébert, son varlet et serviteur, n'a este
aucune chose receu, pour ce qui par le marché que ledit
des Aubeaux à avec messieurs les gouverneurs, il doit
estre amorti, sa femme et sondit serviteur en ladite con-
frarie, pour ce cy vu 1. x s. »
Là s'arrêtent les extraits de nos archives sur Pierre des
Aubeaux.
Mais Pierre Monnier, dit Fleurent, semble s'être fixé à
Gisors, car, aux comptes de 1 5 20, il travaille à l'église que
construit Robert Grappin :
t Du 5e jour de may v^c xxi a esté paie à maistre Pierre
Fleurent, pour avoir fait quatre anges sur le portail de
devant la ruelle Nicoll Thomas, dont en a esté paie la
somme de lx s. t. >
Son atelier était adossé à l'église :
1529. — € Le 7e jour de janvier fut compté par mess,
le trésorier à Pierre Fleurent, ymaginier, pour opération
de son mestier, lequel il avoit opéré à l'église, et pour
icelle opération fut appoincté que ce seroit pour les arrest
qu'il pouvoit devoyr à cause de ses ouvrouères assis
contre l'église eschus au terme saint Remy v« xxvni, les-
quels arrest se montoient à xxv s. t. »
Aux comptes de 1 537, il est mort, caria t v* Pierre Mon-
nier, dit Fleurent, ymaginier », paie le loyer de son « ou-
vrouère •.
I lO
Note sur la commanderie de Villedieu-la^Mon-
tagne. — M. de Merval communique une étude sur la
commanderie de Villedieu-Ia-Montagne.
Aux confins de la Normandie et de la Picardie, sur le
territoire de la commune d'Haucourt, dans le hameau de
Villedieu-la-Montagne, qui était autrefois une petite pa-
roisse de Tarchidiaconéd'Eu, et du doyenné de Neufchâtel,
on voit auprès d'une église du xii^ ou du xiii^ siècle, qui a
été classée il y a plusieurs années, comme monument his-
torique, quelques bâtiments en brique et pierre dont un de
forme hexagone qui a conservé dans le pays le nom de salle
des chevaliers ; c'est tout ce qui reste de l'importante com-
manderie de Villedieu-en-M on tagne, appelée hôpital dans
le pouillé d'Eudes Rigaud, dont l'église paroissiale était
une dépendance c hospitalarii habent in manu sua. *
Cette commanderie de Tordre de Saint-Jean de Jérusa-
lem, l'une des deux, en Normandie, qui furent fondées en
sa faveur et n'appartinrent pas aux Templiers avant de lui
revenir, avait des propriétés considérables, non seulement
dans la province, mais encore en Picardie, et était la seule
du grand prieuré de France qui relevât d'un seigneur par-
ticulier, son fondateur s'étant réservé ce privilège pour
lui et ses descendants.
Elle devait sa fondation à Hugues de Haucourt, cheva-
lier, qui conjointement avec Gaudefroid des Pois, avait
déclaré en présence de Rotrou, archevêque de Rouen, par
conséquent entre 1 164 et 11 84, et de Tabbé de Beaubec,
faire donation, fratribus hospitalis ville Dei supers Gors
montent et infrà villam (i), d'une maison pour les loger
avec un jardin et la terre d'une charrue, puis de deux
cents mesures de terre pour leurs hommes, à la condition
que chacun d'eux devra payer aux dits seigneurs Hugues
(i)Un traducteur de cette charte traduit Gorsniontem par
Gaillemont, c'est probablement Gaillofoniaine.
1 1 1
et Gaudefroid, un cens de douze deniers et de deux cha-
pons par an.
Cette charte conservée aux Archives nationales, série
5i5o, suppl. no 2, est suivie d'une charte communale oc-
troyée par Guillaume de Haucourt, seigneur de Haucourt,
fils d'Hugues, approuvée par les frères de Thôpital, dans
laquelle on voit que les hommes de Villedieu auront le
droit quand ils construiront une maison de la vendre ou
de la donner, de marier à leur gré leurs fils et leurs filles,
et en cas de vente de leur terre devront un dîner au sei-
gneur qui aura le droit de retenir la terre en donnant la
treizième partie de sa valeur.
Que chaque habitant aurait Tusage du bois d' Haucourt
et de Genetel (hameau situé à 1/4 de lieue sud d'Hau-
court) pour raccommoder ses charrues.
Que défense leur était faite de quitter leurs terres pour
en prendre d'autres en dehors de la seigneurie.
Et que si le seigneur leur donnait des terres à Pierre-
mont (autre hameau d'Haucourt), ils auraient le droit de
les cultiver aux mêmes conditions que celles de Villedieu;
enfin, que si le seigneur d^Haucourt avait à se plaindre
d'un homme de Villedieu, il devait l'assigner devant la
cour de l'hôpital, les hospitaliers par privilège royal jouis-
sant dans toutes leurs possessions de la haute, moyenne
et basse justice.
Par cette même charte, Guillaume de Haucourt affran-
chissait la terre de Villedieu de toutes tailles et corvées^
moyennant que les frères hospitaliers lui payassent à lui
et à ses héritiers trente et une livres beauvoisis chaque
année, à la Saint-André.
La donation de la terre de Villedieu fut confirmée par
Richard-Cœur-de-Lion qui, par sa charte du 5 janv. 1 104,
accorda en outre aux frères de l'hôpital toutes franchises et
immunités, voulant encore que si un de leurs hommes
était condamné pour délit envers le Roi, l'amende ou les
biens saisis fussent remis à l'hôpital.
I 12
La même charte exemptait les frères de toute autre ju-
ridiction que de celle de Tordre.
Le commandeur de Villedieu était patron et collateur
de la cure, jouissant de toutes les dîmes de la paroisse,
ainsi que le constate le procès-verbal de la visite prieurale
de 1495 (ces visites avaient lieu tous les vingt-cinq ans
pour renouveler les terriers, bien établir les droits et les
charges des commanderies), dans lequel on lit :
f Audict lieu de Villedieu, a uneesglise parochiale fon-
dée de S. Jehan de TOspital, auprès de l'esglise est la
maison du commandeur qui a esté faicte toute neufve tant
par frère Jehan de FiefFes, ci-devant commandeur, comme
par le frère Nicole de Montmirel, présent commandeur.
c Audict lieu, le villaige de Villedieu à xxx ou xl habi-
tans, hommes de la religion, a toute juridicion, prison et
justice.
Les membres de la commanderie étaient :
I o La terre et seigneurie de Frettencourt, située sur la
paroisse de Criquiers, à environ lieue et demie du chef-
lieu dont le commandeur était seigneur temporel et spiri-
tuel, comme on le voit dans le procès-verbal que je citais
tout-à-rheure t il y a, dit-il, ferme au villaige de Fretten-
court ; ledit villaige de xv à xvi feus, hommes de la reli-
gion a toute juridicion au ressort de Villedieu, audict lieu
réglise est fondée de Saint- Pierre qui est parochiale, dont
est curé à présent frère Loiseau, à charge des paroissiens
et du commandeur comme celle de Villedieu, au dict lieu
a des terres labourables lx acres bailles à ferme.
f Plus y a le villaige du Mesnil-David (paroisse d'Illois),
où a X habitans, hommes de la commanderie, où a le tiers
des dismes. >
La maison de Frettencourt était située sur le chemin du
Chevalier, allant de Frettencourt à Gaillefontaine, et avaif
des cens et parties de dîmes à Gaillefontaine, Nullemont,
Ronchoy et Ormesnil.
2° Fourcigny, dont le commandeur était seigneur, pa-
ii3
tron et collateur de la cure et jouissait d'une partie des
dîmes.
On lit dans le procès-verbal déjà cité :
c Forcenyes, membre de la commanderie, auquel a
esglize parochiale de la religion, fondée de TOspital Saint-
Jehan, auprès d'icelle est la maison manable pour le fer-
mier et granges et estables et y a viron cent acres de terre
labourables baillez à ferme audict villaige de Forcenyes a
XXX ou XXXV habitans, hommes de la religion, a toute juri-
dicion et justice levée et du dict villaige dépendent aultres
petis villaiges sur lesquels le commandeur prent de menuz
cens. »
Ces petits villages étaient Escles et Courcelles, mainte-
nant dans rOise, Morvillers- Saint-Saturnin, Charny,
Digeon, Gauville et Nesle- L'hôpital, dans la Somme; Fla-
manville, Tocqueville, Touffreville Hodenc-au-Bpsc et
la Boissière, dans la Seine-Inférieure.
Le commandeur avait en outre le tiers des dîmes à
Escles, â Hodenc-au-Bosc et à la Boissière, et nommait à
ces trois cures.
Les commandeurs de Villedieu, lorsqu'ils allaient visi-
ter les biens de la commanderie situés dans le pays de Caux,
s'arrêtaient à Âumale, dans un hôtel à Tangle des rues
Colleau et la Poterie, qui leur appartenait, mais en 1 589,
il était en si mauvais état que le commandeur d'alors, le
chevalier Jehan de Meaux de Marly, l'amodia; depuis il fut
converti en grange, et lors de la visite de 1727 il était loué
26 livres par an.
Ces biens avaient été donnés à Tordre, au mois de dé-
cembre 1209, par Pierre de Cantelou, chevalier, qui lui
avait donné tout ce qu'il possédait en justice, rentes et
domaines à Fontaine-le-Dun, c apud fontes de Dum. »
(Arch. nat., s. 52o6, sap. n<* 3.)
La seigneurie de Fontaine-le-Dun consistait principa-
lement en cens et en rentes foncières à Neuville-lès-
Dieppe, Luné'ray, La Houssaye-Bérenger, Saint-Denys,
8
IÎ4
Saint- Vigor, la Gaillarde, Drosay, Lamerville, Veulles,
Grainville-la-Teinturière, Blanc-Mesnil, Rozay, Buchy,
Les Authieux et Beaunay.
Le chef-lieu de la seigneurie était une tour de pierre,
dite la tour du Temple^ sise au Pollet, faubourg de Dieppe,
bâtie sur une demie-vergée de terre au bord du chemin
descendant de Neuville à la rivière d'Arqués, où le com-
mandeur de Villedieu faisait tenir les plaids.
Deux fiefs en relevaient, le fief de Vatrival, paroisse de
Sainte-Marguerite, et le fief noble de Saint-Etienne-du-
Haut-Prieur, paroisse d'Arqués, qui appartenait, en i65o,
à Pierre de Brinon, seigneur de Meulers.
Lorsque le concile de Vienne, en 1 3 1 1 , eut accordé les
biens de Tordre du Temple aux chevaliers de Thôpital de
Saint-Jean de Jérusalem, ces biens, que le roi de France
avait mis squs le séquestre, leur furent dévolus, mais ils
n'en entrèrent en possession qu'après bien des négociations.
Parmi eux était la petite commanderie de Repentigny, à
une lieue de Gournay, sur la paroisse de Mont-Rôti, dont
le revenu était si peu considérable, qu'elle fut, une cin-
quantaine d'années après l'époque de sa dévolution à
l'ordre, réunie à la commanderie de Villedieu.
Elle se composait d'une habitation seigneuriale avec cha-
pelle, et d'une ferme de 180 acres de terre, plus de quel-
ques rentes sur des maisons de Gournay ; un seul fief en
relevait : le fief de la Perruque, autrement dit du petit
Temple, scis paroisse de la Haye de Neuf-Marché, qui
appartenait, en i65o, à Damien Le Vaillant, seigneur de
Rouge-Fossé, et avait été avant à Jean de Maries, che-
valier, sieur d'Omécourt, et était chargé d'une rente de
sept livres au profit de la commanderie.
Au xvi« siècle, la maison du Temple de Campeaux, près
Formerie, fut détachée de la commanderie d'Ivry-le-
Temple et réunie à celle de Villedieu, 98 mines de terre
en dépendaient.
Le commandeur avait le patronage et la collation de la
ii5
cure avec la dîme de la paroisse, haute, moyenne et basse
justice, mais il fut évincé de la seigneurie par arrêt du
Parlement de Paris, du 27 mars 1748.
Cette maison était un don de Constance, sœur du Roi
Louis VII, qui par ses lettres, datées de Tan 11 72 (Arch.
nat., s. 5,1 55, sup. n» 5), en avait £ait donation aux cheva-
liers du Temple pour le salut de son âme, de celles de ses
père et mère et du feu roi son frère.
Le revenu de la commanderiede Villedieu-la-Montagne
était, en 1495, de 498 livres 16 sols; en 1 583, de 1,9001.;
en 1757 de 9,221 livres et en 1783 de i5,io5 livres.
Voici maintenant la liste, que je crois à peu près com-
plète, des titulaires de la commanderie, depuis la lin du
XI v« siècle ; plusieurs ont porté des noms illustres, mais
tous étaient de bonne noblesse, puisque, pour entrer dans
Tordre des hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem^ il fal-
lait faire des preuves remontant au moins à deux cents
ans, sans annoblissement avant la naissance du postulant.
Pour être nommé commandeur, le chevalier devait
avoir, résidé au moins cinq ans à Rhodes ou à Malte et
avoir fait trois caravanes, c'est-à-dire trois campagnes sur
les galères et vaisseaux de la religion, et le grand maître
de l'ordre ne disposait de cette grâce qu'en faveur des
frères à qui leurs blessures, leur âge ou leurs infirmités
ne permettaient plus de se livrer aux exercices de la guerre;
c'était une sorte de retraite peu lucrative du reste, chaque
commanderie étant taxée, envers le trésor de Tordre, sui-
vant son importance, d'une contribution annuelle appe-
lée Responcion, s'élevant au cinquième, au quart ou au
tiers de ses revenus, et le commandeur ayant à sa charge
toutes les réparations des hôtels, chapelles et bâtiments
ruraux.
Liste des commandeurs de Villedieu-la- Montagne :
i356. Frère Mathieu de TAbbaye.
1 364. F. Michel de Tournay.
1374. F.Guillaume FoUebarbe.
ii6
1406. F. Noël Lentequin.
141 5. F. Guillaume Lecocq.
I4a3. F. Simon de Thiennes.
1470. F. Jehan de Fieffés, allias de Fives.
1493. F. Nicole de Montmirel.
1 5oo. F. Jehan de Courcery,
ibij. F. Bertrand de Rouvroy, de la famille des ducs de
Saint-Simon.
i528. F. Jacques de Bourbon, depuis grand prieur de France.
i533. F. Jacquet de Vignacourt, d'une maison qui a fourni
deux grands maîtres à l'ordre.
1537. F. Bertrand Le Grand.
1573. F. Berton des Pretz.
i58i. F. Jehan de Meaux de Marly, dont la famille a fourni un
grand prieur de France.
1604. F. Antoine de Mornay de Villarceau.
161 3. F. Georges de Sailly.
i636. F. Jean de Monceaux -la-Houssaye.
1641. F. Adrien de Sarcus, dont un grand oncle avait été grand
prieur de France.
1 644. F. Philippe de Meaux-Rocourt-Survillierv, depuis grand
trésorier de l'ordre.
i65g. F. Jacques de Carrel-Mercey.
1 676. F. Etienne Texier de Hautefeuille, lieutenant-général des
armées du Roi, depuis bailly, Grand-Croix et am-
btssadeur de l'ordre près la Cour de France.
1682. F. François de Villiersde la Noue.
i685. F. Louis Feydeau de Vaugien, depuis bailly de Morée.
1 69 1 . F. Alexandre-César d'O.
1700. F. Guillaume Ribier.
1705. F. Eustache de Bernard d'Averne de la Châtellenie, de-
venu grand prieur de Champagne.
1729. F. Antoine Costart delà Motte-Hotot.
1735. F. Constantin-Louis d'Estourmel, chef d'escadre des ar-
mées navales du Roi, depuis grand hospitalier à
Malte.
1742. F. Pierre-François de Palastron.
1756. F. Louis 'François de Paule Lefebvre d'Ormesson, bri-
gadier des armées du Roi, depuis grand trésorier
de l'ordre.
«'7
1774- F"- Pierre de Mauléon de SavoUian.
1783. F. Charles-François de Galonné d'Avesne.
Église de Saint-Jean^d'Abtot. — M. Brianchon a
adressé la note suivante sur la situation de Saint-Jean-
d'Abtot :
L'église de Saint- Jean-d*Abbetot, spécimen si curieux
et si rare, de Tarchitecture du xi^ siècle, dans nos contrées,
se trouve dans un état de délabrement navrant. Pour por-
ter remède, et un remède efficace, à cet état de choses, je
n'ai eu qu'à m'inspirer de la pensée même exprimée par
un antiquaire, que nous vénérons tous, dans son rapport à
M. le Préfet de la Seine- Inférieure, du i3 février i836, lu
à la séance de la Commission des antiquités, le 5 mars
suivant : € Réparer et successivement entretenir la toiture
de l'église de Saint-Jean-d'Abbetot, disait M. Deville,
telle serait la seule dépense à feire pour lui assurer plu-
sieurs siècles encore d'existence. » Idée éminemment pra-
tique que celle de M. Deville, et au bout de quarante-six
ans, la première à suivre encore. Seulement, elle n'est pas
complète. Il faut y ajouter : remise en état des verrières,
avec leur protection assurée par des grillages en fil gal-
vanisé.
Pénétré de l'importance de ce double but, et pour ré-
pondre au vœu de la Commission, je me suis rendu, le
12 juillet courant, à Saint-Jean-d'Abbetot , où deux
hommes spéciaux , aussi experts que consciencieux ,
M. Laporte, entrepreneur de serrurerie au Havre, et
M. Toutain, entrepreneur de peinture et de verrerie à
Saint-Romain-de-Colbosc, ont procédé simultanément,
sous mes yeux, au relevé exact des travaux afférents à
chacun d'eux. Ensuite j'ai prié M. Héquet, maire de la
Cerlangue, de s'adresser à un ouvrier pour le devis des ré-
parations du toit.
C'est le résulsat de ces trois opérations que j'ai l'honneur
de transmettre à la Commission.
ii8
En voici le résumé :
Travaux de couverture 265 fr. y 5
Travaux de vitrerie 352 90
Travaux de grillage 600 >
1 .218 fr. 65
Somme à laquelle on pourrait ajouter
pour frais imprévus 281 35
Total 1 .5oo fr. »
On lit, dans le procès-verbal de la Commission des
antiquités, faisant suite au rapport de M. Deville, que la
Commission, à l'unanimité, insiste, dès à présent, de la
manière la plus formelle sur la nécessité de la conser-
vation de Péglise d'Abbetot, comme étant un des types
devenus aujourd'ui si rares de notre architecture du
xie siècle.
L'avocat a change, mais la cause est restée la même,
sinon plus intéressante encore.
En raison des sacrifices antérieurs faits par la commune
de la Cerlangue pour le monument, annexe dont il s'agit,
et vu l'insuffisance des ressources communales, peut-être
la Commission départementale estimera-t-elle qu'il y
aurait lieu d'exonérer, dans l'espèce et par exception, la
commune de la Cerlangue de toute participation aux tra-
vaux projetés pour la conservation de l'église de Saint-
Jean-d'Abbetot.
Après avoir pris connaissance de ces lettres et des
devis annexés, la Commission est d'avis de solliciter
de M. le Préfet une allocation de i,5oo fr., à prélever
sur le crédit affecté aux monuments historiques, et
applicable à l'église de Saint-Jean-d'Abtot.
Notice sur Cosme et Daniel Dumoustier. — M. de
Beaurepaire lit une notice sur deux artistes rouennais,
Cosme et Daniel Dumoustier.
119
NOTES SUR COSME ET DANIEL DU MOUSTIER
Au premier rang des peintres français qui se sont fait
un nom sous le règne de Henri IV, on cite Cosme Du
Moustier et son fils Daniel, dit parfois Du Moustier
crayon^ et qui passait, au rapport du P. de Saint-
Romuald, pour le plus excellent crayonneur de TEurope.
Mais VAbecedario de Manette, édité par MM. de Chen-
nevières et de Montaiglon, et même VHistoire des
peintres, publiée plus récemment par M. Ch. Blanc, ne
fournissent que des renseignements fort insuffisants sur
ces deux artistes, dont le mérite ne saurait être contesté et
dont les productions sont encore très recherchées. C'est
ce qui m'engage à consigner dans nos procès-verbaux
certains documents qui les concernent,, documents authen-
tiques, que le hasard m'a fait découvrir dans les registres
du tabellionage, et qui ont, pour nous, cet intérêt parti-
culier d'établir que, Tun et Tautre, ils ont habité cette ville,
soit qu'ils y soient venus pour y pratiquer leur art, comme
portraitistes, soit, ce qui me paraît beaucoup plus vrai-
semblable, qu'ils y aient été attirés ou retenus par des
relations de famille ou des intérêts de propriété, sur les-
quels nous ne sommes pas présentement éclairés.
Il résulte de ces documents que Cosme Du Moustier
avait épousé une nommée Charlotte Berrier, et que c'est
de son mariage avec elle qu'était né Daniel ; — que Cosme
était, dès 1 598, varlet de chambre du Roi, titre qui ne
l'obligeait à rien, et où il ne faut voir autre chose qu'un
prétexte à l'attribution d'un traitement et d'une position
privilégiée à la cour; — que le même peintre dut à la £siveur
de Henri IV le don d'une pension sur l'abbaye de Bon-
port, dont était abbé commendataire le célèbre Phi-
lippe Desportes; enfin que cette pension donna lieu à
quelques difficultés qui finirent par une transaction inter-
venue, le 25 juillet 1598, entre le poète abbé et le peintre
pensionnaire. Cette pension n'était pas à dédaigner. Elle
I20
fut réglée par la transaction à 400 1. par an, somme con-
sidérable pour le temps, et dont Timportance est une
marque non équivoque du crédit dont jouissait Cosme
Du Moustier.
On sait que Philippe Desportes, fort en faveur sous
Henri III, pour des œuvres poétiques dont l'objet n'était
ni la i^ligîon ni la piété, avait été nommé par lui à Tab-
baye de Bonport; — qu'à la mort de ce prince il prit
parti pour la Ligue et pour les Guise. On sait aussi que
Henri IV, avant sa conversion, affecta, sans le moindre
scrupule, les revenus des bénéfices ecclésiastiques à la
rénumération des services qui lui avaient été rendus.
Nous sommes porté à supposer que cette pension, qui
fut matière à discussion entre Desportes et Du Moustier^
avait été attribuée à ce dernier dans l'intervalle de temps
qui s'écoula entre la saisie que fit Henri IV de l'abbaye
de Bonport, comme occupée par un prélat rebelle a son
autorité, et la restitution qu'en obtint Desportes, après la
pacification du royaume. Il fallut bien accorder tant bien
que mal la donation et la restitution.
Quoi qu'il en soit et pour ne point trop étendre ce
préambule, voici l'analyse des documents auxquels nous
venons de feire allusion.
c 2 juillet 1 598. Mention, dans un contrat de Daniel Du
Moustier, fils de noble homme Cosme Du Moustier, var-
let de chambre ordinaire du Roi et de Charlotte Berrier.
c 7 septembre même année. Honorable homme Cosme
Du Moustier, peintre et varlet de chambre du Roi, de-
meurant en cette ville de Rouen, confesse avoir reçu
comptant de Philippe Desportes, conseiller et aumônier du
Roi, abbé de Bonport, 200 écus sol, restant de la somme
de 3oo, que ledit Desportes lui devait aux termes d'une
transaction passée entre eux à Paris, devant les notaires du
Châtelet, le 25 juillet iSgS. Signé : Du Moustier. >
« i3 octobre 1601. Noble homme Cosme Du Moustier,
peintre et vârlet de chambre du Roi, demeurant à Rouen,
121
confesse avoir reçu de Philippe Desportes, conseiller du
Roi en son conseil d'Etat et privé, abbé de Thiron, loo 1.
pour un quartier de sa pension, i
c 9 mai 1602. Noble homme Cosme Du Moustier, donne
procuration à Jacques Halle, maître en la Chambre des
Comptes à Paris, pour le représenter au traité de mariage
qui devait être passé, à Paris, entre son fils Daniel Du
Moustier, qualifié comme lui peintre et varlet de chambre
du Roi, et Geneviève BoUiffre, fille de noble homme
Claude Bolliffre, maître des enfants de musique de la
Chambre du Roi. La procuration fut passée devant Lam-
bert etTherouldc, tabellions à Rouen. Le traité de mariage
a été publié, par M. Boilly, dans les Archives de l'art
français y t. III, p. 307. •
c Mardi 4 octobre i6o5. Noble homme Cosme Du
Moustier, peintre et varlet de chambre du Roi, demeurant
en la paroisse Saint- Vivien de Rouen, a confessé avoir reçu
comptant de messire Philippe Desportes, par les mains de
Me Jeh. Morin, son maistre d'hostel, la somme de 100 1. 1.
pour ung quartier escheu le dernier jour de septembre
dernier passé, an présent, d'arrérages de 400l.de pension
par an, que ledit Du Moustier a à prendre sur le revenu
de lad. abbaye de Bonport, pour les causes contenues en
la transaction de ce faîcte et portée entre luy et ledit sieur
Desportes, précédent ce jourd*huy. Signé Du Moustier. »
Les registres du tabellionage de Rouen mentionnent,
à la date du 12 octobre iSgS, Philippe Du Moustier, mar-
chand bourgeois de Rouen. Je ne saurais dire s'il était de
la Camille de nos peintres, pas plus que des Du Moustier,
enlumineurs, domiciliés, au xvi^ siècle, près de la cathé-
drale, que je vois cités dans les archives du chapitre ; un
Pierre Du Moustier, maître charpentier à Rouen, cité à la
date du 12 février 161 3 (Tabellionage de Rouen), expert
choisi par la ville pour visiter le pont de bateaux, 3 juin 1 625
(Délibérations de THôtel-de- Ville de Rouen).
A propos de peintres valets de chambre du Roi, je
122
signalerai, à cause de leur attache avec ce pays, Marin Le
Bourgeois, de Lisieux, auquel Henri IV fit don, le der-
nier mai 1601, des fruits et revenus des biens provenant de
la confiscation du nommé Claude Pouseau, condamné à
mort (B. 20, f» 75) ; — Jean Bouhon, que l'on voit domi-
cilié à l'archevêché de Rouen, 1029 juillet i633. — Jean de
Vos; valet de chambre de la sœur unique du Roi, cité dans
un contrat du tabellionage de 1 598, pourrait bien avoir été
peintre et se rattacher à la famille des peintres de ce nom.
M. Le Breton soupçonne Dumoustierd^étre Fauteur
du dessin des carrelages des châteaux d^Évreux, de
Madrid et de la Bastie. Il croit que c^est à lui que se
réfère Tindication portée au tableau des notables de
Rouen, en 1547.
M. Tabbé Tougard fait ensuite les communications
suivantes :
M. BARTHÉLÉMY ET l'aRT OGIVAL
M. Tabbé Tougard, à l'occasion du décès de notre
regretté confrère, explique les circonstances qui détermi-
nèrent M. Barthélémy à étudier et à remettre en honneur
les constructions de style ogival.
Le projet primitif de reconstruction de Péglise de Bon-
secours ne comportait qu*une sorte de temple grec, ce qui
était déjà un progrès sur les chefs-d'œuvre de style fila-
ture (le mot est de l'abbé Coipel) que les années précé-
dentes avaient élevés aux applaudissements des contem-
porains, et qui se nommaient les anciennes églises de
Saint-Paul et de Saint-Hilaire de Rouen, de Forges et de
Sainte-Marie du Havre.
Mais quelques séminaristes, entre autres celui qui fut
depuis l'abbé Alliaume, lisaient au presbytère de Bonse-
cours la Vie de sainte Elisabeth^ par Montalembert. Ces
jeunes gens communiquèrent à M. Godefroy les idées,
nouvelles alors, de l'Introduction. Le curé n'y vit d'abord
123
que l'enthousiasme de novices littérateurs. Sur leur insis-
tance, il lut lui-même, réfléchit, et fut entraîné.
En conséquence, ce fut le plan d'une église ogivale qu'il
demanda à M. Barthélémy. Mais le maître de Tœuvre,
qui n'en était plus à ses débuts, déclara qu'on le lançait
dans rinconnu et qu'il était absolument étranger aux pro-
cédés et à la manière du moyen-âge. Il demanda donc du
temps, lut et voyagea. Deux ans plus tard, il prit ses
crayons et vit à Bonsecours au mois de juin 1840, le P.
Arthur Martin, l'illustre auteur des Vitraux de Bourges,
et l'un des premiers tenants de la réhabilitation du moyen-
âge. C'en était fait : désormais les saines traditions sur
l'architecture religieuse étaient de nouveau en vigueur dans
le département.
MAISON DE CORNEILLE AU PETIT-COURONNE. INSCRIPTION
Le même membre s'étonne que l'inscription placée
près de la porte de la maison de campagne du grand
Corneille, au Petit- Couronne, en fixe l'acquisition par le
département à l'année 1874. Il'croit utile de constater que
l'initiative de cette mesure si louable, fut prise dès 1868
par Ig baron E. Le Roy, négociée par F. Deschamps et
votée par le Conseil général, dans sa séance du 28 août de
la même année, sur le rapport conforme présenté par
M. le sénateur Ancel.
M. le Président remarque qu'il eût été difficile d'a-
dopter la première date, puisque Tachât n'a été ac-
compli qu'en 1874.
TORCY-LE-PETIT
La curieuse arcade de crucifix, signalée l'an dernier à la
Commission par le même membre, existe toujours dans
ce village, mais y court plus que jamais le danger d'être
vendue. Y a-t-il quelque moyen administratif de s'opposer
à cet acte de vandalisme ? ou l'un de nos collègues pour-
124
rait-il en procurer Tacquisition par quelque église où on
la rétablirait avec honneur ?
M. Gaston Le Breton promet d'intervenir et de
négocier la réintégration de cette pièce.
VAL-DE-LA-HAYE
Des plantations opérées à la fin de Thiver dernier sur
remplacement de la chapelle de Sainte- Vaubourg ont
ramené sur le sol des fragments de pavés vernissés qui
formaient le dallage de cet intéressant monument. L'un
de ces carreaux, de soixante-trois millimètres de côté,
représente une fleur de lis. L^aspect général de ces débris
est celui de certains carrelages modernes. Il faut se féliciter
de voir la céramique rentrer dans les bonnes traditions
des âges précédents, et souhaiter en même temps qu'elle
en imite non-seulement les formes, mais aussi le soin
consciencieux apporté à la bonne exécution des produits.
CLOCHER DE COTTÉVRARD
M. Tabbé Levacher, professeur au Petit - Séminaire ,
appelle l'attention de la Commission sur l'état assez pré-
caire de ce clocher. Ce fut sans doute une heureuse idée
que de transporter dans ce village la flèche de ^'église
Saint-Nicolas de Rouen, qui, sans cela, eût disparu. Mais
ce riche présent ne laisse pas d'être embarrassant pour une
^brique et une commune peu fortunées. M. le curé se
préoccupe avec raison de sa restauration. La Commission
voudra Vy encourager par l'intérêt qu'elle lui témoignera.
Plusieurs membres objectent que la question du classe-
ment de ce clocher a été antérieurement débattue dans la
Commission et résolue négativement. Il n'y a donc lieu
qu'à une demande de secours adressée à la Préfecture
selon les formes ordinaires.
La séance est levée à quatre heures.
Le Secrétaire,
Vicomte R. d*EsTAiNT0T.
125
SÉANCE DU i8 AOUT 1882
La séance ouvre à deux heures, sous la présidence
de M. de Beaurepaire, vice-président.
Sont présents : MM. Adeltne, Billiard, Bouctot,
Le Filleul des Guerrots, de Girancourt, Gouellain,
Tabbé Tougard et le vicomte d^Estaintot^ secrétaire.
Excusés : MM. P. Baudry, Brianchon, Du BouUay
et Lefort.
Les volumes suivants sont déposés sur le bureau :
Bulletin historique de la Société des Antiquaires
de la Moriniey i22« liv.; — Société des sciences de
Semur, 17* année, 1880; — Société industrielle
d'Elbeuf, no i, 1882; — Société archéologique de
Nantes, t. XX, 1881.
Le programme du Congrès des Sociétés savantes en
i883, envoyé par M. le Ministre de Tlnstruction
publique, est lu par M. le Vice-Président, et mis à la
disposition des Membres qui voudraient prendre part
aux séances.
M. le Vice-Président communique un dossier re-
latif aux vitraux de Vatteville. M. le Préfet saisit la
Commission de la question de savoir sMl y a lieu de
remplacer le vitrail principal, absolument détruit.
La dépense est évaluée à i,5oo fr. La fabrique et la
commune votent chacune 5oo fr., et sollicitent un
secours d^égale importance.
Du moment qu^il s^agit de remplacer un ancien
vitrail, le sentiment de la Commission se prononce
contre le projet ; elle ne peut proposer d^allouer de
fonds pour une œuvre moderne, et préférerait en
accorder pour la restauration du vitrail ancien.
126
La Commission délègue M. Brianchon pour aller
voir sur place Tétat de Tancien vitrail, et vérifier s'il
peut être ou non restauré et conservé.
M. de Beaurepaire communique un extrait du re-
gistre des délibérations du Conseil de fabrique de
Téglise Saint-Maclou, de Rouen, soumis par M. le
Préfet à Texamen de la Commission.
La fabrique expose que les perrons et deux piliers
de la lanterne sont dans un état de dégradation com-
plète. Le devis, dressé par M. Barthélémy pour ces
travaux, s'élève à 10,648 fr. 60. La fabrique a voté
i,5oo fr. et demande le concours du dépanement.
Le travail de réfection des perrons ne semble pas
absolument utile, et, de plus, est sans intérêt historique
ou archéologique.
Celui des piliers paraît rentrer davantage dans le
cadre des dépenses que la Commission peut autoriser.
Ce sentiment, exprimé par M. le vicomte d^Estaintot,
a prévalu, et la Commission, consultée, décide à
l'unanimité de contribuer pour 2,5oo fr. dans la
réparation des piliers et contrefaits de la lanterne.
M. le vicomte d'Estaintot prend place à la séance,
et donne lecture du procès -verbal de la dernière
séance, qui est adopté sans observation.
M. le Secrétaire propose de rétablir dans Téglise de
Néville une inscription relative à J. de Bréauté; il
est prié de fournir le devis de la dépense à laquelle ce
travail donnerait lieu.
M. Pelay dépose des plans de Rouen, relevés par
M. Roëssler, à Londres, et faits pour le siège de cette
ville, en i562; d'autres représentent le fort Sainte-
Catherine, en iSqi; une Estacade sur la Seine
en iSgi, etc.
127
M. Pelay communique un dessin qu'il a fisiit exé-
cuter, représentant des sépultures tout récemment
découvertes à Tangle de la rue Tabouret.
M. de Beaurepaire lit la notice suivante, relative à
Téglise de Notre- Dame-de-la-Ronde.
L'église de Notre-Dame-de-la-Ronde, Tune des plus
notables de la ville de Rouen avant 1789, a disparu com-
plètement. Il n'en reste plus qu'un vague souvenir. Elle
longeait la rue de la Grosse* Horloge, dite autrefois la rue
de la Corvoiserie. Supprimée à Tépoque de la Révolution,
elle fut vendue, avec toutes ses dépendances, comme do-
maine national, à Valentin Chéron, le 3 juin 1796, pour
le prix de io8,320 1. Quelques années après, elle était
démolie pour donner passage à une nouvelle rue, la rue
Thouret, dont l'ouverture avait été projetée antérieure-
ment à la vente.
On s'est perdu en conjectures sur Torigine de cette
église. Les uns ont voulu y voir une ancienne synagogue,
à cause de son voisinage de la rue aux Juifs ; d'autres,
une chapelle de l'Hôtel-de-Ville primitif. Ces conjectures
ne nous paraissent pas avoir le moindre fondement.
Lorsque les juifs perdirent la possession de leur clos,
sorte de quartier qui leur avait été réservé, il y avait
longtemps déjà que l'église de N ot re- Dam e-de- la- Ronde
était connue (i). Quant à la commune de Rouen, qui ne
sait maintenant qu'elle est d'institution relativement ré-
cente ? Elle se montra, d'ailleurs, à ses débuts, trop hos-
tile au clergé, pour qu'on puisse supposer qu'elle ait affecté
(i) On lit dans une ancienne Chronique « Mil mcxviii,
les Juys qui tenoient à Rouen beaucoup d'éritages es provendes
(lisons paroisses) de Saint-Erblant, Notre-Dame la Roonde et à
Saint-Lô, et avoient une rue appellée la rue aux Juys (et encore
est appellée, et estoit leur moustier en une place de présent ap-
pellée le Qos-as-Juys) furent boutez hors de lad. ville, et leur
héritages confissiez au Roy. »
128
ses ressources à la construction d^une chapelle assez im-
portante pour devenir, presque aussitôt après son érec-
tion^ église de paroisse (i).
Prenons donc notre parti des t(^nèbres qui nous ca-
chent les commencements de cette église. Après tout,
combien en compterait-on sur lesquelles on en sache plus
long ? Si quelque présomption est permise, c'est que
toutes remontaient à une très haute antiquité. Les men-
tions qu'on en rencontre sont plus ou moins anciennes.
Il n'en est aucune qui puisse équivaloir à un acte de
fondation.
Au point de vue du culte, Notre-Dame-de-la- Ronde
présentait cette singularité d'être et d'avoir toujours été,
autant, du moins, qu'on peut en juger par les documents
conservés, à \a fois collégiale et paroissiale.
On s'accordait à citer, comme le plus ancien document
où il en fût question, une charte de réformation de Tar-
chevêque Eudes Rigaud, des derniers jours de mars i232.
Nous sommes heureux de pouvoir reculer de quelques
années la constatation authentique de l'existence de cette
église.
11 est fait mention, dans une charte du prieuré de
Bonne-Nouvelle, 1216, d'un Roger, chapelain de La
Ronde, Rogero^ capelîano de Rotunda (2) ; — dans une
charte de l'abbaye du Valasse, 1226, d'un Roger (le même
vraisemblablement que le précédent), prêtre de Sainte-
Marie-la- Ronde, Rogero^ presbytero de Sancta-Maria-
Rotunda ; — dans une charte du Chapitre de la cathé-
drale, 1227, de l'église Sainte-Marie-la-Ronde, in Corve-
(i) Cependant il est certain qu'il y eut plus tard une chapelle
à THôtel-de- Ville. (V. la Notice de M. E. De la Quérière sur
Tancien Hôtel-de- Ville de Rouen.)
(2) On disait La Ronde aussi souvent que Notre-Dame-<le-
I i-Ronde. Item xx solidos super domum Salehadin ante Rotufi"
dam, (Obituaire de la cathédrale de Rouen, p. 189, aux Arch.
de la S. Inf.)
t29
séria, ab oppositis ecclesie Sancte Marie Roîunde; — dans
une autre du même fonds, 1249, du cimetière de Notre-
Dame -la-Ronde.
Jusque vers le milieu du xiiia siècle, il y avait eu dans
cette église trois chanoines en possession de trois grosses
prébendes, dont la collation, de temps immémorial, ap-
partenait au roi, sans doute, en sa qualité de successeur
des ducs de Normandie. Il paraît que ces chanoines n'é-
taient pas astreints par leur institution à la résidence.
Aussi s'en dispensaient- ils sans scrupule ; ils se conten-
taient de toucher leurs revenus.
Aux termes de la charte de réformation d'Eudes Ri-
gaud^ il fut décidé qu'il y aurait, à l'avenir, en l'église de
Notre- Dame-de-la-Ronde, quatre chanoines, dont Tun
aurait le titre de doyen, trois vicaires nommés, chacun
par un des chanoines, et un curé pour le ministère pa-
roissial, indépendant du doyen, tous obligés à une rési-
dence dont les conditions et les rétributions furent alors
strictement déterminées. La collation du curé et des
chanoines fut réservée au roi. Cette ordonnance, renou-
velée et complétée par une autre du même archevêque
(mars i255), fut confirmée par des lettres de saint Louis,
datées de Falaise, 26 avril i256 (i).
On peut remarquer combien on poussait loin, en ce
temps-là, le respect des droits acquis. Bien qu'arrêtée en
principe, la réformation ne fut appliquée que progressi-
vement, à mesure que les prébendes vinrent à vaquer (2).
Il est encore à observer que ce fut saint Louis qui sollicita
cette mesure, comme ayant droit de présenter aux cha-
noinies, et que la seconde ordonnance archiépiscopale fut
rendue pendant le séjour de ce prince à Rouen (3).
(i) M. Léopold Delisle, Cartulaire normand, io3.
(2) Regestrum Visitationum, de l'archevêque Eudes Rigaud,
795.
(3) M. Léopold Delisle, Cartulaire normand, 99. Etant à
Rouen au mois de mars i255, saint Louis confirma une charte de
9
i3o
Cest ce qui donna lieu, après la canonisation de saint
Louis, de le considérer comme le fondateur de la collé-
giale de Notre- Dame-de-ia-Ronde, où sa fête fut toujours
célébrée d'une manière très solennelle (i).
On a rapporte la traduction de cette ordonnance dans
V Histoire de RoueUy édition de lySi. •
Une quatrième vicairie fut fondée par un nommé Jean
Le Villain en i365 (2). Celle-là fut mise à la présentation
du roi.
Enfin la cure fut unie au doyenné en faveur de Guil-
laume Mesard, licencié en décret, secrétaire, puis vicaire-
général du cardinal d'Estouteville, archevêque de Rouen,
par bulle du pape Calixte III, du 6 des nones d'oc-
tobre 1455, et par lettres de l'archevêque, du 21 octobre
de Tannée suivante (3).
Mesard obtint du chapitre de la cathédrale, le 19 février
Î459, la permission de porter, en Téglise de Notre- Dame-
de-la-Ronde et ailleurs, hormis dans l'église métropoli-
taine, l'a u musse grise et le camail. Les chanoines eurent
égard, en cette occasion, aux recommandations du car-
dinal d'Estouteville, auquel ils avaient les plus grandes
obligations (4).
la reine Blanche en fiveur des Frères Mineurs de Rouen, 1248, et
la vente faite par Guillaume Bellet, chevalier, à Tabbaye du
Valasse, d'un emplacement situé rue Froiderue, à Fécamp, où
les religieux de ce monastère s'étaient fait construire un hôtel.
(Arch. de li S.-Inf., F. des Frères Mineurs, et F. de Tabbaye de
Fécamp.)
(1) Louis XI, dans des lettres patentes, dont nous ferons plus
loin connaître Tobjet, déclarait que cette église « fut ancien-
nement fondée par le très glorieux saint Monsieur saint Louis.
(2) Cette date est celle des lettres d'amortissement qui furent
obtenues en conséquence de cette fondation. (Arch. de la S.-
Inf., F. de Notre-Dame-de-la-Ronde.)
(3) Ibidem,
(4) Arch. de la S.-Inf., G. 21 35.
î3i
Grâce au même appui , Mesard fit reconnaître par
Louis XI (Plessis-du-Parc, novembre 148a), non seule-
ment pour lui, mais pour les chanoines, ses confrères, le
droit de porter à Notre- Dame-de-la-Ronde, et dans toutes
les autres églises de la ville, tant pendant la célébration
de Toffice divin, qu'siux processions, Taumusse de gris four-
rée de menu vair (i). Il faut croire que c'était là un privi-
lège bien contraire aux usages reçus et dont la concession
ne paraissait pas rentrer dans les attributions de l'autorité
royale, puisque les chanoines de la cathédrale en contes-
tèrent la légitimité et soutinrent, à ce sujet, un long
procès devant le bailli, et, devant le sénéchal de la
province, en 1483 et i486 (2). Si plus tard ils trouvèrent
bon que le successeur de Mesard portât ces ornements, il
semble, d'après leurs délibérations, que ce ne fut qu'une
gracieuse tolérance de leur part.
La lettre suivante, adressée par le cardinal d'Amboise
aux chanoines de la cathédrale vient à Tappui de ce senti-
ment. Elle vaut la peine d'être citée.
« Messieurs, je me recommande à vous tant que je
puis. J'ay donné charge, quand je partis, à mon procu-
reur, de parler à vous pour appointer le différent qui est
entre le chapitre et le doïen de La Ronde, h cause des
aulmusses, et me semble qu'il n'y aura que bien à Ten
laisser user ainsi que faisoit son prédécesseur, messire
Guillaume Mesard, à qui Dieu pardoint ! vous priant que
ainsi le vueillez faire, et à Dieu, qui vous ayt en sa saincte
guarde. Elscript à Gaillon, le vii« jour d'avril (1499), votre
frère G., cardinal d'Amboyse. » Pour suscription : t A
mes très chers frères les doïen, chanoynes et chapitre de
Rouen, i
Plus d'un siècle après, en i636, les débats recommen-
çaient entre les chanoines de la cathédrale et ceux de Notre-
(i) Arch. delà S.-Inf., F. de Notre-Dame -de-la-Ronde.
(2) Ibidem, G. 366 1.
l32
Dame-de-la- Ronde, parce que ces derniers s'étaient pré-
sentés revêtus d'aumusses devant la porte de l'hôtel du
président de Fumechon, aux obsèques de ce magistrat (i).
Plus tard, il y a lieu de supposer que la question fut
jugée, sur un nouvel incident, en faveur des chanoines de
Notre- Dame-de-la-Ronde, ou bien que, sans décision
judiciaire, les chanoines de la cathédrale fermèrent les
yeux sur une usurpation à laquelle ils n'attachaient plus
la même importance, puisqu'ils laissèrent, sans protesta-
tion, leurs rivaux faire insérer dans VHistoire de Rouen ,
de 1731, les lettres de Louis XI, auxquelles, pendant si
longtemps, il leur en avait coûté de se soumettre.
Malgré son titre, qui indiquait une sorte de supériorité,
le doyen était astreint à la même règle que les chanoines
de la collégiale. On en a une preuve très positive dans la
permission qu'ils accordèrent, en chapitre, à Mesard, de
ne point venir à matines, d'entrer au chœur sans chape,
et d'en sortir quand il lui plairait, en considération des
services signalés qu'il avait rendus à Téglise, et aussi de
sa vieillesse et de ses infirmités, 16 mars 1497 (2).
De nouveaux règlements furent donnés au chapitre de
Notre- Dame-de-la- Ronde en 1648 et en 1660. Comme ils
sont pour nous sans intérêt, nous éviterons d'en parler,
ainsi que des débats qui s'élevèrent entre les chanoines et
les vicaires perpétuels, au sujet de la résidence, des offices,
de la jouissance des maisons appartenant à la collégiale,
ainsi encore que des contestations qui survinrent entre le
chapitre et les paroissiens au sujet du cimetière, du droit
(i) Arch. de la S.-Inf., G. 366 1.
(2) « Etsi decanus ecclesie coHegiate Béate Marie Rotonde
RothomagensiSf pro tempore existens, teneatur in ea continuant
facere residentiam, nec, nisi petita licencia, more canonicOy de~
beat chorum exire, » Ce ne fut qu'au xyiii* siècle, en vertu
d'une ordonnance de Mgr de Saulx-Tavannes que le doyen fut
dispensé d'assister aux offices du chœur, en considération des
fonctions curiales dont il était chargé.
i33
de sépulture, de la fourniture des ornements et des livres
liturgiques, ou des réparations de l'église (i).
11 suffira de constater que le chapitre et la paroisse for-
mèrent toujours des communautés distinctes, ayant leurs
propriétés particulières, les unes administrées par les cha-
noines, les autres par la fabrique, ayant aussi leurs sceaux
particuliers. Les armes du chapitre étaient une sainte
Vierge debout, tenant Teniant Jésus, le tout d'or, sur un
fond d'azur semé de fleurs de lys d'or.
Du temps de Le Brun des Marettes, c dans les grandes
fêtes et dans de certains dimanches privilégiés, il n*y avait
qu'une grand'messe célébrée par le doyen, tant pour les
paroissiens que pour MM. du chapitre qui y assistaient. »
La séparation était complète au xviii« siècle. Des règle-
ments de Mgr de Saulx-Tavannes, du 7 août 1741, por-
taient que tous les jours de l'année, même les fêtes so-
lennelles, MM. du chapitre commenceraient leur grand'
messe capitulaire à huit heures et demie et les vêpres à
une heure et demie, en sorte que le curé pût commencer
l'office de la paroisse à l'heure réglée pour les paroisses du
diocèse et de la ville, i
Pendant longtemps les chanoines conservèrent l'usage
de tenir leur chapitre tous les lundis derrière le grand
autel du chœur. Ce ne fut que dans la seconde moitié du
xv^ siècle que Mesard fit construire, à ses dépens, un re-
vestiaire pour servir tant aux réunions des chanoines
qu'à celles des trésoriers de la fabrique.
(i) Sentence de Tofficialité (jeudi après l'Exaltation de la
Sainte-Croix, 1438), sur un procès entre le chapitre de Notre-
Dame-de-la-Ronde et les trésoriers. Ceux-ci avaient fait enlever
du chœur la tombe de Gautier le Sage, ancien clerc de la com-
mune de Rouen, du doyen Gautier le Sage (vraisemblable-
ment fils du précédent)^ et d'Emmeline, sœur de ce doyen. Les
doyens étaient enterrés dans le chœur sous la tombe de Mesard,
et les chanoines, dans la même enceinte, sous la tombe du cha-
noine Bacqueler.
Lorsqu'en 1477, ces derniers curent fait construire la
chapelle Saint-Eutrope, auprès du chœur, sur remplace-
ment de deux maisonnettes comprises dans le cimetière,
on se trouva dans la nécessité d'abattre ce revestiaire. La
fabrique dut en faire construire un autre, « pareil en lar-
geur et en longueur, assouvy de toutes choses 9 au bout
de la chapelle Saint-Julien, de l'autre côte de Téglise. La
chapelle Saint- Julien ayant été, a son tour, démolie,
en i5i3, pour être reconstruite avec plus d'étendue et
d'élégance, le revestiaire fut reporté au bout de la cha-
pelle Saint-Eutrope. Ce ne fut pas son dernier déplace-
ment. Nous le voyons, au xviiie siècle, situé au bas de la
nef, près du portail latéral.
L'obi tuaire du chapitre de Notre- Dame -de-la -Ronde
fournit les noms de quelques-uns des bienfeiteurs de cette
communauté.
Janvier, 3, obit de M« Marc Le Loquetier, ancien
doyen et commémoration de l'archevêque Jean de Ma-
rigny; 8, obit de Richard Marin, ancien curé de La
Ronde; 12, commémoration de Guillaume Le Sage, an-
cien doyen, et de Me Robert d'Andeli, chanoine; 17, obit
de l'archevêque Eudes Rigaud. — Avril, 8, commémora-
tion de l'archidiacre du Mans. — Juin, 8 des calendes de
juillet, obit de Charles V. — Juillet, 5 des calendes
d'août , obit de Gautier de Tours , qualifié troisième
doyen.
Cet obi tuaire fait mention de la dédicace de Notre -
Dame-de-la-Ronde au ler juin, et de la fête de S. Eutrope,
martyr, au mois d'avril.
Il contient, à ses premiers feuillets, le texte des ser-
ments que devaient prêter le doyen et les chanoines à
leur prise de possession.
Voici le texte du serment du doyen :
Ego N.y Decanus hujus ecclesie Béate Marie Rothonde
Rothomagen.^ juro, ad Sancta Dei Evangelia^ quod sum,
i35
prout nuptie demonstrant, de légitima matrimonio pro-
creatus. Item juro quod capitule hujus ecclesie^ in his que
ad ipsos spectant^ humiliter obediam. Item juro quod sta^
tuta et consuetudines hujus ecclesie approbatas observabo
fideliter. Item juro quod jura, privilégia^ libertates et pos-
sessiones hujus ecclesie pro posse deffendam. Item juro
quod sécréta capituli nemini revelabo. Item juro quod
fidèle consilium et auxilium competens in omni honestate
et utilitate ipsius ecclesie rectum ac justum^ secundum
conscientiam meam, dum tempus postulaverit^ sine fraude
et personarum acceptione, prestabo^ precipue requisitus.
Item juro quoi in hac ecclesia faciam continuam residen^
tiam personalem^ interessendo matutinis et singulis horis
dieij prout in statutis et reformacione hujus ecclesie con-
tinetur.
On doit signaler dans ce document un témoignage re-
marquable de rimportance que Ton attachait aux offices
qui se célébraient à la cathédrale.
iVa quod diebus in quibus fit processio generalis in
ecclesia Rothomagensi et celebratur sancta synodus, finita
prima f dicuntur misse de Beata et obitus.
Ordinatum est capitulariter quod in ecclesia Rotonde
prima et ultima Adventus et eciam ixx^, xl^ et medie xl^,
videlicet Letare^ dominicis quibus fit sermo ad populum
in ecclesia cathedrali, necnon diebus Dedicacionis et Reli'
quiarum dicte ecclesie cathedralis atque sanctorum Mel^
loni, Romaniy Audoeni, Firmini, Fromundiy Marcialis^
matutine incipientur hora quinta cum dimidia^ predictisque
dominicis, intuitu sermonum hujusmodi^ continuabitur
servicium.
On peut citer parmi les anciens doyens de Notre-Damc-
de-la-Ronde, au xv« siècle, Jean Guérin, 1419-1422 (i); —
Laurent Butot, i438-)445 (2); — parmi les curés, Hélie
(i) Arch. delà S. Inf., G. 352 1.
(2) Ibidem, G. 1910.
i36
Fouache, 1 368- 1376 (1) ; — Jean Pajot, chanoine de Notre-
Dame de Beauvais et de Notre-Dame de Rouen, ancien
curé de Saint- Laurent-en-Caux, mentionne, en 1438,
comme curé de Nptre- Dame-de-la- Ronde, titre qu'il
prenait encore à Tcpoque de son décès, ce qui prouve
que, bien que décidée en 146 5, l'union de la cure au
doyenné ne fut réalisée que plusieurs années après. Le
testament de Pajot, daté du 11 février 1461, est remar-
quable par le grand nombre de legs qu'il contient. Ceux
qui concernent ses livres seraient intéressants à relever (2).
Après Pajot, tous les doyens furent, en même temps,
curés de la paroisse. Le premier qui cumula les deux fonc-
tions fut Guillaume Mesard, dont nous avons déjà parlé,
qui jouit d'un grand crédit pendant l'épiscopat du cardinal
d'Elstouteville, et fut un des principaux bienfaiteurs de
Notre- Dame-de-la- Ronde. Sa tombe se trouvait au milieu
du chœur. L'Histoire de Rouen, de 1731, nous en fait con-
naître l'inscription.
Hicjacet venerabilis magister Guilleîmus Mesard^ in-
signis quondam vicarius generalis et officialis Rothoma-
gcnsis^ justitiœ pius amator et in judicio integri atque
impolluti animi, qui ohiit anno DD. i4go^ die veneris
9 februarii. Orate pro eo, Mesard était représenté sur
cette tombe, revêtu de ses habits ecclésiastiques, vraisem-
blablement de cette aumusse qui mit le chapitre de la
cathédrale en conflit avec l'autorité royale. Cette inscrip-
tion a été mal lue : la date doit être rectifiée. Mesard, en
effet, vivait certainement encore en 1497. Nous pensons
qu'il dut mourir le 9 février 1498.
Il eut pour successeur Robert de Coquebourne, écos-
sais de naissance, qui fut présenté par le roi Louis XII,
et nommé par Tarchevèque, le 29 juillet 1498 (3).
(1) Arch. de la S.-Inf., G. 3421, 352o.
(2) Ibidem^ G, 3439.
(3) A la mort de Mesard, il y eut procès pour la cure. Jean
'3;
Bernardin de Vauldrey obtint ce bénéfice sur la rési-
gnation de Robert de Coquebourne, le 7 septembre 1 5o8,
et le possédait encore en 1 5 1 9. Il le résigna, pour cause de
permutation, en faveur de May Du Breuil, docteur en
théologie, qui lui abandonna la cure de Saint-Pierre de
Louvigny^ au diocèse de Meaux. Les lettres de collation
sont du 10 avril 1519. May Du Breuil fut chanoine de
Rouen et pénitencier de la cathédrale. Il mourut peu de
temps après avoir été nommé doyen de La Ronde.
Enguerran Du Breuil, licencie en l'un et l'autre droit,
fut nommé doyen de La Ronde, le 1 3 août 1 5 1 9, en rem-
placement de May Du Breuil. Il mourut en 1 53o, et fut
remplacé, le 14 février de cette année, par Jean Heutru,
clerc d*Avranches, qui résigna, peu de temps après, en
faveur de Robert Le Marchant, prêtre du même diocèse,
lequel fut pourvu dès le 3o mars suivant. Après lui, Jean
Rome, chanoine de Rouen, obtint le doyenne de La
Ronde. 11 le résigna en faveur de Robert Bordel, qui lui
abandonna la cure de Roumare. Bordel fut nomme au
doyenné le 21 août i545. II le résigna peu de mois après
en faveur de Durand Durand, qui lui abandonna ses cures
de Sainte-Croix de Montivilliers et de Saint-Mards de
De Lintot et Jean Favé, chanoines de Rouen, prétendant, l'un et
Tautre, agir en vertu de la procuration du roi, avaient nommé,
dès le 1 1 février, le premier, Guillaume Gueuret, le second,
Pierre Le Franchois; mais Louis XII présenta directement Co-
quebourne. CoUatio decanatus Rotunde Rothomagensis, cum
cura eidem annexa, vacantis per decessum domini ac magistri
GuUlelmi Mesardi, fada magistro Roberto Coquebounte, post
dectsionem brevii levaii per procuratorem regium et pro eo
flniti contra alium se gerentem pro vicario domini Régis, xxixa
juin. (Arch. du secrétariat de l'Archevêché.) — Dès le 14 fé-
vrier 1499* le chapitre de la cathédrale nommait une commis-
sion pour examiner ce qu'il y avait à faire à l'égard de l'écossais,
doyen de Notre-Dame-de-la-Ronde, que Ton avait vu revêtu de
l'aumusse.
i38
Vcricourt, au diocèse de Reims. Durand Durand, nommé
le II octobre 1546, mourut en 1 55 1, et fut remplacé, le
2 mai i55j, par Jacques Chapperon , du diocèse de
Saintes.
Jean Chapperon fut reçu doyen le 4 mai i55i, et paya
à la fabrique, pour sa réception, 19 1. 12 s. Il décéda
en i555, et fut remplacé, sur la présentation du roi
François I«^ par Angélus Vergitius, originaire de Tîle de
Crète (i). Il fut reçu par procureur, le 9 juin i555, et
paya ce jour-là, à la fabrique, pour sa réception, 20 1.
Mais peu de temps après Pierre Galland était présenté
au même bénéfice par le même roi, et il n*est pas douteux
qu'il en ait joui paisiblement puisque ce bénéfice est
(i) Arch. du secrétariat de Tarchevêché. — Ange Vergèrc,
célèbre calligraphe, né en Crète au commencement du xvie siècle,
se fît connaître d*abord en Italie, d'où il passa en France. Son
écriture grecque était admirable. « Elle senrit d'original, dit
Bayle, à ceux qui gravèrent les caractères de cette langue pour
les impressions royales, sous François I^r. » Vergère resta attaché
à la cour des Valois jusque sous Charles IX, ainsi que le témoi-
gnent ces vers de Baîf, adressés à ce dernier roi dans l'épître
dédicatoire de ses poésies :
Sage Vergère grec à U gentil main ,
Pour récriture greque écrivain ordinere ,
De vos granpére et père et le vostre ut salere ,
Pour à l'accent des Grecs nui parole dresser
Et ma main sur le trac de sa lettre adresser.
Parmi les œuvres calligraphiques de Vergère, on cite le Cata-
logue des manuscrits de la bibliothèque de François U' et la
copie du Cynegiticotij d'Oppien, que Henri II lui commanda pour
la duchesse de Valentinois. Au talent de calligraphe il unissait
la connaissance des lettres anciennes, et il a traduit en latin le
traité de Fluviorum et Montium nominibus (Paris, i556). On a
dit que le proverbe « écrire comme un ange » datait d*Ange
Vergère ; mais autant que nous pouvons en juger, il ne paraît
pas remonter si haut. ^ Nicolas Vergère, fils du précédent, né
en Crète, passa en France vers 1 546. Il fut lié avec Balf et
i39
signalé comme devenu vacant^ par le décès dudit Galland,
dans de nouvelles lettres de présentation, obtenues du
Roi, et dans de nouvelles lettres de collation, obtenues
du vicaire général de Tarchevèque, par Angélus Vergitius,
24 septembre i558. Celui-ci prit possession, par Nicolas
Mérille, son procureur.
Après lui viennent : Jean Mérille, chanoine de Rouen,
reçu au doyenné de La Ronde, 4 mai i563-i573. — Guil-
laume Pynel, ancien chanoine de Saint-Hildevert de
Gournay, reçu au doyenne de La Ronde le 12 sepv
tembre 1 573-1 579. — Etienne Le Paincteur, receveur-
général de la fabrique de la cathédrale, plus tard chanoine
de Rouen, doyen de La Ronde, iSSi-iSSg. — Jean
Harel, 1589-16 avril 1596. — Claude Sacquespée, 1597-
1598. — Pierre Le Blond, 1598-1639, année de son décès.
Il fit une fondation en l'honneur du Saint- Sacrement. Il
y eut procès au sujet de son épitaphe. — Henri Lebrun,
maître ès-arts en TUniversité de Paris, 14 mars 1639-
i65[. Après avoir résigné son bénéfice, il demanda aux
chanoines, la permission de continuer à porter, comme
honoraire, Thabit de leur église, ce qui lui fut accordé. Il
est connu comme auteur de quelques traités (i).— François
de la Force, docteur en théologie, chanoine et pénitencier
de la cathédrale, nommé en remplacement du précédent.
Reçu au doyenné le 28 avril i65i-i662 (2). — Louis
Turnelle. (Voir Haefer, Nouvelle Biographie.) — Je suis porté à
voir, dans le concurrent de Vergère, Pierre Galland, érudit
français, né à Aire en 1 5 10 et mort en i559; lié aussi avec
Turnelle et Budé. — Cs. sur Vergère et Galland, M. Léopold
Delisle, cabinet des mss. de la Bibliothèque nationale; sur
Vergère, Bayle, au mot Vergère, Tamizey de Larroque Revue
critique f '872, p. 159, Le Play, Anleactes, p. 245.
(i) Il devint chanoine de la cathédrale.
(2) Il fut prieur de Saint-Michel du Mont-Gargan. Il décéda
en 1689 et fut enterré en l'église Saint-Jean de Rouen. (Arch.
de la S.-Inf., G. 2097.)
140
NozereaU) nommé le 2 août 1662, en remplacement de
François de la Force, qui avait résigne en sa faveur ;
reçu le 19 septembre 1662-1688. Il donna à la fabrique
de très belles pièces de marbre d'un prix considérable
et 200 1. pour être employées à la contretable du chœur.
Il était, en même temps que doyen de La Ronde, cha-
noine de Rouen (1). — Thomas Horcholle, docteur de
Sorbonne, i«r juin 1688-4 juillet 1716, date de son décès.
— Louis Horcholle, docteur de Sorbonne, frère du pré-
cédent, 17 16-14 novembre 1728, date de sa résignation.
— Jean-François Vattier, bachelier en théologie, con-
seiller au parlement, 1728-26 juin 1748, date de son
décès (2). — Alexis Pain des Essarts, ancien curé de
Saint- Vigor de Rouen, 29 septembre 1748-22 mars 1789,
date de son décès.
On cite parmi les chanoines de Notre- Darae-de-la-
Ronde Claude Chappuys, bibliothécaire du roi, chantre
de la cathédrale de Rouen, 1544-1545 ; — Denis de Brè-
vedent, abbé de la Trappe, en 1 562 ; — vers le milieu
du XVII* siècle, Thomas (Filz-Simon), natif de Trédach,
en Irlande, docteur en théologie de l'Université de Caen,
prieur du prieuré de Dalytz. ; — Robert Prévost, cha-
noine de Chartres, prédicateur du roi, dont les sermons
ont été imprimés en 1786 (3).
Des fondations avaient été faites en cette église ,
en i325, pour Pierre de Gamaches, chevecier de La
Ronde (4) ; — le 26 juillet 1 441, pour Nicolas Burguet,
(i) 11 résigna en faveur de Thomas Horcholle pour cause de
permutation contre la chapelle de la Trinité en la cathédrale, et
moyennant une pension de 5 00 livres. Il devint chanoine de la
cathédrale.
(2) Fondation pour lui après son décès, 17 février 1672.
(3) Dictionnaire portatif des Prédicateurs français, Lyon, 1 757.
(4) Testament de Richard de Droitecourt, pénitencier de la
cathédrale^ mercredi après l'Epiphanie, i325. (V. S., F. du Cha-
pitre.)
14!
prêtre, maître ès-arts et en médecine, qui y fut enterré
dans cette église (i) ; — en 1469, pour Jean Le Vieil,
avocat en cour d'église, lequel y fut pareillement en-
terré (2) ; le 16 juillet i5o2, pour Jeanne Le Picard, dame
de POuraille ; — le 27 février i5i9, pour Daniel de la
Place, sieur de Fumechon (3).
On voit par un règlement de M. de Fieux, vicaire-
général, du 20 octobre 1689, qu'il y avait alors, en Téglise
Notre- Dame-de-la-Ronde, outre le curé-doyen et les cha-
noines, 10 prêtres habitués, du nombre desquels 3 vicaires
perpétuels, ayant qualité de premiers chantres; 1 vicaire
et I clerc ayant qualité de seconds chantres, tous consi-
dérés comme suppôts du chapitre. En 1 720, on comptait, à
Notre-Darae-de-la-Ronde, 3 chanoines, 3 vicaires perpé-
tuels, 3 aides de chœur, le vicaire de la paroisse, le
sacriste, 6 ou 7 prêtres habitués de 1,000 à 1,200 com-
muniants (4).
Les principaux hôtels qui en dépendaient étaient THô-
tel-de-Ville, et l'hôtel du Lion-d'Or, où est aujourd'hui le
passage d'Étancourt, qui servit de logis, en décembre 140 1,
au duc de Charolois, depuis duc de Bourgogne.
Notre- Dame-de-la-Ronde était le siège de trois confré-
ries : Tune de Saint- Eutrope, l'autre des Trépassés, plus
tard transférée à Saint- André de la Porte- aux-Fèvres ; la
troisième de Saint-Louis, pour les merciers, dont le
siège fut depuis établi à Saint-Jean.
Le Brun des Marettes, dans ses Voyages liturgiqueSy
nous apprend que, d'abord, en cette église, le saint Sa-
(i) Arch. delà S.-Inf., F. de Notre-Dame-de-la-Ronde.
(2) Ibidem,
(3) Ibidem.
(4) Ibidem. Le Brun des Marettes, dans ses Voyages litur^
giques, publiés sous le nom du sieur de Moléon, dit : « Il y a
encore 10 ou 12 prêtres de la paroisse qui se joignent aux cha-
noines pour chanter l'office. » Dans toutes les églises de Rouen
on remarquait un nombreux clergé.
14^
crcment était gardé, pour le viatique des mourants,
dans une petite armoire pratiquée dans un pilier, du côté
de l'Evangile, sous une image de la Vierge ; que depuis
on le mit tout au haut de la contretable dans une lan-
terne de verre et de menuiserie ; que ce ne fut que dans
les derniers temps, lorsque Ton n'eut plus dégoût pour l'an-
tiquité, qu'on le mit dans un tabernacle sur l'autel. » A
l'appui de la remarque de ce liturgiste je note, dans le
contrat de la fondation d'un vicaire du nom de Michel
Le Roy, de Tannée 141 1, une clause portant que, pendant
la messe d«s obits, on mettrait deux cierges aux deux côtés
du tabernacle t où est et seroit mis le corps de Notre-
Seigneur en l'église, et Tautre sur l'autel >, ce qui établit
clairement que le tabernacle n'était pas encore sur
l'autel.
Nous nous en tiendrons à ces renseignements sur l'his-
toire de cette paroisse. Bien qu'il ne subsiste plus rien de
son église, nous croyons intéressant, au point de vue ar-
chéologique, de dire quelques mots de son architecture et
de son ornementation.
Notre- Dame-de-la-Ronde, d'après une description d'ar-
chitecte de 1731, contenait un chœur, une nef principale,
deux ailes ou deux nefs latérales terminées chacune par
une chapelle, l'une, au nord, dédiée à la Vierge, et précé-
demment à S. Julien et h S. Jean; Tautre, au midi, dédiée
à S. Eutrope.
Les voûtes, tant celles du chœur que de la nef, étaient
portées sur des piliers de pierre de carré d'architecture,
d'où partaient les arcades fermées en ogives . Les ailes, ou
nefs latérales, étaient fermées par des murs avec pieds
droits sur lesquels étaient assises les arcades de leurs
voûtes. Ces murs, à l'extérieur, étaient appuyés par des
buttants.
Ces piliers appartenaient au style de Tarchitecture de
la fin du xv® siècle , comme ceux de Saint- Vivien et de
Saint-Godard; on n'y voyait aucune trace de chapiteaux.
•43
La tour était posée à rentrée du chœur, suivant un
usage qui paraît avoir été général autrefois, aussi bien
dans les églises de ville que dans celles de la campagne.
Vers 1464, on fit construire, au côté droit du chœur, la
chapelle de Saint- Eu trope. On s'adressa, alors, aux conseil-
lers de la ville pour obtenir d'eux c aide à parachever et
parfaire cette chapelle t. Le 29 décembre de cette année,
ils promirent que, dès qu'elle serait en état, ils y feraient
feire f une belle et notable fourme de pierre et de
verre (i). i En i5i3, on fît construire à nouveau, du côté
gauche, la chapelle dite de Saint-Julien.
L'église se terminait, au couchant, par un pignon
plein.
La porte qui donnait accès aux paroissiens avait été
pratiquée dans le flanc de la nef à la dernière travée. Elle
s'ouvrait sur une place dite VAttre de La Ronde , et était
ornée de bas-reliefs représentant le Trépas de la Vierge et
son Assomption dans le ciel. «La Vierge était représentée
entourée d*anges. On lisait en lettres gothiques de fer doré :
Tôt a pulchra es, arnica mea. Le Brun des Marettes signa-
lait cette vierge comme une œuvre d'art remarquable,
c estimée, dit-il, des sculpteurs qui ne manquent pas de
la faire voir aux étrangers, tant pour la beauté que pour
la grandeur de la pierre, ne faisant qu'un corps avec le
pilier. > Au-dessus régnait une galerie assez étroite con-
struite en maçonnerie avec appui décoré d^architecture à
jour. Suivant ï Histoire de Rouen^ édition de lySi, ce
portail aurait été construit, en 1490, aux frais de Mesard.
On accédait dans le cimetière par un autre portail situé
derrière la chapelle Saint-Eutrope. € Ce portail, parfaite-
ment bien travaillé, si Ton en croit la même histoire, était
décoré d'une image de la Vierge, d'une architecture go-
thique. • Il aurait été commencé en i532 et achevé,
en 1537, ^^^ ^**^*^ ^^ Trésor.
(i) Délibérations de rHôtel-de-Villc.
144
Les cchevins avaient une entrée particulière dans cette
église par une galerie qui mettait en communication THô-
tel-de- Ville avec le bas de la nef.
Même après qu'ils eurent, dans Tenceinte même de
l'Hôtel-de- Ville, une chapelle spécialement à leur usage,
Notre-Dame-de-la-Ronde resta leur église de prédilection,
et Ton voit que parfois ils y firent célébrer des services
religieux.
C'était dans Paître de La Ronde, séparé de la rue de la
Grosse -Horloge par un petit mur^ dit le muret de la
Ronde^ qu'ils allumaient leurs feux de joie.
On sait que, dans les circonstances solennelles, c'était à
eux à fournir le bois nécessaire pour les feux de joie
qu'on allumait au parvis de la cathédrale. Mais là ces feux
étaient allumés, suivant un cérémonial invariable., par le
gouverneur de la province, et, en son absence, par le pre-
mier président du parlement. Le rôle du Conseil de
ville se bornait à payer la note de la dépense et à flaire
présenter les torches par le maître de ses ouvrages.
Mais à Taître de la Ronde, le Conseil de ville était chez
lui, et personne n'eût pu songer à lui disputer l'honneur
de mettre le feu aux bûchers qui étaient préparés pour les
cérémonies publiques. Là encore, au coin du muret de la
Ronde^ par les soins des échevins, étaient mises en perce
les barriques de vin t qui servaient à faire boire le peuple
à la santé du roi (i) >.
( i) Publication de la paix de Cateau-Cambrésis, lo avril i SSg :
« Pour exercer libéralité, on distribuera 2 poinssons de vin fre-
laté à tous passans, et pour éviter à la confusion du peuple,
seront dressez deux tables au coing du muret de La Ronde. » —
Feu de joie devant Notre-Dame-de-la-Ronde, 25 juillet i585. —
Feu de joie en Taître de Notre-Dame-de-la-Ronde, près la croix,
allumé par le premier échevin ; « 2 ponsons de vin défoncez au
muret de l'église de La Ronde, pour les donner au peuple en
signe de joie » (à l'occasion de la publication de la paix avec l'Es-
pagne), 7 juin 1598. — A Taître de Notre-Dame-de-la-Ronde, feu
.45
Cet aître otaic bâti cl*échoppes dont trois furent démo-
lies, en 1617, lors de la venue du roi Louis XIII. Quel-
ques-unes de ces échoppes furent pendant longtemps
occupées par des libraires.
La décoration intérieure de Notre-Dame-de-la-Ronde
a varié, comme celle de toutes les églises de la ville.
Entre la nef et le chœur se trouvait, à Torigine, un jubé
surmonté d'un crucifix et accompagné de deux autels,
dont Tun était dédié â Notre-Dame. Cet autel est cité
dans une sentence de Tofficial de 1438, à laquelle nous
avons fait ci-dessus allusion.
Le passage suivant, emprunté à VHistoire de Rouen,
nous donne la description d'un autel à la romaine cons-
truit dans le chœur, et que Ton admirait encore cent ans
après. € En 1688, Ton commença d'élever dans le chœur
un grand autel isolé en forme de colonade avec quatre
colomnes de marbre de Brèche d'Italie et leurs piédestaux
de marbre blanc, enrichis dans les quatre faces de plaques
de marbre pareilles aux colomnes, qui composent un ordre
corinthien, enrichi de tous les ornements dépendant dudit
ordre, tant en l'architrave, frize, corniche et entable-
mens dudit ouvrage , au-dessus duquel sont placées des
courbes qui soutiennent une couronne terminée d'un
globe qui porte une croix, le tout enrichi d'ornemens de
sculpture. A la place de la muraille qui étoit ancienne-
ment derrière, il en a été fait une autre, qui forme une
espèce de cul de four, dans la place du cimetière, décorée
d^architecture en dedans de l'église en forme d*autel, en-
richi de quatre pilastres de marbre, piédestaux revêtus de
marbre, base, chapiteaux, architraves, frise de marbre,
corniche et un entablement cintré dans le milieu pour y
mettre un tableau, le tout de Tordre corinthien, et de
de joie, a6 av. i6ai. — « Ponson de vin défoncé devant la Ronde
pour faire boire le peuple à la santé du roi, > 6 nov. 1628. Fon-
taine de vin coulant pendant la nuit, 5 août i658, 20 fév. 1660,
etc.
10
146
même hauteur que te même ordre dont est composée la
colonadedu grand autel.... Le tout a été exécuté et achevé
l'an 1708 par les sieurs Milet des Ruisseaux, excellent
architecte, et Poultier le jeune, très habile menuisier de
cette ville, et achevé de dorer par le sieur Bachelet,
maître doreur de cette ville, au mois d'août de la même
année. Le tout des dons de Messieurs de la Fosse et
Nozereau, chanoines de la cathédrale, ci -devant doyens
de La Ronde, et Monsieur HorchoUe, à présent doyen ; de
Messieurs les échevins de la ville et de plusieurs parois-
siens. >
Le même goût présida à la reconstruction de Tau tel
Saint-Jean.
M. Du Moustier, en son vivant, lieutenant criminel au
bailliage de Rouen, légua à l'église, par testament, la
somme de 5oo livres^ qui fut employée par le curé à ce
travail.
Le ic"" octobre 1697, sa veuve offrit d'y faire mettre un
tableau où saint Pierre, patron de son mari, serait repré-
senté. Elle choisit^ comme sujet c le miracle fait en faveur
d^un pauvre boiteux, par saint Pierre, à la porte du temple. »
Elle mit à sa libéralité cette condition qu'on conservât
récusson de ses armes, tel qu'il était, mi-parti des armes
de son mari et des siennes. L'offre fut acceptée. L'artiste
auquel elle s'adressa fit une copie d'un tableau de Poussin,
copie assez bien faite pour avoir figuré, pendant quelque
temps, au musée du département. Elle est signalée dans
le Catalogue de Le Carpentier^ sous le n» 334.
L'autel Saint- Eutrope, achevé en 1703, aux frais de la
ville, reçut sa décoration d'une main plus habile. Le
tableau de la contretable fut fait par Jouvenet (i), dont on
a conservé cette quittance : « J'ai receu de Monsieur le
doyen de la Ronde la somme de quatre ving livres pour
le tableau que j'ay fait en la chapelle de Saint-Eutrope.
(i) Ce peintre était de la famille du célèbre Jouvenet.
H7
Faict ce vingt quatre de juillet mil sept cens trois. — •
Jouvenet. •
Le Brun des Marettes et le Tableau de Rouen de 1777
citent, comme dignes de remarque, en Téglise Notre-
Dame-de- la-Ronde, < au milieu du chœur, un ange de
cuivre de hauteur humaine, qui estoit le mieux travaillé
qu'on pût voir, et qui servoit de double lutrin devant et
derrière. > Cet ange avait été donne par le sieur Louis
Bedenne, marchand de Rouen, et feit par Michel Le
Marié, maître fondeur de la même ville, en Tan 1659(1).
Mais ce qu'il y avait de plus remarquable à Notre-Dame-
de-la -Ronde, et ce qui doit surtout attirer notre attention,
c'était la tour, tour ronde, surmontée d'un cône sphcrîque
en pierre.
Il est probable que le nom de La Ronde venait de la
forme de cette tour. On a prétendu, cependant, que cette
forme était aussi celle de tout le corps de l'édifice, abs-
traction faite des chapelles et du bas de la nef, qui n'ap-
partenaient pas au plan primitif, la nef ayant été cons-
truite pendant le décanatde Mesard, et les chapelles entre
1470 et i53o.
M. de Jolimont, dans son ouvrage intitulé : t Les
principaux Édifices de la ville de Rouen en /525, » p 77,
signale, en cette tour, un reste de la primitive ou d'une
(i) A la cathédrale n'était-ce pas aussi un lutrin, cet angs de
cuivre dont il est question dans les comptes de la fabrique
de 1415 et de 1427 : « Johanni Queval pro mundando et clarifî-
cando sex victbus angelum chori in isto anno cum candelabro
de cupro, xl d. — Joh. Caval, dynand, pro mundacione angeli
chori et candelabri de cupro, xx s. » (Arch. de la S.-lnf., G. 2484,^
2484). Cependant Charles VI fit don à la cathédrale d*une
assez forte somme d'argent « pour faire un aigle en façon de
lestrin comme celui de Paris. » L% 8 octobre 1648, on voit
poser, dans le chœur de la cathédrale, un aigle servant à dire
hs leçons, exécuté par Mathieu Touzé, fondeur de Rouen, d'a-
près le modèle du sculpteur Racine. Ibidenif G. 2818.
148
des primitives églises, et nous dit qu^elle était « de style
roman en appareil carre à plein cintre. •
L*auteur de l'Histoire de Rouen croyait aussi à l'anti-
quité de cette construction, puisqu'il attribuait à sa forme
ce nom de la Ronde, connu dès les premières années du
xiii« siècle. € On peut remarquer, dit-il, la tour, qui est
d'une figure pyramidale, composée de petites pierres, par-
faitement bien cimentées les unes sur les autres, soute-
nues de plusieurs petites colomnes ensemble d'espace en
espace, entre lesquelles se forment des espèces d'arcades
que Ton a été obligé de remplir de pierre et de moellon
pour soutenir la pesanteur de la tour qui menaçoit ruine.
Elle est soutenue dans l'église de quatre gros piliers qui
rendent ce temple un peu obscur et matériel. •
On voit, par cette citation, que dès ijSi, et même
avant, la tour de Notre- Dame-de-la-Ronde avait donné
lieu à de sérieuses inquiétudes.
En 1 75 1, les alarmes devinrent plus vives, et l'on en
vint à redouter pour les paroissiens un malheur sem-
blable à celui qui était arrive, le i5 septembre 1739, en
l'église de Sa int-Thomas-du- Louvre, à Paris.
On s^adressa à M. de la Bourdonna ye, Intendant de la
généralité. Il fit visiter l'église par Jean-Nicolas De
Montjay, « architecte expert-juré des bâtiments, arpen-
teur du roi pour le bailliage, généralité de Rouen et res-
sort du parlement de Normandie. »
Le rapport, rédigé à la suite de cette visite, ne fut rien
moins que rassurant. Il concluait, sans hésitation, à la
démolition immédiate du clocher, qui pouvait s'écrouler
d'un moment à Tautre.
• Cette démolition fut décidée en principe. Mais il fallut
du temps pour examiner les projets de démolition et de
reconstruction qui furent §lors proposés par divers archi-
tectes, MM. De Montjay, Thibault et Le Brument.
Plusieurs années s'écoulèrent : la situation ne s'aggrava
pas; on reprit confiance, et l'on s'enhardit même à faire
149
sonner de nouveau les cloches que, pendant quelque
temps, on n'avait pas osé mettre en branle dans la crainte
d'ébranler le clocher.
M. de Belbeuf, procureur général au parlement, nomma,
à son tour, en 1 766, un architecte, Pierre-Amand Quinel,
qui rassura complètement les trésoriers et le public, en
démontrant que le défaut d'aplomb et les lézardes que
Ton avait signalés, remontaient à Tépoque même où la
construction avait dû prendre son assiette.
La fabrique s'en rapporta à son avis qui lui épargnait
une lourde dépense à laquelle elle n'eût su comment pour-
voir, parce que les ressources sur lesquelles elle avait
compté lui avaient échappé. Elle ne trouva à redire que
sur le chiffre des honoraires, que l'architecte ne put se ré-
signer à réduire qu'à la suite deiongues discussions (1770).
Le rapport de De Montjay, auquel il ne fut donné aucune
suite, nous offre, du moins, cet avantage de nous faire
connaître assez exactement la structure de la tour de
Notre- Dame-de-la-Ronde.
D'après le procès-verbal qu'il dressa en 1752, t le clo-
cher était porté sur quatre piliers, deux de la dépendance
du chœur et en formant l'entrée, les deux autres dans la
nef. La distance entre les deux piliers du chœur était de
16 pieds I pouce; entre les deux autres, de i5 pieds
7 pouces seulement.
f La hauteur de la voûte, prise au milieu des quatre
piliers, à l'endroit où se trouvait le passage des cloches,
était de 36 pieds.
< De la naissance du clocher à la pointe on comptait
84 pieds sur 17 pieds 7 pouces de diamètre au-dessus de la
voûte et dans œuvre. •
€ Ce clocher était construit, dans toute sa hauteur, de
maçonnerie de carreau de bloc, dirigé, à l'extérieur, d'un
plan rond, à l'intérieur, d'un plan octogone. La tour, de
la voûte à la naissance de la flèche, avait 1 7 pieds de hau-
teur. »
i5o
Bien que cette tour nous paraisse indubitablement une
construction antérieure à Tépoque gothique, nous devons
faire remarquer que les piliers, a en juger par un plan que
nous avons sous les yeux, étaient taillés dans le genre de
ceux de la nef : ils présentaient des nervures prismatiques
qui annoncent clairement la fin du nw^ siècle ou le siècle
suivant. Il faut supposer, à notre avis, qu'ils avaient été
remaniés et que la masse en avait été dégrossie lorsqu'on
construisit la nef du temps de Mésard.
Nous compléterons cette notice en y ajoutant quelques
extraits des comptes de la fabrique et la copie de quelques
documents. Si nous ne nous trompons, on y trouvera
quelques éclaircissements sur des artistes rouennais et
sur d'anciens usages, en général peu connus.
ENTRA ITS DES COMPTES DE NOTRE-DAMK-DE-LA-RONDE
Pâques 1541 Pâques 1542 : — « Mise pour les orgues :
A Jeh. Quonyam, masson, pour avoir faict les cartouches
pour les orgues, xlv s. — Pour la parpaye desd. cartou-
ches, IV 1. X s. — A Me Jeh. Gougeon, pour avoir faict les
cartouches, le chapiteau de la coulonne et les ars-boutans
ou arpiez, jouxte le marchié faict avec luy, la somme de
xLix 1. X s. —Audit M« Jeh. Gougeon, pour avoir vaqué par
dix moys, à solliciter les huchers et les corriger de leurs
faultes, la somme de xv l. xv s. — A Thierry Du Bosc,
hucher, pour boys et peine d'avoir assis lesd. ars-boutans
au fust des orgues, xx s. — Paie à N" Quesnel, tailleur
d'ymages, pour avoir Êiict six images à mettre aux orgues,
Lxii 1. X s. — Pour le vin de la Saint-Martin, aux servi-
teurs des compositeurs d'orgues, x s. viu d. — Ausd. com-
positeurs, pour ung disner de la Saint-Martin, xlv s. —
A un nommé Jeh. Duchesne, pour avoir faict le devys
des orgues et du fust et ung vittre, xxv l. — A Robert
Lecourt, vitrier et peintre, pour avoir faict troys pour-
traictz pour le feict des bans, xlvii s. — A M«s Robert
Becquet (i), Jeh. Gougeon et Jeh. Duchesne, pour dire
leur opinion de l'ordonnance de deux anges et ungloureur
et deux autres anges avec une y mage Nostre Dame, paie
xxxn s. — A M« Anthoine Josseline et Guilbert Coquerel,
compositeurs desd. orgues, cl. — A Ch. Barate (2),
peintre, pour avoir peint les orgues et ymages iic xvii I. x s.
— Aud. Barate, pour avoir fleurdelisé le pendant de de-
vant les orgues, v 1. » Mention, dans le même compte, de
Tautel Saint- Julien et du paiement fait à Téglise d'une
somme de 100 1. par Guill. Bigot, maître de la confrérie
de Saint-Eutrope.
1 542-1 543. — « A XII organistes, pour avoir visité et
fait jouer les orgues, x 1. vu s. x d. • — Mention < de la
voirrière Saint-Julien >; de Tautel Saint-Julien; de Ma-
thieu Le Roux, orfèvre.
1 543-1 544. — Mention d'Antoine Josseline, facteur
d'orgues.
1544-1545. — Vente du fût des vieilles orgues, 8 1.—
Mention € du benestier de l'autel Saint-Sébastien. »
1547- 1548. "~ Gages de l'organiste, 35 1. t Pour vi gal-
lons de vin, lesquels ont esté délivrez à M« Toussains et
Le Page, clerc de lad. église, pour son bancquet qu'il a
faict comme maistre de la Sainte-Cécile, xxiv s. — Pour
une fourme à mestre soubz les orgues à se asseoir pour
cueillir aux reliques, xviii s. » Suivant un usage gé-
néral, les aumônes, à certains jours, étaient provoquées
par l'exposition des reliquaires.
1548- 1549. "~ * Pour avoir raccoutré les anges de l'é-
glise, au paintre, xxxv s. A ung masson, pour foire les
troux des voultes, pour pendre lesd. anges, vi 1. viii s. »
(i) Ailleurs, le même, avec Jeh. De la Rue, maçon, et Olivier
Delacour, est chargé de visiter Téglise.
(2) Ce peintre mourut en i553, comme le prouve cet article
inscrit dans le compte de cette année-là : « Receu pour la sépul-
ture de Ch. Barate, peintre, xxn s. »
l52
— 8 aunes de corde pour tendre le voile du chœur. — « A
Pierre Le Febvre, fondeur, pour ung candélabre à mettre
au chœur, xxxv 1. > Ce candélabre était pendu à la voûte
par des verges de fer. — < Pour plomber le bénestier, à
rentrée de l'église, xxxiii livres de plomb a vi d. la livre. »
1564. — On paye à Christophe Bellenger, imaginier,
demeurant à Saint-Pierre-de-Manneville, 38 1. « pour
reste et parpaye de ce qui lui étoit dû pour avoir fait le
crucifix de Téglise et les 2 images > (probablement la sainte
Vierge et saint Jean). — t A Georges Le Pilleur, peintre,
pour les avoir peint et la boise (poutre ou arc triomphal)
portant le crucifix, un" v 1. •
1 582-1 583. — Construction d'une croix devant l'église,
par Thomas Brière. On fit venir la pierre de Vernon.
Cette croix était ornée de quatre images ou statues. Brière
est encore cité dans le compte de 1607.
Compte de i588. — Nouvelles orgues confectionnées par
un nommé Nicolas Barbier, dont le nom se retrouve dans
les comptes de 1590 et de i6o3. Elles furent visitées par
Jean Titelouze, organiste de Notre-Dame, et par Corneille,
organiste de Saint-Michel. La même année, on eut recours
à Jérémie Le Pilleur, peintre, pour redorer la couronne
de rimage saint Louis (3i 1. 10 s.), et à Timaginier Jean
de Rouen, pour retailler ladite image.
1589. — Travaux de verrerie par Philibert Du Mesnil.
1591. — Paiement de 60 1. pour travaux exécutés par
le peintre Fernande Du Hay.
1 599. — Contretable feiite par Michel Lourdet. On paye
au menuisier Rouland Sebeult, 174 1., c pour avoir livré,
devant le grand autel, les carolles avec les 2 coulonnes et
les 2 anges sur icelles coulonnes ; et 5o s. pour 2 lieu-
trins faicts par lui, attachez ausd. carolles et coulonnes
pour dire les epistres et évangiles >, sans compter quel-
ques gratifications qu'on lui donna sous le nom d'honnes-
tetéSy et 8 livres a\i maçon qui avait fait les bases des pié-
destaux desd. colonnes.
i53
1600. — Mention des verriers Jean Gaillard et Etienne
Pinchon. Ce dernier refit une vitre qui avait été en/on-
drée par les voleurs.
1604. — Lourdet reparaît. On lui paye 21 3 1. pour tra-
vaux de dorure au grand autel, qu'on déplace pour le mettre
plus autour.
1609. — Paiement de 106 1. à Jean Besoche pour tra-
vaux de verrerie.
1612. — Mention de Jacques Bernard, facteur d'orgues,
et de Guillaume Varenger, menuisier, qui mit des balustres
aux orgues.
16 14. — Mention de la visite faite de Tcglise Notre-
Dame-de-la-Ronde par le coadjuteur.
1616. — On paie 5 1. 2 s. 6 d. à Philippe Liégeard,
menuisier, pour une longue forme ou table pour servir à
communier.
1617. — Au mois d'août, construction d'un oratoire
pour le jubilé des 40 heures. On fit nettoyer le portail
lorsque le roi arriva en cette ville.
En i653, mention du tapis qui se mettait tous les jours
à la chaire. On Tacheta 18 1. (i).
En 1736, Tarchitecte De France est chargé de la déco-
ration du choeur. Un nouveau pavage en marbre et en
terre cuite est substitué à l'ancien. Une des conséquences
de ce travail fut la destruction des tombes, notamment de
celles de Mesard et de Bacqueler. La chose allait telle-
ment de soi, dans la pensée du Chapitre, des paroissiens
et de l'architecte, que, dans le devis, on se contente de les
indiquer en termes généraux et comme de simples maté-
riaux qu'il ne fallait pas laisser perdre : « Il convient faire
scier en deux une grande tombe de marbre noir qui est
de présent au bas du chœur, plus une autre tombe qui est
cassée en deux, une autre plus petite qui est au milieu
(i) Une nouvelle chaire fut faite par Mouard, menuisier, vers
le milieu du xviiie siècle.
134
des deux grandes cy-dcssus, etc., le tout étant de marbre
noir, qui serviront de tombes et bandes au pavage tant
devant la marche du sanctuaire qu'aux bouts et costes des
stalles, lesd. tombes et bandes seront bien et deuement
ocarries pour y faire des coupes à plat. » Ce fût avec le
même sans-façon qu'en 1738, on fit disparaître la croix de
pierre du cimetière et que Ton supprima l'ancien portail
avec sa vierge et ses ornements gothiques; le tout pour
la construction d'échoppes.
DÉLIBÉRATION AU SUJET DES TAPISSERIES
Le mardi xiii d'avril mil vc un" dix-neuf, feste de Pas-
ques, en procédant à la clausion du compte rendu par le
sr Guill. Du Buse, trésorier, il a esté proposé, entre aultres
choses, que la tente généralle qui se ÙLict en ceste église
le jour de Pasques, de diverses pièces de tapisseries, ciels
et tapis, n'étoit point nécessaire, ny bonne de continuer à
l'advenir, d'aultant que la plus grande partie desd. pièces
(de tapisserie) se voit ordinairement n'estre que des his-
toyres et représentations prophanes et déshonnestes qui
n'aportent nulle révérance ny dévotion en l'honneur de
Dieu ny de son ecclise, mais seullement une curiosité qui
tend à volupté par le regard de la beauté desd. pièces,
et par ainsy l'intention première de nos anciens, qui n'a
esté que pour honnorer Dieu et son ecclise, seroit dé-
laissée et mesprisée. Davantage que c'est une trop grande
peyne au trésorier de rechercher par tant d'endroicts la
quantité desd. tapisseries qu'il luy convient avoir en telle
occasion, dont souvent il advient des inimitiez entre
plusieurs personnes, à cause du refus qui se faict de
prester aucunes d'icelles pièces, joint les avaries extraor-
dinaires qu'il y a en l'exécution de lad. tente généralle,
faicte en des jours qui ne sont point particulièrement sol-
lempnisez, pour ceste paroisse, et partant qu'il estoit bon
d'en résouldre pour l'advenir, mesmes en considération
que Messieurs les grands vicayres et archidiacre de Mgr
i55
l'archevêque de ceste ville ont, par plusieurs foys, aux
cours de leurs visites, exhorté les curez des parroisses de
ceste d. ville de ne permettre tendre en leurs ecclises
telles superfluitez de tapisseries ; ce qui a esté ainsy dict
et raporté par mondit le doyen et curé de ceste ecclise ;
Arresté que, pour les raisons susdites, il ne se fera, de
ce jour et à Tadvenir, aucune tente de tapisserie en ceste
d. ecclise, pour ledict jour de Pasques ou pour les autres
festes de l'année, sinon que ce qu'il conviendra de ciels
et tapis pour mettre seullement dans le chœur et dessoubz
le crucifix d'icelle, et non aultre part, parce que lesdits
ciel et tapis ne seront que en £aissons de fruicts et non
à personnages, pour éviter l'interprétation de la représen-
tation d'iceulx personnages, et ce en attendant qu'il y ait
moyen de faire flaire et avoir, aux dépens du Trésor,
telles pièces qui sera lors advisé pour le mieux pour la dé-
coration et ornement de lad. ecclise ; et pour ayder à faire
fonds audit Trésor pour tel effect, il a esté aussy arresté
que chacun trésorier, pour l'advenir, donnera audit Trésor,
en la dernière année de sa charge, la somme de douze
escus ou autre plus grande somme, sy sa dévotion l'incite
à ce fayre, et que la présente résolution sera suivie et
entretenue d'ores en avant et pour les années à venir. •
LETTRE DE M. DE BELBEUF, PROCUREUR GÉNÉRAL, AU SUJET
DU CLOCHER DE NOTRE-DAME-DE-LA-RONDE
c RouCn^ ce ii avril 1770.
c Messieurs,
•< Vous avés eu connaissance que, dans les années 1 766
et 1767, on agita pendant longtemps le point de sçavoir
si le clocher de vostre église menaçoit ou non une ruine
prochaine, capable d'entraisner dans sa chute la partie de
réglise sur laquelle il tomberoit ; les maisons de plusieurs
propriétaires voisins étoient menacés du même danger;
i56
la perte de la vie et de la fortune de ceux qui se trouve-
roient sous ces ruines ajoutoient rhorreur d'un spectacle
effrayant au malheur général dont la paroisse craignoit
le moment. Il étoit cet instant annoncé comme très pro-
chain ; différents proceds verbaux d*architectes avoient
jette une allarme universelle ; vous vous rapellerés encore
que pour prévenir tous ces maux, il fut question d'un
emprunt considérable sur la paroisse ; qu'il y eut même
des engagements pris par la fabrique pour la somme de
1 5,000 1. Vous me fîtes part de vos craintes et de Teffroy
public qui constcrnoit vos paroissiens ; nous crûmes ce-
pendant qu'il étoit sage, avant que de se livrer à une dé-
molition très coûteuse et à des emprunts très onéreux, et
qu'il convenoit de se bien assurer des dangers comme de
ne rien épargner pour chercher les ressources au mal. On
sçait bien lorsqu'on commence un ouvrage de cette es-
pèce le prix qui est annoncé qu'il doit coûter, mais on
ignore toujours ce qu'il coûtera. Soyez sur que votre
église auroit été culbutée en totalité et que la réédifîca-
tion auroit été généralle. Il n'y a plus de bornes alors aux
dépenses; elles tiercent sur celles des particuliers quand
elles regardent des corps ou des administrations. Je peux
dire, Messieurs, qu'un œil de sang froid sur vos dangers
prétendus vous a sauvés, soit à titre de trésoriers ou de
propriétaires, cette dépense accablante. Votre trésor s'en
seroit senti longtemps, et les propriétaires suporteroient
aujourd'huy une lourde somme, chacun pour sa contribu-
tion; différentes ordonnances que je rendis arrêtèrent les
pas qu'on vous engageoit de précipiter. Le sieur Quinel,
architecte, fut par moy nommé pour vérifier la cause des
lézardes qu'on croyoit apercevoir pour la première fois au
lever d'un beau soleil qui les éclaira. Je luy fis remettre
les anciens proceds verbaux de ces lézardes antiques ainsi
que des inclinaisons des murs des pilliers du clocher ; il
aperçut, après un travail sage, sans prétentions que le vice
qu*on disoit nouveau étoit aussi ancien que le moment
•57
premier ou après la construction du clocher le bâtiment,
ayant reçu ce poids, avoit cherché de lui-même son aplomb
et qu'en se roidissant contre le fardeau qu'on venoit de
luy donner il avoit feit des efforts pour établir Tapuy né-
cessaire de toutes les forces qui en dévoient soutenir la
masse, que ces efforts avoient donné lieu aux lézardes, et
qu'ainsy il ne falloit point faire de constructions nou-
velles ny de démolition du clocher, mais seulement répa-
rer et rétablir en neuf certaines parties qui avoient été
mal faites dans le principe ; dépense médiocre en compa-
raison de celle qu'on vous présentoit à faire et dont vous
ne connoîtriez peut-être pas encore le capital.
« Il l'échafauda, il dressa desproceds verbaux; ces actes
donnèrent lieu h une discussion littéraire entre luy et les
architectes qui condamnoient votre église à une chute
prochaine. Il prit en main vos intérests et il les défendit
si bien et si publiquement que M. l'Intendant jugea à
propos, à la lecture de ces écrits respectifs, de faire faire
une visitte d'office par deu» ingénieurs qui trouvèrent
qu'il n'y avoit point de danger à craindre du clocher ny de
nécessité de démolir aucunes parties de l'église, mais qu'il
suffisoit de faire des réparations ; cela est constant par
leur proceds verbal du 6 febvrier 1767.
« Le sieur Quinel est donc l'homme qui vous a servi
utilement. Son assurance et sa fermeté à soutenir un
point de fait aussi intéressant pour vous a donc sauvé à
votre fabrique et à tous les propriétaires une dépense
énorme et accablante ; vous jouisses tous aujourd'huy de
ses peines, puisqu'au moyen d'une dépense modique vous
avés l'avantage d'avoir conservé un monument ancien
dans cette ville, une église suffisante à votre paroisse, et
vos revenus sans cotisation lourde et fort chères dans des
années surtout où le pauvre suffit à peine à ses besoins
et où le riche est trop heureux d'avoir du superflu pour
le répandre chés l'indigent. Il est juste que le sieur
Quinel soit payé ; il s'est adressé à moy pour vous
i58
présenter sa prière. Je m'en suis d'autant plus volontiers
chargé que j'ai connu ses vu^s, que j'ai réglé ses dé-
marches et que je suis persuade que vous m'en avés de la
reconnaissance.
« Jay rhonneur d'être, Messieurs, votre très humble et
très obéissant serviteur,
c Belbeuf. »
Ce qui attire le plus Tattention dans les documents
cités à la suite de cette notice c^est Tindication d'un
travail dont fut chargé Jean Gougeon.
On ne saurait affirmer qu'il s'agisse du fameux
sculpteur; ce n'est pas cependant invraisemblable,
puisque cet artiste passe pour avoir séjourné et tra-
vaillé à Rouen vers cette époque.
M . le Président fait observer que les mêmes prénoms
se transmettaient dans les familles, et que Ton ne peut
induire de cette communication rien de précis à Tégard
du célèbre artiste.
PETIT-QUEVILLY.
M. Tabbc Tougard rappelle que, à la fin du mois der-
nier, la presse locale et même la presse parisienne ont
signalé des inscriptions plus ou moins patriotiques, fraî-
chement apposées sur la chapelle Saint-Julien ; en s'éton-
nant que la Commission des antiquités n*ait pas protesté
h ce sujet.
La Commission estime qu*il n'y a pas lieu d'introduire
ce débat.
La séance est levée à trois heures et demie.
G. GOUELLAIN.
iSg
SÉANCE DU i6 DÉCEMBRE 1882.
La séance ouvre à deux heures à la Préfecture, dans
la salle des adjudications, sous la présidence de M. de
Beaurepaire, vice-président.
Présents : MM. Adeline, Paul Baudry, Billiard,
Bouquet, Tabbé Lx)th, Maillet du Boullay, de Merval,
Pelay, Tabbé Tougard, de Vesly.
Excusés : MM. Brianchon et de Girancourt.
En Tabsence de MM. d'Estaintot et Brianchon,
Tabbé Tougard est chargé des fonctions de secrétaire.
La correspondance imprimée comprend :
CompteS'-rendus de la Société des Antiquaires de
Saint-Pétersbourg, i" fascicule gr. in-40 et atlas
gr. in-fol. ; — Bulletin de la Société des Antiquaires
de rOuesty 2« et 3« trimestre de 1882 ; — Commission
des Antiquités et des Arts de Seine-et-Oise, 2« fasci-
cule de 1882 ; — Mémoires de la Société d'Agricul-
ture d'Orléans, 4* trimestre de 1*882 ; — Bulle-
tin de la Société historique et archéologique de
LangreSy t. II, mai 1882 ; — Recueil des Publica-
tions de la Société havraise d'Études diverses,
46*^ année, 1879 ; — Procès-verbaux des séances de
la Société des Lettres , Sciences et Arts de VAvey-
ron, juillet 1878-mars 1880; — Mémoires de la 5o-
ciété de statistique, Sciences et Arts des Deux-
Sèvres, 2« série, vol. XIX (pour 1881) ; — Bulletins
de la Société de statistique, Sciences et Arts des
Deux-Sèvres, n^* 7-12, 2 fascicules ; — Bulletin de
la Société d'Histoire, d'Archéologie et de Littéra-
ture de l'arrondissement de Beaune, 1881 ; — Bul-
letin de la Société des Antiquaires de Picardie, 1882,
i6o
n° 2 ; — Bulletin de la Société des Amis des Sciences
naturelles de Rouen, 1882, i*^ semestre; — Mémoires
de la Société historique du Cher, 3« série, t. II,
3« livraison ; — Board of régents^ of the Smith-
sonian institution for the geer, Washington, 1882.
La correspondance manuscrite comprend une lettre
de M. le Préfet, qui annonce le renouvellement du
crédit de 1,000 fr., voté par le Conseil général, et ré-
clame le dépôt dans les bureaux du Bulletin de la
Commission, qui doit être mis sous les yeux de ras-
semblée départementale.
Armes et autres objets antiques, — M. de Vesly a
la parole pour Timportante communication qu'il a
résumée lui-même dans les termes suivants :
Le service des ponts et chaussées a fait exécuter, depuis
une année, entre Elheuf et Orival, des dragages dont la
dépense a dépassé 1 85, 000 francs. C'est dire que plus de
16,000 mètres cubes de sable ont été extraits du lit du
fleuve. Un tel travail devait nécessairement amener des
«
découvertes archéologiques. Aussi MM. de Lagrené et
G. Lechalas, ingénieurs des ponts et chaussées, sous les
ordres desquels les dragages s'exécutaient, ont-ils tenu
rigoureusement à l'accomplissement de la clause du cahier
des charges mentionnant la remise des objets trouvés à
l'administration des ponts et chaussées.
C'est donc grâce à la vigilance des agents chargés de la
surveillance des dragues que notre collègue, M. Léon de
Vesly, a pu dresser l'inventaire des objets recueillis.
OBJETS d'époques DÉTERMINÉES.
lo Belle épée de l'âge de bronze; 20 Lance gauloise;
3*» Épée gallo-romaine; 4° Fragments gallo-romains;
30 Fer de lance gallo-romaine ; 60 trois fers de lances
mérovingiennes; 70 quatre scramasaxes; 8° une francisque;
i6i
90 un couteau carlovingien incrusté d'or; 100 une lame
de couteau; iio Fragments d'épée; 12° Ecuelle d'étain,
xiie siècle, avec marque; i3o Poignard du xv«; 14» Fer
de hallebarde du xv« ; 1 5o Chandelier du xv« ;
OBJETS d'époques INDéTERMlNÉES.
160 Faucille; 170 Lame de fleuret; 180 Baïonnette;
190 Canon de fusil.
DÉBRIS DE LA FAUNE.
Ossements de mammouth, de bos primigenius^ de cerf,
de cheval et plusieurs ossements qui n'ont pu être déter-
minés.
Sur la demande de M. Tabbé Tougard, M. de Vesly avait
été prié de faire connaître la profondeur du gisement où
les objets avaient été trouvés. Ce travail n*a pas été pos-
sible : car les états d'attachement mentionnent le profil,
c'est-à-dire l'endroit de la rivière d'où les objets ont été
extraits; mais il faudrait une vérification de la profondeur
atteinte par la drague au moment de la découverte, et il y
a là des impossibilités d'un ordre matériel.
M. le Président prie M. de Vesly de faire une épure
des pièces les plus intéressantes qu'il vient de présen-
ter à la Commission, et il fait voter des remercîments
à M. Léchalas et à M. de Vesly.
M. Pelay demande à notre confrère s'il a pu sur-
veiller également les dragages exécutés dans le port de
Rouen^ et qui ont dû retirer des eaux de curieuses
pièces. M. de Vesly répond que les ouvriers ont
fait main basse sur ce qu'ils ont jugé à leur conve-
nance : il ne peut signaler qu'un chandelier et une
marmite de bronze, trouvés ensemble, et qui sont au-
jourd'hui en vente chez un brocanteur.
Anciennes maisons de Rouen. — M. Maillet du
II
l62
Boullay offre à la Commission la photographie de deux
maisons de Rouen, Tune du quartier Saint-Sever, et
Tautre à Tangle de la rue Tuvache et de la rue Mal-
palu.
Cette dernière lui fournit Toccasion de rectifier une
note publiée, il y a trois jours, par le Journal de
Rouen, L'auteur de cette note affirmait qu^on la voyait
V disparaître avec regret; > tandis que, grâce aux soins
de notre collègue, elle ne disparaîtra pas du tout. Il Ta
visitée avant que les ouvriers aient commencé à l'atta-
quer; et Tadministration municipale ayant corres-
pondu avec bienveillance à ses désirs, il en a recueilli
dans le musée départemental les remarquables épaves,
entre autres des pilastres les plus beaux qui se puissent
voir à Rouen. Il avisera ensuite à restituer cette mai-
son à rinstar de celles qu'on a déjà restaurées.
Ses efforts ont été moins heureux quant à une mai-
son de Saint-Sever, dont M. P. Baudry possède heu-
reusement plusieurs dessins. Car les fragments sont
loin d'être au complet, et, pour Torigine de ces dispa-
ritions, il faut remonter avant la guerre, et en attribuer
la responsabilité à des hommes qui n'y avaient vu
qu'un vulgaire moyen de chauffage.
Découverte d'un trésor à Blévilie. — Le même
membre a reçu, en date du 5 courant, une lettre de
M. le Préfet, lui demandant son avis sur une autori-
sation de vente formulée, le 1 1 novembre dernier, par
le Conseil municipal de Bléville, au sujet d'un trésor
ou cachette trouvée dans l'ancien cimetière, et se com-
posant de 1 3o pièces d'or des xiii«, xïv« et xv^ siècles.
L'intention de la municipalité est de provoquer une
vente publique, au Havre, après l'avoir annoncée avec
toute la publicité possible.
i63
La première pensée de M. Maillet du Boullay avait
été de prier M. le Préfet d'y mettre opposition. Il se
fondait sur ce que Tautorisation réclamée impliquait
que la commune n'avait pas un droit absolu de vendre.
Sur quoi M. de Beaurepaire fait remarquer que Tau-
torisation n'est qu'une pure formalité résultant de la
tutelle administrative.
Aussi^ réflexion faite, et la loi accordant moitié de
la trouvaille à Touvrier, et moitié à la commune, M. le
Conservateur du musée s'est borné à répondre au
Préfet qu'il serait grandement désirable qu'il ne fût
pas procédé à la vente publique, avant qu'on ait pu
constater quelles sont les pièces de ce trésor qui man-
quent à la collection départementale, de façon à ce
qu'elles pussent être acquises de gré à gré, sur estima-
tion contradictoire à dire d'experts. L'une de ces pièces
a été offerte à la personne qui a été chargée de colla-
tionner et d'estimer provisoirement ce trésor.
Antiquités diverses. — M. le Président rappelle
qu'il est resté dépositaire de divers objets qui doivent
être déposés au musée, et dont quelques-uns mérite-
raient les honneurs de la gravure, par exemple, ce dé-
bris de vase qui portait l'inscription : Pense à la mort,
poure sot.
Fragments de vitraux. — Il signale, en outre,
parmi eux, les restes de deux vitraux de Saint-Gervais,
décrits par M. Thieury dans son ouvrage sur cette
église. Ils avaient été déplacés lors de la restauration
du monument; mais leur nouvel emplacement les ex-
posa bien davantage aux intempéries de l'air, et une
bourrasque les a crevés, en rendant impossible toute
reconstitution.
M. Maillet du Boullay explique qu'il a recueilli de
t64
semblables fragments à Saint-Maclou, et que le rem-
placement des anciens vitraux de cette église lui fera
peut-être courir le risque dMtre encombré de ces frag-
ments.
On objecte que si le Musée départemental vient à
être transféré dans Téglise Saint-Laurent, ces débris
pourront devenir un utile auxiliaire de cette installa-
tion nouvelle.
Cathédrale. — Tour de Beurre. — M. Tabbé Loth
demande à la Commission de formuler un vœu dont
il n^aura aucune peine à lui faire sentir Timportance.
Tous nos confrères savent, en effet, que, cette se-
maine même^ une gargouille s*est détachée de la Tour
de Beurre, et a causé le plus juste émoi dans le voisi-
nage : car le fracas de sa chute a fait croire à une ex-
plosion.
M. Loth a visité la tour à la suite de l'événement,
et il a été frappé de son état de délabrement. Depuis
longues années elle n'est Tobjet d'aucune surveillance,
mais livrée à un entier abandon. Les vents et les
pluies ont emporté les mortiers et descellé d'énormes
pierres ; en sorte que de nouveaux accidents sont à
craindre.
M. Bouquet confirme les paroles du dernier histo-
rien de la cathédrale par l'effroi qu'il a éprouvé lui-
même, il y a déjà plusieurs années, en visitant la
tour. Il signale spécialement, au passage qui donne
accès dans la tour, une trentaine d'éclats de pierre
qu'une bourrasque pourrait fort bien lancer sur la voie
publique, et demande que ces pierres soient enlevées.
Il se demande même comment on osait sonner Té-
norme Georges d'^Amboise. M. de Beaurepaire répond
qu'il n'était sonné que rarement, et non sans appré-
i65
hension, à cause, disent les registres capitulaires, de
rétonnement delà tour.
M. l^abbé Loth constate que la restauration de la
cathédrale se poursuit sans relâche, grâce aux alloca-
tions généreusement accordées par le Gouvernement.
Les sommes dépensées sont considérables, sans doute,
mais ne répondent pas à Timportance de Tédifice. Des
basiliques beaucoup moins vastes, celles de Séez et de
Coutances, par exemple, sont mieux partagées. Notre
collègue voudrait donc que, après un examen compé-
tent de la situation, on fît auprès de M. le Préfet une
respectueuse instance pour qu'il voulût bien stimuler
la bienveillance du comité supérieur des architectes de
Paris.
La Commission décide que deux de ses membres,
MM. les architectes de Vesly et Simon, se joindront à
M. l'abbé Loth pour visiter, jeudi, la Tour de Beurre,
et que le résultat de leurs observations sera consigne,
par écrit, et transmis immédiatement au Préfet.
— M. P. Baudry lit les deux notes suivantes :
GAILLON. — DÉCOUVERTES ARCHéOLOGIQUES
M. le docteur Hurel, de Gaillon, dont vous avez bien
voulu consigner déjà quelques découvertes archéolo-
giques (t. IV, p. 342 du Bulletin de la Commission), m'a
fait part, cette année, de ce qui, depuis cette époque, a
été trouve dans la région qu'il habite et en grande partie
recueilli par lui.
Je citerai entre autres, dans les travaux faits pour
l'écluse de Notre-Dame-de-la- Garenne, commune de
Saint-Pierre-la-Garenne, deux hachettes en pierre, une
dent qu'il croit être d'éléphant, et des ossements ; à Saint-
Aubin, un fragment de hachette; au hameau de Chante-
loup, deux percuteurs, une hachette et des flèches en
i66
pierre; à Autheuil, une hachette; à Noire-Dame-de-la-
Garenne, quatre tombeaux en plâtre.
ANCIENNES CHAIRES. — NOTES DE RAYMOND BORDEAUX
Le Bulletin de la Commission des antiquités constate
(t. III, p. 335) que j'ai offert à cette Société le calque d'un
dessin, fait par M. d'Arras, architecte, de l'ancienne
chaire en bois de Notre-Dame.
Pour venir tardivement, quelques notes relatives à cet
ancien monument ne seront peut-être pas sans intérêt,
d'autant que je les lire, en grande partie, d'une corres-
pondance qui m'avait été adressée en 1874, sur le même
sujet, par M. Raymond Bordeaux, de regrettable
mémoire.
Notre savant confrère considérait cette chaire comme
très curieuse et comme étant peut-être la seule chaire
épiscopale, à roulettes, conforme aux rites, qui eût sur-
vécu aux transformations modernes. Les chaires fixes,
nous écrivait-il, convenaient aux paroisses remplies de
bancs fixes. Les chaires roulantes étaient celles des cathé-
drales, où il n*y avait autrefois ni sièges ni bancs d*œuvre.
La chaire de Notre-Dame, d'après le même archéo-
logue, était une tribune à barreaux, analogue au barreau
des anciens tribunaux. On plaçait sur son vaste plancher
la chaise, le fauteuil, cathedra^ de l'archevêque, qui s'as-
seyait là, entouré de son cortège. Les barreaux ne devaient
pas être primitivement garnis d'un lambris, mais d'une
tenture, et pouvaient laisser voir le fauteuil. Il y avait, il
y a peut-être encore à Rugles, à Verneuil, des chaires en
fer et à jour comme des balcons.
Les anciennes chaires, dit encore M. Raymond Bor-
deaux, étaient peu élevées et beaucoup moins que les
jubés. Le tact de nos pères leur eût fait trouver inconve-
nant d'obliger un évêque, un prêtre âgé, de monter un
long escalier, quand un degré de quatre ou cinq marches
suffisait pour le placer au-dessus de l'auditoire. Des
16;
transformations^ relativement modernes, avaient dû en
effet exhausser le plancher et l'appui-main de la chaire de
Notre-Dame et donner plus de développement à Tescalier.
Un article de la Semaine religieuse (1881, p. 1004) cons-
tate même que la chaire aurait été surélevée de la hauteur
de la petite galerie qu'on remarquait à sa base.
L*abat-voix, toujours d'après M. Raymond Bordeaux,
était étranger aux usages anciens et ne prenait jamais
l'apparence d'un dais ou d'un baldaquin, couronnement
autrefois réserve aux autels et au Saint-Sacrement. Notre
savant confrère citait, à l'appui de cette assertion, une
chaire roulante de la cathédrale de Troyes, chaire du
xvi^ siècle, connue sous le nom de chaire de Saint-Ber-
nard. Elle n'a pas d'abat-voix, disait-il, non plus qu'une
autre chaire roulante, reléguée dans un coin de la collé-
giale de Saint- Quiriace, à Provins.
Les premiers abat-voix étaient en forme de carène,
continue notre correspondant, comme celui de l'église
Saint-Cyr d'Issoudun, dont la chaire date de 161 8; c'était
un petit toit garni de deux crochets potences, en fer, qui
ont dû servir à tendre un voile ou une tapisserie. Mais la
plupart des abat-voix primitifs affectaient la forme d'un
plafond plat, comme celui de Coutances et comme ceux
que l'on voit représentés dans les intérieurs d'églises
peints par Peters-Neefs. Le large châssis, l'immense et
lourde visière supportant une sorte de bonnet carré, cou-
vert d'une toile insignifiante, qui dominait l'ancienne
chaire de Notre-Dame, offrait une réminiscence, très mal
reproduite à une époque moderne, d'un ancien couron-
nement en carène.
Construite en juillet 1 599 par un menuisier de Rouen
du nom de Nicolas Guillebert, ainsi que le rapporte l'ar-
ticle de la Semaine religieuse déjà cité, la chaire de Notre-
Dame a servi, pendant deux cent soixante-dix-huit ans,
de tribune sacrée à d'éminents orateurs, au R. P. Galle-
mant, en 1614; au P. Le Jeune, à Bourdaloue, et, de nos
i68
jours, à M. Fayet, au P. de Ravignan, au P. Félix, au
P. Montsabré et à tant d'autres.
A cause des différents souvenirs qui s*y rattachaient, il
nous a paru juste de consacrer une courte mention à cet
ancien spécimen d'ameublement ecclésiologique qui,
comme on le sait, a été remplacé en 1877.
M. de Beaurepaire rectifie ropinion de M. P. Bau-
dry, relativement aux chaires roulantes. Elles ne furent
pas exclusivement épiscopales. Car en plein xvrii® siè-
cle, la fabrique de l'église Saint-Michel, à Rouen,
commanda une chaire mobile. Et de même la chaire
de Saint-Ouen servit souvent pour les prédications
faites dans le cimetière de Saint-Nicaise. La nécessité
souvent imposée de parler en plein air, vu Taffluence
des auditeurs, eût suffi pour multiplier les chaires
roulantes.
Quant aux abat-voix, ils étaient inconnus en France,
et nous vinrent d'Italie. En iSiy, un religieux pié-
montais nommé François Ceva, prêchant à la cathé-
drale, demanda que, suivant Pusage de son pays, un
appentis fut établi au-dessus de la chaire ad rétention
nem vocis. — M. Bouquet ajoute qu'on ne voit point
d'abat-voix dans les miniatures du Roman du Renard,
— M. le Président communique alors le mémoire
qui suit :
Si Ton jette les yeux sur un ancien plan de Rouen, on
y verra figuré, au milieu d'une place fort étroite, vers
l'extrémité de la rue de la Grosse -Bouteille, un bâtiment
en forme de colombier, sous la désignation de la Cour du
Tôt. Au chapitre xvuie, intitulé : Hotels les plus célèbres
de Rouen ^ le continuateur de Farin n'a pas oublié d'en
faire mention, et, à vrai dire, cet hôtel avait droit, sinon
à la célébrité, du moins à l'attention : par les privilèges
169
dont il prétendait jouir, il présentait quelque chose de
singulier au sein d'une bourgeoisie absolument étrangère
depuis longtemps au régime féodal. Le passage de VHis-
toire de Rouen auquel je fsiis allusion étant fort court, il ne
me coûtera guère de le reproduire, ni à vous, Messieurs,
d^en entendre la lecture. Voici ce passage :
c Hôtel du Tôt. Cet hôtel est maintenant nommé la
Cour du Toty dans laquelle on voit un colombier et des
maisons où demeurent plusieurs particuliers. C'est un fief
de haubert, qu'on appelle vulgairement le fief du Tôt, dont
le seigneur jouit de plusieurs beaux privilèges, savoir : du
droit de foire, de colombier, de pêche dans la rivière de
Seine, de chasse, de chauffage dans les quatre forêts de la
vicomte de Rouen, et de plusieurs autres droits qu'il
seroit trop long de détailler ; et il est d'autant plus consi-
dérable qu'il est unique en son espèce et au milieu d*une
grande ville. Les lettres de ce fief portent qu'il est assis
dans risle de Notre-Dame, parce que ce quartier de la
ville jusqu'à la porte Martain ville s'appeloit autrefois Tlsle
de Notre-Dame; peut-être à cause que la petite rivière
d'Aubette semble faire une isle, eu égard à la rivière de
Seine, et que la plupart des maisons doit quelque rente
au chapitre de Notre-Dame. Jacques Frontin, écuyer,
étoit, en 1668, le seigneur de ce fief du Tôt, et, en cette
qualité, étoit le premier paroissien de Saint- Maclou. Il
portoit pour armes d'argent à un chevron de gueules à
trois branches de houx. »
Disons-le en passant, l'Ile Notre-Dame ne paraît pas
avoir eu une si grande étendue que celle qui lui est attri-
buée dans cette citation. Ce qui est certain, c'est que cette
désignation s'appliquait à un terrain que le Chapitre avait
fieffé, en 1377, à Jean Le Gras, terrain qui appartenait,
en i53o, à un nommé Nicolas de la Chesnaye (i), et qui
(i) Arch. de la S.-Inf., G. 4405. — Il est question de ce
terrain dans une délibération du Chapitre de la cathédrale du
I JO
était limité par TAu bette et par le canal de la Seine. Les
échevins et le Chapitre de Rouen, contestaient, en 1 53o, a
ce propriétaire, le droit d*élever des maisons du côté de la
rivière et des murailles de la ville, ce qui nous donne lieu
de supposer que Tlle Notre-Dame était encore considérée,
à cette époque, comme située en dehors de Tenceinte de
Rouen.
Quoi qu'il en soit, le fief du Tôt était possédé, en 1 586,
par Charles Quesnel, bourgeois de Rouen, lequel ne pre*
nait aucun titre nobiliaire; même à une époque anté-
rieure, il n'en eût point eu besoin pour posséder très léga-
lement un fief noble, et cela en vertu d'un privilège
reconnu officiellement aux bourgeois de Rouen depuis
Louis XL Ce fief devint, en 1617, la propriété de Cathe*
rine Quesnel, veuve de Soupplix Le Plastrier, fille et héri-
tière de Charles Quesnel. Il appartenait, en i632, à
Jacques Frontin, sieur de la Hauteville, conseiller du Roi,
auditeur de ses Comptes en Normandie; et, en 1710, à
Jacques- Joseph Frontin, sieur de Beaumont. On conserve
les Aveux que ces divers propriétaires rendirent au Roi,
pour ce fief, aux années que nous venons d'indiquer, et il
est à remarquer que les derniers mentionnent plus de pri-
vilèges que les premiers, soit par le fait d'une usurpation
qui aurait été tolérée parce qu'elle était sans conséquence
bien sérieuse, soit par suite de recherches nouvelles,
entreprises par des seigneurs avisés et jaloux de leurs
droits (i).
Dans son Aveu de 1 586, Claude Quesnel avoue tenir du
Roi un quart de fief de haubert, nommé le fief du Tôt, au-
1er juin i486 : « De Insula Béate Marie, dudum est, data in
emphiteosim, cujus redditus diminutus est occasione immu-
nitionis et porcionis ipsius Insuie, adaptate in compositione
fossati aquosi juxta muros ad piscariam appropriati, cujus utili-
tatem et usufructum percipit villa Rothomagensis. » Le Chapitre
songeait à en réclamer la restitution.
(2) Ârch. delà S.-Inf., B. 2o5, 211.
171
trement dit Aubette, assis à Saint-Maclou, avec extension
sur Saint- Vivien, t consistant, ainsi que de ce il apperoit,
par les anciens vestiges et apparences d'icellui, en certain
manoir, avec plusieurs maisons et édifices, entre lesquels il
y avoit coUombier, basty de pied droit, portant six pans le
long de la rivière de Seine. > A raison de ce fief, il déclare
avoir droit de chauffage en l'une des forêts, sans pourtant
spécifier laquelle. Il rappelle que ses prédécesseurs étaient
tenus au ban et à Tarricre-ban, mais que lui présentement
en était exempt, ainsi que des droits de relief et de trei-
zième, en sa qualité de bourgeois de Rouen, < possesseur de
chose assise en cette ville. » L'Aveu est court ; Claude
Quesnel regrette de n'en pouvoir dire davantage, et s'en
prend, suivant l'usage, « sl^l grands troubles, divisions et
anciennes guerres, lesquelles avoient régné en ce pays,
mesme à l'inconvénient de feu advenu en la Chambre des
Comptes de Paris, » oîi les Aveux des fiefs de Normandie
étaient reçus antérieurement à i58o, année de l'établis-
sement à Rouen d'une Chambre des Comptes particulière
à la Normandie.
Pour lui tout se réduisait donc, en fiaiit de privilège
quelque peu utile, à la jouissance d'un droit de colombier.
Catherine Quesnel, dans l'Aveu de 1619, ne prétendait
encore à rien de plus. Elle rappelait pourtant qu'un mou-
lin avait autrefois existé dans l'étendue de son fief.
En février 1628, Jacques Frontîn obtient la propriété
du fief du Tôt, par un décret de justice, passé devant le
bailli de Rouen ; il en rend Aveu à la Chambre des
Comptes, et trouve le moyen d'en amplifier la dignité ; il
en vante les extensions à Saint-Vivien, à Sotteville et*
à Quatremares; le droit de cour, usage, juridiction,
plaids et gage-piège; tout ce qui signalait une tenure
noble et la distinguait d'une simple roture, si tant est
qu'il put être question de roture dans l'enceinte d'un
franc bourgage. A la suite du colombier à six pans, tou-
jours subsistant, et du moulin, démoli, il mentionne.
172
comme dépendant de son fîef, une maison située sur la
paroisse Saint-Maclou et possédée par Pierre Bourré,
commis au greffe criminel du parlement, ainsi qu'une autre,
située en la rue Vatier-Blondel. Il n'oublie pas de décrire
ce manoir, accompagné de plusieurs tènements de maisons
et édifices, à l'entrée duquel manoir était encore une grande
porte de pierre de taille, au frontispice de laquelle étaient
élevées et taillées en bosse les armoiries timbrées des pré-
décesseurs seigneurs du fief du Tôt. Il revendique le droit
de pèche dans les rivières de Seine et d'Aubette, le droit de
chasse dans les forêts de la Vicomte de Rouen, le droit de
faire tenir un marché une fois la semaine, le cours duquel
marché avait été discontinué depuis les troubles, et enfin,
ce que n'avait osé indiquer clairement le continuateur de
Farin, t le droict de la première et plus éminente place du
costé des laiz, dans le chœur de Téglise Saint-Maclou,
avec obligation, au curé ou vicaire de cette église, d*en -
voyer frapper à la porte du manoir, les jours de festes et
dimanches, pour advertir le seigneur d'aller entendre et
assister aux grandes messes paroissiales, avant que de les
commencer. >
Un point qui ne laissait prise à aucun doute, c'est que
des armoiries ornaient autrefois la grande porte de T Hôtel
du Tôt. Elles avaient été, il est vrai, € souillées et gastées
par quelques voisins envieux de cette marque de dignitç de
fief. > Mais bientôt, elles avaient été, tout à nouveau,
repeintes et remises à leurs dépens au premier état, par
arrêt du parlement, rendu, le 19 juin i6o3, sur la requête
de Soupplix Le Plastrier. Jacques Frontin se fonda sur
cet arrêt pour substituer, à cet ancien blason, le sien
propre, en sa qualité de propriétaire actuel de l'Hôtel du
Tôt. C'était attacher bien de l'importance à une circon-
stance assez indifférente, puisque nombre de maisons, à
l'intérieur de Rouen, portaient également, à leur porte
principale, les armoiries de leur propriétaire, sans qu'on
pût songer à y voir des marques de fief
173
A Jacques Frontin, sieur de la Hauteville, succéda
Jacques Frontin, sieur de Beaumont, maître en la Chambre
des Comptes , et, à ce dernier, Jacques- Joseph Frontin,
lequel, dans un Aveu de 1 710, n'oublie pas de parler de la
porte cochère de pierres de taille, ornée des armoiries dé
son père, en bosse, du colombier et surtout du droit
d'avoir la première et la plus cminente place dans le chœur
de l'église Saint-Maclou, au lieu où se mettaient les laïques,
toujours avec obligation au curé ou au vicaire d'envoyer
frapper à la porte de l'Hôtel du Tôt avant de commencer
la grand'messe (i).
Je dois déclarer que je n'ai pu trouver aucune mention
ancienne ni du droit de chauffage réclamé par le seigneur
du Tôt dans les forêts de la vicomte de Rouen, ni de ce
privilège de premier paroissien de Saint-Maclou, et je
doute fort que ces droits aient jamais été reconnus par les
officiers des maîtrises ni par le curé.
Quant à la qualité de fief, on ne peut raisonnablement
songer à la contester, et ce qui, à première vue, paraît
une singularité, s'explique assez naturellement, quand on
songe que, pendant très longtemps, les paroisses de Saint-
Vivien, de Saint-Nicaise et de Saint-Maclou étaient en
dehors de la ville de Rouen, et qu'en i53o encore, l'Ile
Notre-Dame était vraisemblablement, comme nous l'avons
dit, située en dehors de l'enceinte fortifiée.
Maïs à cette question particulière au fief du Tot^ on
peut en rattacher une autre plus intéressante, et sur la-
quelle. Messieurs, j'appelle votre attention, celle de savoir
comment s'étaient formés, et comment avaient disparu ces
fiefs, très nombreux, qui existaient en dedans de la ville,
et quelle signification nous devons donner à ce mol fief.
En parcourant les chartes desxii« et xiii® siècles, concer-
nant des maisons ou des rentes à l'intérieur de Rouen,
(i) En 1769, le iief du Tôt appartenait à Jacques Frontin,
sieur de Caudecote, héritier de Claude Frontin, son oncle.
1/4
chartes rédigées ou reconnues devant le maire de la com-
mune, on voit mentionnes un grand nombre de fiefs.
Ce sont : le fief du Roi en la paroisse Saint- I^urent, 1295;
celui de la Monnaie, comprenant une maison sise en la
rue Ganterie, fin du xn^ siècle; celui du maire ou de
la mairie, 1295 (i); ceux du Chapitre ou de Notre-Dame
dans les paroisses de Saint-Denis et de Saint-Étienne des
Tonneliers, fin du xn" siècle et xiii« siècle; celui de Fabbé
de Cerisy, commencement du xiii*; celui du Mont-aux-
Malades, en la rue Cauchoise, 1226; celui de Tabbaye de
Saint-Ouen, sur Robec, xii« et xin^ siècle; celui de la
même abbaye, dit le fief au Moutardier (2), sur la paroisse
Sai nt- Vivien ; celui de Tévêque de Bayeux; celui d'É-
tienne Blondel; celui de Robert du Bosc-le-Hard, en la
paroisse Saint- Godard ; celui du chambellan de Tancar-
ville, qui n'était autre que l'ancien donjon des ducs de
Normandie, abandonné depuis la construction du palais
de la Basse Vieille-Tour; celui des seigneurs d'Esneval,
en la paroisse Saint-Amand ; celui de la Heuse, à Saint-
Maclou ; celui de Pierre de TEspinay, chevalier, en la rue
de l'Arquet, près du pont de TArquet, i2i3; celui de
Thomas, fils de Robert l'Écuyer, 1208; celui du comte
de Leicester, près de la rue Massacre; celui de Roger de
Meulan, en la rue Vaske, fin du xn^ siècle ; ceux de
(1) « Le fieu au maire. » Tabellion, de Rouen, Reg. 3, T. 307.
— Infeodo majorie extra muros, 1295. F. des Hospices.
(2} Le fief au Moutardier à Saint-Vivien,prèsdu Ruissel, appar-
tenait à Tabbaye de Saint-Ouen et comprenait plus de vingt
maisons ou héritages. Il avait appartenu, au xiiie siècle, à Lam-
bert Lé Moutardier, lequel Tavait acheté de Raoul de Cotevrart.
Il était tenu de Jean, fils de Maurice. Une partie de remplace-
ment de ce fief était encore en marais. Dans la charte de Robert
Le Moutardier, on lit que, si le vivier était mis à sec et que
Lambert pût posséder en entier la terre que Teau couvrait encore,
celui-ci, aurait à payer au seigneur 5 s. chaque année, en plus de
4 s. 6 d., formant la rente ordinaire.
175
Préaux, 1 295 ; de Sakespée, près la porte Beauvoisine,
120 5; de Geoffroy Salcnan, en la rue Etoupée; de la
Vaupalière, en la paroisse Saint-Maciou, 1296; de Henri
Waspal, à Saint-Hilaire de Rouen, 12 17 (i).
A propos de ces maisons ou terrains qualifiés de feoda^
il est question de seigneurs (domini feodorum), distincts
des possesseurs ou détenteurs de ces maisons ou terrains.
Il est question du consentement obtenu de ces seigneurs
pour les ventes faites par ces possesseurs ou détenteurs,
soit moyennant une rente annuelle, soit pour un prix
d^argent. Il est question de droits seigneuriaux, yura domi-
nica. Il est question d'hommage et de serment àc fidélité.
Et pourtant il n*est pas rare de voir ces fiefs possédés par
de simples bourgeois, dépendant eux-mêmes de soi-disant
seigneurs de ces biens qualifiés feoda.
Les exemples qu'on en pourrait citer seraient innom-
brables. En voici quelques-uns :
En 1 164, Simon I^nglois prend en gage de Richard de
Herburvilla^ pour Tespace de huit années et moyennant
une somme de 70 sous d'angevins qu'il lui paie, la maison
du dit d'Herbou ville, sise près de l'altre de Saint-Amand.
Cet acte a pour témoin Guillaume de Malpalu, seigneur
dudit Simon (2).
Vers la fin du xii^ siècle, Robert du Bosc-le-Hard parle
d'un fief, à lui appartenant, sis en la paroisse Saint-
Godard, et d'un autre fief que tenait de lui, en la même
parroisse, Enguerran de Kersonaria (Charte passée devant
Jean Fessart, maire de Rouen) (3).
Mention du fief tenu de Louis, fils de Guillaume, par
(i) Henri II confirme aux religieux de Saint-Lô les dîmes du
fief de Tévéque de Bayeux, sis à Rouen. A raison de la concession
du prince, ils avaient droit de prendre unum cervum et vi solides
in Moneta ; unum aprum in festivitate S. Rumpharii.
(2) Arch. de la S.-Inf., F. de l*abbaye de Saint-Amand
(3) Jbid., F. du Chapitre.
176
Robert de Vileis, en la rue Veauiricrc, du temps de Ma-
thieu Le Gros, maire de Rouen ; d'un fief tenu du môme,
par Garnier de Bapaumes, en la rue de la Renelle (i).
En 1208, M« Roger de Frontebosc donne pour le salut
de son âme, en pure et perpétuelle aumône, aux moines
de Sainte-Foy de Longueville, une masure en la paroisse
de Saint-Nicolas. Il déclare que cette masure était tenue
de Thomas qui fut fils de Robert TÉcuyer, par une rente
annuelle de 6 sous, rente que les religieux prirent l'enga-
gement de payer à sa décharge (2).
En 12 14, Robert d'Esneval, chevalier, donne à Téglise
de Saint-Amand 10 sous de rente sur tout le tènement
que tenait de lui Jean, fils de Maurice, devant le cimetière
de Saint-Amand ; cette rente était affectée aux frais du lu-
minaire du chapitre de Tabbaye de Saint-Amand, où i'ab-
besse Mathilde avait été inhumée, in quo Matillidis^ quon-
dam abbatissa^ ancillamen, humata requiescit (3).
En août i23i, Laurent du Donjon vend le donjon à
Robert du Châtel pour 5 1. de rente et moyennant aussi
une once de poivre à payer chaque année au seigneur de
ce tènement, le chambellan de Tancarville, sans compter
le droit d'hôtage que ce seigneur s^ était réserve (4).
La même année, Robert Le Marchand vend à Robert
Fils Alain, pour un capital de 100 sous, une rente annuelle
de 10 sous sur un tènement qu'il tenait de Geoffroi Sal-
men, qualifié seigneur du fief, ledit tènement situé en la
rue Étoupée, m vico stoupato extra portam (5).
Quant au fait du consentement donné parle seigneur du
fief à la vente faite par les sous-tenants, je me bornerai à
trois citations.
(i) Arch. de la S.-Inf., F. du Mont-aux-Malades.
(2) Ibid., F. du prieuré de Longueville.
(3) /Wrf., F. de Tabbaye de Saint-Amand.
(4) Jbid.f F. des Cordeliers.
(5) Ibid.y F. du Chapitre.
177
Cette formalité est mentionnée dans la vente faite par
l'archevêque d*York, à Hélie de Warwick, chapelain du
Roi, moyennant 7 1. d'angevins, d'un fief situé rue Saint-
Denis, relevant du chapitre de Rouen, moyennant une
rente annuelle, ce qui n'empêcha pas l'archevêque dTork
de devenir seigneur immédiat de ce fief, par le paiement
qu'il stipulait, à son profit, d'une autre rente sur le même
fief(i).
Quelques années après, sous le maire Mathieu Le Gros,
un particulier vend à Tabbaye de Saint-Georges-de-Bos-
cherville une terre située en la paroisse de Saint-Pierre-
le-Portier. 11 obtient le consentement de Henri de la
Heuse, qui était alors seigneur de cette terre pour les trois
quarts. Hanc venditionem bénigne fieri concessit^ salvo
redditu suo de octo solidis (2).
En 1221, Auberée de Gaugi, vend, pour i3 1. 1., un tène-
ment situé en la rue Saint-Cande-sur-Rive (Saint-Cande-
le- Vieux), qu'elle tenait d'Etienne Blondel. Celui-ci donne
son consentement à la vente, et l'on ajoute au bas de
l'acte : t Actumfuit hoc de assensu dicti Stéphanie domini
illius tenementi, salvis tamen sibi et suis heredibus jure
et redditu suo videlicet x soi usualis monete (3).
L'hommage est formellement indiqué dans une charte
passée devant Raoul de Cotevrart, maire de Rouen, par
laquelle Robert, prieur du Mont-aux-Malades, vend à
Raoul de Cailli un tènement de maisons et de masures
dans les rues de Burnenc et Brasière (actuellement la rue
de Fontenelle), tènement que Jean Pigache avait donné en
(i) Arch. de la S.-Inf., F. du Chapitre. Charte de la fin du
XI le siècle, du temps de GeofTroi, doyen de la cathédrale, et de
Barthélémy Fergaut, maire de Rouen.
(2) Charte de Willelmus filius Audulfi et d'Aeiesia de Bella-
fossa, sa femme. La terre vendue était située en la rue Kestiere
in parrochia S. Petri-Poterii, Ibid.j F. de Saint-Georges-de-Bos-
cherville.
(3) Ibid., F. du Chapitre
12
.78
pure et perpétuelle aumône à ce couvent, quand il y prit
Thabit. Le prix était de 5o l. d'angevins, une fois payées,
à quoi il Êillait joindre une pitance par an. Les religieux
du Mont-aux-Malades prennent l'engagement d^acquitter
Tacquéreur de tout cens moyennant une rente annuelle de
12 s. dont ledit tènement ou fief resterait grev^ à leur
profit. Raoul de Caili leur prêta serment de fidélité à
raison de cette concession, de hac siquidem terra et de hoc
hepreditagio fecit ipse Radulfus nobis fidelitatem (i).
En 1208, Hugues Grognet, concède à Robert Lavenier
un tènement devant Taître de Notre-Dame ou de la cathé-
drale, à tenir de lui et de ses héritiers par 1 5 sous de rente.
Aux termes du contrat, lacquéiKur en pouvait disposer à
sa volonté, salvo, ajoute Hugues Grognet, predicto redditu
et jure dominico. Et de hoc tenemento devenit idem Ro-
bertus homo meus. (Charte passée devant le maire de
Rouen.) (2)
Vers le même temps, Mathieu Le Gros, en concédant à
Robert Le Juif une terre située sur la Renelle, en la paroisse
Saint-Laurent, retient que Tacquéreur et ses héritiers au-
ront à lui payer une rente annuelle de 10 s., sauf le droit
seigneurial dû au propriétaire primitif, ce qui n'empêche
pas que Robert Le Juif dut faire hommage à Mathieu Le
Gros et lui donner deux besans d'or de recognitione (3).
Si Ton s'embarrasse des notions que Ton donne d'ordi-
naire sur la féodalité, on ne comprendra rien aux condi-
tions exprimées dans les actes que nous venons de relater.
Et pourtant tout s'explique, et de la manière la plus simple.
Aux xii^ et xiiic siècles, la fieffé appelée /eo^u m était le
contrat le plus ordinaire, le seul même qui fût habituelle-
ment possible, comme transmission de propriété, dans un
temps où le numéraire était peu abondant.
(i) Arch. delà S.-Inf., F du Mont-aux-Malades.
(2) Ibid., F. du Chapitre.
(3) Ibid., F. du Chapitre.
179
Le premier bailleur d'une maison ou d'une terre h titre
de fîeffe en restait le seigneur ; la rente constituée à son
profit était son droit seigneurial; pour l'acquittement
duquel il pouvait se faire faire justice sur le bien fîeffe.
Son consentement était nécessaire pour que le fieffa taire
pût, à son tour, fieffer, en tout ou en partie, le bien qu'il
tenait de son seigneur primitif, dont il n'eût pas été juste
qu'il diminuât la garantie. Mais, ce consentement obtenu,
non parfois sans gratification, il devenait lui-même sei-
gneur, par rapport au troisième acquéreur ou fîeffataire.
sans préjudice du droit du seigneur primitif, qualifié domi-
nus capitalis ou chevetaigne seigneur.
En envisageant les choses de la sorte, les mots fief ^ sei^
gneur^ hommage^ n'on^lus rien qui rappelle ce que nous
nous représentons par ces mots de fief et de féodalité.
Mais pourquoi les a-t-on employés si habituellement
dans les actes qui concernent des maisons situées à Tinté-
rieur de Rouen ? Ne serait-ce pas que la constitution des
fiefs tient plutôt à un système économique qu'à un système
politique et ne mérite pas les jugements que l'on en a portés?
ou bien l'emploi de ces termes tiendrait-il à une préten-
tion des bourgeois de Rouen, qui auraient voulu assimiler
les biens tenus en bourgage, aux terres nobles, par le
même sentiment qui les faisait, plus tard, se considérer eux-
mêmes comme nobles, et réclamer pour leur député, dans
les assemblées d'États, place avec la noblesse et au-dessus
des représentants du Tiers- Etat.
M. Fabbé Loth expose que les Frontin du Tôt éle-
vèrent les mêmes prétentions à Dieppe, et engagèrent
même de ce chef, avec la fabrique de Saint-Jacques, un
procès dont les conséquences furent déplorables, car
il amena la démolition de la clôture d'une chapelle.
A propos de la posture des fidèles dans les églises au
moyen âge, M. Tabbé Tougard fait remarquer qu'en
Orient, un passage de saint Chrysostôme indique clai-
j
i8o
rement qu'on s'y asseyait : « Voyez le riche, s'écrie le
saint orateur, avec quel faste il s'asseoit! »
Enfin, M. l'abbé Tougard termine les communica-
tions par l'exposé des faits suivants :
CLOCHER DE LILLEBONNE
Il rappelle que, dans sa séance du 3i août dernier, le
Conseil général a émis un vœu pour la restauration du
clocher de Lillebonne, sur lequel il a appelé toute l'atten-
tion de M. le Préfet.
Notre confrère s'associe aux vues de rassemblée dépar-
tementale. Le clocher de Liilebonne est une des flèches
les plus admirées de notre pay% Et, toutefois, depuis plu-
sieurs années déjà, son état inspire des inquiétudes telles
que l'administration a cru devoir interdire l'emploi des
belles cloches qu'on y a montées. Cet état de choses est
intolérable et intéresse la sécurité des habitants et la
conservation d'une église qui est une des plus belles cons-
tructions modernes du département. M. Tougard propose
à la Commission d'appuyer énergiquement auprès du
Préfet la restauration de ce clocher.
ÉGLISE DE SAINT-MARTIN-LE-GAILLARD
Dans sa séance du 26 juillet dernier, la Commission
s'est occupée avec intérêt de cette belle église. M. le curé
de cette paroisse en témoigne à nos collègues toute sa
reconnaissance. De plus, sa lettre du 1 1 octobre dernier
atteste que la sollicitude de la Commission était bien jus-
tifiée.
€ Tout le corps de l'église est solide, écrit-il ; mais le
pignon (car je ne puis pas dire le portail) est dans un
grand délabrement. Il y a plus de cent ans qu'on parle d'y
travailler, et il y a environ quatre-vingts ans qu'on y a
fait une porte et restauré la croisée au-dessus.
c 11 nous est arrivé une rafale vers la fin de mars et une
i8i
autre quinze jours après^ telles que la muraille en était
ébranlée, qu'il en était tombé de petites pierres et qu'une
partie du mur intérieur menaçait ruine. >
Un tel état de choses a obligé d'y mettre des ouvriers,
qui ont refait une partie de cette muraille sur une hauteur
de plus de 2 met. 5o cent., et sur i met. 5o cent, au
moins de largeur.
f Maintenant, conclut M. le curé, tout cela est conso-
lidé, et il n'y a plus de danger; seulement la muraille est
vieille. »
MONT-AUX-MALADES. — MONNAIES
La canalisation d'une conduite d*eau a procuré au Mont-
aux-Malades la découverte de plusieurs monnaies. Le
secrétaire de la mairie a recueilli un double tournois de
Louis XIII.
Ce travail a donné une nouvelle démonstration du soin
avec lequel les Romains établissaient leurs voies. I^ tran-
chée, en effet, a dû être creusée au milieu de ces énormes
silex qui formaient en partie l'empierrement de ces routes
jusqu'à une profondeur d'environ 80 centimètres.
CRUCIFIX DU PONT DE BATEAUX DE ROUEN
Les ateliers de M. Vasse, le maître de forge bien connu,
conservent le crucifix qui décorait jadis le pont de bateaux
de Rouen. Le christ est en plomb et est repeint chaque
année par le personnel de l'atelier. Le contre-maître qui
a fourni ces détails croit que M. Vasse céderait volontiers
au Musée ce dernier débris du pont que nos pères ont
admiré.
La séance est levée à quatre heures.
Le Secrétaire par intérim ^
A. TOUGARD.
Rouen. — Imp. E. Cagiiiak,p, mes Jcannc-Darc, 88, et des Basnage, %.
PROCÈS-VERBAUX
DE LA
COMMISSION DES ANTIQUITÉS
DE LA SEINE-INFÉRIEUKE
PENDANT L'ANNÉE i883
—% fi l»!
SÉANCE DU 7 FÉVRIER i883
La séance ouvre à deux heures sous la présidence de
M. de Beaurepaire, vice-président.
Sont présents : MM. Adeline, Paul Baudry,
Billiard, Maillet du BouUay, Bouquet, Félix, de Glan-
ville, Gouellain, Le Breton, Lefort, de Merval, Pelay
et Brianchon, secrétaire-adjoint.
— La correspondance imprimée comprend :
Annual reports ofthe bureau of Ethnology to the
Secretarjr of the Smithsonian institution, 1879-
1 880 ; — Société archéologique de Bordeaux^ t. V 1 1,
1880; — Société industrielle d'Elbeuf, 1882; —
Bulletin de la Société archéologique et historique de
r Orléanais, t. VII, 2« trimestre de 1882; — Bulletin
historique de la Société des antiquaires de la Mo-
rinie, Bi* année, 124e livr., 1882; — Bulletin de la
Société des antiquaires de Picardie, 1882 ; — Bi//-
letin du Comité des travaux historiques y 1882.
— M. le Président donne lecture d'une circulaire de
i86
M. le Ministre de Tlnstruction publique et des Cultes,
en date du 3 février dernier, relative à la 21^ réunion
des Sociétés savantes; — d'une lettre de M. le Préfet,
en date du 16 janvier 188 3, dont M. le Président
donne également lecture, il résulte que, sur la propo-
sition de M. le Préfet, la Commission départementale
vient d^accorder^ à la commune de la Cerl^ngue, un
secours de i,5oo francs destiné à « payer diverses ré-
parations qu^il est urgent d'exécuter à Téglise de Saint-
Jean-d'Abbetot. »
A propos de cette subvention, M. le Président fait
observer qu'il doit exister un reliquat de compte, con-
cernant des travaux exécutés antérieurement à Téglise
de Saint-Jean-d'Abbetot, et demande au secrétaire-ad-
joint s^il n'aurait pas quelques renseignements à.
fournir à la Commission. M. Brianchon répond que,
en effet, ayant dû récemment s'entendre avec M. Hé-
quet, maire de la Cerlangue, dont relève l'église de
Saint-Jean-d'Abbetot, pour les nouveaux travaux « à
exécuter d'urgence et par voie d'économie » à cette
église, aux termes d'une lettre de M. le Sous-Préfet du
Havre, en date du 17 janvier i883; quant aux travaux
anciens, remontant au mois de juillet 1880, et jugés
très satisfaisants, mais restés inachevés, voici ce qu'il a
appris : le total des travaux s'est élevé à la somme de
3.002 fr. 85 c, y compris les honoraires de l'archi-
tecte, qui est notre confrère, M. Simon. Les comptes
n'étant pas revenus approuvés à la mairie, rien n'a
été payé. La commune delà Cerlangue tient à la dis-
position des entrepreneurs, une somme de 1,102 fr.
72 c. Reste un découvert de 1,900 fr. i3 c.
Ces explications entendues, la Commission est
d'avis qu'il y aurait lieu, pour M. le Maire de la
i87
Cerlangue, d'en référer le plus tôt possible à M. le
Préfet, qui aviserait au moyen de combler le déficit et
pourrait faire délivrer, provisoirement, un à compte
aux entrepreneurs.
— M. Paul Baudry donne lecture de la note sui-
vante :
Une maison, avec jardin, située au foubourg Saint-Sever,
rue aux Chiens, i8, fut acquise, le i6 mars 1778, par
Henry- Louis Poterat, écuyer, sieur de Saint- Etienne,
seigneur et patron honoraire de Saint-Sever-lès- Rouen
et du fief d'Emendreville.
Henry-Louis Poterat, d'une fieimille justement célèbre
dans rindustrie des faïences, demeurait alors en son ma-
noir seigneurial de Sotte ville-lès- Rouen. Après lui, la
maison de la rue aux Chiens fut, le 22 février 1 786, ven-
due par son frère, François-Nicolas Poterat de Saint- Sever,
à Marie-Madeleine-Louise Boivinde Saint-Etienne, veuve
et créancière, mais non héritière, de Henry-Louis Po-
terat.
Le i3 juin 1790, Mellon- Louis Boivin, bourgeois de
Rouen, héritier de Marie-Madeleine, sa tante, fît vendre
la maison à Pierre Couvet, maître toilier fabricant.
Dans les titres de cette propriété, qui appartenait, il y
a peu d'années encore, à un honorable descendant de la
famille Couvet, et qui est actuellement louée par la
Fabrique de Saint-Sever pour Tusage de plusieurs prêtres
de la paroisse, j'ai recueilli quelques détails que vous
voudrez bien, peut-être. Messieurs, accueillir avec intérêt.
Henry- Louis Poterat avait signifié, le 7 juillet 1775, à
M. Valentin, curé de Saint-Sever, et, le 28 novembre 1776,
aux trésoriers de la même paroisse, deux contrats de fon-
dations religieuses faits par sa famille les 21 juin 1687 et
2 5 octobre 1699, et dont il réclamait l'exécution.
I^ 6 décembre 1778, à la requête de Henry-Louis
Poterat, demeurant en son hôtel, rue aux Chiens, Marye,
'i88
huissier, signifie à M* Valentin un procès- verbal consta-
tant qu'il s'est transporté, avec des témoins, dans Tenceinte
de réglise de Saint-Sever, heure de la grande messe
paroissiale, qui s'est commencée à dix heures du matin^ et
ce dans la grande nef, à la portée de la chaisCy aux fins
d'entendre si M. le Curé ou autres prêtres préposés .annon-
ceraient au prône la fête de saint Joseph, pour être célé-
brée, comme fête triple^ le samedi suivant, conformément
au contrat fait, le 21 juin 1687, par Marie Lequieu, veuve
d'Edme Poterat, et par Louis et Michel Poterat ses fils.
11 s'est également assuré si les intentions prévues par le
contrat du 25 octobre 1699 sont remplies, et a pourcela,
ainsi que ses assistants, entendu la messe paroissiale
depuis son commencement jusqu^à sa fin.
Entre autres exploits délivrés, sur la requête de Henry-
Louis Poterat, au trésorier en charge et au Curé de Saint-
Sever, celui du 8 novembre 1782 est particulièrement
curieux.
Le sergent royal Bosquer y déclare à M^ Valentin qu'il
ne peut ignorer qu'aucun laïc, à l'exception du patron,
n'a le droit de prendre séance dans le chœur de Téglise,
pendant l'office divin ; que c'est un droit honorifique qui
est réservé au seul patron et non à autres, suivant le sen-
timent de tous les auteurs, et ainsi qu'il a été décidé par
différents arrêts des 4 janvier i658 et 9 septembre der-
nier; qu'il ne peut pas ignorer davantage que le Curé est
obligé de donner l'eau bénite au patron et à sa famille
dans son banc, immédiatement après le clergé et avant
que de la distribuer aux autres laïcs.
Cependant, ledit sieur Curé fait entrer, et prendre séance
dans le chœur de Saint-Sever, pendant l'office divin,
divers particuliers, même du commun du public et en habit
laïc, et leur donne l'eau bénite avant de la donner au sei-
gneur de Saint-Etienne et à sa famille.
Pour quoi M. de Saint-Etienne requiert M« Valentin
de tenir la main à la police du chœur et à l'exécution des
189
lois qui ne permettent qu'au clergé et au patron d'y
entrer et d'y prendre séance, comme aussi de donner
l'eau bénite à lui et à sa famille, lorsqu'ils seront dans
leur banc, immédiatement après le clergé et avant toutes
autres personnes.
Ces revendications minutieuses, dont j'abrège encore la
teneur, nous paraissent aujourd'hui fort étranges. N'ou-
blions pas toutefois que l'exercice d'un droit, si absolu
qu'on le suppose, a sa raison d'être lorsqu'il s'appuie sur
des motifs légitimes et qu'on ne le sépare pas de l'accom-
plissement d'un devoir. N'oublions pas non plus qu'une
même question peut être interprétée différemment par les
parties qui y sont intéressées, sans que cela incrimine la
bonne foi ni les intentions de Tune ni de l'autre de ces
parties.
Avant de quitter Saint-Sever, permettez-moi encore,
Messieurs, de vous indiquer une date dont la mention
peut être bonne à conserver. Je la tire des archives dépar-
tementales, fonds de l'archevêché.
Le mardi 25 septembre 1781, par ordre du Cardinal de
La Rochefoucauld, archevêque de Rouen, une visite fut
faite au cimetière de la rue Saint-Julien pour examiner si
ce cimetière, alors non encore utilisé, était dans les con*
ditions nécessaires pour que la bénédiction en fût auto-
risée.
Le procès-verbal d'examen mentionne, au milieu du
terrain qui doit être affecté à l'usage de cimetière, une
grande croix de fer, de la hauteur de douze pieds, y com-
pris son pied en pierre dure, sur laquelle il y a un Christ
doré.
C'est cette croix, qui avait été conservée lors de la sup-
pression du cimetière en juillet i855 et lors de l'érection
de l'église Saint-Clément, 1870-1872, dans une partie du
même cimetière, qui a été abattue et brisée dans la nuit
du 3o septembre au i^f octobre 1882.
Après cette communication, M.. de Reaurepaire
rappelle qu^un débat eut lieu, à la fin du xyii^ siècle,
entre les religieux de Bonne-Nouvelle et la famille
Poterat, à propos du fief d'Emendreville.
Il semble permis de conclure de l'observation de
M. le Président, que les droits seigneuriaux réclamés
par Henry-Louis Poterat, comme patron honoraire de
la paroisse de Saint-Sever, étaient au moins contes-
tables.
M. Gaston Le Breton reconnaît l'exactitude des faits
allégués par MM. Baudry et de Beaurepaire, etprésente
à Tappui ses observations.
— M. le Président communique à la Commissionles
Notes suivantes 5wr quelques Comptes provenant des
archives du Comté de Longueville :
I
Les vicissitudes par lesquelles passa le comté de Lon-
gueville expliquent suffisamment la dispersion et la perte
des archives de cette grande seigneurie. On n'en a re-
cueilli que quelques débris dans le fonds du Domaine du
Roi et de la Chambre des Comptes de Normandie, qui font
actuellement partie des Archives de la Seine- Inférieure.
Dans le nombre je signalerai, comme dignes d'intérêt,
les documents suivants :
c Compte Guillaume Delamare, receveur de la terre
que M™e la comtesse de Bar, dame de Cassel, a à Lon-
gueville, pour les termes de Saint-Michel i385 et de
Pâques 1 386, » compte qui fut présenté à cette dame pen-
dant le séjour qu'elle fit à Auffay, dans le cours de l'an-
née i386, avec deux de ses officiers, M. Henri d'Antoing
et le bailli de Puisaye.
• Compte Guillaume De Paris, vicomte et receveur pour
noble et puissante dame M™^ la comtesse de Bar, dame de
Cassel, en sa terre de la comté de Longueville, pour le
!9I
terme de Saint-Michel i386. i Ce compte fut présenté,
en la ville d'AUuye, à Jean de Ville-Amenou et à Jean
de Châtillon, le 29 juillet 1387.
Autre compte du mêrîie pour le terme Saint-Mi-
chel 1387. Ce compte fut présenté à Nieppes, à mes-
sire Tercelet de la Barre, chevalier, maître d'hôtel de la
comtesse.
La dame de Bar dont il est ici question s'appelait
Yoland de Flandre; elle était fille de Robert de Flandre,
seigneur de Cassel, et de Jeanne de Bretagne.
Outre Cassel, qui, par lui-même, constituait déjà un
domaine très considérable, elle possédait Dunkerque,
Bourbourg, Gravelines, Alluye et Montmirail.
En i353 elle avait épousé en secondes noces Philippe
de Navarre, et c*était par ce mariage que lui était échu le
comté de Longueville [Anselme, V, 3 12). Devenue veuve
une seconde fois, elle ne craignit pas d'entrer en lutte avec
Pautorité royale en faisant saisir, quoiqu'il fût en la sauve-
garde du Roi, Henri de Bar, seigneur de Pierrepont, et en
refusant de le rendre malgré les réclamations qui lui furent
adressées. C'était s'attaquer à trop forte partie, comme
l'événement le prouva bientôt. Elle fut en effet arrêtée,
à son tour, en 1 364, en l'un des châteaux de Robert, son
fils, premier duc de Bar, amenée à Paris et renfermée dans
la tour du Temple. Elle réussit à s'échapper; mais elle fut
appréhendée de nouveau et reconduite en prison, où elle
resta jusqu'au mois de novembre 1374, date des lettres de
rémission qui lui furent accordées à la prière de son fils.
Elle mourut le 12 décembre i395, et fut enterrée en
l'église de Saint- Maxe de Bar, le 2 janvier 1396, bien que,
par son testament, elle eût exprimé la volonté d'être
inhumée en l'église de Térouanne (Anselme^ II, 736).
L'intitulé du premier des comptes que nous venons de
citer nous apprend que la comtesse de Bar était à Auffay
le dernier mai 1 386. On l'y trouve encore, le i^ juin de cette
même année, logée à l'hôtel de la femme de Ricard Pain-
xgi
faitis, à laquelle le receveur G. Delamare eut à payer une
somme de 20 s.
On apprend par ces comptes que le domaine de Lon-
gueville était divisé en six sergenteries, désignées par les
noms de leurs chefs-lieux : Longueville, Auffay, Brachy,
Vascueil, Grainville-sur-Ry et Bellencombre.
On peut croire que la dame de Bar n'était pas étran-
gère à toute instruction puisque, dans le temps qu'elle
était à Auffay, on la voit dépêcher à Paris un nommé
Perrin de la Magdalène pour « solder la moitié de la bible
en roumant, qui fu maistre Gaultier de Bourmont. » Une
traduction française de la Bible est un fait à noter. Le
prix n'est guère moins remarquable. L'ouvrage avait coûté
200 1. parisis, ce qui revenait à 23o 1. tournois. Les ma-
nuscrits coûtant si cher, il n'y a pas lieu de s'étonner que
les bibliothèques fussent, en général, si mal fournies. Mais
la privation n'était pas grande pour le public; le goût, il
faut le reconnaître, était ailleurs.
Le même messager reçut l'ordre de porter à Paris t un
ciel à chambre et les dossiers, i qu'il déposa chez Guille-
min Le Broudeur, nouvel exemple de cet usage où l'on
était alors de faire transporter ses tapisseries d'un lieu
dans un autre, comme un simple article de voyage, à
moins qu*on n'aime mieux supposer que ce déplacement
eut pour objet un travail de broderie dont un ouvrier
parisien paraissait plus qu'un autre en état de se charger.
Ce n'est pas sans quelque plaisir que je relève, dans le
compte de 1 386, cette citation qui établit la supériorité de
la Basse-Normandie sur la Flandre, en tant que pays
d'élevage pour la race bovine.
t Pour les despens de Pierre Litaire, d' Auffay, boucher,
lequel, par le commandement et ordenance de madame,
a la ou païs d'oultre Saine et ailleurs, en plusieurs lieux,
pour acheter xxxii bestes aumales, lesquelles ont esté me-
nées à Nieppe, xv s. »
En 1 387 la comtesse eut une difficulté pour une ques-
193
tîon de patronage ; il fallut envoyer à Rouen consulter le
pouillé d'Eudes Rigaud, qui a été publié dernièrement
dans la collection des Historiens de France.
« Pour despens fais par Ricart Le Petit, procureur de
madame, alant d'Auffay à Rouen devers le bailli de ma-
dame et devers les vicaires de Tarchevesque pour ce que
le Baudrain de la Heuse avait présenté à Téglise des Au-
tieux près Belencombre, disant que le curé en estoit
trespassé et que le droit de présenter li appartenoit, afin
de savoir que Ten en feroit, et pour estre aie devers yceux
vicaires pour savoir au Matreloge, où sont enregistrez les
églises de Tarchevesquié, se ladicte église estoit en la col-
lacion de la conté de Longueville, afin de pourveir ou
demourer et fere ce qu'il appartiendra, xiiii s.
t Pour deniers paies par ledit vicomte à un tabellion
apostolique pour avoir une lettre ou instrument de la vie
dudit curé des Autieux, qui fut envoiée querre à Paris, et
lequel curé est encore en vie, comme appert par la rela-
cion dudit tabellion, xx s. »
D'autres articles de dépenses concernent les frais de
justice. Les plaids du comté de Longueville se tenaient à
Aufifay, et c'était là que se trouvaient la cohue et le cep
ou prison.
Compte du terme de Saint-Michel 1 386 :
t A Guillaume Gaillart, charpentier, pour avoir fait un
cep à Auffay, de xiin pies de long, mis xiin soleaux pour
renforchier la prison et plusieurs reilles, avoir fait un
bufet en la cohue, vi 1.
t A Rogier Suzanne, d'Aufay, sereurier, pour avoir fait
et assis une sereure à clef et un fermant de fer audit chep,
pour ce à li poié, comme appert par quittance, x s.
€ A Jehan Pelichon, pour avoir fait fere en la maison
où l'en tient la juridicion de Belencombre certaines
euvres, c'est assavoir la caière (la chaire), les sièges et par-
quet et autres ordenances d'icelle cohue et trouvé les es,
une table où la majesté de Notre Seigneur est figurée et
194
les armes de madame, cleu, late, paine d'ouvriers et
estrain à recouvrir ycelle maison lxxiii s. vi d. »
La cohue où l'on rendait la justice était couverte en
chaume; mais la chaire annonçait la dignité du juge,
l'image du crucifix imposait le respect aux justiciables^ et
les armoiries faisaient connaître la qualité du seigneur
investi du droit de haute justice.
Cet article fut contesté. En marge on lit cette note :
« Rayé pour ce que madame a une chohue en la ville, où
il peust bien avoir tenu ses plais, i
Il faut croire que ce cep et ces prisons étaient peu sûres,
puisque le même compte contient l'article suivant :
« A Estiene Le Fèvre, carpentier, pour avoir fait en une
des toureles du chastel de Longueville, i. planquié et
I . huis pour mettre Florens d'Yvetot, escuier, lequel estoit
détenu prisonnier pour certains excès et actemptas fais en
la terre et juridicion de madame, et pour le tenir plus
seurement pour ce que les autres prisons n'estoient pas
assez fortes, pour ce poié, comme appert par sa quic-
tance xii s. i
Cette dépense, si faible qu'elle fût, donna encore lieu à
contestation. Les vérificateurs du compte mirent en
marge : t Royé pour ce qu'il nV deust avoir mis nuls
frais : aussy il avoit escript qu'il le mettroit à Arques, et
est le prinsonnier eschapé. >
Ils approuvèrent un autre article de dépense relatif à des
poursuites contre un animal homicide.
t Pour les despens de Guillemin Colichon, sous-sergent
de Bellencombre, lequel ala de Auffay à Rouen, devers le
bailli de madame, pour savoir que l'en feroit de une truye
qui avoit tué et murdry i . petit enfant à Aufay. » La ré-
ponse du bailli ne nous est pas parvenue. Mais, d'après
les usages judiciaires de l'époque, on peut conjecturer
qu'elle ne fut pas favorable à la truie et que cette bcte dut
mourir, non pas de la main du boucher, mais de celle du
bourreau, pratique, du reste, recommandée par le plus
illustre des philosophes grecs, Platon, à dessein, sans
doute, de frapper l'imagination des gens du peuple, et
aussi de punir indirectement le propriétaire peu soigneux
d'un animal malfaisant.
Le compte de i383 nous fournit le détail des frais d'une
exécution capitale encourue pour un motif plus ordinaire :
a Pour les despens d'un appelé Guillemin de Carville,
détenu prisonnier à Auffay pour la mort de Guillaume
Sanson dit Rivet, où il fu par l'espace de xii jours avant
ce que il fust condempnépour ledit cas, pour ce, ii s. vid.
c Pour autres despens que il fist depuis que il fu jugié
à morir pour le dit cas, en 3 pos de vin que il oit par
chopines en ladicte prison m s. ix d.
« Item, en la rue d'Auffay, quant l'en mena à la justice,
et fu le xxv« jour de janvier Tan ini» et sept, en une cho-
pine de vin et [ . verre xviii d.
c Pour les despens de Symonnet Fortin, sous-sergent
d' Auffay, iequel ala à Dieppe quérir le bourrel pour exé-
cuter ledit de Carville, et pour les despens dudit bourrel,
tant à Dieppe, comme ailleurs, en venant à Auffay, viii s.
c Pour les despens dudit bourrel fais à Auffay, quant
il y fu arrivé ii s.
c Et pour uns gans que ouït ledit bourrel ix d.
f Pour le salaire dudit bourrel de avoir exécuté ledit
de Carville, comme appert par sa quittance rendue à la
court Lxx s. >
Soixante-dix sous représentent le prix de plus de soixante
jours de manœuvre. Cette dépense, considérable pour le
temps, prouve qu'alors, comme maintenant, les hautes
œuvres n'étaient acceptées que grâce à l'appât d'un très
fort salaire.
Un autre procès criminel nécessita une dépense de 48 1.
7 s. 9 d. Il est ainsi indiqué :
c Pour deniers paies par le viconte, pour plusieurs
mises et despens fais par le bailli et procureur de madame
et plusieurs advocas et gens notables, tant de Rouen et de
la terre de Longueville comme d'ailleurs, ledit viconte,
sergens et autres officiers de ma dicte dame, pour faire
l'exécution d'un nommé Jehan Le Caron dit le Flamenc,
né de Ayre en pais de Picardie, bani pour certain murdre
et cas crimineux, jugié et condempné à morir. »
La même année, Guy de Houdetot, dit Porquet, avait
aussi été condamné à mort par les juges royaux. La con*
fiscation de ses biens avait valu à la comtesse le revenu
d'un fief situé dans le domaine de Longueville, revenu
qui était évalué à 25 1. par an.
Après Texpulsion des Anglais, le comté de Longueville
fut possédé par Jean d'Orléans, comte de Dunois, à qui il
avait été donné, en 1443, par le roi Charles VII, en
échange du comté de Mortain.
En 1467, le receveur de ce domaine était Raoulin
Blancbastpn. Il avait sous lui des receveurs particuliers
c pour ce que ladicte comté s'estendoit en lieux si loing-
tains l'un de l'autre et en tant de diverses parties que à
peine eust esté possible que ung seul recepveur eust peu
entendre à tout et à respondre et avoir congnoissance des
parties qui par la guerre avoient esté aliénées et estoient
de présent encores en grant nombre incongneues, parce
que on n'en avoit aucune déclaracion sur quoy l'en se
peut régler. >
Le compte que ce receveur rendit à son maître pour
l'année comprise entre Pâques 1467 et Pâques 1468 nous
fait connaître que Dunois était à Longueville, avec son
fils, au mois de juin 1467, et que de là il se rendit à
Dieppe. Ce fut, je crois, pendant ce voyage que furent
décidés quelques travaux importants indiqués au compte
de cette année-là.
f Deniers paies par le receveur par l'ordonnance et com-
mandement de mon dit seigneur pour le paiement des
journées de manouvriers qui ont besongné les moys de
juillet, aoust, septembre, octobre, janvier et février 1467
à oster les terres pour prendre les fondemens du boUevert
197
que mondit s^ a voit ordonné estre fiait en la place et chas-
tel dudit lieude'Longueville, devers la ville, devant le vieil
portail, et mesmes à prendre les fondemens d'une tour à
dos d'asne commenchée au coing de la vielle tour et ung
paon de mur venant dudit dos d'asne audit vieil portail,
rompu aussi de grans pannées de murailles qui estoient au
dehors des fossés et assemblé de matières de pierre pour
besongner ausdits boUevert et dos d'asne. »
Pour exécuter les travaux qu'il avait projeté de faire au
château de Longueville, Dunois s'était adressé à Nicolas
Duval, maître des œuvres de maçonnerie du Roi au bail-
liage de Rouen. La confiance qu'il avait en l'habileté de
cet architecte l'engagea à le charger de la construction de
son château de Châteaudun, sa demeure de prédilection.
Duval fut remplacé à Longueville par Perrin Sautin, au-
quel, dans le cours des travaux, le receveur eut à payer
60 s., f c'est assavoir 40 s., le jour de l'Ascension Notre
Seigneur, pour le mouton qu'il est de coustume de livrer
aux ouvriers de l'astellier, qui se mettent et assemblent
ensemble à ce jour, pour supporter à leurs despens, et
20 s. t., pareillement délivrés et baillés le jour Saint-Mi-
chiel; que lesdits ouvriers souppent ensemble, pour ce
que après ledit jour ilz ne prennent que deux heures par
jour, et en précèdent ils en ont trois. »
Les statues de Bertrand Du Guesclin, de La Hire et de
Dunois, les trois plus illustres possesseurs du comté de
Longueville, ornaient je ne sais quelle partie du château.
Ce fut, ainsi que je l'ai fait remarquer dans un travail
publié, il y a plusieurs années, un artiste de Rouen, Pierre
Le Singnierre (le Cignerre), tailleur et maçon, qui fit à
Rouen les tabernacles ou niches où durent être posées ces
statues.
Je noterai la substitution de l'ardoise à la tuile pour les
couvertures. On employa cette année, à Longueville, pour
couvrir les nouvelles constructions, de l'ardoise que l'on
fit venir d'Angleterre par le port de Dieppe. Au xvi^ siècle
il n'était plus guère question que de Tardoise d'Angers.
Je noterai encore, comme honorable pour le pays, Tex-
cellente qualité de la cervoise qui se fabriquait à Dieppe.
Le comte de Dunois fit charger en celte ville, pour être
transporté à Châteaudun, c un baril de fine servoise et
une pipe de servoise ordinaire. •
Le compte auquel sont empruntés ces notes et ces
extraits fut présenté à François, comte de Dunois et de
Longueville, seigneur de Parthenay, grand chambellan de
France, en son château de Châteaudun, le 29 avril 1470.
Jean de Dunois, son père, était mort à Lay, près Paris, le
24 novembre 1468.
Le compte, rendu au même seigneur pour Tannée com-
prise entre Pâques 1473 et Pâques 1474, est du même
comptable.
Ce document fournit une preuve irrécusable des ravages
commis par les Bourguignons.
« Il n'a esté receu des hommes et tenans de la dite
comté, qui eurent leurs maisons brûlées par les Bourgui-
gnons es sergenteries de Longueville, Belencombre, Lon-
gueil et AufFay, ou temps durant dudit présent compte.
« La paroisse de Longueville en laquelle tous les
hommes et tenans de la fiefferme ont eues leurs maisons
brûlées.
<«: Cent sous paies aux trésoriers de l'église N. D. d'Auf-
fay pour emploier en la réparacion de Téglise brûlée par
les Bourguignons. »
Celte année, c'était encore Pierre Sautin qui était
chargé des travaux du château de Longueville.
Je me contenterai de signaler, parmi les autres comptes
relatifs à la seigneurie de Longueville, celui qui fut rendu,
pour Tannée commençant à Pâques i5io, par Chariot
Blancbaston à M. le duc de Longueville (François d'Or-
léans II), comte de Dunois, de Tancarville et de Mont-
gommery; — celui qui fut rendu par le même, pour Tan-
née i5i6, à la duchesse de Longueville (Jeanne de Hoch-
199
berg), dame de Rothelin, comtesse de Dunois, Neufchâtel,
Charolais, Tancarville et Montgommery, princesse de
Chastellaillon, vicomtesse d'Abbeville et du Crotay, ayant
la garde de ses enfants mineurs; — enfin, celui qui fut
rendu par Jean De la Mare à la reine d'Ecosse, duchesse
douairière de Longuevillc, ayant la garde du duc de
Longueville, son fils mineur, pour un an commençant au
terme Saint-Michel 1549.
Deux pièces, que j'ai récemment acquises pour les Ar-
chives du Département, nous fournissent le détail de ce qui
fut dépensé aux obsèques de Louis d'Orléans I»' du nom,
duc de Longueville, décédé à Beaugency le i^r août i3i6,
et rétat de la maison de son fils, Louis d'Orléans II du
nom, issu de son mariage avec Jeanne de Hochberg, mar-
quise de Rothelin, lequel épousa, en i534, Marie de Lor-
raine, qui, devenue veuve, se remaria, en i538, à Jacques,
vice- roi d'Ecosse.
Je me contenterai de transcrire ces deux documents,
qui ne peuvent donner lieu à aucune difficulté d'interpré-
tation.
« Parties deues à Marin Leritier, tailleur de feu M. le
duc de Longueville, pour i'obsèque de feu mondit s^, en
façons par moy faictes cy-après déclarées.
« Pour la façon d'une robe de drap d'or et une couver-
ture pour mectre sur le lict de parement de feu mon
dit sf, pour ce xxxii s. vi d.
« Pour ung poisle noir et pour une grande croix blanche
de satin doublé de bougran, pour façon, quarante sols,
pour ce XL s. t.
<c Plus pour le drap mortuaire, de drap d'or, avecques
une croix de toille d'argent, pour façon, quarante cinq
sols t., pour ce xlv s. t.
« Plus pour avoir faict, à seize chevaulx, à chacun une
housse de velours noir avec une croix blanche, de damas
blanc, qui est, pour fasson à chacun desd. chevaulx, qua-
rante sols pièce, qui est en somme trente deux livres, pour
200
ce XXXII 1. 1.
« Pour cinq grans manteaulx et cinq chaperons à
longue comète, pour ducil, manteau, chaperon, pour
façon de chacun, quarante solz t., qui est en somme dix
livres, pour ce x 1. t.
« Plus pour huit pages, à chacun d'eulx fait robe et saye
de drap noir, ensemble chaperon, qui est, pour pièce à
chacun dix solz t., montent en somme quatre livres,
pour ce iHi 1. t.
« Plus pour quatre paiges, fait à chacun une robe de
velours noir, qui est, pour façon de chacune, dix solz,
vallent quarante solz t., pour ce xl s. t.
« Plus pour deux laquays, pour façon de pourpoint h
chacun d'eulx, fourny de futaine et toille, vingt sols pièce,
vallent quarante sols t., pour ce xl s. t. •
I RooUe des gaiges des gentllzhommes, officiers et servi-
teurs domestiques ordonnez pour le service de notre très
cher et très amé nepveu Loys, duc de Longueville et de
noz enfans, nepveuz et niepce, pour ung an commençant
le premier jour de janvier Tan mil cinq cens vingt et
quatre et finissant le dernier jour de décembre l'an mil
cinq cens trente cinq.
Et premièrement.
Ceulx qui sont ordonne^ pour le service de notre dit Jilj
et nepveu le duc de Longueville,
c Messire Olivier de Hocberg, prothonotaire du Sainct
Siège appostolique, iiic 1. 1.
M. du Lude, vic 1.
Messire Anthoine de Lamet, vc 1.
M. de Loges, lieutenant de la compaignie, iiic 1.
Jehan de Baudreul, maistre d'ostel, président des
comptes à Chasteaudun, iiic 1.
201
Maistre Jehan Vaillant^ tnaistre des requestes ordinaire
de notre dit filz et nepveu, ne 1.
Yves de Hattes, maistre d'ostel, nic 1.
Galloys Descheiles, s' de Marmcigne, maistre d'os-
tel, nic 1.
Antoine Tiercelin, escuyer d'escuyrie et maistre des
comptes à Chasteaudim, u^ 1.
Jacques d'Avaugourt, escuyer trenchant, u^ 1.
François de Varennes, escuyer d'escuyrie, vin» 1.
Bertrand David dit Beaumur, vi" 1.
Claude de la Chastre, eschançon, iic 1.
Philippes de Henencourt, xl 1.
Janus dfe Thibyviller, xl 1.
Officiers
Robert Albisse, trésorier et receveur générai des finances
de la maison, i\^ 1.
Messire Hector Le Touzé, aumosnier, ini" 1.
Jehan de Rouvray, secrétaire, vi" 1.
Philippes Jehannault, argentier, ini"' 1.
Anthoine Vignon, varlet de chambre, lx 1.
Jehan Dancourt, varlet de chambre, pour ce quMl a
cheval à livrée, xxx 1.
Jehan Somper, varlet de chambre, lx 1.
Fleurent, tailleur, xxv 1.
Archiles Fedrich, tabourg, lx 1.
Jehan Cavellier, fourrier, lx 1.
Benoist, fourrier, lx 1.
Marsault Hubeau, sommelier, nii" 1.
André Le Maire, sommelier, ini»» 1.
Geoffray Texier, ayde en eschançonnerie, xxx 1.
Thomas Angot, feulconnier, lx 1.
Huguet Marion, huissier, lxI.
Jehan Vivien, queux, c 1.
Claude Chancon, son ayde, xxx 1.
Perot Vectault, pallefrenier des grans chevaulx, xxini L
'4
202
PVançois Buet, pallefrenier de rescuyrie, xxiiii 1.
Pierre Paurlet, son ayde, x L
Jehan Villâte, mulletier, xxini 1.
Michau Sanyer, mulletier, xxiiii 1.
Deux aydes, xxiiii 1.
Julien Roy, portier, xxiiii 1.
Jehan De Meddes, boucher, xlv 1.
Ceulx qui sont ordonne:^ pour le service de notre fil^ et
nepveu, est ans à Vescolle à Paris.
Jehan de la Rinville, gouverneur, ne 1.
Maistre Estienne Raymond, magistri^ lxx 1.
Maistre Elstienne Guimont, chappellain, xxx L
A Targentier, xl L
Loyset Du Jardin, queux, xxx 1.
Jehan Dreux, sommelier, xxx 1.
Mathurin de Montdoulcet, varlet de chambre, xxx 1.
Ceulx qui sont ordonne^ pour le service de notre fille et
niepce,
Pierre de Saumery, vi« 1.
Loyse de Cicon, femme du seigneur de Mesnillon, c 1.
Jehanne Dupuis, xxx L
Jehanne de Savoye, xx 1.
Noël Cornilleau, tailleur et varlet de chambre, xxnii 1.
Maistre Anthoine Bugnot, secrétaire et contrerolleur
général des finances de la maison, vi» 1.
c Robert Albisse, trésorier et receveur général de nos
finances, nous voulions et vous mandons que payez, baillez
et délivrez aux devant nommez au présent rooUe et estât,
et à chacun d'eulx respectivement, les sommes contenues
par chacun quartier de Tannée, montans à la somme de
sept mil huit cens soixante dix-huit livres tournois, et, en
rapportant avec le présent rooUe les quittances particu-
lières de chacun d'eulx, nous voulions lesd. sommes estre
assises et allouées en la despence de nos comptes de la
203
présente année par nos amez et féaulx conseillers les pré-
sident et gens de nos comptes à Chateaudun, ausquels
mandons ainsi le Êiire sans difficulté. Car tel est notre
plaisir. Donné à Baugency le dixiesme jour de juing Tan
mil cinq cens vingt-cinq. Signé : J. d'Orléans, arche-
vesque de Thoulouse, Jehanne, Bugnot. »
— M. le Président rappelle ensuite à la Commission
la perte qu'elle vient de faire en la personne de M. le
docteur Ernest Guéroult, décédé à Caudebec^n-Caux,
le 24 décembre dernier. Nommé, par arrêté préiectcral
du 16 mars 1868, membre correspondant, en rempla-
cement de M. Mathon, M. le docteur Guéroult a
cofhblé, autant que pouvait Tespérer M. Pabbé Cochet,
le vide que r homme de bien, son prédécesseur, aussi
modeste que savant, avait laissé dans les rangs de la
Compagnie (i). Peu d'hommes ont plus aimé la
Commission que notre regretté confrère. Quelques
jours avant sa mort il Fexprimait encore, dans une
lettre intime adressée au Vice-Président, en termes des
plus touchants. Forcé de prendre, avant Theure, sa
retraite professionnelle, pour cause de santé grave-
ment altérée par excès de fatigue et de dévoueinent, le
docteur Guéroult consacra tout entiers les derniers
jours de sa laborieuse existence à Tarchéologie locale,
moitié pour l'histoire elle-même, moitié pour Tabbé
Cochet, son illustre ami. De médecin qu^il ne pouvait
plus être, devenu antiquaire pour se délasser, M. le doc-
teur Guéroult ne vivait plus, à la lettre, que pour la
Commission. Rarement il manquait une de nos séances,
et, lorsque ses communications parlées faisaient défaut,
»
(i) Cf. Bulletin de la Commission des antiquités, t. I, pages
197-198.
204
il y suppléait presque toujours par des communications
écrites.
La Commission remercie M. le Président d'inter-
préter aussi fidèlement sa pensée et s'associe à ses
regrets.
En réponse à la demande de plusieurs membres, le
secrétaire-adjoint constate qu'il existe à Caudebec trois
collections : la collection municipale, fondée par M. Bio-
chet; la collection de l'église, œuvre de M. l'abbé
Sauvage, et la collection de feu M. le docteur Gué-
roult, celle-ci la plus importante des trois. Si cette der-
nière sera conservée ou aliénée, c'est ce que Ton ne
saurait dire encore. Provisoirement, M. Brianchon se
croit en mesure d'affirmer qu'elle reste accessible à tous
les visiteurs.
— Cest avec un vif sentiment de satisfaction que la
Commission apprend, par M. le Président, le retour
d'un des membres les plus assidus à ses séances et les
plus animés de l'esprit de famille archéologique, M. de
la Serre, inspecteur des eaux et forêts pour la circons-
cription de Rouen.
— L* analyse partielle de la correspondance im-
primée offerte à la Commission des antiquités, dans la
séance du lo juin 1882, dont M. Brianchon donne
ensuite lecture, mentionne particulièrement :
1° L'ordre du jour adopté par la Société des anti-
quaires de France, sur la proposition de son président,
M. Heuzey, membre de l'Institut, dans la séance du
7 janvier 1880, et ainsi conçu : « La Société des anti-
quaires de France est opposée en principe à toute res-
tauration ». (Cf. Mémoires de la Société nationale
des antiquaires de France^ 5^ série, t. I, p. 49) ;
205
20 La définition, par M. d'Arbois de Jubainville,
dans le même ouvrage (p. igS)^ de Vercingétorix» 5i<-
premus militum dux, nom qualificatif; le Vercingéto-
rix, comme on disait le Brenn, remarque M. Bou-
quet;
30 Une très intéressante communication (p. 261-
263) de M. Héron de Villefosse, conservateur-adjoint
des antiquités grecques et romaines au musée du
Louvre, sur la découverte, à Lillebonne et à Saint-
Jean -de- Folleville, en 1880, des thermes antiques
d'Alincourt et du bas-relief d'Oreste du Bois d'Har-
court;
40 Dans le Bulletin de la Société des amis des
Sciences naturelles de Rouen^ pour 1881 : Les
Lichens des falaises de Saint- Jouin, par M. l'abbé Le-
tendre, vicaire au Grand-Quevilly (p. 227-232) ; —
Note sur la découverte de VHieracium pratense,
Tausch. dans l'Eure, suivie de la description des
Hieracium à hampe nue et à rejets rampants qui
croissent en Normandie, par M. Alfred Lacaille, sup-
pléant du juge de paix, à Bolbec (p. 333-336); —
Note sur VElodea canadensiSy par M. Tabbé Letendre
(p. 337-339); — Compte rendu de Texcursion de
Veulettes et Petites-Dalles, par M. Henri Gadeau de
Kerville, de Rouen (p. 341-347) ; — Communications
nombreuses de M. Lemetteil, de Bolbec (p. 361-371);
5® La description, dans le Bulletin historique de la
Société archéologique de Tarn -et -Garonne (t. IX,
p. 225-23o) , par Mg^ Barbier de Montault, d'une
tapisserie du xv<^ siècle, de fond identique à une petite
tapisserie représentant saint Roch, qui figurait à Tex-
position universelle de Paris, en 1878, et appartenait
à M. Le Breton, de Rouen.
2o6
M. Gaston Le Breton fait observer que cette tapis-
serie est aux armes des d^Esneval, qui portent pallé
cTor et (fa\tir de six pièces, au chef cousu de
gueules;
6^ Une savante analyse (p. 258-261), par M. R. de
Merciat, d'une Étude sur Varchéologie chrétienne,
pubiiée dans les Lettres chrétiennes dt Lille, et dues à
notre compatriote, M. Paul Allard.
— M. Gouellain expose et apprécie la découverte
de tombeaux francs faite à Pont-Authou, dans le dé-
partement de l'Eure, et rapportée par le Brionnais du
26 novembre 1882, ainsi qu'il suit :
On sait que, d'après la tradition, Pont-Authou, aujour-
d'hui charmante petite bourgade industrielle située sur la
Risle, en avsl et à peu de distance de Brionne, aurait été
autrefois une ville très importante, ayant pour faubourgs
les communes d'Authou, Thierville et Bonneville. Il y a
quelques années déjà , on a trouvé, à Pont-Authou, de
nombreuses antiquités romaines : \ases funéraires, débris
d'armes, tombeaux de pierre, etc.
M. A. Boulanger, architecte à Brionne, nous fait part,
dit le Courrier de VEure^ d'une découverte très intéres-
sante, au point de vue archéologique, qui vient d'être faite
tout récemment par des ouvriers qui travaillaient à la con-
struction du chemin de fer de Glos-Montfort au Neubourg,
dans une tranchée traversant les anciennes voies romaines
de Lillebonne à Lisieux et de Rouen au Mans.
De nombreux tombeaux en pierre de taille ont été mis
à nu, et, malheureusement, plusieurs ont été brisés par la
pioche des ouvriers et jetés dans les remblais de la voie
ferrée.
D'autres tombeaux, en plus grand nombre, existent
encore, et semblent indiquer l'emplacement d'une vaste
nécropole gallo-romaine franque.
207
Il serait à désirer, dans Tintérêt de Thistoire de notre
pays, que des mesures fussent prises sans retard par Tadmi-
nistration supérieure pour assurer Tenlèvement et la con-
servation de ces tombeaux. Ce qui serait d'autant plus
facile que les travaux du chemin de fer dont il s*agit
s'exécutent aux frais de TÉtat.
Le nombre des cercueils était de 29.
Un dessin, au crayon, d'objets extraits des fouilles
est déposé, par M. Gouellain, sur le bureau de la Com-
mission.
Ces objets consistent en : 6 cercueils en pierre, dont
3 plus larges à la tête qu'aux pieds et 3 rectangulaires;
2 couvercles de cercueils; 3 armes en fer; i grand an-
neau en fer oxydé; i double annelet en fer; i agrafe
en métal blanc; i agrafe en bronze; i vase en terre
noire; i vase en terre grise.
— A M. le Président, qui demande si les travaux
exécutés au Palais-de- Justice n'ont rien fait découvrir
de nouveau : — « Rien absolument, répond M. Lefort, »
ce que M. Le Breton attribue au fréquent bouleverse-
ment du sol.
— En septembre 1882, dit M. Pelay, les fouilles
faites pour les fondations du Musée-Bibliothèque, dans
la partie longeant la rue du Coquet, ont rnis à nu un
mur en piene assez important.
Cette muraille, dont M. Pelay a pu reconnaître l'exis-
tence non interrompue à plusieurs endroits, se dirigeait
en ligne droite vers la tour du Donjon du château de
Philippe-Auguste, en prenant comme point de départ
le portail latéral nord de l'ancienne église S*-Laurent.
Les quelques recherches auxquelles s'est livré
M. Pelay n'ont pu lui fournir aucune indication sur
cette muraille.
2o8
— M. Paul Baudry soumet à Texamen de la G>in-
mission une sorte de minerai gravé, en partie tronqué,
très-lourd, eu égard à son volume, et dont il désire-
rait connaître la matière et Pusage. L^objet en ques-
tion est de forme polyédrique. Poids, environ i kil.
25 grammes; hauteur de la base, 2 centimètres; hau-
teur totale, 7 centimètres ; plan inférieur, 8 centimètres
sur 6. Toutes mesures données sans rigueur mathé-
matique.
M. Gouellain pense que la matière pourrait être du
cinabre ou sulfure de mercure. Des deux écussons or-
nant les faces principales, Pun révèle, à M. de Beau-
repaire, les armoiries des Carmes Déchaussés; Tautre,
diaprés M. de Merval, porte cinq tiercefeuilles. Les
motifs décoratifs indiquent le caractère espagnol. D'une
inscription, d'ailleurs incomplète, qui couvre la base,
on nedéchififre guère que les lettres suivantes »lvssmo
s^ APZ LAvs. Le style général est celui du xvn« siècle.
Quant à l'usage, il reste indéterminé. Peut-être était-ce
un poids.
Présenté, après la réunion, à Tun des plus compé-
tents professeurs de la ville, celui-ci y a reconnu un
hématite rouge, formé d'oxyde de fer, qu^il décrit :
une pyramidique tronquée, irrégulière, à huit pans,
placée sur une base d'un nombre égal de faces.
A quatre heures, la séance est levée.
Le Secrétaire-adjoint,
Brianchon.
209
SÉANCE DU 22 MARS i883
La séance ouvre à deux heures sous la présidence de
M. de Beaurepaire, vice-président.
Sont présents : MM. Adeline, Paul Baudry, de Bel-
legarde, Billiard, le marquis de Blosseville, Maillet du
Boullay, Bouquet, de Girancourt, de Glanville,
Gouellain, Gaston Le Breton, l'abbé Loth, Pelay,
Tabbé Tougard, de Vesly et Brianchon, secrétaire-ad-
joint.
Est absent et excusé : M. le vicomte d'Estaintot,
secrétaire.
— La correspondance imprimée comprend :
Bulletin de la Société archéologique de Soissons,
t. XI, 2« série, 1880; — Comptes rendus et mémoires
du Comité archéologique de Senlis, t. VII, 1881 ; —
Mémoires de la Société d'émulation du DoubSj
5« série, 6^ vol., 1 88 1 ; — Bulletin de laSociété archéo-
logique de Tarn^t-Garonne, t. IX, 1881; — Bul-
letin du Comité des travaux historiques et scienti^
JiqueSy n**' i et 2, 1882 ; — Bulletin de la Société in-
dustrielle d'Elbeufy no 3, 1882; — Cartulaire du
prieuré de Saint-Étienne^de- Vignory (Société archéo-
logiquede Langres), par J. d'Arbaumont, 1882 ; — Afé-
moires de la Société des antiquaires du Centre^ t. X,
1882; — Mémoires de la Société académique de
Saint-Quentin, 4« série, t. IV, 1882.
Le procès- verbal de la séance du 7 février, est lu et
adopté.
— M. le Président saisit. la Commission d'une
demande de secours, formée par la commune d'Anger-
210
ville-rOrcher, pour réparations au clocher et à Péglise
atteints par la foudre l'année dernière.
L'église entière d'Angerville-POrcher est classée par
rÉtat et le Département.
Le devis des travaux s^élève à 5,820 francs, dans
lesquels la subvention réclamée entrerait pour un
chiffre de 2,820 francs.
Examen fait du dossier, dont les pièces sont régu-
lières et auxquels il ne manque qu'un plan pour être
complet, la Commission émet à Punanimité un avis
favorable à la demande de la commune d' Angerville-
rOrcher, sous condition expresse que le style de
l'église sera respecté dans toutes ses parties.
— En présence d'accidents trop souvent renouvelés,
la Commission, s'inspirant d'un vœu de M. l'abbé
Cochet, croit devoir recommander à nouveau l'établis-
sement de paratonnerres sur tous les clochers classés
comme monuments historiques.
— M. Pelay remet à M. le Président un croquis de
cercueils en pierre.
En exécutant des travaux d'élargissement et de ni-
vellement de la rue Tabouret, dans les premiers mois
de 1882, les ouvriers ont rencontré des cercueils de
pierre, au nombre de trois ou quatre. Comme leurs
congénères de la rue RouUand, découverts en i833,
les cercueils appartiennent à l'époque gallo-romaine.
Il n'en est pas moins permis de supposer, avec
MM. Billiard et Paul Baudry, que les premiers occu-
pants des sépultures ont dû céder la place, selon l'usage,
aux Mérovingiens ultérieurs des vi^ ou vii« siècles.
Les fouilles de la rue Tabouret ont été particuliè-
rement suivies par M. de Beaurepaire et M. l'abbé
AUard, du clergé de Saint-Gervais, qui a pris soin de
311
recueillir les ossements et de les déposer au cime-
tière.
Disons en passant que les cercueils en pierre de la
rue Tabouret, sur lesquels M. Pelay fixe notre atten-
tion, comme l'urne en terre cuite de la rue du Renard,
aperçue par M. Paul Baudry, Tannée dernière,
donnent une fois de plus raison à Tabbé Cochet,
quand il appelle si bien le quartier Saint-Gervais, —
« la grande nécropole de Rotomagus » (i).
Un dessin du croquis de M. Pelay sera relevé, par
les soins de M. Paul Baudry, pour les archives de la
Commission.
— M. de Vesly met sous les yeux de la Commis-
sion une épée en fer et un javelot de bronze. Ces deux
objets ont été extraits du lit de la Seine, à Oissel, près
du banc Saînt-Marcin, lors des draguages exécutés sous
la direction de MM. Lagrenée et G. Léchalas, ingé-
nieurs des ponts et chaussées.
L'épée, qui est fort bien conservée, mesure o" jS de
lame et o'niô de poignée, y compris la garde et le pom-
meau. Sa longueur totale est de o'^gi. La largeur de
la lame est de o^^oSS, près de la garde, et de ©'"oSo à la
naissance de la pointe. Cette arme a été obtenue d'un
seul jet, et le pommeau, de forme semi-lenticulaire,
mesure o'"07 sur o'"45. Ce poids était destiné à équili-
brer Parme dans la main du guerrier.
Le javelot de bronze, recouvert d'oxyde, auquel
adhèrent de petits coquillages, mesure o<"i8 de hau-
teur et o™o55 de sa plus grande largeur. La hampe
devait pénétrer jusqu'à l'extrémité de Parme : car la
(i) L'abbé Cochet, Répertoire archéologique de la Seine-Infé-
rieure ^ col- 372.
212
douille conique forme une saillie qui se continue jus-
qu^à la pointe.
M. de Vesly croit pouvoir fixer à Pépoquede la
Gaule indépendante Tépée de fer et dit que le javelot
de bronze est d'importation romaine.
M. Gouellain ne partage pas l'opinion de M. de Vesly
en ce qui concerne Tépée de fer. Il la croit postérieure
et d'origine franque. Cette arme, selon M. Gaston Le
Breton, est du ix<^ siècle.
M. de Vesly regrette de ne pouvoir se rangera l'opi-
nion de ses honorables collègues.
a L'épée, dit-il, dont on vient de donner la descrip-
tion, est à lame plate. Elle a été fondue d'un seul jet.
Elle ne présente aucune arête, ni gouttière, et, quoique
son exécution atteste une industrie déjà développée,
c'est en vain qu'on chercherait dans l'examen de cette
arme les caractères de l'épée franque. » M. de Vesly
reconnaît d'ailleurs l'embarras dans lequel il s'est
trouvé en voulant cataloguer l'épée d'Oissel : car il
n'existe aucun type similaire dans nos collections
départementales (i).
L'épée en fer et le javelot de bronze, provenant des
dragages d'Oissel, sont offerts par M. de Vesly au
musée d'antiquités. Un dessin en sera remis aux ar-
chives de la G)mmission.
Et, d'autre part, MM. les Ingénieurs chargés des
travaux de dragage ayant promis à M. Maillet du
Boullay de réserver les trouvailles qu'ils pourraient
faire au musée d'antiquités, M. de Girancourt trouve
(i) L'épée trouvée à Oissel ayant été soumise par M. de Vesly
à M. Nicaise (de la Marne), cet archéologue a reconnu que
Tarme était d'origine Scandinave. Cest une arme d'importation
dont le type est fort rare en France.
2l3
juste d^'adresser à tous les donateurs, tant présents que
futurs, un témoignage officiel des remercîments de la
G>mmission.
— M. Billiard soumet à l'examen delà Commission
des spécimens de silex taillés, recueillis autour de
Rouen, sur lesquels il donne les explications sui-
vantes :
Plusieurs localités des environs de Rouen, et notam-
ment Blosseville-BonsecourS; Darnétal, Saint- Léger-.
du-Bourg-Denis, le Mont-aux-Malades, les plaines de
la rive gauche de la Seine, Oissel, Saint-Étienne-du-
Rouvray, Quatre- Mares et Sotteville avaient déjà
fourni, il y a quelques années, de remarquables
échantillons des armes et outils en pierre à Tusage de
l'homme aux temps préhistoriques. Mais, depuis un
an, ce sont les travaux exécutés dans les plaines de
Quevilly et sur les bords du fleuve qui mettent à dé-
couvert une nouvelle et intéressante série de ces
curieux monuments.
« Cest la fleur du panier, dit M. Billiard, que je
présente à la Commission, avec seulement deux ou
trois échantillons déjà entrés dans le musée, que les
nouveaux vont aller rejoindre ».
Voici, de Pensemble de ces spécimens, Torigine, la
liste et la description.
Quevilly. — Une longue pièce ronde en silex noir,
sorte de poignard très aigu de chaque bout, de o"i8
de circonférence maxima et d'une longueur de 0^44
centimètres. Quatre silex gris et polis, percés naturel-
lement, en forme d'^amande, très pointus des deux
bouts, taillés par éclats, et mesurant, du plus grand au
plus petit, de o<°20 à o^^i i de longueur. Hache polie
en silex gris, longueur, o>°24. Hache polie en silex
214
rouillé, longueur, o"i2o. Deux petites pointes de
flèche miniature ( i ) .
Quai des Curandiers. — Très belle hache polie, en
silex presque noir, longueur, o™22.
Seine, devant les chantiers Ciaparède. — Une
énorme hache de silex jaunâtre, en forme d^amande,
percée naturellement, très pointue des deux bouts,
taillée par éclats, longueur, o"28, largeur, o™i 3, épais-
seur au trou, o™o6.
Mont'Saint^Aignan, — Hache polie, d'une belle
forme, en silex gris, longueur, o™20.
DarnétaL — Hache polie, d'une belle forme, en
silex gris, longueur, o"^20. Casse-téte en silex blanc
rouillé, outil taillé en éclats, de manière à prendre la
forme de la main fermée, qu'il dépasse par les deux
bouts. Deux silex plus ou moins arrondis, en forme
de percuteur, outil plutôt qu'arme. Pointe de flèche
miniature.
Saint'Léger-dU'Bourg'Denis, — Casse-tête en
silex blanc rouillé, outil taillé en éclats de manière à
prendre la forme de la main fermée qu'il dépasse par
les deux bouts.
Saint^Étienne-du-Rouvray, — Pointe de flèche mi-
niature.
Quatre-Mares, — Pointe de flèche miniature.
Poses (Eure). — Pointe de flèche miniature.
La Commission félicite à la fois dans M. Billiard le
collègue qui représente plus particulièrement, à ses
(i)Ces deux pointes de flèche miniature, ainsi que les quatre
autres désignées plus loin, ont été offertes par M. et Mlle Billiard
au musée d'antiquités. Peu de jours après la séance de la Com-
mission, M. Billiard a reçu de Quevilly une vingtaine de nou-
velles pointes.
2l5
séances, Parchéologie préhistorique, et le conservateur-
adjoint, qui, de concert avec l'honorable continuateur
de Tabbé Cochet, M. Maillet du BouUay, ne néglige
aucune occasion d'enrichir le musée d^antiquités.
— M. Maillet du Boullay présente un spécimen de
poterie trouvé dans les démolitions du quartier Mar-
tain\ille et offert au musée d^antiquités par M. Bour-
don, du quai de Paris.
Ce pichet ou pot à boire, qui rappelle un vase à
pasiîUages, communiqué par M. Lefort, dans la
séance du 25 janvier 1882^ est attribué au xv« siècle, et
porte pour inscription ces mots : Fa-f-e« quitte.
— M. Pelay informe la Commission que la belle
collection préhistorique de M. Michel Hardy, ainsi que
sa bibliothèque, viennent dMtre en grande partie dé-
truites par un incendie. La Commission est unanime à
déplorer l'accident doublement fâcheux pour la science
et pour le savant, dont notre sympathique collègue,
l'archiviste de Périgueux, a été victime.
— M. Brianchon donne lecture de la note suivante :
A la demande qui m'avait été faite par notre collègue ,
M. de Merval, dans la séance du 7 février dernier, j*ai
cherché à me renseigner sur les découvertes sépulcrales de
l'église de Raffetot, et voici ce que j'ai appris :
f On a — m'écrivait M. l'abbé Brentot, curé de Raffe-
tot, à la date du 27 février dernier, — on a, sur la demande
de M. le vicomte Roger des Mares de Trcbons, de Grain-
ville- Ymauville, retiré tous les débris qui encombraient un
tombeau, violé en 1793, probablement par esprit de cupi-
dité. Ce tombeau, d'un mètre seulement de profondeur,
renfermait : 1° les gros ossements de deux corps, les deux
crânes, plus une mâchoire d'enfant, le tout recueilli avec
respect; 2° deux têtes en marbre blanc, d'un très beau
travail, Tune 4'homme, l'autre de femme, mutilées, mais à
2l6
garder néanmoins précieusement; 3o la plus grande
partie de la pierre tombale, dont un petit morceau, que
vous aviez vu, m'avait £iit soupçonner la présence. J'en ai
reconstitué une assez bonne partie. Elle est d'un François
de Kanouville. Elle a trait à une fondation. Sans date.
Conservée au presbytère.
c A côté de ce tombeau, j'ai eu idée qu'il pouvait encore
y avoir eu d'autres sépultures. J'étais dans le vrai. L'ar-
gile, à peine sondée, ne m'a pas paru vierge. A deux pieds
à peine, la pelle a rencontré un corps sonore. C'était un
cercueil en plomb, d'un mètre de longueur, intact. Sans
lever ni déplacer le petit cercueil, on a continué au bout
les sondages. La terre n'est pas plus vierge qu'au-dessus. Il
y a encore un cercueil à une plus grande profondeur,
celui de la mère, peut-être. Les choses en sont là. »
M'étant empressé^ après cette lettre , de me transporter
à l'église et au presbytère de Raffetot, j'ai pu y vérifier
toute l'exactitude des indications données par M. le curé,
auxquelles je ne me permettrai d'ajouter que quelques
mots.
C'est dans la crypte vide qui existe sous l'ancienne cha-
pelle seigneuriale qu'ont eu lieu les deux fouilles pra-
tiquées par M. le curé de Raffetot. Commençons par la
seconde. J'ai vu le petit cercueil de plomb trouvé à
soixante centimètres de profondeur. Il paraît en place, et
ne porte aucune instruction. Sa forme est celle d'un tube
à dessous plat. Le second cercueil n'a pas encore été dé-
blayé.
La première fouille offre beaucoup plus d'intérêt.
Presque au fond de la crypte et à gauche se trouve le
caveau rectangulaire visité par M. le curé. On l'avait rem-
pli indistinctement d'objets appartenant à la sépulture, et
d'autres qui lui étaient étrangers. Outre les gros ossements
et les têtes de marbre, mentionnés dans la lettre de M. le
curé, il y avait encore de la terre, des silex, des fragments
de table d'obit et des morceaux de plomb, M. le curé a
2Î7
recueilli de plus une grande lettre cursive en plomb P, me-
surant o«o7 sur o'»04, et deux clous, d'où semble résulter,
au moment de la -sépulture, l'existence de cercueils de
plomb et de bois, et d'une inscription d'applique.
Les deux têtes, en marbre de Paros, si je ne me trompe,
et d'une grande finesse d'exécution, sont fort belles. Elles
révèlent la main d'un maître. Les figures ont été sauva-
gement mutilées. Les traits caractéristiques de la physio-
nomie, le nez, la bouche, les sourcils, les yeux n'ont pas
trouvé grâce devant le marteau des iconoclastes; mais à
cet acte impie ont encore échappé, comme par miracle,
des détails précieux et charmants.
La tête de l'homme est nue, l'oreille petite , le cou for->
tement attaché. Les cheveux aplatis sont symétriquement
disposés par étages circulaires de sept ou huit rangs de
boucles. Moustache épaisse, barbe courte et frisée. Face
carrée, visage osseux, pommettes saillantes.
La tête de la femme est plus curieuse encore. Sa coif-
fure, très bien conservée, et d'une forme particulière que
je me garderai bien de décrire, emprisonnant carrément
la tête aux cheveux relevés tout autour du front, enrichie
d'une double rivière de perles mêlées de cabochons, puis
fermée derrière par une pièce plate, aussi ornée de perles,
suffirait seule à dater la sépulture. Comment ces deux
têtes, évidemment du mari et de la femme, ont-elles été
rejetées aux décombres, pendant que le reste des person-
nages a disparu ? C'est sans doute que les deux tètes,
séparées de leurs troncs auxquels elles ne tenaient que
par un pivot, vu l'exiguité de leur volume, n'étaient
bonnes à rien, tandis que les corps, de grandeur naturelle,
auront pu être sciés, débités et utilisés pour le plus grand
profit des spoliateurs.
Les fragments d'inscription, au nombre de dix ou onze,
sortis également de cette sépulture, ne proviennent pas,
comme l'avait pensé M. le curé, d'une dalle tumulaire,
mais bien d'une table de fondation ou pierre d'obit, que
i5
2l8
nous supposerions volontiers avoir été placée, plutôt dans
la chapelle seigneuriale que dans la crypte. Sur cette
plaque de marbre noir, de 45 à 5o centimètres carres
environ, est gravée, en lettres dorées, la partie d'inscrip-
tion suivante, que nous attribuons, d'après la forme de
certaines lettres, et en l'absence du millésime qui n'a pu
éire retrouvé, aux premières années du xvii« siècle.
EVR Messire Franco ys de Canovville
OY, Seignevr de Raffetot, malleville
T DE VlNACOVRT MEV DE DEVOTION PO» AVGMETER LA
ICE A DÔNÉ AVMOSNÉ ET FODÉ A PERPÉTVITÉ TROYS
T A LEGLISE DE RAFFETOT PO» Y ESTRE CHATÉB ET
E TOVS LES lO' DE LA SEPMAINE LAQUELLE SE DIRA PRO
EDY. ET SAMEDY ET LES AVTRES loVRS SE DIRA
ENTZ CONVENABLES DE NOIR ET DE ROVGE qViL
DE CHACQVE M ESSE SE G HATERA VN LIBERA
SSEVRS, SVR LEQVEL SERA ALLVMÉ PENDANT
POIX DE TROIS LIVRES , ET SVR LAVTEL DEVX
VE LE PREMIER VENDREDY DE CHACQVE
T LIBERA SERA DISTRIBVÉ A TRENTE
E LA PAROISSE DE RaFFETOT, QVI AVRO
N VN PAIN dVn SOLD, ET A. QVINZE PAV
PAREILLE NÉCESSITÉ ET QVI A
T JeVDY CHACVN SIX DEN
NDAT LE VIVAT DV
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ME DE H
CAIR
NTECO
DVR
B
AV G
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219
Église de Raffetot (20 mars j883).
Plaque de marbre noire recueillie au presbytère et
fragmentée en onze morceaux. — »■ Inscription gravée en
lettres dorées. Dimensions approximatives : hauteur, o"42 ;
largeur, o'n46.
La Commission ne s*étonnera pas si je n'ai pu quitter
l'église de Raffetot, qui conserve comme un reflet de son
ancienne splendeur, sans jeter un dernier regard sur les
fonts baptismaux et les quatorze médaillons renaissance,
récemment classés, comme on sait, parmi les monuments
historiques du département. Ces objets sont remarquables,
mais ils sont détériorés, et M. le cure ne m*a pas caché
qu'il serait heureux de voir le Département assurer, par
rétablissement d'une grille, la conservation des bas-reliefs
des fonts baptismaux, et, par telles mesures que de raison,
la consolidation de quelques médaillons qui tombent de
vétusté.
Je me permettrai encore de recommander aux lumières
spéciales de mes confrères, non seulement l'attribution des
armoiries diverses qui se trouvent ça et là sur les pierres
sépulcrales ou de fondation, à une clé de voûte, sur la
cuve baptismale, au socle de la croix du cimetière, et
jusque sur la cloche nommée Catherine en 1776, mais
encore et surtout la lecture delà double ligne de caractères
du xvfc siècle Inscrits sur trois côtés d'une dalle tumulaire
encastrée dans le mur de la chapelle seigneuriale de
l'église de Raffetot en 1864.
Les quelques mots que nous soyons parvenus à déchiffrer,
M. le curé et moi, embrassent les deux points extrêmes,
l'alpha et l'oméga. Reste à suppléer l'intermédiaire.
On lit au commencement :
Cy dessoubj gist damqyselle. . .
Et à la fin :
Nobles lecteurs, prie^ Dieu et Marie que Vdme soit en
paradis.
Des restes d'armoiries, placées à droite et à gauche du
220
chevet da monument, pourront aider à la restitution des
personnages.
— M. Gaston Le Breton fait passer sous les yeux de
la Commission le dessin d'une statue de Louis XV, par
Jean-Baptiste Lemoyne.
On sait que Térudit conservateur du musée céra-
mique de Rouen est Fauteur d^une notice intitulée :
Le sculpteur Jean^Baptiste Lemoyne et V académie
de Rouen. Nous ne saurions mieux faire que d^em-
prunter à cette notice, p. 28, la description du dessin
dont il s'agit :
a Un dessin original à la mine de plomb rehaussé
de bistre, dit M. Le Breton, représentant Louis XV en
costume d'empereur romain, élevé sur un bouclier par
trois guerriers debout, nous paraît être une variante du
projet de J -B. Lemoyne que Ton voit au Louvre et
sur lequel le prince est revêtu d'une armure de son
temps et porté par des guerriers un genou à terre. Ce
dessin appartenait à M. Jules Maciet, qui a bien voulu,
sur notre demande, en faire don à la bibliothèque pu-
blique de Rouen, t»
A propos d'une statuette d'Osiris, qu'il soumet à la
Commission, avec plusieurs autres échantillons en
terre cuite des bords du Nil, M. Gaston Le Breton
entre dans des considérations détaillées sur les pro-
duits de la céramique égyptienne à l'époque ptolé-
maïque, ainsi que sur les soins apportés par les Egyp-
tiens à la conservation des morts. Ces considérations
intéressantes, que chacun voudra relire dans le dis-
cours de réception à FAcadémie de notre collègue, La
céramique polychrome à glaçures métalliques dans
Vantiquité, sont couronnées du témoignage d'Héro-
dote par M. Bouquet.
221
— M. Tabbé Tougard communique à la Commis-
sion un extrait de la Liste des ouvrages de Carie
VanloOy imprimée peu de temps après sa mort. On y
lit les deux indications suivantes :
« 1726. Mars et Vénus, gravé par Ravenet. A
Rouen, chez M™« de Brèvedent ».
a 1 741. La Vierge et le Jésus. A Rouen dans la
salle des Consuls ».
Le même membre rappelle à ce propos que Tun des
tableaux de Téglise de Motteville passe pour être du
même maître.
M. Gaston Le Breton croit pouvoir reconnaître,
dans un tableau de Carie Vanloo à la cathédrale, la
Vierge et Penfant Jésus qui décorait autrefois la salle
des Consuls.
« Nos collègues apprendront avec plaisir, ajoute
M. l'abbé Tougard, que la belle abbatiale de Saint-
Georges vient d'être pourvue d'un maître-autel en
pierre, dont Pensemble reproduit celui de l'abbaye de
Saint-Germer, près de Gournay. »
— M. Brianchon est heureux de préciser, à la suite
d'une subvention de quarante mille francs récemment
accordée par le ministère des cultes, la situation
financière de l'œuvre pour la restauration de la â^che
de réglise de Notre-Dame de Caudebec-en-Caux.
Dépenses à faire 1 55,ooo fr.
Ressources acquises
A l Beaux-Arts. 3o,ooo )
i<» Etat. \ ^ . \ 70,000 )
/ Cultes 40,000 S (io5,ooo
Département 35,ooo )
a» Souscriptions libres de la ville 44,000
Total 149,000
A déduire 140,000
Reste à fournir 6,000 fr.
222
— M. le Vice- Président donne lecture d'un mémoire
qui a été adressé par M. Coppinger sur le Cimetière
Gallo-Romain des Vertus,
•
f II y a trois ans, en interrompant la fouille que nous
avions entreprise aux Vertus, ce n'était point sans esprit
de retour. A notre avis, si le cimetière était de quelque
importance, il devait comprendre plus d'une vingtaine de
sépultures. Une nouvelle campagne, faite au mois d'octobre
dernier, nous démontra que nous ne nous étions point
trompé.
Cette fois, à notre grand regret, nous n'avions plus
près de nous notre ami, M. Michel Hardy, et, nous devons
Tavouer, son expérience nous fit plus d'une fois défaut.
Dans les sept sépultures de la fouille de 1882 (ce qui
porte à trente-trois le nombre de celles que nous avons
découvertes), nous retrouvons les mêmes procédés que
précédemment. Les sépultures sont garanties par de gros
silex ou par des fragments de tuiles. Les urnes cinéraires
sont du genre alla. Les vases aux offrandes rappellent
les petits « pots-à-beurre, » tant de fois représentés et
décrits dans les ouvrages de M. Tabbé Cochet.
Très peu d'objets ont pu être retirés intacts du sol.
Une seule sépulture a été trouvée dans son état pri-
mitif, chose assez rare. Aussi en dirons-nous quelques
motSk
Cette sépulture ne se composait que d*une grande urne
cinéraire forme « pot-au-feu », et d'un petit vase aux
offrandes, tous deux posés sur l'argile et hermétiquement
couverts d'un fragment de tuile. Contrairement à ce qui
s'était présenté jusqu'alors, très peu de terre avait pénétré
à l'intérieur de l'urne cinéraire, et, pour la'première fois,
il nous fut donné de nous rendre un compte exact de la
façon dont tout avait été disposé dans l'urne. Au fond,
on apercevait les cendres et les débris d'ossements, et
posée dessus, légèrement inclinée, une charmante am-
223
«
poule à anses en verre vert (i). Cette petite ampoule est
absolument intacte, et est certainement le plus précieux
objet de la fouille de cette année. Elle ne mesure que
oi"o35 de hauteur, et 011104 de largeur à la panse.
Parmi les objets provenant des autres sépultures, nous
n'avons à signaler qu'un vase aux offrandes en terre grise
de o™io5 de hauteur, de o™o65 dans sa plus grande lar-
geur, côtelé, et enduit d'une couverte qui présente encore
en certains endroits les traces d'une jolie teinte rose violet.
Il est entier et offre, il nous semble, quelque intérêt
à cause de la couleur très particulière de sa couverte.
Une sépulture nous a semblé être celle d'un enfant,
si Ton en juge par les urnes qui sont de très petite dimen-
sion.
Pour une des sépultures, il nous fut facile de consta-
ter que nous avions été devancés dans nos recherches.
Quelques ossements épars et de gros silex groupés témoi-
gnaient encore de l'existence de la sépulture, importante,
selon toute apparence. Mais les urnes avaient été enle-
vées.
Très probablement nous étions en présence d'une des
deux ou trois sépultures rencontrées par M. l'abbé
Cochet dans le sondage qu'il fit en 1S72. En fouillant
avec soin, nous avons cependant encore trouvé, oubliée
entre deux silex, une petite amulette en verre de couleun
verdâtre. Cette amulette ressemble â une bague en forme*
de tore. Son diamètre intérieur est de 0^014, son dia-
mètre extérieur de o>"02i. Son épaisseur est très irrégu-
lière et varie de o"oo3 à o™oo5.
Nous avions espéré, en relevant avec soin la position
de chaque sépulture, recueillir quelques indications pou-
(i) Semblable à celle que M. Michel Hardy a trouvée dans le
même cimetière en 1872. -~ Voir aussIM. Tabbé Cochet, Seine-
Inférieure Historique et Archéologique, page 441. Le petit
flacon de verre à deux anses, en cou de cygne, que représente
la gravure, est exactement l'analogue du nôtre.
224
vant nous guider dans nos recherches; mais il notis fut
impossible de Êiire à cet égard quelque remarque utile.
Aucune méthode, dans la disposition des sépultures,
aucune règle, dans les distances qui les séparaient. Cer-
taines étaient à un mètre seulement l'une de Fautre.
Beaucoup étaient séparées par un intervalle bien plus
grand, quelquefois cinq mètres.
Les sépultures n'étaient point placées en ligne, mais
plutôt groupées. Cest ce qui ressort de la compa-
raison des deux fouilles de 1879 et de 1882. En 1879, sur
un espace de cent mètres carrés environ, nous avions
trouvé vingt-six sépultures. Sur un espace à peu près égal
nous n'en avons découvert que sept en 1882.
Comme on le voit, la campagne de cette année a été
moins fructueuse que celle de 1879. Mais, encouragé par
l'accueil si bienveillant fait à notre première notice sur le
cimetière des Vertus par la Commission des Antiquités de
la Seine-Inférieure, nous n'avons pas cru devoir lui laisser
ignorer le résultat de notre seconde fouille.
— Par mesure d'ordre et dans le but de garantir la
fidélité des procès-verbaux et d^en faciliter la rédaction,
M. le Président prie les membres de la Commission^
qui prennent la parole au cours de nos séances, de vou-
loir bien lui adresser, dans un délai le plus rapproché
possible, des notes spéciales qui puissent permettre au
secrétaire-adjoint de remplir sa tâche^ rendue plus
lourde par la distance, avec autant d''exactitude que de
bonne volonté.
Le Secrétaire-adjoint,
Brtanchon%
225
SÉANCE DU 12 MAI i883.
La séance est ouverte à deux heures sous la prési-
dence de M. de Beaurepaire, vice-président.
Sont présents : MM. Adeline, Paul Baudry, de
Blosseville, Bouquet, de Glanville, Gouellain, Gaston
Le Breton, Pelay, de la Serre et Tabbé Tougard.
En Tabsence des secrétaires, le procès- verbal est
confié à M. Gouellain.
Se sont excusés: MM. Brianchon, d'Estaintot, Félix,
Lefort, Tabbé Loth et Maillet du Boullay.
Le procès-verbal de la dernière séance est lu et
adopté.
M. Gaston Le Breton fait observer que son opinion
et celle de M. Gouellain sur Page de Pépée présentée
par M. de Vesly, est confirmée par VioUet-le-Duc,
dont le Dictionnaire du Mobilier français offre
(p. 365) une arme de tout point semblable, que ce
savant attribue au ix« siècle.
La correspondance imprimée comprend :
Mémoires de la Commission des Antiquités de la
Côte-d'Or, t. X, l'c livr.; ^Mémoires de la Société
des Antiquaires de France, t. XLII; — Société des
Antiquaires de Picardie, t. XIV; — Société polyma-
thique du Morbihan, années i88i et 1882; — Société
archéologique de Nantes^ t. .XXI ; -^ Académie de
Besançon, année 1881.
M* le Préfet soumet à la Commission un dossier con-
cernant Téglise de la Cerlangue. Il s'agit de décider
si l'allocation demandée au Département, pour la re-
construction du chœur^ doit être prise sur les fonds
des monuments historiques.
226
La Commîssîon, sur Tavis conforme de M. le Pré-
sident, répond que le secours doit être emprunté au
budget des édifices paroissiaux^ attendu que le clo-
cher seul de la Cerlangue est classé.
Distribution est faite du Bulletin de la Commission
pour l'année 1881, qui complète le tome V. Des
remerciements sont votés à MM. d'Estaintot et G. Le
Breton pour la table du volume et les deux planches
qui ornent la présente livraison.
M. le Président se félicite de voir revenu parmi
nous, M. de la Serre, dont l'empressement à fréquen-
ter nos séances ne peut qu'honorer la Commission.
M. Gouellain informe ses collègues du violent
incendie dont a été victime notre confrère, M. Michel
Hardy, qui a vu sa collection préhistorique gravement
endommagée. Néanmoins une lettre récente de cet
excellent archéologue a informé M. l'abbé Tougard
que les ravages du feu sont moins irréparables qu'on
n'eût pu le craindre. M. Michel Hardy espère recom-
pléter ses intéressantes séries; et alors son vœu le plus
cher sera de les faire entrer dans notre Musée dépar-
temental, où elles seront plus à Pabri des accidents.
M. G. Le Breton fait passer sous les yeux de la
Commission un dessin de la cheminée en plâtre d'une
maison aujourd'hui démolie de la rueMalpalu, n<> 62.
Cette cheminée doit entrer au Musée céramique. Dans
son ornementation, M. G. Le Breton signale l'in-
fluence de Lepautre.
Le même membre annonce qu'il a réclamé pour la
même collection des boiseries qui se trouvaient dans
la Basse-Vieille-Tour.
Caudebec-lès-Elbeuf. — Découvertes archéolo-
giques. — M. Gouellain résume trois articles publiés
2%y
au commencement du mois dernier, dans le Journal
cPElbeuf, M. Drouet y raconte qu'il a découvert plus
de 3oo sépultures à Caudebec^lès-Elbeuf sur un espace
d^environ 200 mètres carrés. Ces tombeaux ont donné
environ 5oo vases, quelques objets de verre, deux épées
et des anneaux en fer, enfin des fibules, des miroirs et
quelques monnaies romaines ou gauloises en bronze.
Malgré l'abondance de ces antiques débris, notre
confrère combat les conclusions de M. Drouet, qui
affirmait que cette fouille précise remplacement de la
ville d'Uggate. M. Gouellain remarque, en effet, que
Tabsence de murailles et de fondements dMdifices ne
permet pas de tirer cette conséquence de cette petite
campagne archéologique, qui n''en reste pas moins
fort intéressante, et dont la Commission est heureuse
de féliciter M. Drouet, en l'engageant à poursuivre ses
explorations.
A Toccasion de cette communication, M. Pelay
expose qu^un homonyme de notre ancien collègue de
Caudebec, M. Gosselin, possède l'emplacement de
l'ancien cimetière et qu'il y fait de fréquentes décou-
vertes. Il a pu ainsi grouper un remarquable ensemble
de vases gallo-romains.
Le même membre signale dans la rue Malpalu la
porte et l'escalier de la maiscjn dont M. G. Le Breton
a pu sauver la cheminée d'un seul morceau. II est à
regretter que la ville, qui s'est réservé tout ce qui peut
être intéressant dans les démolitions, n'ait pas songé à
leur conservation. Une autre cheminée de la même
maison, d'ailleurs assez peu intéressante, a été achetée
par M. David Dautresme. Des fragments remarquables
d'une troisième cheminée ont été réunis par M. G. Le
Breton, qui espère en reconstituer l'aspect»
228-
' Ailiers. — Ruines gallo-romaines, — Le même
membre a extrait du journal la Risle ( n» du 22 avril
dernier) la note suivante :
M. Brichard, négociant, à Caudebec-en-Caux, amateur
photographe, s'est rendu au Flacq, commune d'Aiziers, et
a photographié les ruines gallo-romaines mises à découvert
par le mascaret dans un champ, près la Seine, appartenant
à M. Jean-Félix Topsent.
f II en a pris six vues destinées au musée de Caudebec.
a Ces ruines aujourd'hui arrachées de leur emplacement
ont été déchirées par les marées des 9 mars et 7 avril i883 ».
Cimetière Saint-Maur à Rouen. — M. de Beau re-
paire donne lecture de la notice suivante sur le cime-
tière Saînt-Maur.
NOTICE SUR LE CIMETIERE SAINT-MAUR A ROUEN
De tous les cimetières de Rouen, celui de Saint-Maur
est le seul qui soit ancien. Sa situation dans un faubourg
solitaire l'avait sauvé de la proscription qui atteignit, en
1772, tous les cimetières de cette ville : il y en avait eu
jusqu'alors autant que Ton comptait d'églises paroissiales
et de communautés religieuses, â son tour, il vient d'être
interdit, ainsi que tous ceux que Ton avait établis à cette
époque et pour lesquels on s'était cru permis d*espérer
une durée indéfînie. A vrai dire^ étant donnés nos prin-
cipes en fait d'administration, et nos exigences en fait de
salubrité publique, cette mesure était inévitable ; c'était
une conséquence forcée du débordement de plus en plus
marqué de la population urbaine en dehors de l'enceinte
des boulevards qui avait remplacé, vers la fin du dernier
siècle, les fossés et les fortifications du moyen-âge.
Ce cimetière appartenait autrefois, comme il appartient
encore aujourd'hui, à l'Hôtel-Dieu de la Madeleine.
Suivant Farin, il en serait fait mention, sous le nom de
229
chapelle de Saint-Nicolas de Beauvoir, dans une bulle
d'Urbain III, de Tannée 1 185 (i).
J'avoue ne pas connaître le texte de ce document, mais
i'ai sous les yeux une autre bulle, du mois de mai 1 1 98,
par laquelle Célestin III confirme à ses chers fils, les ma-
lades de rhôpital de Sainte-Marie-Madeleine, entre autres
biens, locum sancti Nicolai de Belyeier, avec les maisons
et les terres qui en dépendaient.
Bien que, dans cette bulle, il ne soit pas question de
chapelle, le nom de saint par lequel le lieu est désigné ne
permet guère de douter qu'il n'y en eût une dès ce temps-
là.
Quelques années après, la vraisemblance fait place à la
certitude. Une charte de 1222, conservée dans le fon^s du
prieuré du Mont-aux-M alades, mentionne, en termes
précis, ecclesiam Sancti Nicolai de Bellovisu (2).
Il paraîtrait, toujours d'après Farin, que cette chapelle
aurait été dédiée par Tarchevcque Thibaud, et qu'à cette
occasion des indulgences auraient été accordées aux fidèles
qui la visiteraient le jour anniversaire et durant Toctave de
cette fcte. La cérémonie ayant eu lieu le 1 3 janvier, veille
de saint Maur, on peut admettre qu'insensiblement l'ha-
bitude se sera formée de donner le nom de Saint-Maur,
d*abord à cette chapelle, ensuite au terrain qui y était at-
tenant, enfin à la rue par laquelle on s'y rendait, et cela
d'autant plus naturellement que ce nom, abstraction faite
de l'orthographe, dont le peuple n^eut jamais souci, conve-
nait assez bien à un cimetière (3).
(1) Histoire de Rouen ^ 3* partie, p. 66,
(2) La rue qui longeait cette église est désignée sous le nom
de vicus Sancti^Nicholai de Bellovisu et de Sancti-Nicholai de
Bellovidere, dans une autre charte d'avril ia23 (v. s.), même
fonds. Le lieu dominait la ville et la vallée : de là le nom de
Beauvoir, équivalent de Bellevue.
(3) Histoire de Rouen, 3* partie, p. 66. Ce ne furent pas des
motifs plus sérieux qui déterminèrent le choix des patrons pour
23o
Qu'il y en eût un a Beauvoir dès la fin du xii^ siècle,
rien de plus probable. Au xiii^ siècle, son existence ne
saurait plus faire Tobjet d'un doute. Nous voyons, en effet,
que ce fut là que Vincent du Valricher, un riche bourgeois
de Rouen, peut-être même un maire de cette ville, fut
enterré avec sa femme Perronnelle.
Leur sépulture donna lieu à l'érection d'une seconde
chapelle tout près de celle de Saint-Nicolas. Jean de Saint-
Léonard, neveu de Vincent du Valricher, la fit construire
à ses frais ; il obtint de l'Hôtel-Dieu que deux religieux y
célébreraient à perpétuité deux messes par jour.
Le cimetière de Beauvoir était compris dans la paroisse
Saint-Gervais. On le considéra, pendant quelque temps,
comme une partie de l'exemption des moines de Fécamp,
à qui appartenaient le prieuré et l'église Saint-Gervais.
Aussi voyons-nous que, pour l'approbation de cette cha-
pelle, on crut devoir s'adresser à l'abbé de Fécamp, lequel
donna son consentement, en y mettant pour condition
que les religieux, chargés des offices, lui prêteraient
l'obéissance canonique ; et que, sur les revenus affectes à
la fondation, il serait offert, chaque année, une livre d'en-
cens à l'église paroissiale (dimanche, veille de la Toussaint
1288) (i).
Postérieurement des débats s'élevèrent entre l'arche-
vêque et les moines au sujet du cimetière de Beauvoir. Il
est constant qu'il finit par être soumis directement à l'au-
torité de l'ordinaire, de même que l'Hôtel-Dieu, dont il
n'était qu'une dépendance. Aussi était-ce l'archevêque qui
certaines corporations de métier. Remarquons que le cimetière
de Caudebec-en-Caux était aussi sous le vocable de saint
Maur.
(i) Une autre redevance était due aux religieux de Fécamp par
l'Hôtel-Dieu, pour la chapelle primitiye du même cimetière :
« Des religieux de THostel-Dieu, pour la chapelle de Saint-Ni-
colas, où Ton presche le lundi de Pasques, lx chandelles de cire. »
Compte de la baronnie de Saint-Gervais, 1495- 1496.
23l
nommait à cette seconde chapelle sur la présentation du
seigneur de Frontebosc, fief situé à Limésy (i).
Comme elle était dédiée à saint Etienne, elle porta son
nom (2). Elle fut dite aussi la chapelle des Valricher, et
plus tard, la chapelle de Frontebosc, du nom seigneurial
des héritiers ou représentants du fondateur.
S'il fallait en croire une tradition rapportée par Farin,
elle aurait servi autrefois de paroisse aux habitants du
hameau du Nid-de-Chien, en la vallée de Robec, et
c'aurait été là qu'ils auraient fait baptiser leurs enÊints
jusqu'au jour où, cette chapelle ayant été détruite par les
guerres, les fonts baptismaux furent transférés en l'église
du prieuré de la Madeleine. Mais il est clair, pour nous,
qu'on aura pris pour une pratique normale un fait
accidentel ; et que la chapelle de Saint-Etienne, de fonda-
tion récente, comme nous venons de le voir, ne dut être
adoptée, pour église de paroisse, par les habitants du Nid-
de-Chien que lorsque, par suite ou de siège ou de peste,
les communications se trouvèrent interceptées entre la
ville et les faubourgs.
La dévotion des fidèles envers les deux chapelles, dont
(i) Il est fait allusion à ces débats dans un compte de l'arche-
vêché de 1402-1403 : «c Cas de nouvelleté prins par Tabbé de
Fécamp contre Mgr pour la reconstruction du cimetière Saint-
Mor 1». Arch. de la S.-Inf. G. 18. — En Tannée i658, Albert
Le Marchant, vicaire général de l'abbé de Fécamp, prétendit
visiter la chapelle Saint-Maur : il se présenta, suivant le céré-
monial d'usage, à la porte de cette chapelle ; mais il trouva porte
close et personne pour lut ouvrir; le chapelain, bien que régu-
lièrement prévenu, jugea prudent de se tenir à l'écart, par res*
pect pour les droits de l'ordinaire. Ibidem, G. 5204.
(2) Chapelle Saint-Etienne au cimetière Saint-Maur, vacante
par le décès de Richard Ango, conférée à Jean Kaulin, clerc, à
la suite d'un procès, pour le patronage, entre Agnès Raulin,
veuve de Jacques Gouel, et le prieur de la Madeleine, 16 mai
iSog. Registre du Secrétariat de l'Archevêché.
wk^«
232
nous venons de parler, fut favorisée par diverses bulles
d'indulgences, notamment par une bulle de Nicolas IV,
1288, où saint Maur est signalé, après saint Nicolas et
avant saint Etienne, comme particulièrement honoré au
cimetière de Beauvoir. Le nom de saint Maur est exclu-
sivement attribué à la principale chapelle de ce même
cimetière, dans des lettres du cardinal d'Estouteville, qui
nous apprennent qu'elle avait été démolie sous la domina-
tion anglaise et qu'on s'occupait alors de la réédifier.
Pendant longtemps, les religieux de la Madeleine
eurent à Beauvoir une sorte de succursale de leur hôpital ;
ils y entretenaient un chapelain, parfois qualifie prieur,
avec quelques frères pour acquitter les fondations et pré-
sider aux enterrements.
Dom Nicolas Le Gras, prieur de T Hôtel-Dieu, fit
ordonner par le chapitre de la communauté que Ton
célébrerait, à Saint-Maur, Tofïice des défunts chaque
dimanche de carême, et qu'il y serait dit, tous les lundis
de Tannée, une messe de requiem.
Les religieux perdirent la propriété de ce cimetière
lorsque, vers i55i, une administration, mi-partie laïque,
mi-partie ecclésiastique, prit possession de leur maison.
Ils n'eurent plus qu'à remplir les fonctions du culte,
pour lesquelles on leur laissa une portion de leurs anciens
revenus.
Les nouveaux administrateurs conservèrent, du moins,
à Saint-Maur un chapelain qui recevait les offrandes des
fidèles et devait en remettre une part aux pauvres de
THôtel-Dieu. Quelques années après, en i566, ils furent
condamnés, par arrêt du parlement, à faire bâtir une
maison près d*uQ terrain qui avait continué d'appartenir
aux religieux, et qu'on appelait encore, à cause de cela, le
prieuré.
En 1 63 5, il est question de religieuses de l'Hôtel- Dieu,
envoyées à Saint-Maur pour faire leur évent.
Au xviiic siècle encore, les religieux possédaient, comme
233
lieu de récréation, un jardin avec maison, attenant à Saint-
Maur (i). Le 19 juillet lySô, ils obtinrent en échange de
ce terrain, un emplacement près du lieu de santé où Ton
venait de transférer THôtel-Dieu.
Deux chapelles dans un cimetière , c'était, ce semble,
autant, sinon plus, qu41 n'en fallait pour satisfaire à la piété
des Rouennais. Une troisième y avait été, cependant,
fondée, en 1472, par f ung bon catholique, bourgeoys et
demeurant en la ville de Rouen, natif du Trect (Utrecht),
en AUemaigne, nommé Guérart Louf, ymaginier et
peintre. » Cet artiste, qui paraît avoir joui d'une certaine
célébrité parmi ses contemporains, prit à sa charge les
frais de construction et d'ornementation de cette chapelle,
après s'être entendu avec les religieux, qui consentirent à
lui donner, dans le cimetière Saint-Maur, tout le terrain
qu'il lui fallait, sous réserve, toutefois, qu^ils en demeure-
raient seigneurs en fonds et en propriété. Guérart Louf ne
se borna pas à cette œuvre de piété. Il fonda, dans la
même chapelle, c une noble confrarîe sous le nom de la
glorieuse Résurrection Notre Sauveur et Rédempteur
Jhesu-Crist, saint Ladre, sainte Marthe et des Tré-
passés >, et obtint pour cela l'autorisation du couvent de
r Hôtel- Dieu. Les premiers associés étaient au nombre
de 40, y compris le fondateur. C'étaient, je n'en cite que
quelques-uns : Pierre Le Forestier, prieur de la Madeleine ;
Jacques Duval, avocat ; Jean Le Normant, Pierre Le Clerc,
Reynaud Billon, notaires en cour d'église ; Richard Le Rat,
chanoine du Sépulcre; sire Robert le Cornu, Robert de
Villeneuve, Colin Marguerie, Simon de Conflans, écuyer,
et Jacob Louf, frère de Guérart. La confrérie avait deux
sessions annuelles , ou, comme on disait, deux sièges : le
siège d'hiver, le jour de la Commémoration des morts, le
samedi, le dimanche et le jeudi suivants; le ^id^ed'été^ le
(i) On voit, par un ancien document, que le jardin des religieux
occupait une longueur de 117 toises le long de la rue Saint-
Maur. Il est figuré dans le plan de Gomboust.
16
234
lundi après Pâques, le samedi, le dimanche de Quasimodo
et le lundi suivant. Ce jour-là, les frères renouvelaient
leur bureau, procédaient aux admissions de nouveaux
membres, et tenaient buffet en la chapelle pour y recevoir
les aumônes des fidèles.
Chaque lundi de Tannée, une messe était dite par un
religieux. Le premier lundi de chaque mois , cette messe
était chantée à note avec diacre et sous-diacre.
Le mardi qui suivait la Commémoration des morts, les
frères servants s'assemblaient, sur la semonce de leur clerc,
en la maison de l'échevin, vers deux heures de relevée, et,
après que celui-ci leur avait offert du pain, du vin et des
épices, ils se rendaient à leur chapelle, avec croix, ban-
nière et clochette. Là, ils entendaient les vêpres des Tré-
passés, chantées par 6 ou 7 religieux de T Hôtel-Dieu. Le
lendemain, après une procession autour du cimetière , au
chant du libéra^ ils assistaient à une grand' messe que
disaient les mêmes religieux. Plus tard, pour se conformer
à la volonté du testateur, ils devaient, cette messe dite,
aller jeter de Peau bénite sur sa tombe et réciter à son
intention une patenôtre et un Ave Maria,
A la suite de cette cérémonie, les frères convoyaient
réchevin jusque chez lui, et tous prenaient ensemble c ré-
fection corporelle, en signe de bonne amour et de frater-
nelle union, m L'échevin, ainsi que le prévôt, payaient
chacun 3o s. pour leur écot; les autres frères payaient ce
à quoi ils étaient taxés par délibération des maîtres.
Une seule disposition des statuts me paraît mériter d'être
rapportée.
« A toutes les assemblées d'icelle confrarie se gouverne-
ront les frères servans bien et honnestement sans noises
ne tenchons, ne nul blasphème de Dieu, et s'il estoit ainsi
que par aucun des servans en avoit, les maistres les pour-
roient tirer du service, s'ilz ne s'apaisoient. »
Je suis très porté à croire que cette association fut
établie à l'instar de celle qui avait été fondée, peu de
i35
temps auparavant, à Paris, en l'église de la Madeleine de
la Ville-l'Évèque, près la porte Saint-Honoré*
Cette dernière était d'autant plus honorablement connue
qu'on la disait fondée par le roi Charles VIII et par la
reine, sa femme, lesquels avaient voulu en être appelés,
Tun le premier frère, l'autre la première sœur.
Le prieur, les frères et les sœurs de la Madeleine (et
dans le nombre, il faut certainement comprendre Louf et
ses compagnons) demandèrent à être affiliés à la confrérie
de la Ville-rÉvêque, faveur qui leur fut accordée, le 20
octobre 1492, par Gilles Picart, avocat au parlement, par
Jean De la Place, procureur général au Châtelet, et par
Ambourse Prieur, agissant tous en qualité de gouverneurs
et de maîtres de la confrérie.
On ne sera pas surpris d'apprendre que la bonne union
ne dura pas toujours entre les religieux et les confrères : Top-
position d'intérêts ne pouvait manquer d'être une source
de division. Les premiers soutenaient que les maîtres
n'avaient le droit de tenir buffet dans la chapelle qu'aux
jours de sièges, ci-dessus indiqués ; ils trouvaient aussi à
redire â l'usage qui s'était introduit de foire des cueillettes
(quêtes) dans le cimetière. Ils prétendaient encore qu'il
n'appartenait à aucun prêtre d'y administrer les sacrements
sans leur permission. De leur côté, les maîtres reprochaient
aux religieux de se montrer peu exacts dans la célébration
des messes, et de laisser les prédications à leur charge. Ces
sortes de débats se renouvelèrent plus d'une fois. Il suffit
de les indiquer en passant : les détails n'auraient plus d'in-
térêt pour personne.
Les statuts de la confrérie furent approuvés par Mgr
d'Estouteville, le ï6 octobre 1475, sous le titre de • Statuts
de l'Association de la bienheureuse Marie-Madeleine, mi-
roir des pécheurs, de sainte Marthe, sa sœur, et de saint
Lazare, son frère, t Ils le furent de nouveau, et avec cer-
taines modifications, par Mgr Charles de Bourbon, le 8 jan-
vier 1571. On voit, par les lettres de ce dernier, qu'il
236
y avait alorà 80 frères et 40 sœurs. Un des articles est ainsi
conçu : c Ordonné que chacun frère et seur de ladite
association sera tenu et subgect de venir, le jour de la
procession, à la Magdaleine, avec un chapelain et avec une
chappe, sur peine d'amende, le lundi après le sermon de
madame sainte Marthe ».
Les souverains pontifes joignirent leurs approbations à
celles des archevêques . Des indulgences furent accordées
aux associés par Sixte V, en 1589; par Innocent X, en 1649.
Un grand nombre de peintres et de sculpteurs faisaient
partie de cette confrérie. Il est même à remarquer que
c'était une stricte obligation, pour eux, de lui payer un
droit lors de leur réception comme maîtres dans la corpo-
ration.
La chapelle des Trépassés, de même que celles de Saint-
Nicolas et de Saint- Etienne, fut ruinée, soit pendant l'oc-
cupation de Rouen par les protestants, soit à l'occasion du
siège mis devant cette ville par Charles IX.
Ce ne fut que quelques années après, en 1569 et 1570,
qu'on put songer à la relever de ses ruines. On en réédifia
le clocher ; on rétablit les verrières qu'on avait dû démon-
ter à la hâte, dans un moment de panique. On en fit
re&ire trois nouvelles par le verrier Jacques Tuchon en
1571 et 1572.
Cette dernière année, on paya 112 1. pour deux /rwi55^/s
historiés mis au tableau de la contretable et qui se fer-
maient à l'aide d'un cadenas, et 45 1. 1 3 s. pour la répara-
tion du mur de la galerie. En 1576, le menuisier Robert
Clerc refit, pour 5i 1., la clôture du chœur. En 1 583, Jean
Férey, maçon, et le frère Louis Guillebert, menuisier,
achevèrent la grande porte du pignon.
L'année suivante, des malfaiteurs s'introduisirent dans
le clocher, et jetèrent à terre le coq qui le surmontait.
Vers le même temps, on vit les catholiques^ réunis à Saint-
Maur, aux prises avec les protestants qui revenaient du
prêche de Pavilly.
Malgré les inquiétudes au milieu desquelles on vivait
alors, on continua les travaux dé décoration entrepris a la
galerie. Le maçon Robert Chrétien et un artiste, du nom
de Pierre Potier, en furent chargés en i586 : ce dernier
répara le tableau qui ornait la muraille et fit une statue
de saint Adrien, l'un des patrons les plus invoqués contre
la peste.
En 1 586, une verrière fut offerte par Nicolas Baudry.
On y fit mettre, en souvenir du donateur, une inscription
par Jean Bezoche, auteur, suivant toute vraisemblance,^
de la verrière.
En 1589, vers le 9 avril, on fit démonter toutes les
verrières qui avaient été restaurées par Nicolas Vereul , en
i582, et on les fit porter chez le clerc de la paroisse de
Sainte-Marie-la-Petite. Bien que rien n'annonçât une paix
durable, on reprit pourtant confiance, et, le 5 novembre,
toutes les verrières étaient remises à leur place, par les
soins de François Le Vieil.
Mais deux années à peine s'étaient écoulées, qu'en prévi-
sion du siège dont la ville était menacée, on s'empressait,
de nouveau, de démonter les verrières. On les porta, cette
fois, chez un nommé Bondor et chez Me Adrien Du val, à
l'hôtel du Petit-Montier (i). On mit également en lieu
sûr la cloche et la menuiserie de la chapelle. Les mêmes
précautions furent prises pour sauver ce qu'il y avait de
plus précieux à la chapelle Saint- Etienne, notamment les
belles statues de VEcce homo et de Notre-Dame, et les
pierres où se trouvaient gravées des inscriptions.
Dès que la paix fut revenue, les confrères s'occupèrent
du rétablissement de leur confrérie. Plus actifs ou plus
généreux que les administrateurs de T Hôtel-Dieu et que
les seigneurs de Frontebosc, ils s'empressaient, dès 1 595, de
faire reconstruire la chapelle des Trépassés et la galerie qui
(i) On connaît encore l'hôtel du Petit-Montier en la rue Cau-
choise.
238
y faisait suite, après en avoir obtenu ia permission de
Tamiral de Villars et du Bureau de T Hôtel-Dieu. En iSgô,
des imaginiers relèvent la croix du cimetière et restaurent
les statues de VEccehomo, qu'il ne faut pas confondre avec
celles de la chapelle Saint- Etienne (i). On fait revenir la
menuiserie du chœur, qui avait été mise en dépôt chez les
cordeliers de Rouen. En 1 597, on répare les verrières aux
dépens d'un des maîtres; on rapporte de Saint-Godard
deux statues qu'on y avait placées pour les soustraire à la
proÊination pendant les troubles.
En novembre 1604, on paie 6 1. à l'cvèque de Damas
pour avoir béni deux autels de la chapelle et celui de la
galerie; et 12 1. à Jean Dusaussoy, ancien maître de la
confrérie , pour l'indemniser des frais du dîner qu'il avait
offert à ce prélat.
D'autres articlçs de dépenses sont à noter, soit parce
qu'ils nous fournissent des noms d'artistes, soit pour les
renseignements qu'ils nous procurent sur certaines particu-
larités archéologiques.
On raccoûtre, en 1609, la chaire du prédicateur. On
paie, pour cela, 12 1. au menuisier Nicolas Roussel, et l'on
achète pour 14 sous de frange. Cette chaire, suivant
l'usage général du pays, était ornée de tentures qui va-
riaient suivant les circonstances. En 1604, maître Jean
Agnès, avait donné, pour la décoration de la chaire, une
courtine de toile noire, bordée de figures de tètes de
mort et de larmes.
Il est encore question, en 1 609, d'un image qui avait été
donné par le frère Robert Le Tellier, et que Ton fit peindre ;
de 6 anges donnes par un autre frère, qui furent placés
aux deux côtés du crucifix ; d'un goupillon (vipillon) qui
(i) Croix du cimetière réparée par Robert Chrétien, maçon;
piédestal et croix en bois, œuvre Ju frère Louis Guillebert, 22 I.,
vers iSyo. Croix de pierre du cimetière raccoûtrée parie sculp-
teur Pierre Le Sénéchal, en 1609.
239
fut attaché à un image de sainte Marthe, servant de reli-
quaire.
On paya, en 1611, i5 1. à David Delamare pour avoir
fait V image des Macabez (Machabées) (i).
En 1644, on donna 5 1. 10 s. à un peintre pour avoir
rafraîchi les images de la Résurrection, déjà restaurées,
en i6o3, par Pierre Brémontier, sculpteur, et qui surmon-
taient le maltre-autel. On paya, cette même année 1644,
8 1. 1 5 s. pour la sculpture et la peinture de VEcce homo.
En 1628, Jean Pinchon reçut 35 s. pour avoir remis en
plomb la verrière de la Cène, qui était au-dessus de Tune
des portes de la chapelle. Le même verrier fut chargé, de
nouveau, de la restauration générale des verrières en
i635. Guillaume Le Vieil les répara, à son tour, en 1668,
1680 et i685.
En 1673, on fit démonter la clôture du chœur. On y fit
mettre des portes et Ton replaça plus haut le crucifix. Ce
travail dut entraîner la suppression du pupitre ou jubé
que l'on voit clairement désigné dans un compte de 1609.
Jouvenet fit un bénitier neuf pour 4 1. 10 s. en 1676.
Un menuisier, renommé pour son habileté, Pierre Le
PouUetier fit, en 1677, la contretable du maître-autel,
dans le goût qui était alors à la mode.
La galerie qui faisait suite à la chapelle était, comme
nous Favons dit, ornée d'un autel. C'était, j'imagine, une
construction dans le genre de celle qu'on voit encore au
cimetière de Brisegaret, près de Montivilliers. David De-
lamare, déjà cité, donna, en 161 1, 28 aunes de toile pour
tendre cette galerie les jours où il s'y ferait quelque prédi-
(i) On peut se demander pourquoi représenter les Machabées
plutôt que tant de saints de la religion chrétienne qui avaient
sacrifié leur vie avec un héroïsme comparable au leur. Ne serait-
ce pas à cause de la profession de foi en la résurrection et en
l'efficacité de la prière pour les morts, contenue dans leur his-
toire? On sait que quelques archéologues voient dans le mot
macabre une altération du nom machabée.
240
.cation;. Jean Pinchon en répara les vitraux Tannée suivante.
En 1646, on se cotisa pour rebâtir la galerie, et Ton
s'adressa, pour cela, au maçon Henri Gosset, et au me-
nuisier Nicolas Roussel. Mais, dès 1659, on ne trouvait
plus suffisant ce qui avait été fait : la galerie paraissait
trop petite pour contenir le peuple qui y venait entendre
les sermons aux dimanches et bonnes fêtes de Tannée,
et qui y restait exposé aux pluies et à toutes les injures
du temps. On voulait d'ailleurs, par motif de piété, avoir
le moyen de mettre à Tabri les os qui gisaient épars dans
le cimetière, où ils étaient laissés à la merci des chiens et
des autres animaux. On décida donc de faire agrandir la
galerie, de lui donner la largeur de la chapelle, et de
faire construire au-dessus un étage à usage de charnier.
Je ne saurais dire où était placée la chambre des assem-
blées de la confrérie. Ce que j'en puis dire, c'est que la
porte en était ornée, en 16 14, d'un rideau où était repré-
senté un Ecce homo, œuvre du frère Pasquet Bucquet.
En 1785, la chapelle des Trépassés fut reconstruite en
majeure partie. D'après le devis qui existe aux Archives,
elle contenait 63 pieds de long sur 16 de large dans
œuvre, et était accompagnée d'une sacristie, qui lui faisait
suite, de i5 pieds de long sur autant de large, au-dessus
de laquelle on mit la chambre des assemblées. Pour cette
reconstruction, on dut démolir le comble ainsi que le clo-
cher de Tancien bâtiment. On ne laissa subsister que les
murs de maçonnerie. Les travaux, dont fut chargé Tentre-
preneur A.-B. Le Jeune, coûtèrent aux confrères 4,5oo 1.
Pendant longtemps la confrérie n'employa pour l'ac-
quit des offices d'autres ecclésiastiques que les religieux de
THôtel-Dieu. Mais la confrérie se maintint toujours, grâce
à la faveur publique, tandis que les religieux finirent par
être à peu près complètement évincés du cimetière. Il en
résulta peu à peu pour elle une véritable indépendance ;
elle finit par avoir son chapelain particulier, et par faire
régler ses offices directement par l'autorité diocésaine.
241
On conserve aux archives du département le Tableau
des Offices qui se faisaient en la chapelle des Trépassés.
La grand'messe s'y disait à neuf heures chaque di-
manche, et était annoncée par trois sons de cloches, à
huit heures, huit heures et demie, huit heures trois quarts.
On y faisait l'eau bénite et le pain bénit.
On y disait aussi les vêpres à deux heures et demie, en
hiver, et à trois heures, en été.
L'office y était célébré, avec une grande solennité, les
jours suivants : Rameaux, Pâques, lundi de Pâques, Pen-
tecôte, lundi de Pentecôte, Toussaint, Commémoration
des morts, fêtes des saintes reliques, et de saint Lazare.
La messe de minuit, à Nocl, y était célébrée de même que
dans les églises paroissiales.
Quelques cérémonies conservaient le souvenir des pre-
mières relations de la confrérie avec THôtel-Dieu. Ainsi,
a la fête de sainte Marthe, le clergé devait partir de la cha-
pelle en corps, avec la croix et les chandeliers, pour se
rendre à l'heure ordinaire dans Téglise de la Madeleine,
et de là aller en procession faire station dans quelque
église.
Le premier dimanche de carême, le dimanche de qua-
simodo, de même qu'à la fête de sainte Marthe, l'office se
faisait^ toute la journée, par les religieux de T Hôtel-
Dieu.
Des prédications avaient lieu très fréquemment dftns
cette chapelle aux frais des confrères. On peut citer,
parmi les meilleurs prédicateurs de la ville qui con'sen-
talent à s'en charger : Marin Le Harcnger, jacobin,
i565, i566, iSyo, 1572; Plumetot, cordelier, i565, i566,
1567, 1569, ^^7^y 1571, 1572; Jacques Le Hongre, ja-
cobin, i565, i568, 1569, '^7^ 1^72, i573;M. Lempe-
reur, i568; Goulle, prédicateur de Tavent à la cathédrale,
20 décembre 1571 ; Me Boette, iSjS; Michel, prieur des
Augustins de Rouen, plus t^rd provincial, 1 573 ; Olivier,
augustin^ même année; le çarme Martel, i58o., i585;
24^
Carré, i585; Tholle, i585, i588; Natalis, i586, i588;
Me Rioult, i586; Taillepied, l'auteur des Antiquités de la
ville de Rouen ^ 1587; Broessin, iSSg; frère Louis Crava-
tai, 1590; Le Roy, gardien des cordeliers, iSçS; Samson,
docteur en théologie, prieur des Augustins, 1600; Mas-
querel, carme, 1602, i6o3, 1610; le curé d'Arqués, i6o5;
Martel, jacobin, 1606, 1608; Le Noir, augustin, 1606,
1616; Guéroult, carme, 1609, 1614; Soret, carme, i632;
le P. Séraphin, capucin (dont les sermons ont été publiés),
de 1666 à 1675; le P. Ambroise, autre capucin, de 1675
à 1686.
En 1 567, on payait aux cordeliers, pour vingt-cinq ser-
mons faits par Plumetot, la somme de 12 1. 11 s. Vers
cette époque, les honoraires d'un sermon solennel ne dé-
passaient pas la somme de i5 sols.
A l'occasion des prédications, des quêtes étaient faites
parmi les fidèles, qui ne manquaient pas de se porter en
foule au cimetière Saint-Maur.
Il est à remarquer que si les peintres et les sculpteurs
étaient afRliés, en général, à la confrérie des Trépassés, il
s'y trouvait aussi, et en grand nombre, des personnes
appartenant aux différentes classes de la société, et même
aux classes les plus élevées.
Dans les derniers temps la chapelle des Trépassés, dite
de Saint-Maur, fît oublier celles de Saint- Etienne et de
Saint- Nicolas.
La seconde avait été rétablie après le siège de i593.
V Histoire de Rouen^de 1731, en parle comme d'un
établissement encore subsistant à cette époque. Mais,
quelques années après, il n'en était plus question. L'autre,
celle de Saint-Nicolas, avait été restaurée, en 1602, aux
frais des administrateurs de l'Hôtel-Dieu. Un arrêt du
Parlement, du 27 février 1672, rendu sur la plainte du
couvent, les condamna à la faire mettre en état. Mais
comme elle n'était que d'une faible utilité, on n'y prit pas
grand intérêt, et bientôt on la laissa tomber en ruine.
243
Une ordonnance de Tarchevêque, du i3 jum 1740, en
autorisa la démolition ; et ce furent les religieux eux-mêmes
qui sollicitèrent cette mesure, contre laquelle il n'y eut
aucune protestation.
La confrérie des Chandeliers s'y était réunie pendant
longtemps, avant de se fixer en Téglise de la Madeleine.
Jusqu^ci il n'a été question dans ce mémoire que de
chapelles et de confréries : j'ai maintenant à m'occuper du
cimetière Saint-Maur, en tant que cimetière proprement
dit, en m'attachant à faire remarquer ce qu'il présentait
de particulier. Le sujet est lugubre ; mais il peut prêter à
des observations assez importantes, si Ton veut comparer
entre eux Tancien temps et le nôtre.
Le cimetière Saint-Maur n'était, à l'origine, que pour
les frères, les sœurs et les pauvres de T Hôtel-Dieu. Mais
les pauvres étant considérés comme les principaux amis
de Jésus-Christ, il arriva bientôt que la piété fît choisir
assez fréquemment ce cimetière par des personnes riches,
non-seulement de la ville, mais de diverses localités du
diocèse (i).
Nous avons déjà cité Vincent du Valricher. Avant lui,
Robert Le Tartarin et Emmeline, sa femme, avaient fait
une donation à l' Hôtel- Dieu^ en demandant à être enter-
rés in cimiterio hospitalis, L*acte est de 1275. Jean Du
Désert, curé de Bertheauville, au doyenné de Valmont,
faix également, en 1291, une donation aux religieux de
THôtel-Dieu, et par le même acte il choisit sa sépulture
in eorum cimiterio apud S. Nicolaum de Bellovidere. Plus
tard, Jean Filleul, conseiller en cour laie, demande par
son testament qu'après son décès c on convoie son corps
(i) Le cardinal d'Estouteville, dans des lettres que nous avons
précédemment citées, le désigne en ces termes : Cimiterium
commune.,, in quo corpora sive cadavera deffunctorum sepe-
liuntur, et tam de monasterio sive hospitali Béate Marie Mag-
daiene, quam civitate et diocesi Rothomagensi caritative por-
tantur et inhumantun (20 sept. 1434.)
244
en réglîse Saînt-Mor jouxte Rouen, en la compagnie de
ses amis ; et qu'on en fasse l'enterrement eu chimetière,
dehors Tcglise, bien et notablement, t 5 sept. 1429.
Pareilles clauses se remarquent • parmi les dispositions
testamentaires de messire Geoffroi Behourt et de dame Eu-
delot, sa mère, 17 mars 1437; de Richard Quesnel, curé
de Saint-Ouen-du-Breuil, chapelain de la cathédrale, 1449 î
de Guillaume Auber, curé de Vacourt, autre chapelain de
la même église, 1485*, de Denis Pilée, curé de Limésy,
1 6 mars 1 5o3 ; de Guillaume Oursel , curé de Saint- Jac-
ques d'Alihermont, 1 5o8.
Pilée annonce qu'il a choisi Saint-Maur parce que c'est
communis sepultura pauperum; Oursel déclare c qu'il a
singulière dévotion à Saint-Mor, en l'oratoire hors Rouen. »
Le même motif est plus amplement indique dans le
testament du chanoine Guillaume Le Brument : c Quo-
niam michi^ spiritualium graciarum munera mendicanti
et temporalium bonorum copia non habundanti^ super-
fluum videtury juxta B, Augustini tradicionem, funeris
ornatus et preciosa exequiarum pompa, corpus meum
ecclesiastice in loco humili tradi cupio sépulture^ videlicet
in cimiterio prioratus sive oratorii S. Mauri prope Ro-
thomagum, intr a quod fidèles plurimi, magna cum devo-
tione^ ad humiles sepius preces concurruntj ut saltem ora-
tionibus salus anime mee adjuvetur, i5o8. t II est à
remarquer que cet article fut biffé, vraisemblablement
par ordre du Chapitre ; et que l'enterrement de Le Bru-
ment se fit, suivant l'usage canonial, dans l'enceinte même
de la cathédrale.
Thomas Le Prévost, drapier de Saint- Nicaise, ordonne,
par son testament, qu'après son décès son corps c sera porté
de soir à l'Hostel-Dieu pour estre mis au charriot dud. lieu
avec les autres pauvres trespassés, et être porté avec yceulx
au cimetière Saint-Mor, t 16 janvie»* i558 (i).
(i) Tabellion, de Rouen, meubles.
245
La même année, le i8 février, Olivier Loîsel, mirouyer^
ouvrier en la monnaie de Rouen, demande que son corps
c soit mis dans le charriot de l'Hostel-Dieu de la Madeleine,
pour être porté au cimetière Saint-Maur, avec les corps
des pauvres dudit Hostel-Dieu (i). »
VJ Histoire de Rouen cite comme enterrés dans ce cime-
tière, Simon Osmont, sieur de Fresquiennes, iSij; Pierre
Guérin, notaire et secrétaire du Roi, décédé en 1440 et
Madeleine Deschamps, sa femme; dame Thomasse Hui-
lard, en son vivant, femme de Guillaume De la Roche,
sieur de Vandrimare, décédée le 2 novembre i5i4, et
aux frais de laquelle un charnier fut construit ; Jean Le
Goupil, sieur des Noyers, décédé en 1440.
La chapelle de Samt-Nicolas contenait nombre de
sépultures de religieux et de religieuses . On y voyait aussi
celles de Louis de Pillays, secrétaire et familier du Dau-
phin, fils de Colart de Pillays, chevalier, sieur d'Ablèges et
deBerselou, décédé en 1400; — de Nicolas Pillays, sieur des
mêmes fiefis, décédé le 1 1 mai 141 5; -— de Marie Mahieu,
sa femme, décédée le 11 octobre 1416; — de Jacques Lamy,
maître des arbalétriers de Rouen, décédé le 28 octobre
141 7; — d'Alonce de Civille, vicomte de Rouen, décédé
le 26 mai i352; — de Marie de Saldaigne, sa femme, décé-
dée Tan 1 575 ; — de François Deudemare, chanoine de
Rouen, décédé le 2 juillet i635.
La tombe la plus connue était celle sur laquelle on
lisait cette inscription : 0 Ci gissent les entrailles de mes-
sire Guillebert Talbot, chevalier anglois, qui mourut le 1 8
octobre 141 8. » Le défunt y était représenté portant son
cœur dans ses mains, d'où ce proverbe longtemps en
usage à Rouen : c II ressemble à Talbot. Il porte son
coeur, f On avait gravé sur la pierre les armoiries de Tal-
bot qui étaient : « Elcartelé, le i^' et le 3", de gueules à un
lion rampant, et les 2 autres, d'azur à 2 léopars lyonnés
(i) Tabellion, de Rouen, meubles.
246
passans, de gueules. > L'inscription et les armoiries ont
été mentionnées par Phistoriographe de cette ville, Farin,
qui a pu les voir sur place.
Je ne trouve à signaler comme ayant existé dans la gale-
rie de la chapelle Saint-Maur que les tombes de Marie
Baudren, décédée le 18 juillet 1628, et celle de son père,
Antoine Baudren, commis au greffe de THôtel-de-Ville;
et dans la chapelle Saint-Etienne, que la tombe de Guil-
laume Toustain, sieur de Frontebosc, de Limésy, etc.,
décédé en i535, et celle de Marie Toustain, veuve en
secondes noces de Pierre Le Brun, sieur de Fresnay, décé-
dée le 22 février 1 596.
Il est à présumer qu'au moment de la démolition de ces
chapelles, au siècle dernier, on ne prit aucunes dispositions
pour assurer la conservation de ces diverses tombes, bien
qu'elles eussent été signalées dans un ouvrage très répandu
VHistoire de Rouen.
Asile des pauvres et de ceux qu'un motif de piété avait
engagés à se confondre avec eux, ce cimetière fut aussi, à
raison, sans doute, de son éloignement de la ville, affecté
à recevoir les cadavres des pestiférés. On en retrancha
une partie près du jardin du prieuré qui fut attribuée aux
protestants pour ceux de leur religion qui étaient enlevés
par la peste. Mais cela dura peu : ce terrain fut rendu au
prieur, le 21 juillet 161 2 ; on donna aux protestants, en
remplacement, un terrain proche du Champ-du-Pardon (1).
(i) Pendant longtemps le Bureau de l'Hôtel-Dieu ne se crut
pas permis d'envoyer au cimetière Saint-Maur d'autres cadavres
que ceux qui avaient posé dans cet établissement et les cadavres
des catholiques. C'est ce qu'il objecta à un sieur Gyrauld, qui
demandait de faire porter à Saint-Maur, par quatr*: hommes, le
corps de Prévost, contrôleur de l'artillerie, 3 mars iSôy; — aux
amis d'un nommé Adrien Blanchet, hérétique et sacramentaire,
décédé en la maison du hallage, qui voulaient le foire enterrera
Saint-Maur, avec la potence, ainsi que les protestants avaient
accoutumé, 10 avril iSyo. Cependant, le a décembre de cette
247
Malgré lés trois chapelles qui le décoraient, rien, surtout
en temps de peste, n'était plus triste, plus désolé que ce
cimetière de Saint-Maur.
A ce su)et quelques traits sont à noter. Signalons d'abord
la négligence avec laquelle, pendant un assez long temps,
se firent les inhumations.
Les corps étaient enfouis à une si faible profondeur qu'il
arriva plus d'une fois que les chiens et les loups en firent
leur pâture. Cest ce dont se plaignit Guillaume Le
Roy, drapier de la rue Cauchoise, maître de la confrérie
des Trépassés, 12 mars 1564. Mêmeplaintele 21 avril 1607.
Figurons-nous encore la fosse commune. Elle est citée
en 1574, dans une délibération qui prescrit de jeter de la
terre sur les corps entassés dans le charnier. Le 18 mars
161 1, on fit marché pour faire un nouveau cerne pour
même année, on accueillit la demande de Romain Aubery « qui
avait supplié que son corps fût reçu à l'Hôtel-Dieu et porté
inhumer ainsi qu'il est accoutumé de faire pour ceux de la R. P.R. »
On y mit cependant pour condition que le corps serait apporté
le soir a pour éviter émotion et scandale. » Cet acte de tolérance fît
une mauvaise impression, comme on le voit par cette délibéra-
tion prise le 2 mai 1571 : « Sur la clameur faicte par aulcungz
catholiques que les corps de ceulx de la R. P. R. estoient indiffé*
remment portez inhumer avecques les corps des catholiques, a
esté faict venir le charretier de la maison de céans, auquel a esté
deffendu de porter ceulx de la R. P. R. sinon en la façon accous-
tumée, en unglieu prophane, joignant le cimetière de Saint-Maur,
ainsy qu'il a esté faict cy-devant, suyvant les arrestz de la Cour. »
(Voir aussi M. Floquet, Histoire du Parlement ^ t. III, p. 63, où
sont racontées les scènes violentes qui eurent lieu, à THôtel-
Dieu, au sujet du cadavre d'un huguenot que le peuple voulait
traîner à la voirie.) — Samedi 10 décembre 161 1. « Aucuns
de la R. P. R. (Bauquemare, le baron de Courtomer, De la
Rivière, etc.) avoient demandé le jardin du prieur de céans
proche et contigu le cimetière Saint-Maur, afin que, suivant
TEdit du Roy, et selon qu'autrefois ils l'a voient possédé,
ils y pussent inhumer leurs corps morts de peste, a Regnard,
maître des requêtes, fut nommé commissaire pour aviser sur
248
rinhumation des pauvres : il devait avoir 48 pieds en carré,
20 pieds de profondeur avec une descente pour conduire
plus aisément le charriot qui portait les corps audit cerne.
« 1 1 avril 1626, conformément à la requête de la confré-
rie Saint-Maur, le lieutenant général du bailliage fait pro-
céder à la visite du charnier, où Ton enterre ordinairement
les corps, clos d'une haie de bois mort d'espine, soutenue
et liée avec des pieux, distante dudit charnier de 60 pieds
ou environ, aux dépens des confrères. » N'est-il pas
curieux, de voir ces derniers supporter, dans cette circons-
tance, une dépense qui paraît si naturellement rentrer dans
les charges delà police municipale?
Le i5 juillet i65o, on fait venir le charretier, et on lui
commande de recouvrir de terre les corps qui étaient dans
le charnier.
cette réclamation. On offrit aux protestants, entre les portes
Saînt-Hilaire et Beauvoisine, près des fossés, une acre de
terre ou environ. Ils refusèrent ce terrain. Mais peu de temps
après ils se contentèrent d'une vergée de terre appartenant
à THôtel-Dieu, au Champ-du-Pardon, non loin des four-
ches patibulaires. Le i*' février i638, on mentionne « hors la
porte Bouvreuil, au triège du Camp-du-Pardon, par. Saint-Godard,
2 jardins, d'une acre et demie, plantés d'arbres, près d'une
place close de murailles où Ton enterre les corps des personnes de
la R. P. R. qui décèdent de la contagion ». — Il ne faut pas con-
fondre ce cimetière avec le cimetière ordinaire des protestants qui
était situéen la paroisse Saint- Vivien, à l'extrémité de la rueSaint-
Hilaire; celui-ci ne fut supprimé qu'après la révocation de l'Edit
de Nantes et fut alors donné à l'Hôpital Général. C'était un terrain
clos de murailles, planté de sycomores, entouré d'une rangée
d'arbres, et estimé à 40 1. de revenu. La personne à qui on le
loua eut la malheureuse idée d'y faire établir des jeux de boule.
Le curé de Saint- Vivien réclama contre cette indécence, et le jar-
din fut loué à un autre locataire qui en tira parti d'une manière
moins inconvenante. — Un autre cimetière à l'usage des protes-
tants se trouvait à Saint-Sever, rue aux Chiens : il fut aliéné le
28 juin 1689.
249
Si désolé, si lugubre que fût ce cimetière, on ne laissait
pas de s'y porter en foule à de certains jours de Tannée.
C'était le lieu que Ton choisissait aussi de préférence pour
les distributions d'aumônes en faveur des défunts, de ceux
mêmes qui avaient ailleurs leur sépulture.
Le chanoine Guillaume Le Roux, qui^ conformément à
ses dernières dispositions, fut inhumé au Bourgtheroulde,
principale résidence de sa famille, avait ordonné par son
testament de distribuer, à l'occasion de ses obsèques, aux
pauvres qui viendraient au cimetière Saint-Maur, 5o mines
de blé en pain, et 4 poinçons de vin.
Le îpur du premier service fait à Rouen pour les obsè-
ques du cardinal d'Amboise, ministre de Louis XII, on fit
une distribution de douzains à tous ceux qui se présen-
tèrent au cimetière Saint-Maur. Il s'y rencontra plus de
20,000 personnes. Il est vrai que cette distribution avait
été annoncée à son de trompe, 3 ou 4 jours à l'avance.
Le mardi des Rogations, une foule de peuple s'y rendait
à la suite de la procession générale de toutes les paroisses
et de toutes les communautés de la ville, en revenant de
l'église Saînt-Gervais où avait lieu la station (i).
L'afHuence n'était guère moins considérable le jour de
la Toussaint. A ce sujet je citerai quelques ordonnances
qui furent rendues à la requête des confrères de la
confrérie des Trépassés, pour autoriser l'ouverture de la
porte Cauchoise par laquelle on se rendait habituellement
à ce cimetière.
« Il est mandé au portier de la porte Cauchoise de Rouen
de la tenir ouverte depuis l'heure de midi , jour de la
Toussaint prochaine, jusques à l'heure de 5 heures et
demie du soir, en faveur et pour l'exercice de dévotion
(i) 8 mai 1620, « à cause de la contagion, la procession du
mardi des Rogations qui va ordinairement à Saint-Gcrvais ne
passera pas par dedans le cimetière Saint-Maur. » — 1 3 mai 1572,
« jour des processions, a esté cueilli, aud. lieu de Saint-Mor,
52 l. »
I
7
25o
qui se faict en la chapelle Saint- Maur par les confrères
d*icelle et aultres led. jour, parce que le sieur David
Delamare, maistre de la confrarie dud. Sainl-Maur, sera
tenu y mectre, de sa part, ung personnage notable à
garder lad. porte et y faire venir deux des harquebousiers
de la ville estantz de lad. confrairie, sçavoir Jaques Gouel
et Jaques Enoc, ausquels il est mandé se trouver à l'ou-
verture, garde et clausion de lad. porte. Faict à Rouen le
25e jour de oct. i5io. Signé : de Hanyvel. »
Pareille permission, sous les mêmes conditions, est
donnée, par le Bureau de PHôtel-de- Ville aux confrères
des Trépassés, le 3o oct. 1614.
Le 3o oct. 1629, requête adressée à Mgr le duc de
Montbazon, gouverneur de Normandie, par les chapelain,
prévôt et maîtres de la confrérie.
Ils y exposent que «à l'occasion du jour de la Commé-
moration des Trespasséz, qui devoit avoir lieu le lundi pro-
chain, plusieurs notables bourgeois et habitans de la ville,
meus de pitié, sortiroient hors de la porte Cauchoise, le
jour et feste de Toussaincts pour se rendre en la chap-
pelle des Trespasséz fondée au cymetière de Saint-Mor,
lieu non moins remply de dévotion, pour le nombre infiny
des corps que Ton y ensepulture, que Saint-Innocent-de-
Paris, pour, en ce dit lieu, entendre la prcdicacion qui
se fera, icelluy jour de Toussainctz, 2 heures après midy,
assister en dévocion au service que Ton y célébrera pour
les âmes des fîdelles deffunts en général, les corps des
quels reposent, tant en lad. chapelle que aud. cimetière.
Et d^autant qu'à cause de lad. feste de Toussaincts Ton
tenoitles ponts levez et portes de ceste ville fermez (i),
qui faisoit que Ton a voit peine de sortir et entrer pour
(i) Présentement les jours de fête, la population des villes se
répand dans les campagnes environnantes. Autrefois, ces mêmes
jours, elle y était renfermée plus strictement que les jours
ordinaires.
25l
exercer lesd. œuvres pieuses et dévottes, • pour cette
considération, ils demandaient < qu'en faveur de ces dévo-
tions, conformément aux ordonnances des sieurs conseil-
lers cchevins, dont ils représentaient un extrait, il plût
au gouverneur de la province, de commander au capi-
taine qui seroit, le jour de Toussaincts, en garde en la
porte Cauchoise, ensemble au portier d'icelle, d*en ûiire
Touverture et la tenir ouverte depuis l'heure de midy
jusques à 6 h. >. La permission fut accordée; mais le
temps fut limité entre 2 heures et 5 heures du soir.
On aurait peine à le croire, si Ton ne savait combien
autrefois on était familiarisé avec les images de la mort (i) ;
ce fut toujours avec le plus grand regret, même en
temps de peste, que les frères abandonnaient ce lieu de
désolation, et c'était avec bonheur qu'ils y rentraient, dès
qu'on voulait bien le leur permettre.
Les sentences d'interdiction rapprochées de celles qui
les annulaient, permettraient de préciser la durée de ces
terribles épidémies qui^ si fréquemment, aux xvi^ et
xvii^ siècles, affligèrent notre ville. Mais il faut se borner
à de courtes indications.
Je vois que la confrérie fut transférée aux Béguines, à
raison de la maladie contagieuse, aux années 1623, 1624,
1626.
Le 5 mars de cette dernière année, on fît dresser par
l'avocat Baudry (c'était, je pense, un confrère) une requête
à la cour pour faire rapporter l'ordonnance de M. de la
Ferté, lieutenant général au bailliage, par laquelle il était
défendu de célébrer le service divin, de prêcher dans la
chapelle des Trépassés et même de tenir ouvert le cime-
(i) Ce fut le xvi« siècle surtout qui se fit remarquer par son
goût pour le lugubre. Il est aisé de le constater non seulement
par les tombes, par la décoration des églises et des cimetières, où
s'étalaient les danses macabres, par nombre de compositions
littéraires, mais encore par les singulières décorations de$
maisons privées.
252
tîère Saint-Maur. On alléguait que tout danger avait cessé.
On ne put, cependant, être autorisé à y reprendre les
exercices ordinaires qu'à partir du premier dimanche de
carême 1627. Le lieutenant général consentit alors que
les marqueurs (ceux qui marquaient les maisons des pesti-
férés et faisaient transporter les cadavres par lecharriot de
r Hôtel-Dieu) se retireraient du cimetière et laisseraient
les portes libres aux maîtres et confrères pour continuer a
faire dire le service divin en leur chapelle.
En i633 la confrérie est encore transférée aux Béguines,
pour cause de la contagion. Ce fléau l'y retient de i635 à
1637.
En i638, elle passe en Téglise Saint-Sauveur^ et ne peut
retourner à Saint-Maur qu'en 1639.
En i65i, il lui faut se retirer à Saint-Michel : elle revient
à Saint-Maur vers la fin de i653.
Quelques années après, en 1667, nouvel exil cause par une
épidémie, très meurtrière, et qui ne prit fin que dans les
derniers mois de Tannée suivante. Les confrères se hasar-
dèrent, le 20 oct. 1669, à demander l'ouverture du cime-
tière pour y continuer, je rapporte les termes de leur sup-
plique, c le service divin tel qu'il était fait depuis plus de
200 ans, afin de satisfaire à la dévotion d'une foule innom-
brable de personnes dont les parents défunts reposaient
à Saint-Maur, en attendant la Résurrection glorieuse. » La
permission leur fut accordée le 23 janv. 1670, pour valoir
à partir du i^' mars suivant.
Depuis cette époque il n'y eut plus, à Rouen, de véri-
table peste ; la confrérie put tenir, sans interruption, ses
assemblées au lieu qui lui était propre et qu'elle affec-
tionnait.
Il nous reste encore, comme souvenir de ces funestes
épidémies, la tombe des 19 pères capucins qui périrent
victimes de leur dévouement aux pestiférés, dans les
années 1622, 1623 et 1624. Je me fais un devoir de trans-
crire ici leurs noms : les pères Christophe, d'Amiens;
253
Sebastien, de Rouen; Illuminé, de Rouen; Julien, de Nesle;
Barthélémy, d'Eu; Josaphat, de la Poterie; Ange, de
Rouen ; Girard, de Saint-Lô ; Nicolas, de Caen ; Simon,
de Rouen; Félix, de Valognes; Maclou, de Dieppe; Jean-
Baptiste^ du Havre ; Charles, de Honfleur ; Alphonse,
de Rouen ; Yves, de Montfort ; Claude, de Cherbourg ;
Alexis, de Rouen (i).
L'inscription qui avait été mise sur leur tombe avait été
détruite pendant la Révolution. Elle fut rétablie en 1822,
aux frais et par les soins de la ville, sur la proposition de
M. de Martain ville, maire de Rouen. Elle est ainsi
conçue :
. c Ici reposent les os
Des pères capucins qui s'étant dédiés
A l'assistance spirituelle des malades
De la peste pendant les années
1622, 1623 et 1624
Y ont fini leurs jours dans l'exercice
De la charité.
Leurs cendres éloignées de celles
De leurs frères sont les illustres
Marques d'un «èle qui n'a pu être
Empêché ni par la crainte de la
Maladie contagieuse ni par l'amour
Que les hommes ont naturellement
De vivre.
(i) En la chapelle de Beauvoir on voyait aussi la tombe de
frère Pierre Le Blond, religieux de THôtel-Dieu, mort de la peste
en 1640; celle de Marie de Sermentot, religieuse, morte de la
peste, le 2 oct. 1648, « le dixième jour après s'être consacrée
pour l'amour de Dieu au service des pauvres malades de la
peste dans le lieu de santé ». Un registre de cet établissement
nous apprend que, du ler janvier au 3i décembre 1637, il y entra
3,5 1 3 pestiférés. Mais combien d'autres étaient morts dans des
maisons particulières et avaient été transportés directement par
les marqueurs au cimetière Saint-Maur!
a54
Le même évangile qui les avait déjà
Dépouillés de tous les biens de la terre
Les a fait mourir dans le lit d*honneur
Puisque c'est en exerçant la charité
Qui est la première de toutes les vertus.
Porte une sainte envie à leur condition.
Si tu ne veux être méconnoissant ne refuse pas
Tes prières à ces âmes généreuses
Qui ont sacrifié leurs corps
Pour le bien être du public (i). •
A part cette tombe, le cimetière était nu. On n'y voyait
aucune de ces croix, ni de ces petits parterres de fleurs,
qui déguisent, présentement, à nos yeux, l'horreur des
tombeaux.
Dans les signes extérieurs qui nous servent à témoigner
notre reconnaissance et notre affection pour ceux qui ne
sont plus, il y a, on me pardonnera de le dire, de la
mode comme en toute autre chose. Sans parer leurs sépul-
tures, comme nous aimons à le faire maintenant, nos pères
les respectaient autant, sinon plus que nous : ils avaient
moins souci des ornements extérieurs et plus de piété
envers les restes des défunts.
N'est-ce pas par ce sentiment qu'il faut expliquer la
longue conservation de la tombe de Bedford, dans la
cathédrale, et de la dalle funéraire de Gillebert Talbot,
dans la chapelle de Saint-Nicolas^ au cimetière Saint-Maur,
dont nons avons parlé précédemment. Les noms qui s'y
trouvaient inscrits rappelaient pourtant le souvenir d*une
époque néfaste, de la domination étrangère, des hommes
qui avaient le plus contribué à rétablir.
Le même sentiment est encore plus clairement attesté
par Tusage où l'on était autrefois de porter à Saint-Maur,
comme dans un lieu consacré par les cérémonies de la
(i) L'ancienne inscriptioD portait « pour le bien du public. »
255
religion et protégé par la dévotion du peuple, toutes les
terres que Ton tirait, chaque année, des cimetières de la
ville et de Tenceinte des églises afin de remédier à l'exhaus-
sement du sol, conséquence forcée d*inhumations multi*
pliées. Quant à la preuve de cette pratique, on la trouve
dans tous les comptes des fabriques, et Ton n'a que l'em-
barras du choix (i).
Ainsi le cimetière Saint- Maur était véritablement le
campo santo de la ville de Rouen, bien qu'on ne voie pas
qu'on y ait apporté, comme dans celui de Pise, de la
terre de Jérusalem, et que très certainement aucun rival '
de Giotto n'ait travaillé à sa décoration. Mais c'est déjà
quelque chose que nos peintres, nos imaginîers,
nos verriers, se soient pris d'affection pour ce cimetière,
et peut-être aurions-nous eu à signaler, dans cet asile de
la mort, quelque œuvre remarquable, sans les ravages des
guerres et des révolutions.
(i) Comptes de la paroisse Sainte Jean de Rouen : i636. « Payé
à celui qui mène le charriot de la Madeleine, pour 3 bellenées de
terre de lad. église, pour porter au cymetière Saint-Mor, 20 s. —
i63jf au charretier de la Madeleine, pour avoir porté 4 voyages
de terre à Saint-Maur durant l'hiver, 32 s. — 1639, payé à
Henri Marquis, maître maçon, la somme de 4 1. 19 8., pour
avoir par luy racoustré ung benestier de pierre, que pour avoir
faict porter les terres sainctes de lad. église au cimetière de
Saint-Mor, 4 1. 19 s. t. — 1640, au charestier de la Madaleine,
pour avoir porté des terres de Tesglise à Saint-Maur, 303.-1642,
au charetier de la Magdelene, pour avoir porté les terres de Tes-
glise à Saint-Maur, 24 s. — 1643, au charretier de la Madelene,
pour avoir porté les terres de lad. église à Saint-Maur, 16 s. —
F. de la paroisse Sainte-Croix des Pelletiers, 17 avril 1690, per-
mission du curé de faire porter dans le cimetière Saint-Maur
les terres qui lui seront incommodes dans le cimetière de son
église, parce que le sol de ce cimetière était au dessus du niveau
du sol de réglise, ce qui la rendait humide et malsaine. — F. de
la paroisse iV.-D. de la Ronde, 19 avril 1760, terres du cime-
tière de N.-D. portées au cimetière Saint-Maur. »
256
Une fois cependant le cimetière Saint-Maur fut profane,
et le fait donna lieu à un procès qui émut, vivement
l'opinion publique, et se termina par une sentence du
lieutenant général criminel de Rouen, du 23 avril 1735.
Au mois de décembre précédent, un cadavre avait été
enlevé pendant la nuit, « crime d'autant plus condamnable
qu'en troublant ainsi les aziles destinez pour le repos et
les cendres des morts, c'était manquer de respect pour les
lieux saints et d'humanité à l'égard du public. > c II n'est
point de nation, disait le magistrat, chez laquelle la sépul-
ture^ quoi qu'accompagnée de cérémonies différentes, ne
soit en très grande vénération; il n'est que les infâmes et
les criminels qui en soient privez, et, selon saint Paul, il y
a autant de charité d'ensevelir les morts que de conserver
la vie aux vivans. La terre est le siège des morts, et si c'est
une impiété de ne les pas inhumer, de quel œil peut-on
regarder ceux qui troublent leur repos ! C'est une barbarie
qui a été réprimée toutes les fois que la justice en a eu
connaissance. » La sentence fut imprimée, lue, publiée et
affichée aux carrefours de la ville et dans les faubourgs.
Le corps, après avoir été reporté en l'église Saint- Patrice,
fut inhumé avec honneur dans le cimetière de Saint-
Godard. Quant à l'auteur de cette profanation, il n'est
pas signalé dans la sentence. C'est un égard que l'on eut
pour le coupable, qui n'était autre que le célèbre Lecat.
Emporté par son zèle de savant, il avait dérobé un cadavre
pour ses études anatomiques.
La sentence du lieutenant général criminel était conçue
en des termes que n'eussent pas désavoué ses prédéces-
seurs. Quelques années après on n'eût pas parlé de la
même manière. Quand on supprima les cimetières, on fit
peu d'attention aux sépultures : les dalles tumulaires des
églises furent déplacées ou mutilées avec un sans-façon
auquel personne ne trouva à redire.
Aujourd'hui il ne reste plus une pierre des trois cha-
pelles du cimetière de Saint-Maur. Elles ont subi le sort
25/
de ces générations d'hommes qui, tour à tour, sont venues
s'engloutir dans cet étroit espace, où l'on ne rencontre
que des monuments des plus modestes, destines tous, eux->
mêmes, à une disparition prochaine.
Du moins on a conservé les vitraux qui ornaient la plus
intéressante et la dernière de ces chapelles, la chapelle
Saint-Maur.
Le 1 7 prairial 1 798, le peintre Le Carpentier, agissant
en vertu d'une commission du District, fît enlever ces
vitraux, après les avoir fait soigneusement encaisser; ils
furent portés au dépôt des objets d'art du departement.de
la Seine- Inférieure.
Il est certain qu'ils ne furent pas compris parmi ceux
qui furent plus tard attribués à la ville pour la formation
du musée municipal. Us restèrent, oublies, dans un coin
de la préfecture, jusqu'à Tannée 1820, que le Conseil
général les accorda à M. Crevel, curé de Saint-Romain,
pour la décoration de son église, où l'on peut les admirer
encore (i).
(i) Ces verrières sont ainsi désignées dans un mémoire de
l'année 1680 : les 4 évangélistes; la Création; la Résurrection;
un tableau où Ton voyait représenté le temple et la piscine ;
Job; le Déluge; Tobie; la Transfiguration; la ville où Dieu
parle au peuple d'Israël ; la Multiplication des pains ; l'entrée de
Jésus au temple; la Salutation angélique; les 3 Maries; Jésus
au jardin des Olives ; Jésus en croix. — Le peintre Jean Le Vieil,
demeurant à Rouen, paroisse Saint-Laurent, rue Beauvoisinc,
avait été chargé de la restauration de ces verrières. Le chiffre de
ses honoraires et la manière dont il s'était acquitté de son travail
donnèrent lieu à un procès. On reprochait à Le Vieil d'avoir
exagéré la dépense, et^ chose plus grave, « d'avoir osté là pein-
ture des vitres, de sorte qu'il a voit causé un dommage notable
auxd. vitres, les plus belles de la ville. » Les confrères non seu-
lement ne voulaient rien lui payer; mais ils réclamaient, comme
indemnité, une somme de 200 1. Les parties nommèrent pour
experts, Pierre La Voûte, et Jacques Le Roy, l'un et l'autre
verriers, et demeurant à Rouen, rue de la Poterne. Ces experts
258
On voit que \je Carpentier avait fait enlever^ le 6 prairial
1793, delà même chapelle, 12 tableaux qui, sans doute,
ne lui paraissaient pas sans mérite. Je ne saurais dire ce
qu'ils sont devenus.
Je ne puis mieux finir cette notice qu'en rappelant un
souvenir historique notable, qui se rapporte au lieu dont
nous venons de nous occuper. C'est de Saint-Maur près
Rouen, juillet 141 7, que sont datées les lettres de pardon
accordées parle Dauphin, qui fut depuis Charles VII, aux
bourgeois de Rouen, coupables d'avoir pris parti pour le
duc de Bourgogne et de s'être insurges contre l'autorité
royale. Le même lieu devait voir l'année suivante une
partie de l'armée de Henri V, pendant ce long siège qui fit
tant d'honneur à nos compatriotes.
A propos de la tombe des Capucins, morts au
service des pestiférés, M. Tabbé Tougard fait observer
que cette sépulture était déjà en fort mauvais état avant
le milieu du siècle dernier, puisque D. Duplessis se
plaignait, en 1 740, de n^avoir pu lire les noms des
religieux.
La séance est levée à trois heures et demie.
G. GouELLAiN et A. Tougard.
furent pas agréés; le lieutenant général s'en rapporta à l'expertise
de M. Le Carpentier, maître des ouvrages de la ville.
259
SÉANCE DU 3o JUIN i883
La séance est ouverte à deux heures sous la prési-
dence de M. de Beaurepaire, vice-président.
Sont présents : MM. Adeline, P. Baudry, Billiard,
Bouctot, Bouquet, Félix, Gustave Gouellain, Maillet
du BouIIay, Gaston Le Breton, Pelay, de la Serre et
Tabbé Tougard, faisant fonction de secrétaire.
Le procès-verbal de la précédente séance est lu et
adopté, après quelques additions réclamées par M. Le
Breton pour préciser ses communications.
La correspondance imprimée comprend :
Mémoires de la Société Savoisienne^ t. XXI ; —
Société des Amis des Sciences naturelles de Rouen y
i8c année, 2« semestre; — Antiquaires de Picardie y
3e série, t. VI ; — Société historique et archéologique
de Langres, t. H ; --^ Bulletin du Comité des travaux
historiques et scientifiques y année 1882, n® 4; — 5o-
ciété archéologique de Béliers, 2« série, t. XI,
2° livr. ; — Annales de la Société historique et archéo-
logique de Château-Thierry, 1881; — Société his-
torique d'Elbeu/, 1882, n° 4; — Mémoires de la
Société académique de F Aube, t, XLVI; — Bulletin
de la Société archéologique et historique de P Or-
léanais, n° 1 1 5 ; — Bulletin de Fa Société archéo-
logique de Tarn-et- Garonne, t. X.
Enfin M. Tabbé Tougard offre à la Commission, au nom
des Bollandistes, quatre extraits de leurs Analecta Bollan-
dianay utile complément des Acta Sanctorum qui a
commencé à paraître en 1882, et forme chaque année un
vol. gr. in-80 de 640 pages. Ces extraits sont les Vies de
saint Vital et de saint Geoffroy, abbés de Savigny, dont
200
l'éditeur est M. Tabbé Sauvage, la Vie de saint Ansberty
les Miracles de saint Giîduin et la Translation de
saint Germain de Paris,
Cet hommage des savants Jésuites est un remercîment
pour l'envoi de notre Bulletin. Vers 1870, la Commission
avait compris les BoUandistes parmi les Sociétés savantes
auxquelles la Préfecture adresse d'office les travaux de la
Commission, et ils n'ont cessé depuis de leur être réguliè-
rement envoyés. Les BoUandistes espèrent que Ton
voudra bien leur continuer cette faveur; et ils ont saisi la
première occasion d'en témoigner leur gratitude puisque
c'est Fan dernier seulement qu'ils ont repris leur publi-
cation interrompue durant 1 5 ans. Ils ont cité avec hon-
neur le Bulletin dans leurs recherches sur saint Ingaude,
né probablement à Eu ou à Oust-Marais, au vn^ siècle
(Acta SS. Octobre xiii, 3 F.)
Tombeau de Hugues d'Orges. — M. Gaston Le Breton
donne lecture de l'inscription suivante qu'il a relevée
récemment au Musée du moyen âge (Mittelalterliche sam-
mlung) de Bâie, dont l'installation actuelle date de 1 880. —
Cette inscription, gravée sur une plaque de bronze, était
placée dans l'église Saint- Pierre sur le tombeau de l'arche-
vêque de Rouen, Hugues d'Orges qui mourut à Bâle, le
14 août 1436, pendant le célèbre concile qui se tenait alors
dans cette ville :
Hicjacet dominus Hugo^ de Ourgiis, archiepiepiscopus
RothomagensiSf pro quo collegium huius ecclesie tenetur
celebrare quatuor anniversaria quatuor temporibus anni et
unum in die sui obitus. Singulis quoque diebus anni tenetur
sacerdos, celebrans missam majorem, post finem ipsius
misse dicere super tumba ejus De profiindis, cum oratione
dominica et collectis Deus qui inter apostolicos et Fide-
lium, cum aspersione aque benedicte, prout in litteris
desuper confectis latius continetur. Anima ejus requiescat
in pace. Amen.
26l
Buste de M. A. Le Prévost. — M. d'Esiaintoi, en
s' excusant de ne pouvoir assister à la séance, à cause
des travaux de l'Association normande» informe la
Commission de l'érection, à Bernay, du buste d'A. Le
Prévost, notre ancien collègue.
Église de Saint- Jean-d^ Abbetot, — Empêché éga-
lement de prendre place à cette séance, M. Brianchon
envoie des renseignements satisfaisants sur Pemploi
des 1 5oo francs, votés par la Commission, pour la res-
tauration de Saint-Jean-d'Abbetot, et se loue du zèle
qu'a témoigné en cette circonstance M, Héquet, maire
de la Cerlangue. Il rappelle que la restauration est
demeurée incomplète, qu'il faudra notamment refaire
quatorze marches de Pescalier du clocher, et que la
Commission devra prochainement voter un supplé-
ment d'allocation, en faveur du curieux monument
qui remonte au-delà de Tan loSo.
Chêne d^Allouville. — Le même membre invite
M. Gouellain à mener à bonne fin un projet dont il a
le mérite d'avoir pris lUnitiative. Il s'agit de la réfection
de l'escalier rustique en bois sculpté qui permet l'accès
à la chapelle du chêne d'Allouville.
M. Gouellain explique qu'en effet il s'était préoc-
cupé de ce travail sur certains bruits qui parlaient de
gâter ce doyen de nos forêts par un escalier en fonte.
Mais il n'a pu suivre d'assez près cette affaire. Il profite
de cette circonstance pour remarquer que le décès de
notre collègue, M. le D' Guéroult, a privé la Commis-
sion de tout moyen d'informations sur les environs
d'Yvetot.
M. le Président estime que le meilleur moyen
d'arriver à un bon résultat, est d'appeler sur ce point
262
Tattention du sous-préfet d'Yvetot. L'administration
locale sera heureuse d^aiiirmer sa sollicitude pour ce
monument historique^ et obtiendra certainement la
reconstruction de Tescalier demandé.
Vitraux des chapelles du Cimetière Saint^Maur,
— M. Bouquet , après s'être excusé de son absence,
nous adresse quelques notes sur quatre vitraux des
chapelles du cimetière Saint-Maur, qui décorent
aujourd'hui Téglise Saint-Romain. Décrits dès 1827
par Licquet dans son Précis de Vhistoire de Rouen,
deux de ces vitraux se voient aux fenêtres les plus voi-
sines du portail; ce sont la Sainte Famille et Sainte
Geneviève (dans l'attitude qu'a reproduite une statue
moderne du portail des Libraires à la cathédrale] ; les
deux autres (la Transfiguration et V Histoire d"^ Adam],
occupent la fenêtre géminée du fond de Fabside à
gauche.
M. de Beaurepaire observe que ces verrières, aussi
remarquables par le dessin que par le coloris, ont été
placées à Saint- Romain, non au G>ncordat, mais seu-
lement sous la Restauration.
M. Le Breton fait passer sous les yeux de la
Commission Tesquisse de nombreux carrelages
émaillés; il expose en détail les raisons qui lui font
reconnaître. dans les beaux pavages de faïence qu'on
admire à Langres, à Palisy et au colombier de Boos,
la main d'Abaquesne, Tillustre artiste rouennais. Et à
ce propos, il insiste sur la persévérance courageuse que
mit la fabrique française, vers le milieu du xvi* siècle,
à maintenir les meilleures traditions de Tart national ;
et cela malgré Tenvahissement et la redoutable concur-
rence des faïenciers italiens.
Cette observation a d'autant plus d'importance que
263
la littérature et la langue subissent la même influence
dont elles ne surent pas toujours si bien se défendre,
témoin les dialogues d'Henri Estîenne sur le langage
français italianisé,
Cartulaire de r Hospice. — L'administration des
Hospices ayant jugé à propos de verser, dans les ar-
chives dépanementales, la partie ancienne de ses docu-
ments administratifs, M. de Beaurepaire communique
à la Commission un cartulaire de PHospice-Général,
rédigé vers 1 554, ^^^^ ^^ ^^^^ ^^^ ^^^^ d'une fort belle
miniature, intéressante par le costume et par quelques
groupes de personnages.
Chapelle de PHospice. — Cette communication
amène le même membre à lire le mémoire suivant sur
la construction de la chapelle de T Hospice-Général :
La première chapelle de rHospice-Général de Rouen
remonte à l'époque où Ton prit le parti de renfermer les
pauvres, auxquels jusque-là on s^était contenté de distri-
buer des aumônes. Elle fut construite en i65i. P'arin nous
apprend que ce fut à la Pentecôte de cette année qu'elle
fut bénite sous Tinvocation de Notre-Dame-de-la-Charité,
dont on fit la fête le 1 5 août, jour de TAssomption. L'his-
torien de Rouen ajoute : « 11 y a aussi des indulgences
plénières et les prières des quarante heures le jour de la
Pentecôte et les deux jours suivants pour remercier Dieu
de cet établissement. Le spirituel y est exercé par les
prestres de Saint-Vivien ; l'office s'y fait comme dans
une paroisse. 11 y a même des orgues. >
Les comptes de l'Hospice ne nous fournissent aucuns
renseignements sur cette première construction. Nous y
voyons seulement qu'en i652, on eut à payer à Etienne
De Neuville, maître sculpteur, 6o s. pour avoir gravé et
doré une pierre de marbre noir posée aux pieds de l'image
264
qui surmontait la porte de la chapelle et qui avait été don-
née par M. des AUeurs, conseiller au Parlement; à Nicolas
Baudouin, peintre, 40 1. pour avoir peint, dans la chapelle,
le dessous de la grande porte, celle d'à côte, le jubé,
etc. . . ; h Guillaume Liégeart, maître menuisier, 16I. pour
4 prie-dieu, servant de confessionnaux ; à Nicolas Fabulet,
autre maître menuisier, 1 5 1. pour avoir raccommodé la
chaire du prédicateur ; à Pierre Le Prompt, 6 1. pour bois
de chêne sec, par lui fourni pour faire les montants de cette
chaire; à Delamare,' tapissier, 7 1. i5 s. pour avoir garni
la même chaire, et fourni, pour cela, du roussy et du clou
doré, nouvelle preuve de Tusage où Ton était encore de
préférer, pour la décoration des chaires à prêcher, les
tapisseries aux sculptures, contrairement à ce que Ton vit
se pratiquer depuis. Dans le compte de 1654, il est fait
mention d'un crucifix paye 40 1. à Jean Racine, maître
sculpteur; d'un marbre posé, en souvenir d*une donation,
dans la chapelle et payé 21 1. 2 s. au même artiste; de
tapisseries que Ton empruntait pour tendre la chapelle et
y dresser un oratoire au Saint Sacrement, pendant les trois
derniers jours de la semaine sainte.
Les travaux de construction de cette chapelle furent
entrepris pendant que M. Damiens, conseiller au Parle-
ment, était chargé de l'administration de FHospice. Il est
à croire qu'il y contribua dans une large mesure, et que
ce fut une extrême modestie qui lui fit supprimer toute
constatation officielle de ses bienfaits.
Il eut pour successeur, dans cette pénible fonction, M. de
la Motte-Lambert (i), qui devint plus tard évêque de
Beryte. Celui-ci se trouvant à Rome, en 1657, et se pré-
parant déjà aux missions les plus périlleuses et les plus
(i) Pierre-Marie Lambert, sieur de la Boissière et de la Motte,
fils de Pierre Lambert, sieur de la Motte, vice-bailli d'Ëvreux, et
de Catherine Heudey de Pommainville et de Bocquencey, né à la
Boissière, le 28 janvier 1624, nommé le 17 mai 1646, conseiller
en la Cour des Aides de Rouen, remplacé en juillet i655.
265
lointaines, se souvînt de la maison où il avait fait l'appren-
tissage des œuvres de la charité : il obtint du pape Alexan-
dre VII le corps entier de saint Basilée, martyr, qu'il s'em-
pressa d'envoyer à l'Hospice (2 mars i658).
Cette chapelle subsista pendant un siècle et demi.
On y voyait un certain nombre d'inscriptions dont le
texte a été donné dans V Histoire de Rouen,
D'autres, qui y furent placées postérieurement aux di-
verses éditions de cette Histoire^ nous sont connues par
les copies qu*on. en trouve dans les archives des Hos-
pices. Nous en citerons ici quelques unes (i).
G. B, IHS. MA, G, B.
A la plus grande gloire de Dieu la messe de huit heu'
res, qui se doit dire tous les jours d perpétuité en cette cha-
pelle, a été fondée par M^ Gabriel Bijet, preshtre, notaire
apostolique et secrétaire du Chapitre de Péglise cathé^
drale de Rouen, dont le corps repose cy dessous, confor-
mément au contrat passé devant les tabellions de Rouen, le
2 avril i6j7, qui est décédé le 16 février 1682^ âgé
de 66 ans. — Passants, prie^ Dieu pour le repos de son
âme et mette^ à son imitation vos richesses en dépôt entre
les mains des pauvres pour les reprendre dans l'éternité {2).
I. M.
Francisco de la Haye-Auher,
Presbit, et Senatori Rothomagensi^
(i) Un instant, après la révocation de l'Edit de Nantes, on eut
l'idée de foire rebâtir, pour l'usage de THôpital-Général, le tem*
pie de Quevilly dont les matériaux avaient été donnés aux deux
hôpitaux de Rouen; mais on renonça à ce projet (10, i3 juillet
i685). — En 1790, la chapelle de THospice-Général n'était pas
encore détruite. On y établit un dortoir pour les enfants par déli«
bérationdu ig mai de cette année.
(2) « Petit tableau autrefois situé au côté du midi, vis-à-vis la
chaire, à côté des orgues, proche le jubé des femmes^ au-dessus
d'une grande épitaphe. >»
l9
266
Cujus nomen,
In his œdibus a se instauratis^
AuctiSy instructis per annos LX V,
Pie et féliciter administratis,
Sit pro elogioy
Vero pauperum patri^
Hujus xenodochii curatores
Grati animi monumentum
Pos.
^tatis 88 sœculi 8 1 (i).
Epitaphe rédigée par M. Dornay pour la tombe de
M. Le Brun, avocat au Parlement, ancien conseiller éche-
vin, administrateur et bien^iteur de l'Hospice.
Hicjacet
David Robertus Le Brun,
In senatu Rothomagensi causarum patronus,
Urbis ejus exœdilis,
Hujus publicœ pauperum domus administrât or y
Vir integer, civis optimus, egenorum
Amicus
Et pater,
%, QMisqU^,es,
ProbuSy cinsr, egenus
Luge
Et ora.
Obiit die XXII februarii anno Domini
MDCCLXXL
A part ces inscriptions je ne vois rien à signaler dans
rancienne chapelle deTHospice; elle n'était guère fréquen-
tée que par les pauvres de cet établissement, et par quel-
ques personnes qui y venaient pour la procession de saint
(i) « Petit tableau de cette epitaphe soutenu par deux figures
d'anges entre la fenêtre et le jubé, proche la porte de la rue,
côté du nord. »
267
Barnabe (i), ou le jour de la fête patronale et pendant la
semaine sainte.
Non seulement elle était devenue insuffisante pour le
service auquel elle était affectée, mais elle manquait de
solidité. C'est ce que constatèrent Charles Thibault, Pierre-
Amand Quinei de la Poterie et François Le Queux, archi-
tectes experts- jurés du Roi pour le bailliage de Rouen et
pour tout le ressort du Parlement de Normandie. Ils dé-
clarèrent, à la suite de la visite qu'ils en firent, le 29 avril
1 776, qu'il était indispensable et même urgent d'entre-
prendre une nouvelle construction.
Les conseillers et les notables de la ville s'assemblèrent
plusieurs fois dans la grande salle du Palais sous la prési-
dence du premier président du Parlement, pour aviser aux
moyens de se procurer les fonds nécessaires pour cet
important travail. On adopta les plans de Tarchitecte Vau-
quelin, et l'on décida que l'entrée de la nouvelle église
ferait face au boulevard Martainville, qu'on avait à cœur
de décorer comme étant le commencement de la route
royale de Picardie. On décida encore que l'on demande-
rait au Roi la permission de Êiire un emprunt de 60,000 1.
en constitution de rentes perpétuelles, viagères ou autres.
Construction et emprunt furent autorisés par arrêt du
Conseil du 19 août 1783 et par lettres-patentes du 26 sep-
tembre suivant.
D'après le devis, qui fut imprimé dans le temps, l'entre-
preneur fut astreint à employer, pour les murs,* des briques
de Tosny ou d'autre lieu ; pour les fondations, des pierres
de libage extraites des carrières de Caumont; pour les
autres parties de la bâtisse, des pierres de Vergelé, de
Saint- Leu, deTrossy ou de Conflans.
A l'intérieur, on devait élever des étages de tribunes
dans tout le pourtour de l'église. Ces tribunes devaient
être supportées par un ordre de colonnes doriques de deux
(i ) Cette procession ne fut supprimée qu*en 1 790,
268
pieds de diamètre posées à cru sur le pavé de la nef. Cet
ordre devait être terminé par une architrave au-dessus de
laquelle s'élèverait un socle continu avec des balustrades
répondant aux entre-colonnes. Qe socle porterait un second
ordre de colonnes ioniques, terminées par un enta-
blement. Le tout composerait à peu près Sg pieds de hau-
teur depuis le pavé jusqu'au dessus de Tentablement. Les
murs extérieurs et le portail auraient 48 pieds 6 pouces de
hauteur, depuis le bas de la retraite jusqu'au dessus deTen-
tablement. L'édifice aurait à peu près 160 pieds de lon-
gueur, y compris le portail et les cages des escaliers, sur 1 6
pieds 6 pouces de largeur hors œuvre.
Ce devis fournit la description la plus exacte et la plus
détaillée du monument tel que nous le voyons actuelle-
ment.
Le fronton devait être orné d'une croix accompagnée
de deux anges et surmontée de ces trois lettres emprun-
tées à l'antiquité classique, et que les jésuites avaient
mises à la mode, D. O. M.
JaddouUe, ami de Vauquelin, fut chargé de ce travail de
sculpture dont il ne reste plus de traces. Il fut supprimé à
la Révolution et n'a jamais été rétabli.
Lorsqu'on avait abordé la construction de la chapelle,
l'architecte avait rencontré des difficultés sur lesquelles il
n'avait pas compté et qui tenaient à la mauvaise qualité
du sol. Les tranchées ouvertes, on trouva, à plus de 5
pieds de profondeur, deux cuves de tanneur, deux anciens
aqueducs et les fondements d'un mur de ville bâti sur
pilotis. Ce fut une leçon pour l'architecte, qui se crut dans
l'obligation de donner 3 pieds de plus de profondeur aux
fondations de l'édifice. Il en résulta un excédant de dé-
penses considérable. On avait prévu une somme de
1 5o,ooo 1. et l'on arrivait à celle de 344,057, qu'on essaya
de se procurer au moyen de l'emprunt autorisé de 60,000 1.,
dépareille somme accordée par l'Intendant sur l'Octroi des
marchands, des aumônes de Mgr de la Rochefoucauld, de
269
la Chambre du clergé et de plusieurs personnes charita-
bles. On convint de donner à Vauquelin pour ses hono-
raires 8,5ool. (i)
La première pierre fut posée en 1785. Voici le texte de
rinscription, gravée sur cuivre, destinée à conserver le
souvenir de cette cérémonie.
ARMOIRIES DU CARDINAL DE LA ROCHEFOUCAULD
Z). O. M.
Régnante Ludovico X VL
Hoc Nosocomii Generalis Templum
Erexit Civitas Rothomagensis
Rem Pietaie Coluit
Auctoritate Promovit
Munificentia Maturavit
Votisque Administratorum Favens
Primum Posuit Lapident
Eminentissimus DD, Dominicus de Rupefucaîdi
Sancta Romana Ecclesia Cardinalis
Archiepiscopus Sedis Rothomagensis
Primas Normanniœ
Totius Ordinis Cluniacensis Ahhas Et Superior Generalis
Ordinis Sancti Spiritus Commendator
Administrator Princeps Ejusdem Nosocomii
Cujus Bonum Impiger
Studio Consiliis Donis
(i) Les adjudicataires furent : Rabardy^ pour la maçonnerie,
Dupont, pour la charpente. Le sieur Lamine fut chargé de faire
les chapiteaux des colonnes. On lui paya pour ce travail 1,280 I.
18 juin X788. La Révolution, en diminuant notablement les res-
sources de THospice, mit les administrateurs dans l'impossibilité
de payer les adjudicataires et les fournisseurs. Le 23 novembre
1790^ on ne pouvoit ofirir à Vauquelin, auquel on restait rede-
vable de 21,525 1., qu'un à-compte de 3oo 1. Le 14 décembre
1791, on devait encore 3 1,886 1. Le 18 avril 1792, la veuve de
Dupont, décédé antérieurement au 7 mai 1788, réclamait, sans
pouvoir l'obtenir, le paiement de 1,000 1. dues à son mari.
270
Pro Genii Beneficentia Fovît Et Nutrivit
Anno Salutis M. DCC. LXXXV.
Architecto Bernardo Vauquelin Rothomagœo
Cette chapelle ne fut achevée qu'en 1 790. La bénédic-
tion s'en fit le 25 mars, jour de Tlncarnation de N. S., sur
les 4 heures de Taprès-midi, par M. l'abbé Papillault, cha-
noine, administrateur de l'Hospice, délégué par l'arche-
vêque, qui était retenu à Paris par les travaux de l'Assem-
blée nationale.
On y logea les 3 cloches des Cèles tins, que Ton avait
achetées, le 10 novembre 1784, i,o5o 1.
On y posa une inscription gravée sur plaque de cuivre
ainsi conçue :
Pour perpétuelle mémoire des dons et bienfaits répétés
De Messire Jacques-Christophe de Germont
Conseiller clerc en la grand chambre du Parlement de
Normandie au profit de cet Hôpital et singulièrement
Des enfants exposés.
Du 25 février ij63.
f Par délibération du bureau d'administration, sur le
rapport de ses dernières dispositions, il a été arresté de
s'occuper du soin de remplir son intention en formant, s'il
est possible, l'établissement qu'il s'est proposé pour élever
les enfants trouvés, lors duquel il sera pris les mesures
nécessaires pour conserver et perpétuer la mémoire et
reconnaissance, tant de ce qu'il a aumône en vue d'icelui,
que de ses autres bienfaits.
€ Et, en attendant, qu'il sera célébré dans cette église un
service solennel, auquel tous les pauvres assisteront égale-
ment, lequel service sera répété à perpétuité le 24 février,
jour de son décès.
« Que les enfants et singulièrement ceux exposés, qui
ont été l'objet de sa charité, réciteront chaque jour le
pseaume De Profundis à son intention.
c Que, quoi qu'il n'ait été demandé pour son inhuma-
17^
tion que quatre écoles, tous les enfants y seront envoyés.
€ Et que pour témoignage public tant de ses bienâtits
que de la gratitude, la présente inscription seroit ici
placée :
Pauvres^ renfermés dans V Hôpital^
Et Fidèles qui visite^ cette Eglise^
Priej Dieu pour le repos de son âme.
Pour perpétuelle mémoire
Des dons et bienfaits
De Messire Jacques-Christophe de Germonty
Conseiller clerc en la grande Chambre du Parlement
De Normandie.
« Cet établissement, envisagé depuis longtemps néces-
saire pour la conservation des enfants trouvés, n'est devenu
possible que par les libéralités de ce Père des Pauvres.
c Mais en s'occupant de remplir ses intentions, il a été
indispensable, l'Hôpital ne pouvant suppléer à la dépense,
de se réduire, par forme d'essai au nombre entretenu de
trente en^nts, en attendant que la Providence le mette en
état, par les aumônes des fidèles, de subvenir à tous.
c Lecteurs qui applaudissez à une œuvre aussi chari-
table que patriotique, contribuez à son exécution. »
On mit rinscription suivante sur la tombe du chirur-
gien Leschevin :
Cygît
Jean^Baptiste-André
Leschevin,
Chirurgien émérite de cet Hôpital,
Autant estimé pour ses vertus
Que regretté pour ses rares talents.
Il cessa de vivre
Le huit mars 1788^
Agé de SS ans 8 mois,
Après avoir employé 32 ans
Au soulagement des pauvres
De cette maison.
272
Qtte son âme repose en paix(\).
A peine construite, cette église fut enlevée au culte (2).
Elle servit pendant plusieurs années à des usages profanes.
Elle fut rendue à sa destination après le Concordat, et
Ton prit soin d*y rétablir, en vertu d*une délibération du
2 juillet 1806, tout ce qui pouvait conserver le souvenir
des actes de bienfaisance qui avaient eu lieu, et pour cela
de remettre à leur place les inscriptions sur marbre et sur
cuivre qui n'avaient pas été détruites.
Je n'ai pas à apprécier le mérite architectural de la cha-
pelle de r Hospice. On ne saurait nier que l'extérieur ne
présente un aspect peu avantageux; mais l'intérieur ne
manque ni d'élégance, ni de majesté, et l'on s'explique,
jusqu'à un certain point, qu'il ait excité l'admiration des
contemporains de Vauquelin, qui a laissé, du reste, la
réputation d'un habile architecte.
Tel qu'il est, il est précieux pour la ville de Rouen,
comme un type unique, dans ce pays, de l'architecture
religieuse à une époque où les préjugés gothiques, comme
on disait, n'entravaient plus l'essor du talent. Il rentre
dans la classe, non pas des monuments remarquables, mais
des monuments curieux.
Malheureusement, bien qu'il n'ait guère dépassé l'âge de
l'homme, il est décrépit comme un édifice antique, et il y
aurait presque heu d'en réclamer le classement parmi les
monuments historiques, si l'on ne s'était fiait une loi de
s'arrêter à l'époque de la Révolution.
(i) Cette inscription fut posée en vertu d'une délibération de
radministration, du 3o juillet 1788.
(2) Dès le 28 mars 1790^ on avait défendu de tenir Téglise,
ainsi que les portes et barrières extérieures de Thospice, ouvertes
pour le public pendant la quinzaine de Pâques. On s'était aper-
çu qu'on s'y portait pour éviter toutes relations avec les prêtres
constitutionnels des paroisses. — Le 14 mars 1792, l'aumônier du
régiment suisse de Salis-Samade obtint la permission d'y faire
des instructions aux soldats.
273
Incendie de F Eglise de Saint-Saens. — M. Bouc-
tot rappelant en peu de mots le désastreux incendie que
la foudre a allumé dans Téglise de Saint-Saens, le lo
de ce mois, constate q'ie cette catastrophe est en plu-
sieurs points toute semblable à la destruction de la
flèche delà Cathédrale en 1822. Le feu, en effet, y a
couvé quelque temps au sommet du clocher; puis,
ayant atteint de nombreux nids de corneilles, il en a
rapidement envahi toutes les autres parties; enfin
la flèche consumée ne s'est pas affaissée sur elle-
même : mais elle est allée tomber à quelque distance
delà.
Le clocher seul a profondément souffert de Tin-
cendie : et encore M. Bouctot se demande si les assises
inférieures nbnt pas assez bien résisté au fiéau pour
être conservées. Néanmoins on ne songe qu'à rebâtir
une église entièrement neuve. Tel était depuis long-
temps le vœu de toute la population de Saint-Saens.
C'est que Tédifice actuel est d'un aspect peu agréable,
et n'avait d'intéressant que son clocher et les curieux
vitraux que le feu n'a point endommagés.
Quelques membres se préoccupent de la conserva-
tion de ces vitraux. On ne doit avoir nulle crainte à
leur sujet, puisqu'ils sont classés comme monuments
historiques. S'ils demeurent sans emploi à Saint-
Saens, ils entreront de droit au musée départemental.
Plusieurs de nos collègues réprouvent l'idée d'une
reconstruction, d'un goût douteux, telle que la muni-
cipalité peut rencontrer des types assez maussades en
Flandre. M. G. Le Breton rappelle que l'église incen-
diée possède des colonnettes d'un très beau style
dont on pourrait s'inspirer pour le futur sanctuaire.
Cette idée est parfaitement accueillie. Du reste, la
274
générosité des habitants peut faire espérer un bel édifice
qui soit Pornement de leur bourg.
M. de la Serre offre à la Commission un excellent
croquis, qu'il a pris lui-même il y a quelques années,
de l'ancien clocher de Saint-Saens, dont il rendrait
possible la reproduction. M. le Président souhaite
qu'une gravure de Ce dessin figure dans le prochain
Bulletin^ ne fût-ce que pour rendre intelligible cet
antique rébus : 5o5 clochers, 400 cloches [c'est-k'
dire : A Saint-Saens, il y a cinq clochers dont quatre
sans cloches) .
Dragages de la Seine à Rouen, — M. Maillet du
Boullay présente à la Commision diverses antiquités
qui ont été gracieusement offertes au Département par
MM. Lavoinne, ingénieur en chef, et Juncker, ingé-
nieur ordinaire des ponts et chaussées. Elles sont
sorties des dragages exécutés dans la Seine en face de
l'île Méru. C'est d'abord une grande épée mérovin-
gienne en fer, trouvée la veille, toute semblable à celle
que les fouilles d'Envermeu révélèrent à Tabbé Cochet ;
une autre épée espagnole, d'une conservation parfaite,
est attribuée au xvi« siècle. L'envoi se complète par deux
monnaies : un double écu de Louis XVI et une pièce
en or de 17 14.
Dragages à OisseL — Une note de notre confrère,
M. de Vesly, nous informe que des débris antiques,
de toute sorte, continuent à être arrachés au lit de la
Seine à Oissel, entre autres des armes.
Couvent des Emmurées. — M. P. Baudry appelle
l'attention sur quelques statues, des sculptures et une
inscription qui restent peut-être encore dans le cloître
275
et les autres dépendances des Emmurées^ si elles ne
sont point entrées dans les collections de quelques
personnes parfaitement à même de les recueillir. On
objecte qu^il serait peut-être assez difficile d'assurer
régulièrement la conservation de ces objets, dont le
génie militaire est aujourd'hui possesseur; M. Pelay
remarque au surplus que deux des statues signalées
par notre collègue sont aujourd'hui décapitées. .
Prieuré de SainULô. — M. Maillet du BouUay
an nonce qu'il vient d'obtenir de M. le Maire de Rouen
la porte de l'ancienne école normale de Saint-Lô, et
une pierre chargée d'inscriptions. Seulement l'entre-
preneur a demandé qu'on l'autorisât à ne délivrer
cette porte que lorsqu'il le pourrait faire sans incon-
vénient.
Hénouville. — M. Félix, en regrettant la démolition
du château du Bellay, estime que quelques détails
encore debout seraient très dignes d'être photographiés,
notamment un joli pavillon du temps de Louis XIII.
Il serait même facile de sauver du marteau des ouvriers
un bel épi en plomb. Une notice sur ce château, due
à la plume de M. l'abbé Faye, alors curé d'Hénouville,
a paru dans la Revue de la Normandie^ en février
1867.
M. le Président ajoute qu'un souvenir littéraire se
rattache à ce château par l'un de ses possesseurs, l'abbé
Du Resnel, poète et traducteur^ membre de P Académie
fran(;aise et de l'Académie des Inscriptions.
Tableaux de la chapelle Saint-Yon. — Plusieurs
tableaux dus à Saintigny, se détériorent dans la cha-
pelle Saint-Yon, qui n'est plus aujourd'hui affectée au
276
culte. M. Félix demande qu^il soit pris des mesures
pour leur préservation.
M. de Beaurepaire répond qu'il n'est rien de plus
aisé, attendu que ces tableaux, quoi qu^on ait pu dire,
appartiennent certainement à la ville de Rouen, qui
peut en disposer à son gré : c'est donc près de Padmi-
nistration municipale que des démarches doivent être
tentées.
La séance est levée à quatre heures.
A. TOUGARD.
277
SÉANCE DU 20 OCTOBRE i883.
La séance ouvre à deux heures, sous la présidence
de M. de Beaurepaire.
Etaient présents : MM. P. Baudry, Billiard, Bouctot,
Bouquet, de Girancourt, G. Le Breton, Tabbé Loth,
de Merval, Pelay, de la Serre, Rœssler et l'abbé Tou-
gard, secrétaire par intérim.
Se sontexcusés : MM. Brianchon, Maillet du BouUay
et Simon.
La correspondance imprimée comprend : Bulletin
du Comité des travaux historiques, i883, i«rfasc.; —
Bulletin des Antiquaires de Picardie, 1882; —
Bulletin de la Société archéologique de VOrléanais,
no 1 16 ; — Bulletin de la Société des Antiquaires de
V Ouest, i883, i^f fasc. ; — Recueil de la Société ar-
chéologique du département de Constant ine, vol. 32 ;
— Bulletin de la Société de r Orléanais, vol. 19;
— Congrès archéologique de France^ session de
1 88 1 ; — Bulletin de la Commission départementale
des Antiquités du Pas-de-Calais, 24e fasc, 1879-
i883.
La Commission des Antiquaires de l'Oise a annoncé
renvoi de son Bulletin, en demandant l'échange.
M. le Président n'a encore rien reçu, mais a fait envoyer
la collection de nos Bulletins, même avec nos Procès-
Verbaux.
M. le Ministre de l'Instruction publique a adressé à
la Commission le programme de la réunion des Sociétés
savantes à la Sorbonne pour 1 884, avec le discours
qu'il a prononcé dans la même réunion en i883.
278
Le procès-verbal de la dernière séance (20 juin) est
adopté après quelques observations.
Eglise de Saint-Saens. — Ce qui vient d'en être dit
dans ce procès- verbal amène M. G. Le Breton à en
parler de nouveau à la Commission. Notre collègue se
fait un devoir de protester encore contre une recons-
truction totale de l'édifice. Diverses parties de ce que
le feu a épargné lui semblent très dignes d'intérêt.
Une restauration lui paraît bien préférable, d'autant
qu'elle ne peut manquer d'être satisfaisante, puisqu'elle
est confiée à notre collègue, M. Lefort.
Ces observations sont appuyées par M. Bouctot et
par M. Pelay. Mais ce dernier membre demande si la
Commission a le droit de s'opposer aux projets des ad-
ministrations locales. On répond négativement. D'ail-
leurs la reconstruction est depuis longtemps désirée
par la population du bourg, qui n'avait guère de sym-
pathies pour la vieille église, et trouve de plus, dans un
déplacement partiel de l'église, l'avantage très apprécié
d'agrandir la place du marché.
M. le Président remarque enfin que le travail étant
aux mains de M. Lefort, il sera facile d'obtenir qu'il
vienne nous donner, à une prochaine séance, toutes les
explications désirables. Alors la Commission pourra,
en connaissance de cause, émettre un vœu sur ce qu'il
convient de faire, seule démarche qui soit dans ses
attributions. La Commission se rallie unanimement à
cet avis.
Château d'Hénouville, — M. de la Serre offre à la
Commission un croquis du château d'Hénouville,
mentionné dans la précédente séance. M. le Président
l'en remercie. Ce dessin enrichira les cartons de la
279
Commission, et pourra peut-être figurer au Bulletin,
Rouen. Arcades romanes. — MM. Pelay et P. Bau-
dry ont remarqué, ainsi que M. de Beaurepaire, des
arcades romanes, voisines de Téglise Saint-Maclou.
Elles ont dû faire partie d^un édifice considérable, mais
d'une affectation inconnue.
Préfecture. — En creusant le sol au N.-O. du bâti-
ment des Archives, les maçons ont rencontré une
importante muraille, que M. de Beaurepaire signale
comme un reste des remparts.
M. l'abbé Tougard fait les communications sui-
vantes :
Saint^Aubin-lès-Elheuf. — Découvertes archéologiques.
— Par une lettre adressée le 9 juillet dernier à M. Tabbé
Tougard, M. Albert Marguery, attaché au service des
Ponts et Chaussées, informe notre collègue que les travaux
de construction des écluses de Saint-Aubin-jouxte-Boul-
leng n*ont amené que la découverte d'une petite meule
romaine et d'un chesneau en pierre. Les excavations
atteignent cependant jusqu'à la craie, c'est-à-dire qu'elles
descendent jusqu'à une profondeur d'environ neuf mètres
sous l'eau.
Un tel résultat, peu intéressant par lui-même, prouve
du moins que les parages de Saint- Aubin et Elbeuf furent
anciennement beaucoup moins fréquentés par Thomme,
que ceux d'Orival et Oissel. Leur position stratégique
suffirait peut-être à expliquer cette différence.
M. Marguery se fera un plaisir d'informer la Commission
des découvertes notables qu'il lui sera donné de faire.
Val-de^la-Haye. — Monnaie romaine. — M. l'abbé
Lesourda recueilli, le 24 août dernier, au Val-de-la-Haye,
un Postumus bien conservé.
Double mesure. — Sur la demande de notre zélé collègue,
28o
M. Brianchon, un habitant du Val-de-la- Haye, M. Fro-
mentin, a offert au musée des Antiquités (i^^ septembre)
une double mesure en pierre, qui est Tun des plus beaux
spécimens de la riche collection départementale de petits
monuments analogues. Le cordon sculpté qui sépare les
deux mesures donne à penser que Tobjet remonte à Tépoque
romane.
Quant à sa provenance, les renseignements fournis par
le donateur permettent de supposer que cette mesure fit
jadis partie du mobilier de la magnifique grange dîmeresse
de la commanderie de Sainte- Vaubourg, qui demeure, en
ce genre, Tun des types les plus intéressants de la Seine-
Inférieure.
Notes diverses. — M. le Président groupe ensuite
un certain nombre de notes historiques et archéolo-
giques sur divers points du département.
NOTES ARCHÉOLOGIQUES EXTRAITES DES ARCHIVES DES
OFFICIALITÉS DE FÉCAMP ET DE MONTIVILLIERS.
En classant, pour en faire l'inventaire, les documents
provenant des officialités de Fécamp et de Montivilliers,
déposés actuellement aux Archives départementales, j^ai
relevé quelques notes qui m'ont paru présenter un certain
intérêt archéologique.
Je ne ferai guère que les rapporter, sans trop me préoc-
cuper d'établir entre elles des transitions qui seraient peut-
être forcées, et qui, d'ailleurs, ne sont pas indispensables.
Toussaint Varin, Augustin de Rouen et évêque de
Thessalonique, fut appelé à bénir, le 26 mai iSoj, l'autel
de N.-D. en l'église de Veules ;le lendemain, les autels de
Saint-Nicolas et de Sainte- Barbe dans la nef de l'église
d'Ingouville, et un autre autel, en l'honneur de saint Va-
neng et de sainte Eulalie, dans l'église de l'abbaye de
Fécamp, près de la chapelle in qua monstratur sanguis
Christi. Le dernier mai de la même année, on le voit
28l
dédier Téglise de Saint-Étienne de Fécamp, aujourd'hui
classée parmi nos monuments historiques. M. Tabbé
Cochet, s'en rapportant sur ce point au Gallia Christiana,
fait honneur de la construction de cet édifice à un person-
nage bien connu parmi nous par son goût éclairé pour les
arts, Antoine Bohier. Si cette assertion était fondée, il
ÊEiudrait convenir que les travaux auraient été menés avec
une rapidité surprenante, puisque, par suite du procès
qu'il dut soutenir contre dom Le Roux, nommé abbé par
les religieux, Bohier ne put prendre possession de Tabbaye
de Fécamp qu'en 1 5o6, bien qu'il eût été nommé, par le
Roi, abbé commendataire, l'année précédente. Il est dou-
teux qu'il ait longtemps séjourné dans ce monastère. Le
i8 septembre 1 5i2, on y constate sa présence, par la béné-
diction qu'il y fit des autels de N.-D. ad Virgines et de
Saint- J ean- Baptiste .
Le Répertoire archéologique de la Seine-Inférieure attri-
bue à un nommé Robert Chardon la composition d'un
admirable groupe de pierre, le Trépas de la Vierge^ qu'on
voit encore dans l'église de Fécamp. L'artiste, à supposer
qu'on n'ait pas pris pour son nom celui d'un donateur,
pourrait bien n'être autre que le compilateur d'un recueil
d'actes à l'usage du secrétaire de l'abbaye, Stylus pro
secretariOf où nous lisons, au premier feuillet, cette étrange
signature :
« Celuy qui fit de sa char don
Veuille saulver Robert Chardon,
Non pas chardon, qui drap chardonne,
Mais dom Robert, qui sa char donne ;
Car mieulx sçavoit la char donner,
Que de chardon drap chardonner. »
Ne faudrait-il pas conclure de ces rimes que Robert
Chardon était pitancier de l'abbaye de Fécamp? Quoi qu'il
en soit, il nous en coûterait moins de lui supposer le talent
d'un artiste que celui d'un poète, même médiocre.
Passant de Fécamp à Montivilliers, constatons tout
'9
282
d'abord que Téglise principale de cette dernière ville,
Saint-Sauveur, était à la fois conventuelle et paroissiale.
Par Teffet de cette circonstance, il y eut toujours, dans
cette église, deux intérêts en présence, celui des religieuses
et celui des paroissiens et de leur curé. Quatre commu-
nautés à Rouen : Saint-Amand, Saint-Lô, Saint-Ouen,
Saint-Paul, avaient connu, dans des temps plus recules,
cette situation embarrassante. Elles avaient fini par s'y
soustraire, en faisant construire, non sans de grands frais,
à côté des églises primitives, qui redevinrent exclusivement
conventuelles, d'autres églises qui furent mises à la dispo-
sition des paroissiens. Il en fut autrement à Montivilliers,
où l'opposition d^intéréts ne cessa d'amener de fâcheux
conflits à propos de tout : heures des offices, portes,
cloches, bancs et sépultures.
Pour ce dernier objet, cependant, un arrêt de l'Echi-
quier avait réglé d'assez bonne heure, ainsi qu'il suit, les
droits des parties :
. c Si ne pourront les parroissiens ou trésoriers faire
enterrer en la dicte église quelconque personne que ce
soit, se ce n'est par le congié ou licence de Tabbesse ou
trésorière de la dicte église, de leur doyen ou officiai, ou
de l'ung d'iceulx ; mais, le congié demandé par les amys ou
exécuteurs des trespassés, la dicte abbesse, pour honneur
et contemplacion du cappitaine, et pour la bonne amour
et affection qu'elle veult avoir aux dits habitans, a accordé
que elle ou la trésorière de la dicte église, leur doyen et
officiai, ou Tung d'eulx, ne pourront refuser le dict congié
ne empescher aux dicts parroissiens et habitans, pour le
temps advenir, que eulx ne puissent enterrer quatre per-
sonnes notables d'icelle parroisse dedens le corps de la dicte
église par chacun an, oultre le canchel d'icelle église, en
allant vers la grant porte de la dicte église, et, se plus y
en avoit qui eussent la dévotion d'estre enterrés en la dicte
église, ce sera et demourra du tout en l'ordonnance et
plaisir d'icelles religieuses. »
283
Jusque dans les derniers temps, l'autorisation des reli-
gieuses fut rigoureusement exigée; elle était, du reste,
subordonnée à la condition de payer certains droits au
trésor de la paroisse.
Notons seulement Tinhumation de Michel de Suresnes,
que le roi Charles VII avait envoyé comme capitaine à
Montivilliers, et qui y décéda en décembre 1433, avant
d'avoir vu le pays de Caux redevenir, presque en entier,
la proie de l'étranger; celle de Marguerite, femme de Jean
Deschamps, sieur d'Esnitot, 25 octobre i5o8; celle d'un
écossais, Jean Colzos, qui fut tue au service de la France,
dans un combat naval livré aux Anglais près des côtes de
la Normandie. Notons encore, à une autre époque plus
récente, Tinhumation de Louis-Georges Feudrix, écuyer,
sieur de la Fontelaye, lieutenant civil et criminel au bail-
liage de Montivilliers, i^' avril 1742. La demande avait été
rédigée par le fils du défunt, Louis-Georges Feudrix, écuyer,
sieur de Bréquigny, qui demeurait pour lors à Montivil-
liers, et qui plus tard devait se faire un nom comme érudit.
Ce fut, croyons-nous, dans les difficultés que les parois-
siens de Saint-Sauveur éprouvèrent, en mainte circons-
tance, de la part des religieuses, pour la sépulture de leurs
défunts, qu'il faut chercher le principal motif de l'établis-
sement, en dehors de la ville, du cimetière de Brisegaret,
où ils finirent par avoir une galerie couverte et même un
oratoire.
La formalité d'une demande à présenter à Tabbaye
paraissait assez naturelle ; après tout, il est juste de recon-
naître qu'elle n'était pas tellement difficile à remplir que
l'église Saint-Sauveur n'ait été bientôt transformée en véri-
table nécropole.
Il est plus extraordinaire qu'au xv« siècle on ne pût,
sans la permission des religieuses, ouvrir la grande porte
de cette église.
Une permission de ce genre fut obtenue à l'occasion de
la célébration de la première messe de deux enfants de la
284
ville, Nicolas Le Faé, et Jean Le Fèvre, dit le Flamenc,
en 1434.
La même autorisation fut constamment requise pour
établir des confessionnaux, des chaires, tabourets ou bancs
dans réglise; pour mettre, aux chapelles, des clôtures de
menuiserie ; aux autels, des contretables ; aux fenêtres,
dés verrières ; le long des murs, des statues ou des tableaux.
Il est à remarquer que la décoration des chapelles fut
Toeuvre à peu près exclusive des particuliers ou des con-
fréries. Il n^en dut rien coûter ou peu de chose à la
fabrique. Nous avons eu l'occasion de faire la même obser-
vation à propos de la cathé4rale de Rouen.
Le confessionnal, en tant que meuble plus ou moins
orné, d'une construction spéciale, paraît avoir été inconnu
jusqu'à la fin du xvi^ siècle.
Le II novembre 1604, le vicaire Thomas Hermerel
demanda la permission < de faire bâtir, du côté de la cha-
pelle de Saint-Nicolas, entre les deux premiers piliers d'en
bas de la clôture du chœur, un confession naire de bois, de
6 pieds de long sur 2 pieds de large. 1 II promettait d'en
abandonner la propriété à l'église. La permission lui en
fut accordée.
Plusieurs années auparavant, Jean Hacquet, avocat pour
le Roi au bailliage de Caux, avait demandé qu'il lui fût
permis « de faire rétablir, dans la chapelle où estoit la vitre
de la Transfiguration, une chainture de noir avec ses
armoiries, qu'il y avoit fait placer lors du décès de son
père, pour plus grande mémoire et décoration des trépas-
sés. » f Aucuns, disait-il, ne sçavoit de quel esprit, avoient
effacé et dilué icelle chainture noire. • J'ignore quel fut le
sort de sa demande. A mon sens, c'était bien assez de per-
mettre au patron d'une église de l'entourer de ceinture
ou litre funèbre, comme attestation publique de droits
honorifiques. Pourquoi, sous prétexte de quelques actes
de libéralité, des particuliers auraient-ils mis à perpétuité
une chapelle en deuil, afin d'avoir sujet d'y placer leurs
285
armoiries ? En tous cas, la prétention est à noter, et il est
à croire qu'on en rencontrerait plus d'un exemple.
Disons, en passant, que la vitre à laquelle Hacquet faisait
allusion dans sa requête rappelle le titre sous lequel
réglise elle-même était dédiée. Saint Sauveur était Notre
Seigneur honoré dans le mystère de la Transfiguration, de
même que Sainte Croix, vocable de nombreuses églises,
est Notre Seigneur honoré dans le mystère de la Passion,
et peut-être aussi dans celui de la Résurrection.
Cest du moins ce que je crois comprendre d'après une
pétition du curé et des paroissiens, tendant à ce qu'il leur
fût permis c de faire établir, sur le grand autel de leur
église, un tableau en forme de rétable, avec colonnes,
pilastres, arquitraves et comisses et au dessus deux figures
d'anges, avec l'image du Salvator au milieu, et, en plate
peinture, Tistoire et mistère de la Transfiguration de
N.-S. ; • 1617.
Ce rétable dut remplacer une peinture à l'huile repré-
sentant aussi Vhistoire de la Transfiguration. Ce travail
avait été exécuté aux frais des paroissiens, en i585. Mais,
trente années, c'est plus qu'il n*en faut pour que le goût
soit profondément modifié.
Je laisse de côté toutes les requêtes des confréries, bien
qu'il y en ait d'assez curieuses, et je me contente de citer
celle d'un capitaine de marine, auquel on ne saurait con-
tester le mérite d'avoir bravement servi son pays.
« A Madame, Madame de Moustiervillier.
€ Nicolas Lescollier, escuier, sieur d'Aubyéville, cappi-
taine d'une navire naguères équipée par lui contre les
ennemys, vous supplie que une ensaigne que luy et ses
compaignons victorieux ont prinse sur les adversaires du
sang de France, icelle ensaigne soit installée en l'église de
Sainct-Saulveur de Moustiervillier, pour la dévocion et
confidence quUls ont eue à Notre Seigneur et remembrance
dudit Seigneur, et vous ferez bien. Faict lexvine jour d'oc-
286
tobre Tan mil cinq cents quarante-deux. » Signé : N. Les-
coUier.
Il n'est guère permis de douter qu'une demande aussi
légitime n'ait été favorablement accueillie. Mais pourrait-on
affirmer que cet étendard, glorieusement conquis, ait orné
longtemps les murs de l'église Saint-Sauveur? Si l'on était
tenté d'accuser le patriotisme des habitants de Montivil-
liers, qu'on commence par nous dire quel cas Ton a £ait, à
Paris, des drapeaux conquis par l'illustre tapissier de
Notre-Dame.
On connaît le cimetière de Champfleury près d'Harfleur.
Ce cimetière, aujourd'hui le seul de cette ville, fut pourvu
d'une chapelle, sur la demande des paroissiens, en 1 3 1 5 ;
mais il existait bien antérieurement. On le trouve cité dès
1481, ce qui n'empêchait pas qu'il y eût, près de l'église
paroissiale de Saint-Martin d'Harfleur, un cimetière avec
charnier, lequel, aujourd'hui disparu, a laissé, comme trace
de son existence, à la rue voisine, le nom de rue des Os
rangés, dont on a fait, par un euphémisme volontaire, ou
par pure ignorance, la rue des Orangers, en substituant,
sans souci de la réalité, un nom gracieux à un nom singu-
lièrement lugubre. Le mardi de la semaine sainte 148 1,
Nicolas Osmont, clerc de la paroisse d'Harfleur, était con-
damné à l'officialité pour le fait d'avoir arraché du cime-
tière de Champfleury un austerlin du nom de Radele
Ausac, qui était venu s'y mettre en franchise, comme dans
un lieu sacré.
Je signalerai dans les archives de l'officialité de Monti-
villiers un document relatif à la translation en la chapelle
de la Sainte -Trinité, appartenant à M. de Saint-Supplix,
de la statue vénérée de Notre-Dame des Flots, qui jusqu'a-
lors était restée exposée au portail de l'église d'Harfleur,
1 71 5; — une information faite par l'autorité ecclésiastique
au sujet de la démolition opérée à la hâte et nuitamment,
au grand scandale des bourgeois de Montivilliers, de
l'antique chapelle de la léproserie de Saint- Gilles, par
287
ordre des administrateurs de l'hôpital général du Havre,
lesquels avaient obtenu la réunion des biens de la lépro-
serie à leur établissement, et n'avaient rien de plus à cœur
que de s'exonérer des frais d'entretien et de réparation
d'un édifice devenu, suivant eux, absolument inutile, 17 18 ;
— la visite faite par Jean de Genouville, licencié ès-lois,
doyen de Montivilliers, de l'église Saint-Paul de Rouen, en
1572. Le procès-verbal dressé à cette occasion constate
que l'église conventuelle avait été ruinée dix ans aupara-
vant ; le comble menaçait ruine ; il avait fallu mettre deux
arbres debout pour le soutenir ; la salle capitulaire restait
sans verrines (vitres), sans bancs ni chaires. L'église parois-
siale, distincte, on le voit par ce document, de l'église
conventuelle, n'était pas en meilleur état : elle n*avait
plus même de portes.
Les bâtiments du prieuré de Saint-Paul, réparés tant
bien que mal, furent, de nouveau et plus sérieusement
encore, endommagés pendant le siège de 1592. Démolis en
partie, ils couraient le risque d'être entièrement aban-
donnés. Par bonheur, la prieure d'alors, Barbe Cavelier,
appartenait à une famille de Rouen, riche et considérée.
Son père, lieutenant général du bailli, mit son honneur à
rétablir le prieuré^ de manière à faire regarder comme un
acte de sage administration la nomination qui avait été
faite de sa fille à la dignité de prieure, sorte de compen-
sation qui avait été accordée à celle-ci pour la consoler de
la perte du titre d'abbesse de Montivilliers qu'elle avait
porté pendant quelques années. Ce fut sans doute aux
travaux qui furent entrepris, en 1 SgS, que nous sommes
redevables de la conservation de Tancienne église, type
précieux de l'architecture romane primitive.
L*église Saint- Paul fut visitée, le 18 avril i6o3, par Jean
Quatresols, doyen de Gournay, comme délégué du vicaire
général de l'exemption de Montivilliers. L'ordonnance
qu'il rendit, à la suite de sa visite, contient la prescription
suivante : Tarn vicario quant parrochianis injunctum fuit
28S
Ut cruces in monimentis defunctorum sculptœ delerentur.
Vers le même temps, le célèbre Jacques Gallemant, curé
d'Aumale, visitant Téglise d*Harfleur, en vertu de pareille
délégation, ordonnait aussi c que les tombes où le signe
de la croix était empreint seroient levées et defètes. »
On trouve une prescription du même genre dans un
questionnaire ou sorte de Mémento rédigé, en 1648, à
Tusage du vicaire général de Fécamp, pour appeler son
attention sur les points principaux qu'il devait examiner
dans la visite des églises.
An sint cruces vel aliœ imagines per pavimentum ecclesice
vel nomina Dei vel sanctorum, quod non decet.
Le même questionnaire contient quelques articles con-
cernant les chaires à prêcher.
An suggestum sit in loco apto et convenienti^ ut commode
sermocinaturus ab omnibus audiatur.
An ibi sit crucifixi effigies apte accommodata.
An scala^ qua ad illud ascenditur, sit plana et commoda.
An super illud sit baldachinum^ decenter ornatumy ne
vox concionatoris desuper dilatetur ac diffundatut (1).
La chaire était donc alors d'obligation pour les églises
du diocèse de Rouen, dont les exemptions de Montivilliers
et de Fécamp ne firent jamais que suivre les usages ; elle
devait être ornée d*un crucifix et surmontée d'un abat-
voix, contrairement à ce qui se pratiquait encore au
xvi« siècle, mais on ne voit pas qu on se fût encore avisé
d'en vouloir feiire une œuvre d'art. Souvent, aux fêtes
solennelles, on la couvrait de tapisseries. C'était par là
seulement qu'elle prenait un aspect quelque peu artistique.
La chaire de la cathédrale, mobile et portée sur des rou-
lettes, a paru à nos contemporains, malgré les souvenirs
(i) En visitant réglise Saint-Barthélémy, le 18 janvier 1529
(v. s.)i le doyen de l'exemption de Montivilliers, Jacques Le Roux,
enjoint aux trésoriers de la paroisse de faire faire unam parvam
cathedram ad faciendum pronum et predicandum verbum Dei,
289
qu'elle rappelait, indigne du lieu où elle était placée : par
sa simplicité, elle répondait parBsiitement aux goûts de
l'époque où elle fut construite.
Le questionnaire de 1648 nous fournit une citation con-
cernant un autre objet du culte, auquel on n'attachait pas
une moindre importance.
An sit crux in medio ecclesiœ cumymagine Christi recte
elaborata ?
Il s'agit ici d'un crucifix qui devait être placé entre nef
et chœur et qui généralement était posé sur une poutre
transversale ou sur un arc triomphal.
Ce crucifix était de rigueur. Le 29 janvier 1 398, les reli-
gieuses de Montivilliei*s soutenaient contre les paroissiens
de Saint-Sauveur que ceux-ci ne pouvaient avoir, dans la
partie de l'église qui était affectée au service paroissial,
c aucunes ymages eslevées sans la licence d'icelles reli-
gieuses, excepté seulement l'image du crucifix. • A la suite
de la visite de l'église de Rouelles, le dernier mai i535,
injonction fut faite par le vicaire général de Montivilliers,
au trésorier de la paroisse, ut cicius quant commode fieri
poterit^ altius erigere faciat duo altaria prope crucifixum
dicte ecclesiœ existentia, illisque erectis^ pendentem e
latere faciat constituer e et apponere. Ordre de feire feire
une image du crucifix, au trésorier de Saint- Barthélémy,
le 14 mai i582 ; — à celui d'Octeville, le même jour; — à
celui de Rolleville, le 23 juin 1596.
Si nous réfléchissons aux usages du moyen-âge, nous
comprendrons que c'était le moins qu'on pût faire que de
placer un crucifix à l'entrée du chœur pour tenir lieu de
ces clôtures appelées jubés ou pupitres^ ornées jusque-là
d'un cruciflx monumental, souvent accompagné des images
de la sainte Vierge et de saint Jean, et dont il est aisé de
constater l'existence dans les plus modestes églises.
Citons seulement dans un registre de l'exemption d'Ar-
290
gences, ce qui a trait à l'église d'Amondeville, visitée en
i5o6(i).
Entre autres recommandations faites aux trésoriers on
remarque celle-ci : « Fieri faciant ambonem novum in
pulpito. »
On voit par là, ce que les délibérations du chapitre de
la cathédrale nous avaient déjà appris, qu'on faisait une
différence entre Tambon QX\t pupitre ou jubé. Mais j'avoue
être hors d'état d'indiquer sûrement en quoi elle con-
sistait.
Suivent ces autres prescriptions :
Fiat piscina prope fontes ad abluendum manus dum
bapti^antur pueri.
Reparetur benegerium seu vas in quo reponitur aqua
benedicta prope magnam valvam ecclesice,
Amoveantur archce in navi ecclesice exîstentes.
C'était donc alors l'usage qu'il y eût une piscine près des
fonts baptismaux ; — un bénitier près de la grande porte
de l'église. Dans cette église de village, nous rencontrons
ces coffres et ces bahuts où étaient déposés les ornements,
les livres d'offices, et même les papiers des confréries et
des chapelains. Il n'y a guère lieu de s'en étonner, puis-
qu'il en était de même dans notre cathédrale.
Un compte du prieuré de Saint-Paul de Rouen, de 1438-
1439, fait mention, au chapitre des recettes, des lettres de
mariage et des éciielles de noces. Je suppose qu'il faut
entendre par là les offrandes que l'on recueillait à la céré-
monie des mariages dans des bassins particuliers affectés
à cet usage.
On donnait vulgairement le nom d*e'cuelles à ce que l'on
appelle aujourd'hui bassins, et le plus souvent ces bassins
servaient de supports à des chandeliers.
En i585, le prévôt d'une confrérie de Saint-Sauveur de
(i) Aujourd'hui Mondevilb, arrondissement et canton de
Cucn.
291
Montivilliers obtient la permission • de mettre 4 petits
chandeliers de bois aux ccuelles d'étain où seroient poses
4 cierges, le tout sur le travers d'une chapelle de la con-
frérie, ainsi que cela avoit lieu aux chapelles de la Trinité
et du Saint-Sacrement. 1
Encore aujourd'hui, à Pont-l'Evôque, les confrères de la
charité ont l'usage de faire la quête dans un bassin de
cuivre où se trouve posé un chandelier.
Je finirai par deux citations qui donnent beaucoup ù
penser sur les changements qui ont pu survenir depuis le
moyen-âge dans l'état de la Basse-Seine et de la Lézarde,
son affluent.
Un procès s'éleva, en 1660, à propos des limites de leurs
paroisses respectives, entre le curé d'Harfleur et celui de
Saint-Nicolas de l'Heure. Le premier prétendait justifier
que la rivière d'Harfleur (autrement la Lézarde ; ce nom
est assez moderne) c prenoit son cours et alloit rendre à
l'ancien Hoc pour se décharger dans la Seine par le noir
rocher ou noir perré. » Il y eut là-dessus mémoires et
enquêtes ; mais je ne saurais dire si le curé prouva son dire
de manière à ne laisser aucun doute dans l'esprit des juges.
L'autre citation est empruntée à une pièce de procédure
plus ancienne.
Le 29 janvier 1398, les paroissiens de Saint-Sauveur
reprochaient aux religieuses de Montivilliers d'avoir laissé
annuler le port Gaififre ou Gahiffre, c qui souloit estre en
la dite ville ou près d'illec, et ouquel venoient les vesseaux,
chargés de denrées et de marchandises. >
Les religieuses reconnaissaient que le fait était fondé;
mais que, loin de leur être imputable, elles en étaient les
premières victimes, puisque l'annulation de ce port avait
réduit à rien leurs droits de coutume.
Je me trompe fort ou ce changement dut être la consé-
quence naturelle des travaux qui furent entrepris à Har-
fleur par ordre du Roi. Comment les vaisseaux auraient-
ils pu remonter jusqu'à Montivilliers après que l'on se fut
29>
avisé d'établir des écluses entre cette ville et la Seine, dans
rintérêt du clos des Galées d'Harfleur ?
A roccasîon de cette lecture, MM. Pelay et de
Merval constatent que Tusage d^employer aux quêtes,
en guise de plat^ le fond d'un chandelier muni de sa
bougie^ subsiste encore en Bourgogne, et même dans
le département de PEure.
Chapiteaux de SainUWandrille. — Enfin, M. G.
Le Breton donne lecture d'un mémoire de M. Alfred
Darcel, où notre collègue confirme les conclusions
de M. de Glanville, et celles qu^il a lui-même insérées
dans le Bulletin du Comité des travaux historiques.
Il apporte de nouvelles raisons qui obligent à rejeter
absolument Topinion de M. Galloway. M. Le Breton
développe et fortifie encore la thèse du savant directeur
des Gobelins.
ENCORE LES CHAPITEAUX DE l'ÉGLISE DE SAINT- WANDRILLE
Tandis que M. de Glanville lisait à la Commission des
Antiquités le remarquable Rapport sur les Chapiteaux
du chœur de V Eglise de Saint- WandrillCy qui est inséré
dans son Bulletin (t. V., 3^ livraison, p. 410 à 424), le
Comité des travaux historiques recevait de M. l'abbé
Sauvage, curé d'Ectot-l'Auber et son correspondant, une
communication relative à ces mêmes chapiteaux.
Cette communication ayant été renvoyée à mon examen,
je profitai de mon séjour annuel aux environs de Duclair
pour aller étudier lesdits chapiteaux, et dans la séance du
5 décembre je lisais au Comité le rapport suivant qui a été
publié dans la Revue des Sociétés savantes (7e série, t. VI,
p. 469 à 473).
Rapport de M, Alfred Darcel au Comité des Travaux
historiques^ séance du 5 décembre j88i,
LES PRÉTENDUS CHAPITEAUX ANTIQUES DE l'ÉGLISE
PAROISSIALE DE SAINT-WANDRILLE (sEINE-INFÉRIEURE).
c L'église paroissiale de Saint- Wandrille, bâtie à Tombre
de la grande abbaye de Fontenelle, est un assemblage
assez mal agencé de constructions de plusieurs styles. La
nef est séparée des bas-côtés par quatre colonnes ioniques
supportant des arcs en plein cintre dont Tintrados est orné
de caissons à rosaces. Elle va se rétrécissant vers le clo-
cher, et est aujourd'hui couverte par un berceau en plan-
ches qui recouvre une charpente, jadis apparente, dont on
a coupé les poinçons.
c Le clocher, placé à l'entrée du chœur, est porté par
quatre grosses colonnes ioniques d'où naissent les nervures
prismatiques d'une voûte en ogive.
c Au sud de la croisée s'étend une sorte de transept,
plus long que le bas-côté auquel il correspond n'est large,
voûté sur nervures cylindriques.
c Le chœur, à chevet carré, est de deux travées voûtées
sur nervures qui reposent d*abord sur deux des colonnes
ioniques du clocher, puis, au nord, sur une colonne de
même style, mais pourvue d'une longue console destinée
à recevoir un faisceau de trois colonnes qui reçoivent les
cinq nervures de la voûte.
c Une colonne de même style que les nervures lui cor-
respond au sud. Un faisceau de colonne ttes lui est adossé
pour recevoir les arcs doubleaux et les arcs ogives reçus
par la console du côté opposé.
« Au nord une chapelle de trois travées voûtées sur
nervures très amenuisées s'étend le long du chœur.
« Au sud une petite abside romane, très remaniée,
s'appuyait à l'une des colonnes ioniques du clocher et
s'ouvrait sur le transept sud.
« Cette partie a été très profondément transformée. Le
294
transept sud a été prolongé pour faire une sacristie : la
petite abside a été démolie, et une chapelle a été cons-
truite latéralement au chœur avec lequel elle communique
par deux arcades, de sorte qu'elle forme pendant à la
chapelle du nord.
c Enfin un petit oratoire a été bâti en hors d'œuvre,
dans Tangle de la sacristie et de la nouvelle chapelle, à
l'usage de M. le marquis de Stacpool, propriétaire de
l'ancienne abbaye, aux frais de qui se sont faits, en
grande partie, tous ces travaux neufe.
f Jusqu'ici tout le monde s'était accordé à attribuer les
colonnes ioniques de la nef, du clocher et du chœur à
Textrême fin du xvi^ siècle; la voûte du clocher au
xv« siècle si la tour est du xi* : le chœur au xiii*^ et la cha-
pelle du nord au xiv^.
c Mais voici qu'en abattant la petite abside romane qui
servait de sacristie, on découvrit que Tun des chapiteaux
ioniques du clocher s'y trouvait incrusté, d*où Ton conclut
que ce chapiteau était nécessairement antérieur à cette
abside, qui était du xi^ siècle. S'il était antérieur à la
renaissance normande, tous les autres chapiteaux étaient
de même date que lui, et appartenaient à Tune des
anciennes reconstructions de l'église. Or, les archéologues
de la contrée, M. le docteur Guéroult, de Caudebec, ainsi
que M. l'abbé Sauvage, curé d'Ectot-l'Auber et corres-
pondant du ministère, ayant découvert une chronique de
Fontenelle qui parle de Tune de ces reconstructions faite,
entre les années 734 et 787, à Taide de matériaux anti-
ques, se hâtèrent d'attribuer au viii* siècle l'église de
Saint- Wandrille, qui est placée sous le vocable de Saint-
Michel.
c Voici ce texte, donné dans le Spicilegium d'Achéry
(t. III, p. 21 3) :
« Sub hujus denique tempore^ ErinharduSj prœpositus
ejuSy aedificavit basilicam Beati Archangeli Michœlis,
licet modicOy pulcherrimo tamen opère, allatis videlicet
29S
pétris politis de Juliobona^ Castro quondam nobilissimo et
[firmissimo, ad construendos arcus seu frontispicium ejus-
dem templi,
c Or, ces pierres polies arrachées aux ruines romaines
de Juliobona, aujourd'hui Lillebonne, ne pouvaient être
que les chapiteaux ioniques actuels.
€ Malgré Taspect fort peu antique de ces chapiteaux,
celui qui était incrusté dans les constructions que nous
admettons avoir été du xic siècle pouvait apporter une
apparence de raison aux déductions que nous venons
d'cnumérer. Malheureusement ce chapiteau prouve contre
la thèse soutenue par M.Tabbé Sauvage et par M. Gué-
rouit.
€ La moitié de celle de ses volutes qui était encastrée
est à peine épannelée : comme elle ne devait pas être vue
l'ouvrier n'a pas jugé nécessaire d'en poursuivre l'exécu-
tion jusqu'à son entier achèvement.
€ Nous pourrions nous arrêter à cette preuve négative,
mais nous demanderons de poursuivre plus loin l'examen
des divers chapiteaux et même des différentes colonnes
qu'ils couronnent.
€ D'abord dans tous l'astragale appartient au chapiteau,
tandis que dans toutes les constructions antiques il appar-
tient toujours à la colonne.
c En outre ce chapiteau, très écrasé, qui n'a de hauteur,
avec son abaque, queo<°28 sur une longueur, de volute à
volute, de i^^jS, ne présente aucune apparence antique,
les chapiteaux de ce style étant d'ailleurs très rares chez
les Romains.
c Si nous nous reportons à la colonne du chœur, qui
est munie d'une console dont nous avons parlé plus haut,
nous sommes forcé de reconnaître que cette console fait
corps avec la colonne avec laquelle elle a été construite,
assise par assise, comme toutes celles de l'église. Or, cette
console n'a raison d'exister que pour recevoir les colonnes
et les nervures, qui sont du xiiie siècle ; elle est donc le
296
résultat d'une reprise en sous-œuvre, postérieure par
conséquent à ce qu'elle supporte.
f Ailleurs ces nervures, — les chapiteaux et les colonnes
qui les supportaient ayant été supprimés, — tombent
dans le vide, autour, notamment, du chapiteau ionique
jadis encastré.
f Les différences d*aplomb sont telles que Ton a pas
même essayé jadis de les raccorder; quelques plâtrages,
qui datent d'hier, lors de la construction de la chapelle du
sud, bouchent tant bien que mal les vides.
c Les constructeurs du ziii* siècle eussent été assez ha-
biles certainement pour faire porter leurs nervures sur des
appuis qui auraient existé.
f Enfin, la base de la colonne à console, ainsi que celles
de plusieurs autres, notamment dans la nef, est munie de
larges feuilles s' étalant sur les angles des bases; genre
d'ornement que n'a jamais connu l'antiquité.
c Tout, nous le répétons^ dans le mode de construction
et dans l'aspect des colonnes et des chapiteaux ioniques de
la nef et du chœur de l'église paroissiale de Saint- Wan-
drille atteste l'extrême fin du xvi« siècle, peut-être le xvii";
et nous nous étonnons que M. l'abbé Sauvage, auteur de
la note qui a servi de base à l'examen de la question, et
M. le docteur Guéroult s'y soient trompés.
« Cette erreur est d'autant plus singulière que les co-
lonnes de la nef de la remarquable église de Vatteville,
située à quelques kilomètres de Saint-Wandrille, sur
l'autre rive de la Seine, sont identiquement de la même
construction ; et il en est de même de celles du chœur de
l'église paroissiale de Jumiéges, élevée aussi à quelques
kilomètres de Saint-Wandrille, mais sur la même rive.
c II est impossible d'éprouver le moindre doute â cet
égard et de ne pas reconnaître que les constructeurs de
ces trois édifices appartenaient au même atelier, et que
les mêmes mains y ont travaillé d'après le même mo-
dèle.
297
c Ainsi nous voilà bien opposé aux conclusions de
M . Tabbé Sauvage ; et, loin a que les colonnes et les
arceaux en plein cintre qui portent la tour de Saint- Wan-
drille soient le plus ancien monument qui soit resté debout
sur notre sol normand, » il est impossible de les faire
remonter plus loin que Textrême fin du xvi* siècle.
« Quel fut le sort des a pierres polies » enlevées à Lille-
bonne et employées, au vin® siècle, pour construire
Tcglise Saint-Michel?
€ Si dans le style redondant des chroniqueurs carolin-
giens, ces expressions peuvent s'appliquer à toute espèce
de pierres taillées, n'est-il pas permis d'y voir surtout la
désignation de colonnes de marbre ; car à elles seules peut
s'appliquer la désignation de pierres polies, et non à des
chapiteaux qui sont sculptés ?
€ Or, l'église de Duclair possède, sous son clocher
roman du xi^ siècle, deux colonnes antiques de marbre
couronnées de chapiteaux corinthiens de marbre blanc,
dont le fleuron porte une croix, et qui sont mérovin-
giennes ou carolingiennes. Elle possède de plus quelques
autres colonnes également de marbre antique, placées
sous des chapiteaux du xiii® siècle^ dans sa nef. Ces colonnes,
qui proviennent certainement d'un édifice romain, de
Lillebonne fort probablement, auraient-elles stationné à
Saint- Wandrille, placé à mi-chemin, avant que d'être
apportées à Duclair? »
On voit d'après ce rapport que M. de Glanville et moi
nous sommes arrivés aux mêmes conclusions ; et que c'est
le même détail qui nous y a fait arriver, chacun de son
cote.
Ce détail est la partie du chapiteau de la colonne de
support du clocher, — la colonne sud-est si Téglise est
orientée, — qui était encastrée dans la petite abside du
xi^ siècle aujourd'hui détruite. La volute de ce chapiteau
est^ en effet, « restée à l'état brut de ce côté », ainsi que
le dit le rapport de M. de Glanville. Il ajoute que Tarchi-
20
298
tecte qui a démoli la petite abside, a constaté qu'un vide
creusé après coup existait entre elle et le chapiteau.
Circonstance que j'ignorais et qui ne fait que corroborer
nos conclusions.
J'ignorais aussi la part importante prise dans cette
affaire par l'archéologue anglais, M. W. Galloway, dont je
n'ai connu les recherches et l'opinion que par l'analyse
qu'en fait M. de Glanville dans son rapport. Mais j'avouerai
ne pas comprendre comment un homme compétent en
architecture^ qui a étudié pendant cinq mois l'église de
Saint- Wandrille, a pu, à moins d'être aveuglé par une
idée préconçue, se méprendre si absolument sur le carac-
tère des colonnes dont il s'agit.
Rien, en effet, n'est antique en elles, sauf le style qu'on
a prétendu imiter de très loin, mais en se conformant à
certaines habitudes traditionnelles et françaises de cons-
truction.
Où M. W. Galloway a-t-il vu des grifles garnir la base
de colonnes taillées par des Romains ? Car il ne s'agit pas de
grossières imitations du viii® siècle, mais de colonnes
romaines transportées de Juliobona à Fontenelle dans ce
même viii« siècle.
Dans quel monument antique M. W. Galloway a-t-il
trouvé des consoles dans le genre et du profil de celle qui
a été construite en même temps que l'une des colonnes du
chœur ?
Quand M. W. Galloway a-t-il rencontré un seul cha-
piteau antique, à quelque ordre qu'il appartînt, dont
l'astragale fît partie ?
Or, l'on sait que l'existence ou la non existence de l'as-
tragale à Textrémité supérieure du fût de la colonne ou à
la base du chapiteau, fournit un moyen infaillible pour
distinguer les chapiteaux et les colonnes antiques de ces
mêmes membres d'architecture faits chez nous à partir du
xie siècle.
Les chapiteaux ioniques de l'église de Saint-Wandrille,
299
de la nef de Vatteville et du chœur de Jumiéges étant tous
munis de Tastragale, il en résulte que le constructeur de
ces trois édifices, qui étant tous identiques de style et
d'exécution, sont Pœuvre d'un même atelier, suivait une
tradition qu'il avait héritée de ses devanciers du moyen
âge. Il était donc d^époque postérieure à ce moyen âge^ et
il est intéressant de voir que, vivant à Textréme fin du
xvi^ siècle, ainsi que je le suppose, il fût encore attaché
aux pratiques médiévales tout en prétendant s*inspirer de
l'antiquité.
M. W. Galloway remarque que le plan de la nef de
Saint- Wandrille est un trapèze par suite de « la conver-
gence de toutes les lignes horizontales de la bâtisse de
l'ouest à l'est. > Je crois que la convergence n'existe que
dans la dernière travée, et que les trois autres sont paral-
lèles. Mais comment ne s*est-on pas aperçu que cette
convergence, graduée suivant Tarchéologue anglais,
brusque à ce qu'il m'a semblé, était en tous cas 'motivée
par la nécessité de ne point tomber dans le vide et de
buter contre les deux piliers qui supportent le clocher du
côté de la nef.
Ces piliers ont beau être de style ionique aujourd'hui,
ils existaient antérieurement avec unautre caractère, pour
supporter la tour romane du clocher ; et, comme ces
piliers étaient trop rapprochés pour la largeur que l'on vou-
lait donner à la nef nouvelle, on a rétréci celle-ci à son
extrémité supérieure.
M. W. Galloway qui n'est pas tendre pour ceux qui ne
partagent pas son opinion, et qui voit c un tissu d'absur-
dités > dans les motifs de l'opinion qui a prévalu jusqu'ici,
à savoir que les colonnes du chœur, du clocher et de la
nef de Saint- Wandrille sont postérieures à ce qu'elles
supportent, devra cependant reconnaître un fait. C'est
que la tour romane du clocher repose sur des voûtes à
nervures prismatiques, d'époque postérieure par consé-
quent à ce qu'elles supportent.
3oo
Tout donc, dans le plan et dans les élévations de Téglisc
de Saint- Wandrille, montre des remaniements successifs,
qui bouleversent Tordre logique des temps et des styles,
sans qu'un plan d^ensemble y ait présidé.
En résumé il me semble évident, comme à M. de
Glanville, comme à Tabbé Cochet et à beaucoup d'autres,
que la tour et le chœur de cette église ont été repris en
sous-œuvre lorsque Ton reconstruisit sa nef, à la fin du
xvi« siècle.
M. P. Baudry croît pouvoir faire descendre la date
des chapiteaux jusqu^au règne de Louis XIII^ par les
analogues qu'ail a examinés dans les ruines des Tuile-
ries. M. Le Breton ajoute qu'Hun mascaron ne saurait
être antérieur.
M. de Beaurepaire expose que la méprise n^est pas
aussi grossière qu'elle peut le paraître. En effet, une
visite à l'église de Jumièges avait inspiré à un habile
architecte français des conclusions semblables à celles
de M. Galloway.
La séance est levée à quatre heures moins le quart.
A. TOUGARD.
3oi
SEANCE DU i« DECEMBRE i883
La séance ouvre à deux heures sous la présidence
de M. de Beaurepaire.
Sont présents : MM. Adeline, Bouquet^ de Giran-
court, Lefort, Lormier, Tabbé Loth, Maillet du
BouUay, Pelay, de la Serre, Tabbé Tougard et le
vicomte d'Estaintot, secrétaire.
MM. Brianchon et de Merval se sont fait excuser.
Le procès-verbal de la séance du 20 octobre est lu
par M. Tabbé Tougard et adopté.
La correspondance imprimée comprend :
Mémoires de la Société (^Émulation du Jura^
année 1882; — Mémoires de la Société des anti-
quaires du Centre, x^blt des dix premiers volumes,
i883 ; — Bulletin de la Société des antiquaires de
Picardie, i883, n» 3; — Bulletin de la Société des
antiquaires de la Morinie, 32« année, 227* livraison;
— Commission des antiquités et des arts de Seine-
et-Oise, 3* fascicule, i883; — Société industrielle
d'Elbeuf, année i883, no* i et 2.
M. le Président distribue aux membres présents le
t. VI, i^ livraison du Bulletin.
Vœu relatif à la conservation des ruines de San-
œay, — Il communique ensuite à la Commission une
circulaire adressée par le Bureau et le Conseil d^admi-
nistration de la Société historique du Vexin, dans
laquelle, après avoir fait connaître un vœu relatif à la
la conservation des ruines de Sanxay, émis par cette
Société dans la séance du 27 octobre, elle sollicite le
concours de la Commission dans le même but.
3o4
quables dues à M. l'abbé Emm. Auvray^ licencié es*
lettres et diplômé de Técole pratique des Hautes Études
de Paris.
Il y a dix-huit mois, sinon plus, Tabbé Auvray
écrivait à notre confrère que Tabbé Cochet donnait une
fausse direction à une voie romaine sur sa paroisse
(Criquetot-sur-Ou ville). M. Tougard le pria de lui
transmettre à ce propos une note pour la Commission.
Mais, en poursuivant ses explorations, M. Auvray
s'est vu insensiblement amené à composer, au lieu
d'une rectification de quelques lignes, un petit mé-
moire, soigneusement approfondi, avec planàTappui.
Le sol a été interrogé à l'aide d'une grande sonde en
fer préparée pour cet usage. Et les fouilles se sont mul-
tipliées dans un grand nombre de champs, ce qui n'a
pu se faire qu'après la récolte. M. l'abbé Tougard
insiste auprès de la Commission pour que le plan soit
reproduit, en même temps que le mémoire, dans le
prochain Bulletin.
VOIES IMPORTANTES
QUI TRAVERSAIENT ANCIENNEMENT LE TERRITOIRE
DE CRIQUETOT-SUR-OUVILLE.
Trois voies importantes traversaient anciennement le
territoire de Criquetot-sur-Ouville. Elles tendaient : la
première, de Caudebec-en-Caux à Arques - Dieppe ; la
seconde, deDoudeville à Limésy; la troisième, de Tabbaye
d*Ouvilleà Barentin.
I.
VOIE DE CAUDEBEC-EN-CAUX A ARQUES-DIEPPE.
Cette voie, romaine dans son origine, s'il en faut croire
l'abbé Cochet, fut certainement fréquentée àTépoque nor-
mande, et, plus tard, jusqu'à la fin du xvi« siècle, tant que
les deux bourgs qu'elle reliait si directement conservèrent
OF
r
3o5
leur importance. Elle passait, d'après Tauteur de la Seine^
Inférieure historique^ par Maulévrier, TouffrevilIe-la-Cor-
beline, Yvetot, Baons-le-Comte, Etoutteville-sur-la-Mer,
Doudcville, le bourg de Saâne, Bacqueville, Bertrevillc,
Manchouville, Charlesmesnil, Tourville et Beaumais.
« Voilà, dit-il (i), quelle devait être, selon nous, la direc-
tion de Tantique chemin que de nouvelles recherches par-
viendront peut-être à retrouver. » Ces recherches viennent
d'être feites, qui permettent de rectifier le trace qu'indique
le docte abbc.
Cest cette vieille route que suivit Guillaume le Con-
quérant, lorsque, du fond du Cotentin, il se rendit, en
toute hâte, dans le Talou, pour y étouffer la révolte de son
oncle, Guillaume d'Arqués (2).
Or, Robert Wace (3) écrit que le duc de Normandie :
A Chaudebec ala passer.
De Chaudebec as Bans le Cunte.
Baons-le-Comte et Bacqueville sont, pour nous, deux
points certains du chemin antique, mais les conjectures
de Tabbé Cochet relatives aux villages intermédiaires
nous semblent fautives. La route traversait le territoire de
Ectot-les-Baons, Grémonville, Criquetot-sur-Ouville, Ou-
ville - TAbbaye, Torp-Mesnil, Thiédeville, Auzouville et
Saint-Ouen-le-Mauger, suivant assez exactement, jusqu'à
la vallée de la Saâne, le chemin de grande communica-
tion no 55.
Voici nos preuves. '•'
M. Henry Quesnel, conseiller d'arrondissement pour le
canton d*Yerville, nous a communiqué avec le plus gra-
cieux empressement les titres de la seigneurie des Baons
conservés en son château. Nous y avons trouvé deux
(i) La Seine-Inférieure historique et archéologique ^ P» 73,
n° 16.
(2) Idem, p. 72, no i5.
(3) Roman de Rou. t. II, p. i5 et i6 ; édit Plu^uet.
3o6
plans dessinds au xvin® siècle, Fun de la paroisse, l'autre
du domaine non fieffé. Sur ces plans, le chemin (T Arques
passe au sud du village, et n'est autre que la route
d'Yvetot à Grémonville.
Au triège de la Chapelle, en face d'Ectot-les-Baons, la
cavce de l'ancienne voie est toujours reconnaissable ; mais
la charrue l'aura bientôt comblée.
Dans nombre de titres concernant la paroisse ou le fief
de Criquetot, la voie est appelée : rued'Yvetotà Arques (i),
chemin de Caudebec â Dieppe (2), chemin de Caudebec (3),
chemin d'Arqués (4), chemin d'Arqués à Caudebec (5),
grand chemin de Caudebec à Dieppe (6), grand chemin
d'Arqués (7), grand chemin de Caudebec à Arques (8),
chemin du Roy nostre Sire tendant à Caudebec (9), che-
min du Roy tendant d'Arqués à Caudebec (10).
Notez que, plus les titres sont anciens, plus les appella-
tions qu'ils contiennent, supposent d'importance à notre
voie.
A Ou ville (11), le terrier du fief, dont nous devons une
(i) Titre de M. Adam de Criquetot, 1709.
(2) Aveux, Cricqvetot et Commanville, t. Il, année 1609. Bi-
bliothèque du Grand Séminaire de Rouen. — Registre des Bap-
têmes, 1 601-1667, année i63o, Archives de la Mairie.
(3) Aveux, 1. 1, i63o.
(4) Aveux, 1. 1, 1645, i652, 1659, i683, 1755 ; t. II, i632. —
Registre des Baptêmes, 1601-1667, année 1620.
(5) Aveux, 1. 1, i5 novembre 1723; t. II, 2 may i55o, 2 may
1595.
(6) Aveux, t. I, 16 juin 171 1.
(7) Aveux, t. I, 27 juillet 1644, i5 novembre 1723; t. II, 1686.
(8) Aveux, t. I, i632.
(9) Titres de la Fabrique, contrat de la pièce de terre sise
aux fosses Poulardes, autrefois lo. fosse au leu. i55i.
(10) Titres de la Fabrique, contrat de Pasquet Pouchout,
17 novembre i585.
(11) La voie traversait le bois d*Ouville; nous l'y avons ren-
contrée.
3o7
obligeante communication à M. de Lescaude, mentionne
le vieux chemin d'Arqués désigné, du reste, dans un aveu
de i655 rendu au seigneur de Crîquetot, sous le nom de
grande rue tendant de Caudebec à Tabbaye d*Ouyille(i).
C'est évidemment le chemin que prirent le roi Charles IX
et Catherine de Médicis, lorsque, le 4 août 1 563, ils inter«
rompirent leur voyage dTvetot à Bacqueville-en-Caux,
pour f disner en Tabbaye d'Ouviile (2) ».
Au-dessus du Torp-Mesnil, en laissant le Mesnil-Mas-
carel, hameau de Thiédeville, la voie atteignait Auzouville-
sur-Saâne. A l'endroit où elle franchissait la rivière, exis-
tait autrefois Tauberge mal famée de la Grippière.
D'Auzou ville elle se dirigeait sur Saint-Ouen-le-
Mauger(3) et creusait, sur les flancs de la colline, une
cavée qui subsiste encore.
Enfîn^ après avoir séparé Lamberville de Bacqueville,
elle entrait sur le territoire de cette dernière commune.
Nous ne nous sommes pas contentés des documents
écrits; nous avons interrogé le sol, qui ne nous a pas
refusé son précieux témoignage. Il nous a montré, ense-
veli sous une couche d*argile d'une profondeur de o^iSo
à omSo, le chemin de Caudebec tel qu'il existait autrefois.
La chaussée, mesurée en plusieurs endroits (4)j offre une
largeur de 6 ™ 3o. Le pavage, très compact, fait en silex
bruts et quelquefois énormes, a une épaisseur qui varie
entre o " 3o et o ^ 40. Mais, nulle part, nous n'avons
remarqué l'emploi du sable et de la chaux, ni les quatre
couches de maçonnerie qu'on donne comme les signes
(i) Aveux, t. II, i655.
(2) Nagerel, cité par M. Tabbé Sauvage dans son intéressante
Histoire populaire du Bourg de Bacqueville'en^^aux, p. 39,
(3) Le cadastre de Saint-Ouen et celui d'Auzouvîlle désignent
notre route sous la dénomination de chemin d*Yvetot à
Dieppe.
(4) Notamment dans les pièces de terre qui portent sur le ca-
dastre, les numéros 107,91,92.
;
3o8.
caractéristiques des voies romaines. Notre route ne serait-
clle qu'un chemin Brunehaut? C'est aux experts dans la
voirie de prononcer.
Des limites de Grcmonville jusqu'au chemin rural qui
tendait au carrel de Criquetot et de là à l'ancien cime-
tière, la route de grande communication n^ 55 suit la
voie antique, puis, la laissant s'engager à gauche dans le
Bois-des-Champs, elle longe seulement ce hameau sans y
pénétrer. Cette rectification est certainement antérieure à
la seconde moitié du xvii« siècle; un aveu de i652 en fait
foi (i); elle doit même avoir eu lieu, croyons-nous, avant
Henry IV, t qui le premier conçut le projet d'améliorer
les chemins >, mais dont l'utile entreprise rencontra une
vive opposition de la part des députés de notre pro-
vince (2).
Il y a donc trois siècles au moins, que la voie a été
abandonnée à Criquetot, sur un parcours de 700 mètres,
et, en aucun endroit, l'encaissement n'en est resté visible.
Un plan, en la montrant aux yeux, la représentera avec
plus d'exactitude et de clarté que ne ferait une description ,
et l'indication des pièces de terre que nous reproduirons,
d'après le cadastre, avec leurs numéros, fournira un
moyen facile de contrôler nos assertions.
(i) Dans cet aveu conservé au Grand Séminaire, l'herbage
n° 469 du cadastre est ainsi borné : d'un côté le chemin (rec-
tifié) d'Arqués, de l'autre côté, le lieu presbytéral.
(2) M. de Beau repaire , les Ponts-et^Chaussées dans la Gêné"
ralité de Rouen avant 178g* Rouen, i883.
Nota. — Nous ferons remarquer que, sur la carte de la Seine-
Inférieure au temps des Romains {la Seine^ Inférieure histo-
rique, p. 28), la direction du vieux chemin manque de vérité,
Elle n'est pas même conforme au tracé de l'abbé Cochet ; ce
n'est pas un défaut. Mais ce qui en est un grave^ c'est que cette
route d'Arqués n'y passe point par Arques.
3o9
II.
VOIE ROMAINE DE LIMÉSY A OOUDEVILLE.
M. E. Gaillard, dans ses Recherches archéologiques sur
la Seine-Inférieure y mentionne à Auzouville-rEsneval,
une voie romaine sur laquelle l'abbé Cochet (i) dit n'avoir
aucune donnée. Or, elle allait de Limésy à Doudeville,
passant par Auzouville, Saint-Martin-aux-Arbres, Crique-
tot-sur-Ouvilie, et Amfreville-les-Champs. Aussi le chemin
de grande communication n» 88, qui en suit le tracé, est-il
désigne sous le nom à^ancienne voie romaine^ sur la carte
routière du canton d*Yerville dressée en 1867 par les
soins de l'agent- voyer en chef du département, M. Fou-
ché. Des vestiges de cette route antique existent encore
sous le fossé de la masure n^ 279. L'épaisseur totale des
diverses couches de maçonnerie dépasse o^ 5o. A Tangle
formé aujourd'hui par la grande rue et le chemin de
Mantot, la chaussée était élevée de i "» 3o environ au-
dessus du niveau du sol. Grâce à ce remblai, elle traver-
sait le marais (2) de Commanville (3), sans être jamais
couverte par les eaux.
Dans nos titres elle est appelée : chemyn de Rouen à
Saint- Valéry (4), chemin de Doudeville à Rouen (5),
grande rue de Commanville ou simplement grand'rue (b),
(i) La Seine^lnférieure historique et archéologique y p. 79, n° 3.
(2) Ce marais couvrait la masure no 378, et, sans doute aussi,
le champ n» 378 bis. Il est maintenant asséché ; et les eaux plu-
viales, sans écoulement naturel, sont reçues dans une bétoire
située dans la pièce de terre n° 245.
(3) Commanville, hameau populeux de Criquetot, n^est plus
connu aujourd'hui, des habitants, que sous le nom de Grand* Rue.
(4) Titre de M. Adam de Criquetot, année 1 709.
(5) Aveux, 1. 1, 1640. Bibliothèque du Grand-Séminaire.
(6) Aveux, 1. 1, i638, 3 novembre 1659, 1667; t. II, 1623, 1626
1659. —Archives de la Fabrique, contrat de Jacques Fontaine,
22 juin 1554.
3io
grand chemin de Rouen à Commanville (i), grand chemin
de Rouen (2), grand chemin de Doudeville à Limcsy (3),
chemin du Roy de Doudeville à Limésy (4), grand che-
min du Roy (5), la Chaussée (6), chemin de la chaussée (7),
chaussée de Doudeville à Limésy (8).
Il est vraisemblable que Limésy et Doudeville n'étaient
pas les points extrêmes de la voie antique; mais qu'elle
gagnait la Seine à Rotomagus par Pavilly et Barentin, et
la mer à Saint- Valéry ou vers Tcmbouchure de la Dur-
dent (9).
Au xvii« siècle, et, peut-être, antérieurement, elle fut
abandonnée, sauf par les gens de pied, dans sa partie, de-
venue sans doute impraticable, comprise entre la route
départementale n» 6 et le village d'Auzouville. On prenait
alors, en face du château de Pimont, la troisième voie,
celle d'Ouville-FAbbaye à Rouen par Barentin.
IIL
VOIE d'où ville-l'abbaye a ROUEN PAR BARENTIN.
La troisième voie était l'ancien chemin, aujourd'hui
supprimé, d'Ouville à Rouen, désigné au cadastre de Crî-
(i) Aveux, 1. 1, i5 novembre lyaS.
^2) Aveux, 1. 1, 27 juillet 1644; t. II, lôSg, 1691, 1692.
(3) Aveux, t. II, 1671, 1684, 1723.
(4) Aveux, t. II, 1567.
(5) Aveux, 1. 1, i632,
(6) Aveux, t. I, 1645.
. (7) Aveux, t. II, 1625.
(8) Aveux, t. I, 1692, 1711; t. II, 1609, 1689. -- Titres de la
Fabrique, 1687. — Registre des baptêmes, 1601-1667, 23 sep-
tembre 1629, 5 mai i63o.
(9) Le changement de direction donné à notre voie la fît quel-
quefois appeler : Grand chemin de Doudeville aux Mares
(Aveux, t. I, i685, 1711, 1723; t. II, i655), et grand chemin
du Rcy de Doudeville aux Mares (I, i638, 1661, 1687 ; II, 1711).
Les Mares sont un hameau appartenant en partie à la commune
de Saint-Martin-aux-Arbres, en partie à celle de Motteville.
3ii
quetot sous la dénomination d'Ouville-l'Abbaye à Cide-
ville. Il partait de la route d'Arqués, auprès de Tabbaye,
en face de la vieille auberge de La BotiCy formait la
limite commune d'abord entre Ouville et Yerville, puis
entre Yerville et Criquetot ; et , après avoir traversé la
chaussée de Limésy, il entrait sur notre territoire, Ion-
geait la Folie (i) et gagnait les Mares (2), Hongrie (3), la
Sauvagerie (4), Cidetot (5), Panneville, Hardouville et
Barentin. Dans les titres il est nommé : chemin tendant
du prieuré d'Ouville à Pavilly (6), chemin de Barentin {7),
chemin du Roy nostre sire tendant de l'Abbaye d'Ouville
aux Mares (8).
Le cailloutls (9) a, sur Criquetot, une largeur de 6 1° 20;
répaisseur varie entre o ™ 22 et o " 34.
De cette route, seule la portion qui relie la voie d'Ar-
qués à la chaussée de Doudeville pourrait avoir une
origine ancienne ; il est évident que le prolongement du
chemin ne remonte qu'à Fépoqueoù Ton dut abandonner
la chaussée. Mais cette époque, nous ne saurions la déter-
miner. Seulement, en 1629, la route d*Ouville aux Mares
est qualifiée de chemin du Roy^ et peut-être, à cette date,
y avait-il longtemps déjà qu'elle était fréquentée.
Nous dirons, seulement pour mémoire^ qu'à la voie
(i) Hameau de Criquetot.
(2) La seule maison de ce hameau qui soit sur la commune de
Motteville, était l'auberge.
(3) Hameau de Motteville.
(4) Hameau de Cideville.
(5) Hameau de Mesnil-Panneville.
(6) Archives de la fabrique de Criquetot, fieffé du 27 août
1770.
(7) Archives de la Fabrique; contract entre le curé de Crique-
tot et les religieux ^d^OuvilIe^ au sujet du dixmage; 22 août 1644.
(8) Registre des Baptêmes (i 601-1 663)^ 23 septembre 1629.
(9) Ngus avons pratfqué les fouilles entre la Campagne et
Pi mont, dans le champ inscrit sous le n» 33 au cadastre.
3l2
d'Où ville se rattachait sur notre territoire, au hameau de
la Campagne, la route de Saint- Valéry à Rouen par
Angiens, Ermenouville, Etalleville, Baudribosc et Yé-
manville, route que Cassini a figurée sur sa carte. Elle se
termine aujourd'hui à la voie d'Arqués, qu'elle traversait
autrefois, ainsi que le bois de Criquetot. Nous avons lieu
de croire que c'est le chemin harengier dont il est feit
mention dans le précieux aveu de Jumiéges de l'an 1 526.
Emmanuel Auvray.
Rouen : ancien hôtel de r abbaye de Sainte-Cathe-
rine. — M. Pelay communique le dessin, relevé
diaprés nature, d^une ancienne construction dépeadant
d^une maison située entre la lue Tu vache et la rue des
Crottes, précédemment occupée par M. Duforestel,
épurateur d^huiles, et que de nouvelles édifications
ne permettent plus d'apercevoir.
A cette occasion, M. de Beaurepaîre lit le résumé
de ses recherches, condensé dans une notice sur
rhôtel de Tabbaye de Sainte-Catherine.
NOTICE SUR l'ancien HÔTEL DE SAINTE-CATHERINE A ROUEN.
Les déblaiements opérés récemment dans le quartier
Martainville pour l'ouverture de la rue d'Alsace- Lorraine
ont permis d'apercevoir un mur en pierre de bel appareil,
perce de fenêtres dont la forme paraît indiquer une cha-
pelle du xiie siècle. Ce mur qui, la première fois que j'eus
l'occasion de le voir, me causa quelque surprise, n'avait
point échappé à l'œil vigilant de deux de nos collègues,
MM. Paul Baudry et E. Pelay. Mieux avisés que moi, ils
s'étaient même empressés d'en faire prendie des dessins,
qu'ils auront, je n'en doute pas, l'obligeance de nous com-
muniquer. Aujourd'hui, la chose ne serait peut-être plus
aussi aisée. Des maisons se sont élevées comme par enchan-
tement sur ces terrains vides et nivelés, et, à Theure qu'il
3i3
est, elles dérobent complètement au passant la vue du
monument en question.
Je m*associerai toutefois â eux, slls veulent bien me le
permettre, pour l'œuvre si méritoire qu'ils ont entreprise
et qu'ils poursuivent à Tenvi Tun de l'autre, de conserver
le souvenir du vieux Rouen qui disparaît chaque jour davan-
tage; et je vous dirai. Messieurs, en peu de mots, ce que
j'ai cru reconnaître dans cette intéressante construction,
la plus antique assurément de tout le quartier Martainville,
et Tun des très rares vestiges de l'architecture romane
dans la ville de Rouen.
Ainsi que presque toutes les communautés religieuses du
diocèse, Tabbaye de Sainte-Catherine du Mont avait son
hôtel à l'intérieur de la ville.
Dans une société constituée comme Test présentement
la nôtre, la distance de Rouen au sommet de la côte Sainte-
Catherine nous paraîtrait si peu considérable qu'on ne
comprendrait pas tout d'abord l'utilité de cette seconde
habitation. On pensait autrement au moyen-âge. Rouen,
ne l'oublions pas, était une place fortifiée, dont les portes
ne s'ouvraient qu'à de certaines heures du jour. Ne fallait-
il pas, d'ailleurs, prévoir les guerres et ces temps de
troubles, où, dans les faubourgs, il n'y avait plus pour
l'habitant la moindre sécurité ?
En nous reportant aux habitudes de l'ancien temps, on
ne doit donc pas trouver étrange que l'abbaye de Sainte-
Catherine ait eu son hôtel à Rouen, tout aussi bien et pour
les mêmes raisons que le prieuré de Bondeville, les abbayes
de Saint-Georges-de-Boscherville, de Jumiéges, de Saint-
Wandrille, et tant d'autres communautés religieuses y
avaient le leur ; et il était tout naturel que cet hôtel fût
placé dans le qu^^tier où ce monastère possédait nombre de
maisons, fieffées à des bourgeois suivant l'usage, et un
moulin d'un beau revenu, sur la rivière de Robec, non
loin de celui de la Commune.
Si l'on devait en croire Farin, cet hôtel serait venu à
3i4
Tabbaye de Sainte-Catherine par suite de la donation qui
lui en aurait été faite par un des glorieux compagnons de
saint Louis (i).
Voici le passage de notre auteur :
c II est fait mention, dans les chartes et vieux parchemins
du Couvent du seigneur Thomas de Gades Renicourt,
chevalier et seigneur du lieu de Canteleu de Montigny,
garde et chevetain du châtel et forts du pont de Rouen,
et de sa femme Alienor Âlorges. Lesquels (comme dit ce
vieux manuscrit) par accord donnèrent deux jours de
voirieres fines au montier des frères mineurs de Saint-
Clement de Rouen. En son vivant, il fut homme de bien,
et alla deux fois outre mer contre les Turcs avec le Roy
saint Loiiis, aux années 1246 et 1260, et portoit en ses
armes de gueules au sacre d'or à membres clos et yeux
percez, et pour sa devise avoit tenir son droit,
c II donna aux frères mineurs de Rouen 200 florins
d'or aux léopards pour le bâtiment du Dortoir. Item un
calice d'argent doré pesant quatre marcs et demy, trois
cofinots d'argent et trois cierges pour ardoir devant la
belle dame (2) du montier. Il donna cinquante chapeaux
de batailleurs aux frères religieux du Mont aux ladres. Il
donna son manoir de Gades Renicourt avec la chcnaye et
le grand pré de Couvillon au prieur et aux religieux de la
Madeleine de Rouen. Il mourut le jour de saint Pierre aux
liens, Tan 1274, âgé de 63 ans, sans laisser aucuns enfants
de son fait, et fut inhumé au chapitre de la Sainte-Trinité-
lez- Rouen, ausquels religieux il donna le moulin posé près
du moulin du Chapitre, vulgairement appelé le moulin des
Planches et sa maison qui pose sur la rué des Crotes, à la
charge que les religieux feroient trois obits par an, et un
peu après sa femme Aliénor des Alorges quitta le monde et
(i) Histoire de Rouen, 3e partie, p. 263.
(2) La sainte Vierge. Cette appellation était commune au
xve siècle.
3i5
se rendit nonnain aux amies de Dieu de Saint- Léonard de
RoUen (i). t
Le chroniqueur anonyme cité par Farin, après avoir dit
que Thomas de Renîcourt n'avait pas laissé d'en&nts de
son feit, nous parle de son fils puîné Guillaume de Gades
Renîcourt, qui serait mort outre mer en la saillie de Da-
miette y du mariage de celui -ci^ de ses enfants et de la
famille de Saint- Laurent, alliée aux Gades Renicourt (2).
Nous avouons, sans le moindre embarras, que tout nous
paraît suspect dans ce récit : le titre d'honorable donné à
un chevalier ; cette accumulation de titres de seigneuries
hors d'usage au moyen-âge ; cette qualification de capitaine
du pont de Rouen ; ce nom de dame des Alorges au lieu
de dame Alorge; cette mention d'armoiries compliquées,
avec une devise, sans compter ces 5o chapeaux de batail-
(i) Dom Pommeraye n'a guère fait que copier Farin, Histoire
de V abbaye de Sainte^Trinité dite du Mont-de-Sainte-Catherine,
p. 8iy ce qui ne l'a pas empêché, dans le cours de la même
Histoire, de iaire remonter bien plus haut la donation faite de
THôtel Sainte-Catherine aux religieux de l'abbaye de Sainte-
Trinité : u Le bon religieux Siméon et ses confrères (du Mont-
Sinaî) estans donc arrivés à Rouen, furent recommandez à un
homme très noble, dit la Chronique [de Verdun], nommé Gos-
selin qui les receut fort humainement dans son logis et leur
fournit abondamment tout ce qui leur estoit nécessaire pour se
délasser des fatigues d'un si long et si pénible voyage. La maison
de ce seigneur etoit située (selon que l'assure l'ancienne tradition),
proche Saint-Maclou au lieu qui est possédé par les Pères Char-
treux et les religieux de cette abbaye et s'appelle encore l'hôtel
de Sainte-Catherine. » Cependant Dom Pommeraye a mis cette
note en manchette : « J'ai toutefois de la peine à croire ceci,
d'autant que Saint-Madou était hors de la ville en ce temps- là. >
(a) Famille de Saint-Laurent. Saint-Laurent, Général de Nor-
mandie, domicilié sur la paroisse Saint-Jean de Rouen dès i333,
décédé le ler avril i538. Autre Général, Jean de Saint-Laurent,
décédé le ao décembre 1 546, inhumé dans le chœur de Saint-
Jean de Rouen.
3i6
leurs et ces florins d'or aux léopards. A vrai dire, je ne
puis voir là qu'une grossière supercherie imaginée par un
généalogiste du xvi^ siècle, sinon môme du xvii« siècle,
pour flatter la vanité d'une famille qui n'y regarda pas de
trop près, et dont les alliances et les armes sont rappelées
dans ce singulier document avec un à-propos fort équi-
voque.
J'ajoute qu'on ne trouve aucune trace d'un chevalier
Gades Renicourt, ni de ses enfants ni de ses prétendues
libéralités, dans les archives des établissements dont il fut
soi-disant le bienfaiteur.
On voit bien que l'abbaye de Sainte-Catherine possédait
anciennement un moulin sur Robec ; mais on voit aussi
qu'il lui appartenait bien antérieurement à la fin du
xiiic siècle, et je suis très porté à croire que l'hôtel de la
rue des Crotes faisait partie de sa dotation primitive.
Pour nous en tenir aux documents certains, disons que
cet hôtel, dit l'hôtel de Sainte-Catherine, devait être, entre
la Saint-Michel 145 1 et la Saint-Michel 1432, habité par
quelques-uns des religieux de la Saînte-Trinité-du-Mont.
Cette année-là, à l'occasion d'une inhumation, ces religieux
firent une donnée (distribution) dans le cimetière de
Saint-Maciou, leur paroisse : ils payèrent à l'œuvre de
saint Maciou 18 d.» au fossier qui ouvrit l'huis de l'aître,
i5 d., aux maçons de l'aître, 2 s. 3 d.
Un compte de 1622 fait mention de 20 mesures de
bûches, de 2 muîds d'avoine qui furent portés à la maison
des religieux de Sainte-Catherine ; de certains travaux qui
furent faits au jardin dépendant de cette maison.
En 1 600, après que la manse abbatiale de Sainte-Cathe-
rine eut été réunie à la Chartreuse de Bourbon-lès-Gaillon ;
qu'on eut rasé, conformément à l'ordre du Roi, les murs
de la vieille église contemporaine de Guillaume-le- Con-
quérant, les religieux bénédictins transférèrent leur com-
munauté à l'hôtel Sainte-Catherine. Ils l'occupaient lors-
qu'ils traitèrent avec l'Hôtel- Dieu de Rouen, qui leur
3i7
donna, en échange d'une partie de leurs biens, le prieuré
de Saint-Julien près de Rouen, où ils vécurent assez libre-
ment et presque sans forme de communauté jusqu'à ce
que, moyennant quelques pensions viagères, les derniers
représentants de Tantique monastère abandonnèrent aux
Chartreux ce qui leur restait de leur temporel.
Le 21 février 1601, ils avaient loué à Charles Le Sueur
c leur maison de Saint-Maclou, dite vulgairement la maison
abbatiale de Sainte-Catherine, ayant issue par la rue des
Crottes. »
En 161 3, ils firent bail de cette maison à Pierre Martel,
bourgeois de Rouen. Elle est ainsi désignée : « Une maison
de fond en comble avec le jardin, court et estable, dépen-
dant de ladite maison, nommée Thostel Sainte-Catherine,
assise en la paroisse Saint-Maclou de Rouen, ayant sortie,
d'un costé, en la rue Notre-Dame, et, d'autre costé, à la
rue des Crottes, réservé ung corps de logis estant proche
de la porte du costé de ladite rue des Crottes et une vuide
place joignant la maison appartenant à l'abbaye de Corne-
ville. » Le bail était fait pour 9 ans par le prix de 3oo 1.
par an, à charge, au preneur, d'entretenir la maison de
menues réparations, de ne point charger les greniers de
plus de 5 à 6 muids de grain, de tailler la vigne du jardin,
de conserver les arbres fruitiers, de souffrir l'entrée des
religieux de ladite maison pour aller chercher de l'eau au
puits, quand ils occuperaient le corps de logis par eux
réservé. Ils avaient aussi retenu que^ dans le cas où ils
seroient en nécessité de sortir de la maison de Saint-Julien
à cause des guerres, le preneur serait obligé de leur quitter
cette maison, à condition qu'on lui rendrôit le vin au
prorata, sans formalité de procès, t
Nouveau bail pour le même prix, pour le même espace de
temps, au même particulier, en 1621. Il s'obligeait à faire
avance de 756 1. pour la construction d'un bâtiment neuf le
long de la rue des Crottes. Dans le même temps, le petit
corps de logis dont il est question ci-dessus était loué à la
3i8
veuve et aux enfants de défunt Guillaume Bellin, qui pour-
rait bien être le père du prieur des religieux de Sainte-
Catherine transfères à Saint- Julien.
Le 3 novembre 1659^ bail du même hôtel à Michel Cave-
lier, marchand de Rouen. I^s bailleurs retiennent encore
la faculté pour eux de venir demeurer dans cette maison,
c dans le cas où la guerre et le ravage les obligeraient à
abandonner leur abbaye. »
Autres baux au même particulier, aux années 1668, 1671,
1672.
Le 1 3 juillet 1698, les Chartreux, substitués aux religieux
bénédictins de Sainte -Catherine, iiefient à Siméon Cave-
lier, lieutenant particulier criminel au bailliage de Rouen,
y demeurant, rue Tuvache, le grand tènement de maison
situé entre les rues Notre-Dame, Tuvache et des Crottes,
appelé vulgairement Thôtel de Sainte-Catheiine, consistant
en plusieurs corps de vieils bâtiments, cours et jardins, le
tout borné, d'un bout, la rue Notre-Dame, d'autre bout,
la rue Tuvache et des Crottes, cette fieffé faite pour 200 1.
de rente par an.
Le 22 octobre 1744, ce tènement de maisons était vendu
par Michel-Siméon Cavelier, chevalier de Saint- Louis,
colonel de dragons, et par Siméon Cavelier de Tourville,
aussi chevalier de Saint-Louis, capitaine du régiment des
Gardes françaises, seuls fils de Siméon Cavelier, président
en la Cour des Aides et finances, à P.* erre- Vincent Le
Maistre, marchand fôibricant toilier de Rouen, à charge
de payer les 200 1. de rente aux Chartreux.
Le 14 décembre 1757, Le Maistre vendit une partie de
ce tènement à François Vincent, marchand passementier.
Les titres de propriété furent remis à la veuve Laurent,
propriétaire de toute la maison, après qu^elle eut racquitté
les 200 1. de rente le i3 fructidor an IL
Le souvenir le plus intéressant que je puisse rattacher à
l'hôtel Sainte-Catherine, c'est que ce fut là, dans le petit
corps de logis rései/é par les religieux bénédictins de
3i9
Saint-Julien, que mourut, le 22 novembre 1695, Claude
Bigot, prieur de Saint- Julien^ Tun des principaux bienfai-
teurs de THôtel-Dieu de Rouen.
Une maison appartenant aux bénédictins de Sainte-Ca-
therine, sise rue Notre-Dame, était occupée le 2 août
1439 par Robin Pinel, dont le nom nous rappelle celui
d*un entrepreneur de fêtes publiques, machiniste ou com-
positeur de mystères et de compositions dramatiques
comme on les comprenait autrefois.
Au coin de la rue des Crottes, vers le bas, se trouvait
la maison de Jean Du Four, dit des Presses, dont les
presses sont souvent citées dans des actes du tabellionage.
Dans la même rue, une maison, nommée le Cloître,
appartenait aux représentants de Michel Chinerre, bour-
geois de Rouen.
Elle est ainsi désignée dans un acte du tabellionage de
Rouen, du 3 novembre 1461. a Hostel nommé le Cloestre
avec cour, jardins, estable et chapelle, paroisse Saint-
Maclou, rue des Crotes, où demeuroit naguères messire
Jehan Le Noble, prestre, curé de Floques. t
M. Pelay ajoute que les constructions ainsi remar-
quées se continuent dans les propriétés voisines; que,
notamment sur la propriété Lamoureux, existent des
arcades gothiques et des voûtes en ogive.
Sceau des Jacobins de Rouen. — M. Lormîer fait
passer sous les yeux de la Commission un sceau en
cuivre autour duquel on lit la légende suivante sigil-
LVM. C. s. JACOBI. ROTH. ORD. F. PRiEDICATORVM ; EU
milieu un écusson représentant la figure de saint
Jacques avec un bourdon de pèlerin, et un chef de
trois fleurs de lis d'or.
La chapelle des Jacobins occupait Taxe de la rue
Racine, dont la création ne date que de Tan vi.
320
M. de Beaurepaire observe que cette chapelle était
réglise du couvent.
M. Pelay dit que la messe s^y est célébrée plus tard
quedans les autres églises. M. de Beaurepaire indique
que ce renseignement n'a rien que de vraisemblable,
le prieur Gosselin étant archiviste et favorable aux
idées qui dominaient.
Etalon en bronze de Bolbec, — M. du Bouliay
communique une lettre de M. Brianchon relative au
don fait par notre collègue au muséed'un boisseau
étalon de Bolbec.
Gruchet-le-Valasse, ler novembre i883.
Monsieur et cher Directeur,
J'ai rhonneur de devancer quelque peu, par des consi-
dérations qui ne vous sont pas étrangères, le terme que je
m'étais fixé pour offrir au musée d'antiquités de la Seine-
Inférieure un objet ancien que je n'avais promis à Tabbé
Cochet, votre prédécesseur et mon ami, qu'après ma mort.
Cet objet n'est autre que le c boisseau estalon à bled >• de
Bolbec, dont vous me permettrez de consigner ici sommai-
rement l'historique et la description.
Le boisseau étalon- de Bolbec est d*airain, suivant le
conseil de Gui Pape (Quest. 490), et orné sur tout l'exté-
rieur de feuillages gravés en creux qui décèlent la main
du xive siècle. Son cercle supérieur, apposé après coup, en
cuivre rouge uni, présente un écusson, — de gueules^ à
deux fasces éCor^ — aux armes des ducs d'Harcourt, sei-
gneurs hauts justiciers de Bolbec, Lillebonne et autres
lieux. Deux fleurs de lys accostent les supports, qui sont
deux lions. La couronne ducale, dont est sommé Técu,
précise l'addition d'une bordure qui ne saurait être anté-
rieure au xviiie siècle, puisque l'érection en duché du
comté d'Harcourt date de 1700. La mesure de Bolbec
'i
321
pèse 42 livres ou 21 kilogrammes, et contient exactement
les 24 pots d'Arqués ou 43 litres 77 centilitres réglemen-
taires pour Tancien boisseau de Bolbec et Lillebonne.
Notre étalon servait évidemment de setier régulateur aux
halle et marché de Bolbec sur lesquels s^ctendait la juri-
diction des baronnie, comté et duché d'Harcourt. Relégué,
à la révolution, dans les greniers de l'Hôtel-de- Ville de
Bolbec, rétalon dont il s'agit faisait partie d'un lot de
vieille ferraille qui fut vendu administrativement le
6 février i865. Il en a été distrait pour m'ètre cédé par
un sieur Le Hongre, le 7 décembre 1866.
Mais à quel seigneur d'Harcourt attribuer la paternité
du boisseau d'airain ? A Jean HI, jusqu'à preuve contraire,
et pour la raison que voici : Une charte de Philippe le Bel,
de 1 3oo, rapportée par de La Roque, dans son Histoire de
la maison d'Harcourt^ t. HI, p. 233, s'exprime ainsi :
Notum sit quod nos dilecto et fideli Joanni Domino de
Hericour (Jean HI, dit le Bon on le Boiteux^ sire et baron
d'Harcourt, seigneur de Lillebonne et Gravenchon, mort
en 1 326) concessimus in villa mei Trium Petrarum (les
Trois-Pierres) mercatum institutum ad villam tuam de
Boulebet (Bolbec).
Du marché au setier, il n'y a qu^un pas. Et pourquoi
ne serait-ce point, sinon la première année, du moins
Tune des premières années du xiv^ siècle et de son gouver-
nement, que Jean le Bon l'aurait voulu franchir ?
Cette mesure seigneuriale a figuré : !<> à l'exposition
universelle de 1867, à Paris, où elle a valu à l'exposant
une médaille de bronze ; 2° à l'exposition régionale du
Havre, en 1868; 3<> à l'exposition internationale de 1878,
à Paris, où, placée, par les soins compétents d'un bien-
veillant attaché au ministère des Beaux- Arts, M. Maillet
du boullay, dans la salle du X V^ siècle, sur un socle, près
de la vitrine du musée départemental, elle produisait,
selon son expression, le meilleur effet ; et 40 à l'exposition
rétrospective de Caen, cette année même.
322
J'espère que le c boisseau estalon à bled i de Bolbec,
duxiv* siècle, d'après Andrc Pottier, ou tout au moins
des premières années du xv«, comme le pensent MM. Ch.
de Beaurepaire etTabbé Sommcnil, et qualifie par Adrien
de Longpérier c d'étalon du setier de Lillebonne, i dou-
blement recommandé ainsi par sa griffe du moyen-âge et
par son attribution normande, sera reçu comme en famille
dans ce splendide reliquaire départemental normand qu'on
appelle le musée d'antiquités, si bien dirigé, dans le passé,
par Achille Deville, André Pottier et l'abbé Cochet, et,
dans le présent, par M. Maillet du Boullay, dont je suis,
avec les plus dévoués sentiments d'estime et de confia-
ternité, le très humble et très affectionné serviteur.
Briamchon.
La Commission en exprime tous ses remercîments.
M. de Beaurepaire donne lecture d^une notice sur
la façade de l'ancienne maison de la Grosse-Horloge,
n« i3i.
NOTICE SUR UNE MAISON DE LA RUE DE LA GROSSE-HORLOGE.
On sait que la belle £açade qui décore le jardin de la
tour Saint-André provient d'une ancienne maison qui fut
démolie, il y a quelques années, lors de l'ouverture de la
rue Jeanne-d'Arc.
Cette maison, portant les numéros 129 et i3i de la rue
de la Grosse- Horloge, anciennement rue Vanterie, appar-
tenait aux hospices de Rouen et précédemment à l' Hôtel-
Dieu de la Madeleine.
La ville eut â payer, pour cette maison, aux hospices,
une indemnité de 62,5oo 1. Elle s*en réserva la façade par
le traité qu'elle conclut avec MM. Poncet et Lévy.
Je n'ignore pas que, dans le temps même de ce traité,
on s'est occupé de recueillir quelques renseignements
historiques sur cette maison, très remarquable a<:surément,
323
et Tun des types les plus parfaits de Tarchitecture de la
Renaissance. Peut-être ceux que, de mon côte, }'ai pu me
procurer, font-ils double emploi avec ceux qui ont déjà été
signalés. A tout hasard, je vous demande de les consigner
dans une très courte notice.
Le tènement de maisons dont il ne subsiste plus que la
plus brillante partie avait été emphytéosé par THôtel-Dieu
pour 99 ans, qui devaient nnir à Noël 1870, moyennant
5,000 1. de vin de bail et une redevance annuelle de
3,3oo 1., à Pierre-Paul Thibault, secrétaire du Roi, négo-
ciant à Rouen, 3o décembre 1779.
Précédemment il avait été occupé, à titre de location,
par M™e veuve Thibault et par son fils, 1763-1779; par
M. François Cecille, 1746- 1763 ; par Thomas Le Gendre,
aux premières années du xviii» siècle.
L'Hôtel-Dieu le possédait dès 1698.
Le i5 août de cette année, Jacques Chappelier, sieur du
Boisguillaume, demeurant à Rouen, au ^ubourg Saint-
Sever, avait vendu à THôtel-Dieu, en même temps que le
fief du Boisguillaume, le tènement en question, ainsi dési-
gné : « Un tènement de maisons en deux louages, rue du
Gros Horloge, paroisse Saint-Jean, Tun occupé par le sieur
Simon Gruslé, marchand plumnssier, l'autre par M. Le
Gendre, borné par les héritiers de la succession de
M. Scott, .... provenant de la succession de Jacques Chap-
pelier, cousin du vendeur, qui Tavoit acquis de messire
Adrien Le Seigneur^ sieur de Reuvîlle, conseiller du Roi
en ses conseils d'Etat et privé, président au Bureau des
finances de la Généralité de Rouen, en son nom et se fai-
sant fort de messire Raoul Le Seigneur, chevalier, sieur
d'AmoAtot, son frère, par contrat passé le 28 novembre
1643. »
Cette propriété appartenait à la famille Le Seigneur
depuis le 5 mars i565, date de l'acquisition qu'elle en avait
faite, de René de Laigle, docteur en médecine, et de demoi-
selle Ribault, sa femme, domici'iés en h paroisse Saint-
324
Laurent de Rouen. L'acquéreur, Adrien Le Seigneur, pour
lors marchand à Rouen, y avait ajouté plusieurs corps de
logis, cours, puits, jardins qui lui furent vendus, le 8 no-
vembre 1 584, par Jacques Austin, avocat en la Cour de
Parlement, fils unique et héritier de feu noble homme
Guillaume Austin, conseiller du Roi et général en la Cour
des Aides. Ces corps de logis ne paraissent pas, d'après
les titres, avoir eu de façade sur la rue ; nous n'avons pas
à nous en occuper.
René de Laigle et sa femme se disaient propriétaires du
tènement par eux vendu à Le Seigneur à titre de l'acqui-
sition qu'ils en avaient faite, le 9 juillet i56o, par clameur
de marché de bourse et délais à eux fait au droit de
lad. damoiselle Ribault, de Thierry Dupont, bourgeois de
Rouen, qui lui-même l'avait acquis de Marguerite Ribault,
veuve de Robert de Bauquemare, sœur et héritière de
défunt Jean Ribault, bourgeois de Rouen.
Avant les Ribault, cette maison appartenait à une famille
Le Roy.
Jean Le Roy, drapier, est cité comme paroissien de
Saint-Jean, dans un compte de 147 1.
Dans un autre compte de i533, il est question d'une
maison sise sur cette paroisse et dont étaient propriétaires
les enfants de Jean Le Roy.
Je suppose que la maison qui nous intéresse devint la
propriété des Ribault, par suite du mariage de Marion
Ribault avec Noël Le Roy, ancien trésorier de la paroisse
Saint-Jean, qui fut enterré devant Timage du Crucifix, en
l'église Saint- Jean, en 1542.
Ce qui n'est pas douteux, c'est que cette maison, connue
alors par l'enseigne du Coq, rue Vanterie, appartenait, le
3o mai i525, à Jean Le Roy, bourgeois de Rouen.
Que ce soient les Le Roy ou les Ribault qui aient fait
construire cette maison, le point intéressant à constater,
c*est que c'était une maison construite par des bourgeois
et pour l'usage de bourgeois, à la différence de l'hôtel
325
voisin, malheureusement disparu, qui paraît avoir été
construit pour Tusage d'une fomille aristocratique.
La séance est levée à quatre heures.
Le Secrétaire,
Vicomte R. d'Estaintot.
326
SÉANCE DU 28 DÉCEMBRE i883
La séance ouvre à deux heures et demie, sous la
présidence de M. de Beaurepaire, vice-président.
Sont présents : MM. J. Adeline, Billiard, Bouquet,
Félix, Gaston Le Breton, Lefort, Pelay, de la Serre,
Tabbé Tougard, Brianchon, secrétaire-adjoint.
Correspondance imprimée. — La correspondance
imprimée comprend : Annual report ofthe board of
régents of the Smithsonian Institution for the year
188 1, Washington, i883; — Annales de la Société
des Lettres, Sciences et Arts des Alpes-Maritimes,
T. VIII, 1882; — Mémoires de la Société des Anti-
quaires de la marine, t. XVIII, 1882-1883 ; — Bul^
letin des travaux de la Société industrielle d'Elbeuf
année i883, n° 3, 8 août-7 octobre.
Le Henri IV de la fontaine du Vieux-Palais, —
M. Brianchon donne lecture de la note suivante :
Qu'était-ce donc, au juste, que cette statue de Henri IV
qui décorait la fontaine du Vieux- Palais ? me demandait,
Tannée dernière, un de nos honorables confrères.
— Je ne sais pas ! lui répondis-je, selon mon habitude.
J'ai fait, depuis, quelques recherches, et, sans avoir
épuisé les sources d'information, sans même avoir eu le
temps ou la possibilité de recourir à toutes, si mon confrère
et ami, M. Billard, m'adressait encore aujourd'hui la même
question, voici ce que je lui dirais et ce que je demande, à
la Commission, la permission de lui soumettre.
Quand on parle de la statue qui surmontait la fontaine du
Vieux- Palais ou de la place Henri IV, on croit générale-
ment qu'il ne s'agit que de la seule et même représentation
d'un personnage unique. C'est une erreur. Il y en a eu deux.
327
La première statue de Henri IV, dont nous ignorons
l'auteur et Torigine, mais qui est certainement antérieure
à 1668, date de la première édition de Farin, est restée
debout jusqu'en 1780. La seconde, érigée en i782,.n*avécu
que dix ans.
Parcourons quelques documents :
Farin, dans la 3e édition de son Histoire de Rouen, t. I,
p. 27, s'exprime ainsi :
Source à' Yonville^ autrement dit de S. Filleûil. — Cette
source vie<it de la montagne de Pestet, proche Bapaume.
Sa première cuve ou citerne est voûtée de maçonnerie de
fond en comble. Elle a doure pieds de long et dix de
large. On y voit sur la porte les armes du Roi, de la Reine
et de la Ville, et, au dedans, les sources dont les eaux dis-
tillent de plusieurs endroits de la montagne, pour venir
tomber dans la citerne.
€ On commença à conduire Teau de cette source vers la
ville par des canaux souterrains. Tan i3io.
€ De cette source vient, sans compter les fontaines du
Jardin du Prudhomme ou Lieu de Santé ^ dts Jacobins, du
VieuX'Marchéy ùm Marché aux Veaux, de Saint- Vincent,
de la Poissonnerie du Pont et de Lisleux, — la fontaine
du Vieux-Palais, qui jette Teau par deux tuyaux, et qui
commença à couler Tan iSSg.
€ La masse de cette fontaine porte une grande figure
d'Hercule, armée d^une grosse massue, et ceint d'une peau
de lion. »
D'autre côté Guilbert, dans ses Mémoires biographiques
ft littéraires, publiés en 181 2, au nomJadoulle, écrit ceci :
« La destinée de JadouUe ne fut heureuse sous aucun
rapport. Peu fevorisé du côté des biens de la fortune, il
eut encore le chagrin de voir détruire de son vivant les
ouvrages qui lui avaient mérité, dans notre ville, la consi-
dération des amis des arts. Ces deux figures qu'il fit pour
l'église de Saint- Yon, le beau bas-relief représentant
l'Exaltation de la Croix qu'il exécuta pour le portail de
328
réglise de Sainte-Croix- Saint-Ouen, la statue pédestre
d'Henri IV qui ornait la fontaine de la place du Vieux-
Palais (statue qui avait six pieds de haut, et qui avait été
placée sur la fontaine, le 4 juin 1782), étaient des pro-
ductions de ce sculpteur.
€ Elles ont toutes été anéanties pendant la Révolution.
c II ne reste plus de cet artiste que deux bas-reliefs,
qui suffisent toutefois pour faire apprécier son talent. Celui
des deux où la Religion est représentée avec ses attributs
est au dessus de Tune des portes latérales de Téglise de
Saint-Ouen. L'autre, figurant la Charité, est placée sur
la principale porte de celle deTHôtel-Dieu. i
A quoi il convient d'ajouter les bas-reliefs de la &çade de
Tancien théâtre des Arts, signalés en 1879 par M. Sauva-
geot à la Commission, et recueillis par M. Maillet du
BouUay, au musée d'antiquités.
On lit encore, dans les Lettres sur la ville de Rouen ^
d'Alexandre Lesguillez, 1826, p. 89-90 :
« La fontaine du Vieux- Palais, située sur la place dont
elle porte le nom, date de 1559. Avant la Révolution, la
statue pédestre de Henri IV ornait cette fontaine, laquelle
aujourd'hui n'offre plus rien de remarquable. Cette statue
y avait été placée en 1782. On la devait à Jadoulle,
sculpteur distingué de cette ville. C'était un de ses
meilleurs ouvrages. Le prince y était représenté en habit
royal, couronné de lauriers, et appuyé sur un bouclier qui
portait cette devise :
Ma sûreté est dans le cœur de mes sujets
€ Aujourd'hui (1826), l'on voit la mousse et quelques
gramens se disputer la place où naguère l'on se plaisait à
contempler les traits du meilleur des rois. Si, lorsque la
tourmente révolutionnaire éclata dans notre ville, l'on fut
obligé de soustraire aux regards publics l'image d'un
prince chéri, Ton est généralement étonné que, depuis le
retour d(»s Bourbons, l'on n'ait pas songé à relever un
3^9
monument si cher à tous les cœurs français. Nous en
sommes d'autant plus surpris que, si nous sommes bien
informés, cette statue n'a pas été perdue pour tout le
monde, puisque, dit-on, elle orne un bosquet et une belle
propriété des environs de Rouen.
c Dans l'origine, c'était aussi la statue de Henri IV qui
ornait la fontaine du Vieux-Palais. Mais il était représenté
sous la forme d'Hercule, revêtu de la peau du lion de
Némée, et tenant une grosse massue dans sa main droite.
€ Cette idée n^était pas heureuse; car tout cet attirail ne
convenait guère à un prince qui, dans une circonstance
importante, avait dit aux Rouennais : Je ne veux d'autres
forteresses que dans le cœur de mes sujets, >
Enfin Nicétas Periaux, dans son Dictionnaire des rues
et places de Rouen, iSjOjVer^o, place Henri-Quatre, se re-
portant aux dires de ses devanciers, les résume ainsi :
«I La fontaine que l'on voit au centre de la place Henri-
Quatre, a été établie en 1 549. Elle est alimentée par les eaux
de la source d'Yon ville. Elle était surmontée d'une grande
figure d'Hercule armée d'une massue et ceint d'une peau de
lion, par laquelle on avait eu la prétention de représenter
le souverain.
« Le 4 juin 1782, cette figure fut remplacée par une
autre statue du même prince, en habit royal et appuyé sur
un bouclier. L'œuvre du sculpteur rouennais Jadoulle fut
abattue et mutilée le 5 octobre 1 792.
€ L'auteur des Lettres sur Rouen , -^ M. Lesguillez, -*
dit que cette statue orne actuellement le bosquet d'une
belle propriété des environs de Rouen. »
Ici, suspendant les citations, nous devons ouvrir une
parenthèse et donner place à quelques observations. Les-
guillez a raison quand il dit qu'une statue d'Henri IV,
provenant de la fontaine du Vieux-Palais, se trouvait, en
1826, dans c une belle propriété des environs de Rouen. »
Elle y est encore ; et c'est là que nous l'a montrée, il y a
quelques vingt ans un honorable conseiller à la cour de
33o
Rouen, M. Elie-Lefebvre, tombée de son piédestal, et gisant
toute mutilée dans les carrières de son château de Can-
teleu. Elle a été réparée depuis. Mais, lorsqu'il allègue
que cette statue de Henri IV est celle de Jadoulie, qui
avait représenté le prince « en habit royal, couronné de
lauriers et appuyé sur un bouclier, • Tauteur des Lettres
sur la ville de Rouen se trompe. Il n'est que trop certain
que le Henri IV de Jadoulie, comme Ténonce Nicétas
Periaux, fut c abattu et mutilé i, disons mieux, anéanti, le
5 octobre 1792, sans doute en vertu du décret du 24 août
de la même année, qui ordonnait de « retirer des rues et
places publiques, les tableaux, bustes et statues rappelant
Temblême de la royauté, » tandis que le primitif Henri IV,
exactement décrit par Lesguillez, « sous la forme d* Hercule,
revêtu de la peau du lion de Némée, et tenant une grosse
massue dans sa main droite, » est bien celui de Canteleu.
Cest bien le Henri IV, non pas précisément détrôné, mais
descendu de son piédestal le 4 juin 1782.
Mais comment cette statue de Henri IV, provenant de
[a fontaine du Vieux-Palais, est-elle arrivée aux mains de
la famille Elie-Lefebvre ? Comment est-elle entrée au
château de Canteleu ?
C'est ce qu'il nous reste à examiner.
J'en étais là de mes recherches, c'est-à-dire au résumé
de M. Nicétas Periaux, confirmé par M. Vauquelin dans
sa Notice sur Jadoulie (Précis de V Académie de Rouen,
i8o5), et par M. Edouard Frère, dans son Manuel du
bibliographe normand, lorsque des pièces importantes
tirées des archives du château de Canteleu par M. le baron
Henry Elie-Lefebvre, qui a bien voulu me les commu-
niquer, m'ouvrirent une voie nouvelle et me permirent de
compléter mes informations.
Voici ces pièces :
I . Extrait du Registre des délibérations des assemblées
de V Hôtel'de^ville de Rouen, pour l'année 1779. — Journal
des Eehevins,
33i
t Du dit jour vingt septembre mil sept cent soixante dix
neuf.
« En délibérant sur la requête présentée par M . Charles
Antoine Le Febvre, Conseiller Échevin de cette ville, ten-
dante à ce que pour Tutilitc de sa maison dont il est
propriétaire, scituée à RoQen riie des Charrettes, proche
du vieux palais, paroisse de Saint-EIoi, il lui soit accordé
une demi ligne d^eau à prendre sur le tuyeau de la fontaine
du vieux palais, dont Teau provient de la source de Saint -
Filleul, h ses obéissances d'en faire la conduite à ses frais,
et de paicr annuellement à la Recette de la ville vingt sols
de rente à tolérance ;
€ Lecture faite de ladite requête par le greffier secrétaire
de cette ville ;
t Oui le procureur du Roy parlant par M. de Boisville,
Conseiller Échevin;
« Les avis pris :
« Il A ÉTÉ ARRÊTÉ qu'll cst accordé à M. Lefebvre, et à ses
héritiers en ligne directe, tant qu'ils seront propriétaires
de la dite maison, une demie ligne d'eau à prendre sur le
tuyeau de la fontaine du vieux palais; à la charge par lui
d'en faire la conduite à ses frais et dépens, et de paîer
vingt sols de rente à tolérance à la recette de la ville à
courir du jour de Saint-Michel prochain.
Signé : « Lezurier. •
2. Extrait du Registre des délibérations des Assemblées
de VHôtel'de^ Ville de Rouen pour Tannée 1 780. — Journal
des Echevins.
c Du sept mars mil sept cent quatre vingt.
« Monsieur le Maire a représenté à la Compagnie que la
statue élevée à la gloire de Henri IV posée sur le massif
de la fontaine du vieux palais, étant dans un état de
caducité qui annonce sa ruine prochaine, il conviendroit
en faire placer une autre pour perpétuer la mémoire de
ce grand Roi, qu'en conséquence Messieurs du bureau
333
auroient fait dresser un plan du massif et de la statue à
remplacer, qu'ils soumettent à Texamen de l'assemblée -,
« Le dit plan vu et examiné ;
« Oui le procureur du Roi;
« Les avis pris :
c II A ÉTÉ ARRÊTÉ que ledit plan est agréé, et en consé-
quence Messieurs du Bureau autorisés de ùAre faire tout
ce qui conviendra pour la décoration de ce monument.
Signé : « Bigot de Sommesnil, » maire.
3. Extrait du Registre des délibérations des Assemblées
delHôteUde-Ville de Rouen pour Tannée 1780. — Journal
des Echeiins,
« Du vingt sept avril mil sept cent quatre vingt, au
bureau de l'Hôtel de Ville de RoUen, devant Messieurs les
Conseillers, Maire et Echevins de la dite ville, en présence
du procureur du Roy.
€ Sur le raport à nous fait par le sieur Jaddoule qu'il
avoit visité la statue d'HerCule, laquelle suivant l'opinion
vulgaire representoit Henri IV, et qui étoit sur la fontaine
de la place du vieux palais que la ville a fait démolir; que
cette statué étoit mutilée un peu à la tête, un bras cassé
qui avoit été réajouté, de sorte qu'il ne restoit que le tronc
et le bras gauche de bon, que dans cet état il n'étoit pas
possible qu'elle pût reservir sur la nouvelle fontaine que
la ville se propose de faire reconstruire sur les fondations
de l'ancienne, et qu'elle ne pou voit être placée que contre
un mur en y faisant un autre bras et des )ambes.
« M. Lefebvre Échevin se proposant de faire édiffier
contre le mur de la cour de sa maison, la fontaine que la
ville lui a accordée au mois de septembre dernier, a dit que
par vénération pour la mémoire de Henri IV, il luy feroit
plaisir de placer les débris de cette statue sur sa fontaine,
et a demandé que la ville voulut bien les lui céder sur esti-
mation ;
f Sur quoi il a été délibéré, d'une voix unanime, que les
débris de cette statué ne faisant point un objet de valeur,
333
seront donnés à M. Le Febvre, en considération de ce
qu'il se propose de contribuer à perpétuer la mémoire d'un
Roi chéri, en la faisant restaurer.
Signé : « Bigot de Sommesnil. »
Et en marge :
€ Statue de la fontaine du vieux palais représentant
Henri IV placée sur la nouvelle fontaine, le mardi 4 juin
1782. »
Là se bornent nos découvertes. Ce n'est pas tout ce
qu*on peut trouver ; mais c'est assez déjà pour répandre
sur la question une lumière certaine. La fontaine du Vieux
Palais a été successivement ornée de deux statues de
Henri IV, Tune, d'un artiste et d'une date d'origine égale-
ment inconnus, conservée et cédée à « M. Lefebvre l'aine »
en 1780; l'autre, détruite, de JadouUe, dont la durée se
limite du 4 juin 1782 au 5 octobre 1792.
C'est donc de la première seule que nous avons à nous
occuper.
Conformément à sa proposition faite et en vertu de l'au-
torisation reçue, l'échevin Lefebvre s'empressa-t-il de
• placer les débris de cette statue de Henri IV-Hercule sur
la fontaine édifiée contre le mur de la cour de sa maison »
qui appartient aujourd'hui encore à ses héritiers, c'est ce
que nous ne saurions dire. Tout ce que nous savons, c'est
qu'elle fiit cachée au moment de la Révolution, et que,
sous la Restauration, elle se trouva mise ou remise en
honneur dans le parc de Canteleu, puisque Lesguilliez, qui
écrivait vers 1826, constate le fait de l'existence d'une
statue, tout en errant sur son identité.
Jusqu'à quelle époque est-elle restée debout? C'est ce que
nous ignorons, mais probablement pendant assez peu
d'années, cette statue étant faite d'une pierre extrêmement
friable. Il y avait longtemps qu'elle était reléguée au fond
d'une carrière, lorsque le conseiller Elie-Lefebvre lui fit
remettre une jambe de plâtre, en 1872 ou 1873, et la
redressa de toute sa hauteur,, qui est de six pieds, selon
334
Guilbert, sur un piédestal dans lequel est enchâssée cette
inscription :
Le 2"; avril 1780^ par délibération du corps des Eche-
vins de Rouen^ cette statue d'Hercule^ qui représente^
suivant V opinion vulgaire de cette époque^ Henri IV^ Roi
de France^ a été donnée à M, Elie-Lefebvre alors Échevin^
en considération de ce qu'il se proposait de la faire res-
taurer et placer dans sa propriété^ pour perpétuer la mé-
moire d^un Roi cher à la nation (i).
M. le baron Elie-Lefebvre a bien voulu nous promettre
un dessin ou une photographie du Henri IV de Canteleu
pour les archives de la Commission des Antiquités.
Et maintenant que nous avons rendu à Jadoulle ce qui
appartient à Jadoulle, nous n'attendons plus que l'occasion
de rendre à X. ce qui appartient à X.
Ce nom du statuaire à qui Ton doit le Henri IV à peau
d'Hercule, du château de Canteleu, aussitôt que nous
l'aurons découvert, si nous le découvrons jamais, nous
n'aurons rien plus à cœur, à titre complémentaire, que de
le faire connaître à la Commission.
A moins, ce qui pourrait être, que la Commission ne le
connaisse déjà.
Observations, — M. Bouquet rappelle que le Hen-
ri IV, de Jadoulle, figure dans Millin (2).
(i) La status, à cause des événements politiques de 1789,
n'ayant pu être érigée dans la cour d'honneur de Thôtel de la place
Henri IV, sur une fontaine formant piédestal disposée contre un
mur pour la recevoir, a été transportée à Canteleu, où elle fut
dressée dans le parc du château de M. Elie-Lefebvre, vers la
hêtrée actuelle. On l'entoura de quatre bornes, reliées entre elles
par des chaînes, représentant des cônes tronqués, que l'on voit
encore auprès du Belvédère.
Vers t83o, cette statue fut enlevée, et, vu son état de déla-
brement et de vétusté, longtemps abandonnée, sans qu'on y fit
aucune réparation. — - Note du baron Henry Elie-Lefebvre.
(2) Millin (A. h.), Antiquités nationales ^ Paris, 1790- 1798,
335
D^âiitres reproductions du même Henri IV, toujours
en costume royal, de Lallemand (i), Laborde (2) et
Garneray (3), sont également signalées par MM. Ade«
Une et Pelay.
M. Gaston Le Breton confirme la réflexion de Guil-
bert sur la destinée malheureuse de la plupart des
productions du sculpteur Jadoulle. Les bas-reliefs du
Théâtre-des-Arts, récemment transportés au cloître de
Sainte-Marie, ne feront guère exception à la règle.
Eglise et clocher de Saint-Saëns. — M. Lefort
présente un intéressant rapport sur la réfection du
clocher et incidemment sur la restauration de Téglise de
Saint-Saëns.
Chapelle de Sainte-Catherine ou de Saint-Brice, à
la Cathédrale. — M. Le Breton appelle l'attention de
la Commission sur Pinterruption des travaux de la
chapelle de Sainte-Catherine ou de Saint-Brice, à la
Cathédrale. Il est à désirer, observe notre collègue,
qu'une restauration, si bien commencée, soit reprise
et achevée le plus tôt possible.
Eglise d'Eu. — M. Tabbé Tougard signale à la
Commission Pétat inquiétant, au moins dans quelques
parties, de la belle abbatiale d'Eu, que Tabbé Cochet
plaçait au premier rang de nos monuments diocésains
les plus remarquables. Au rapport d'un de ses con-
frères, M. Tabbé J. Dubois, les voûtes du transept pré-
sentent des taches verdâtres, indices d'infiltration d'eau,
(i) Lallemand, Vue des Tours du Vieux-Palais de la ville de
Rouen.
(2) Laborde (de), Description générale et particulière de la
France, Paris, Lamy, 1781-1792.
(3) Garneray, le Vieux-Palais de Rouen.
336
faisant craindre à la fois pour la préservation du mo-
nument et pour la sécurité des fidèles. De plus, la
restauration de la magnifique abside reste toujours à
rétat de projet. Cest un contraste particulièrement
fâcheux avec le parfait état de la nef, pour laquelle des
allocations assez récentes se sont élevées à 80, 000
francs environ.
La (Commission objectera peut-être, ajoute M. Tabbé
Tougard, qu'il ne lui appartient pas de prendre Pini-
tiative d'une demande qui doit partir des administra-
tions locales. Mais il lui est toujours possible de jeter
un cri d^alarme et d'éveiller sur ce point la sollicitude
de Tautorité départementale.
Notre collègue, M. Lefort, architecte du département,
veut bien se charger de transmettre à son prédécesseur,
M. Sauvageot, également notre collègue et architecte
diocésain, la réclamation de M. Tabbé Tougard con-
cernant Téglise de la collégiale-abbaye, dédiée à saint
Laurent de Dublin.
La Tour de l abbaye de SainUAmand, à Rouen. —
M. le Président donne lecture d'un Mémoire, suivi de
notes, sur la reconstruction de l'ancienne tour de
Péglise abbatiale de Saint- Amand, à Rouen, dont la
Commission est unanime à réclamer Tinsertion inté-
grale dans son Bulletin.
L'abbaye de St-Amand de Rouen possédait, au xvi« siècle,
une église pour ses religieuses, qui faisait suite à une
église spécialement affectée à l'ofRce paroissial.
Cette église conventuelle était ancienne : elle datait de
Tannée 1254. Elle mesurait, en longueur, 90 pieds ou en-
viron, à prendre depuis la séparation de Tcglise paroissiale
dite alors le Petit-St.-Amand jusqu'au bout du chœur de
ladite église conventuelle, en y comprenant l'épaisseur des
33;
murailles. Sa largeur était de 32 pieds de dehors eh dehors.
De chaque côté de cette église, il y avait une chapelle (je
crois qu'il faut entendre par là un bras de transept accom*
pagné d'un autel), de 24 pieds de longueur sur 22 pieds de
largeur.
Le tout était voûté « en croisée d'ogyve avec arcs dou-
bleaux. > Ce sont les termes d'un document du temps, et
je les emploie à dessein parce que, de nos jours, on a
donné au mot ogive un sens qu41 n'avait pas pour les
anciens architectes.
Entre le chœur et la nef s'élevait une tour de pierre de
80 pieds de hauteur, à compter du pavé jusqu'aux dalles,
revêtues de plomb et formant terrasse, sur lesquelles était
posé un clocher de charpente, couvert d'ardoises, de 90
pieds de hauteur, avec un beffroi où avaient été suspendues
6 à 7 cloches, tant grosses que petites. A Montivilliers,
nous avons vu les religieuses se plaindre de l'ambition du
curé et des paroissiens de St.-Sauveur qui s'étaient avisés de
faire fabriquer des cloches dont la voix couvrait la voix
de celles du couvent. Les religieuses de St-Amand avaient
pris leurs mesures pour que les paroissiens, leurs sujets,
ne leur infligeassent pas pareille humiliation.
La tour était portée, suivant l'usage, sur les quatre pi-
liers de la croisée.
Au commencement de l'année i Syo, on conçut de Tin-
quiétude pour la solidité de cette tour.
Guillemette de St-Amand, pour lorsabbesse, fît appel, le
28 janvier, aux principaux ouvriers de la ville.
C'étaient les maçons Jacques Channevière, Pierre Lau-
rens, Jacques Tourmente, Jean Vanier, Augustin De Ry,
les charpentiers Guillaume Cousture, Claude Gigonde,
Martin Cousture. Ils vinrent sur les lieux et procédèrent
à l'inspection de l'édifice, en présence de l'abbesse, de plu-
sieurs gentilshommes et bourgeois de la ville.
Ils constatèrent c une petite ruine» à quelques piliers de la
tour, et ne parurent pas y attacher une grande importance.
338
Mais quelques jours après, lorsqu'ils revinrent pour aviser
aux travaux de consolidation nécessaires, le mal avait bien
empiré ; il était même devenu incurable. Ils reconnurent
que trois des piliers de la tour s'étaient totalement éboulés
et froissés depuis le fondement jusqu'aux chapiteaux sur
lesquels s'appuyaient les voûtes. Ils déclarèrent qu'il n'y
f avoit moyen de retenir iceulx piliers, considéré le brief
et éminent danger qui estoit en iceulx, qu'il n'y avoit
aucune assurance, ad joindre que iceulx piliers n'estoient
faicts que de petit bloc ou mouellon sans aucune ligature. >
Leurs prévisions, cette fois, n'étaient que trop fondées.
Le lundi 7 février, vers 7 ou 8 heures du soir, la tour, qui
était composée, jusqu'à la terrasse ou plate -forme, de
bittes et grosses pierres de taille, s'écroula en écrasant
l'église et en causant c de notables abattemens et dom-
mages, tant au cloistre, dorteuil, chapitre, chambres, que
autres plusieurs endroits d'icelle abbaye, pour le grand
estonnement que telle et sy pesante masse, comme estoit
ledit clocher, avoit faict en tombant. >
L'abbesse, effrayée de la responsabilité qui pesait sur
elle, eut recours, dans cette circonstance, à Tautorité sé-
culière. Le lieutenant général du bailli, Jean de Brèvedent,
se transporta sur les lieux, accompagné de Thomas
Maynet et de Jacques Cavalier, l'un avocat, l'autre pro-
cureur du Roi. Après avoir constaté la gravité des dégâts,
et vérifié que, pour les besoins du culte, les religieuses
pouvaient provisoirement disposer d'une chapelle située
dans Tenceinte de leur monastère, ces magistrats com-
mandèrent à des hommes de l'art c de veoir, marcher et
visiter la ruine en question et d'apprécier et estimer ce
qu'il en pourroit coûter pour réédifîer et remettre l'église
en rétat qu'elle estoit avant l'accident. >
Les experts choisis furent, pour la maçonnerie : Jacques
Chaneviêre, Pierre Laurens, Nicolas Gellouys et Jacques
Tourmente: pour la charpenterie, Guillaume Couture,
Robert Langlois, Martin Couture.
339
Leur rapport fut rédige le 26 février. Les travaux de
reconstruction furent évalués, par eux, à 25. 5oo liv. pour
la maçonnerie; à i5. 000 liv. pour la charpenterie. Total
40. 5 00 livres.
Ces constatations, faites authentiquement par les officiers
royaux, et le rapport des experts nommés par eux, ser-
virent de fondement à la demande que formulèrent, peu de
temps après, les religieuses, à Teffet d'être déchargées de
tous dons gratuits, décimes, emprunts, pendant une pé-
riode de vingt ans, moyennant qu'elles employassent ce
temps à la réédification de leur église.
En attendant une décision définitive sur cette demande,
le Conseil d'État ordonna aux officiers royaux de les tenir
en suspens et surséance quant aux réparations à faire, et
leur fit défenses de les y contraindre par la saisie de leur
temporel, 2 avril 1 569.
Le principal intérêt des documents dont je me suis
borné à donner l'analyse est de nous fournir quelques
noms d'architectes et de charpentiers, et de nous renseigner
sur certaines formalités administratives, peu connues ou
peu remarquées.
Je ne saurais dire si l'église fut complètement recons-
truite, ou si, contrairement à l'avis des experts, d'abord
consultés, il y eut moyen de se contenter d'une simple
restauration. Ce qu'on peut affirmer, c'est qu'au dernier
siècle, l'église paroissiale ne faisait plus suite à l'église
conventuelle, qu'elle s'étendait parallèment, à quelque dis-
tance de celle-ci, en se rapprochant de la rue St.-Nicolas;
qu'elle s'était accrue d'une ancienne chapelle, dite la cha-
pelle St.-Léonard, d'abord réservée aux religieuses, affectée
plus tard à la corporation des brasseurs, et séparée de l'é-
glise paroissiale par une muraille qu'on abattit avec la
permission de l'abbesse, en i635.
Ce fut, croyons-nous, dans cette chapelle que l'office
divin se célébra pour les religieuses, dans les années qui
suivirent la chute de la tour.
Les archives de Tabbaye de St.-Amand sont à peu près
muettes en fait de renseignements archéologiques et artis-
tiques. Peu de comptes ont été conservés, et ce qu'on
peut relever dans ceux qui existent encore se réduit à
peu de chose.
Compte de St.-Amand, du 3 nov. 1441 au 3 nov. 1442.
« Pour les Angleys de Se Katherine, lesquieux avoient
pris et arresté le ver (verrat) de Tostel de Boes, lequel
s'en venoit en ceste ville tout seul, pour leur vin, le xxvi*
jour de novembre, pour ce, ix s.
« Pour un pot de vin, à un frère qui fist le sermon la
veille de TAsompcion, xvii d.
f Pour avoir levé une cerreure d'un coffre estant en la
chapelle S. -Pierre, pour avoir les lettres patentes du Roy,
notre sire, pour le fait du procès de la cure d*Omon-
ville, iv d. t.
f Pour avoir des haveis et de Terbe pour l'église, le jour
du S. Sacrement, vi d.
« A. Messire Guieffroy Coulombel, beaupère de chiens,
pour ses gages dudit office, tant du temps passé que sur
cette présente année, Ix s.
c Pour les Innocens de N. D. de Rouen, à eulx.
donné, ii s. vi d.
« Pour la façon des nates de l'église, vi s.
« Pour ung augustin, qui fist le sermon le xvii*' jour de
mers, pour un pot de vin à lui présenté, pour ce, xx d.
f Pour le pain de Cène, et pain à chanter, v s.
< Pour xxxi poures le jour de lad. Cène, à chacun iii d.,
vallent vii s. ix d.
€ Pour dragée pour la d. Cène, ix d. (1).
(i) Dans le même compte : « Au prévost de Paris, lequel a
épousé la femme qui fut Messire Guy le Bouteilier, pour reste de
gregnieur somme d'une obligation en quoy Téglise étoit obligiée.
« À Messire Regnault le jeune, curé de Caudebec, pour reste
d'argent qu'il avoit preste, à notre grant besoing, pour avoir du
34 î
€ Réception de l'abbesse, madame de Vieupont : 9 février
1544 (v. s.) •< Payé au porteur de la tapisserie de M.
d'Ouessel, xii d.
€ Aux brouettiers . qui apportèrent de la tapisserie de
chez M. d'Escroville, xii d.
c Aux brouettiers qui ont reporte la tapisserie pour la
rendre aux maisons ou Ton l'avoit empruntée pour la bien-
venue de Madame, iii s.
« Mercredi des Saine tes cendres 27 février, aux cham-
berières, pour avoir du sablon d'Estampes, pour nettoyer
la vaisselle, xii s.
c 1 2 mars, pour ung chandelier achepté pour Madame,
et deux fourquettes, Tune pour la cuisine de Madame, et
Taultre pour le couvent, xi d.
« 20 mars, à un painctre qui avoit painct une bourse
pour Madame, v s.
€ 20 avril, à deux chantres et joueurs de violles qui
jouèrent devant Madame, fut donné par le commandement
de Madame, ung teston, xi s.
« 22 avril, pour une demye douzaine de voerres achap-
tés par Monsf le vicomte, v. s.
« 3 may, pour une pdire de quartes à jouer, xv d.
« i3 mai, pour une renge de la bride de la haquenée,
pour aller en Bretagne quérir Madame Padmiralle, xii s.vid.
« A ung charron pour avoir refaict le chariot branslant
de Madame, pour aller en Bretaigne, xviii s
c Le lundi des Rogacions 19^ jour de may, M. de Vieu-
pont et M^ie Renée allèrent à Bos faire tondre les moutons:
à Bonsecours, en allant es oblacions où ils ouyrent messe,
vi d.
« 1 1 juin, à Jehan Jolis, pour deux bastons de fresne pour
faire une litière à bras à porter Madame au Mont-aux-
malades, pour changer d'air, viii s.
grain, poui la chière année, dont avoit en gage une tasse d*argent
et deux choppinectes de l'église. »
342
« Le vendredi, 20«du moys de juing, payé à deux femmes
qui lavèrent les lessives de céans à raison que les chambe-
riéres estoient occupez à la chambre où Madame, que
Dieu absoulle! labouroit à la mort, laquelle remist son
espoir à Dieu notre créateur, et ce dit jour à dix heures
du matin, ii s.
c La mise taicte pour Tinhumation de feue Mi°c de
Vieupont, que Dieu absoulle, le samedi 21^ jour dudit
moys de juin audit an.
€ Premièrement à six carmes qui veillèrent la nuiyt
auprès le corps de ma dicte dame, et se tindrent jusques
à l'heure de l'inhumation ; et encores à six aultres qui
célébrèrent messe a esté payé Iv s.
c A six augustins qui célébrèrent messe le dit jour et
aux sept aultres qui portèrent le corps à Téglise, xlv s.
c A six cordeliers qui semblablement célébrèrent messe
ledit jour, xv s.
« Et par semblable à six jacobins qui célébrèrent messe,
ledit jour, xv s.
« A traize enfifans de S. Nicolas qui portèrent les tor-
ches, XX s.
«.Pour une paire de gantz, ii s. vi d.
c Pour du feure de seigle, pous espandre à l'église, et
par les voyes pour y aller, iii s.
c En esplingues noirres et clou pour attacher les arma-
ries et aultre clou baillé au fossetier, xii d.
« Une paire de botines violectes, ix s.
« Pour le contre-autel et rideaux de la passion, iii s.
« Au paintre pour dix douzaines d'escuchons, iiii 1. 1.
« A huit presbtres qui célébrèrent messe le lundy en-
suyvant, xx s.
c Le samedi, 26^ de juillet 1544, Madame de Maubisson
arriva à soupper, qui yenoit de sa maison de Maubisson,
pour donner ordre et wider les commissaires qui estoient
en ceste maison, payé pour une douzaine de voirres à pied
et une esguiere, viii s. vi d.
343
€ Le vendredi, Séjour du mois d'aoust, à une venderesse
de voyrres et de bouteilles, par le commandement de M. le
viconte, xii s.
c Le 1 2 novembre, à maistre Laurent, pour bailler à ung
homme de Sainte Katherine, pour les droicts que a ung
religieux le jour qu'il est mis en terre, pour ce, xx d.
« Le 24 novembre, à Boyart, pour ung sommier qu'il
mistàPéglisedeS. Amand, quisert à porterie cruciiiîement,
le moulleure, et avoir quis le bois et levé comme il
est, vii 1. X s.
« Le jour S« Katherine, au bouUenger de Chappitre pour
le pain qui fut porté a Tabbaye de S<> Catherine, ainsi que
on a de coutume, pour ce, x s.
€ Le 8 février 1 544 (v s.), au clerc qui joua d'unes re-
galles le jour de S. Amand, et si vint jouer céans, pour
ce, V s.
€ 9 mars 1 644 (v s.) , pour six grands voyrres et une
couppe, V s. vi d.
€ A Vastel, orphèvre, pour une petite chaîne qu'il a
faicte pour porter des heures, xxx s.
€ II oct. 1545, à maistre Guillaume de Dernestal qui
avoit joué des rigalles par deux jours, 44 s.
€ A son homme, 5 s.
< A soupper, un gallon de vin clairet, vi s.
€ Le 18, à ung homme qui aida à apporter la tapisserie
de M. d'Oessel. iii s.
« 10 novembre i545, à ung paintre, pour avoir doré la
pomme du ciel de lict de camp de Madame, vii s. vi d.
€ 20 novembre 1 545, à Nicolas Gosselin, pour xiv voerres,
viii doubles et six simples, et pour son salaire d'avoir gardé
la porte, le jour du banquet de Madame, liv s.
« 2 1 novembre 1 545, à Ancellot du mestier d'orfèvrerie
pour s'enquérir et faire savoir à tous ceulx du mestier que
Madame avoit adiré une estuve en façon de pomme à
tenir en la main, présent Abreham le Tapissier, v s. >
Dans les pièces de comptabilité du commencement du
344
xviiic siècle, je signalerai plusieurs quittances d'un ingé-
nieur très connu à Rouen par ses travaux aux fontaines et
au pont de bateaux, le frère Nicolas Bourgeois, augustin ;
le devis de la réédifîcation de la grande infirmerie sur les
parloirs, de la construction en neuf de l'infirmerie de la
petite vérole, de la chapelle des malades dédiée à S. Claude
et de riniirmerie des sœurs, 1738, 1743.
Ces travaux furent entrepris par ordre de l'abbesse
M^ie de Lorge, qui mourut le 21 oct. 1745, âgée de 5y ans.
On note que les frais du deuil et de Tenterrement s'éle-
vèrent à 2.2 II 1. et qu'elle fut enterrée dans Téglise à la
place des sœurs vis-à-vis la Sainte Vierge.
m
Communication est donnée par M. Brianchon d^une
note concernant les bas-reliefs dits de Michel- Ange.
Deux bas- reliefs en marbre, mutilés, mais d'une grande
beauté, sont exposés en ce moment au Havre, chez
M. Legi^nd, tapissier, rue de Paris. Ces sculptures pro-
viennent du tombeau de Claude de Lorraine, duc d'Aumale,
premier duc de Guise, mort et inhumé à Join ville en i55o.
Une tradition les attribue à Michel Ange. Mais ils
paraissent être sortis, en réalité, du ciseau de Dominique
Florentin. Ils étaient entres, il y quelque vingt ans, dans
la collection de feu M. Délié, ancien notaire au Havre,
retiré à Manéglise, près Montivilliers, où l'un de nos col-
lègues, M. Roëssler, les avait pu visiter et signaler dès 1870.
La séance est levée à quatre heures.
Le Secrétaire-Adjoint,
Brianchon.
Roiien. -^ Imp. E. Cagniard, rues Jeanne-Darc, 88, et des Basiuge, $.
PROCÈS-VERBAUX
DE LA
COMMISSION DES ANTIQUITÉS
DE LA SEINE-INFÉRIEURE
PENDANT L'ANNÉE 1884
SÉANCE DU 28 FÉVRIER 1884
La séance ouvre à deux heures^ sous la présidence
de M. Ch. de Beaurepaire^ vice-président.
Sont présents : MM. Adeline, Baudry, de Belle-
garde, Billiard, du BouUay, Bouquet, Gouellain,
l'abbé Loth, Pelay, de la Serre, l'abbé Tougard, de
Vesly et Brianchon, secrétaire-adjoint.
Le secrétaire-adjoint donne lecture du procès-ver-
bal de la dernière séance du 28 décembre i883.
M. Paul Baudry fait observer que, s'il n'assistait
point à la dernière séance, c'est qu'il n'a pas reçu de
lettre de convocation.
La correspondance imprimée comprend : Société
archéologique de Bordeaux, t. VIII, i" et 2« fasci-
cules, mars et juin 1881 ; — Bulletin de la Société
des sciences historiques et naturelles de Semur
(Côte-d'Or), i8« et 19* années, 1 881-1 882 ; — iî<per-
toire des travaux historiques contenant Vanalyse
346
des publications, faites en France et à Pétranger,
sur Vhistoire^ les monuments et la langue de la
France pendant Vannée 1882, t, II, n»» 2 et 3, i883 ;
— Mémoires de la Société d'émulation du Doubs,
5« série, Ville vol. 1 882-1 883; — Bulletin de la
Société des amis des Sciences naturelles de Rouen^
19^ année, i^ semestre i883; — Mémoires de la
Société des antiquaires du centre, armoriai général,
XII« volume, i" fascicule, i883 ; — Bulletin de la
Société archéologique et historique de V Orléanais,
t. VIII, no 117, 2« semestre de i883 ; — Bulletin du
comité des travaux historiques et scientifiques^ sec-
tion ^histoire et de philologie, i883, no I ; — Tables
des Bulletins et Mémoires publiés par la Société des
antiquaires de laMorinie, par E. Dramard, 188 3;
— Bulletin historique de la Société des antiquaires
de la Morinie, 32« année, nouvelle série, 128® livrai-
son : octobre, novembre, décembre 1883-1884,
Réunions de la Sorbonne. — Par sa lettre circulaire,
en date du 1 5 octobre 1 883, M. le directeur des Beaux-
Arts, donnant avis que la réunion annuelle des délé-
gués des Sociétés des Beaux-Arts des départements à
la Sorbonne aura lieu, en 1884, à Tépoque accoutu-
mée, invite le président de la Commission des anti-
quités de la Seine-Inférieure à faire un pressant appel
aux membres de la Commission pour faire envoyer au
Comité des Beaux-Arts, en février 1 884, un ou plusieurs
mémoires ayant trait à Thistoire de Tart dans notre
région.
Les Arènes de Sentis. — Afin d'achever le déblaie^
ment de Tamphithéâtre gallo-romain découvert à
Senlis par le Comité archéologique, M. le Préfet de
347
rOise vient d'autoriser rémission de 10,000 billets de
loterie à 5o centimes. M. Am. Margry, secrétaire de
la Commission de la loterie, adresse, au nom du
Comité archéologique de Senlis, une lettre-circulaire,
en date du 1 6 février 1 884, à M .le Président de la Com-
mission des antiquités de la Seine-Inférieure, pour le
prier de s'intéresser à la restitution d'un monument
véritablement historique, et de lui donner un précieux
témoignage de bonne confraternité, en concourant à la
souscription dans la mesure de ses ressources. Le
Comité de Senlis s'empressera d'envoyer le nombre
de billets qu'on lui fera l'honneur de lui demander.
Église de Saint-Jeari'd'Abbetot. — M. le Vice-Pré-
sident saisit la Commission, aux termes d'une lettre
de M. le Préfet dont il donne lecture, en date du 21 fé-
vrier, de l'examen du dossier relatif au paiement des
travaux exécutés, en 1880, à l'église de Saint-Jean-
d'Abbetot.
Ce dossier contient :
1° Mémoire de Valladier fils, entrepreneur à Rouen,
du 3o septembre 1880, approuvé par M. le Préfet le
3o mars i883 ;
20 Mémoire de Gustave Dufils, entrepreneur à Yve-
tot, du 9 avril i883, approuvé par M. le Préfet le
3o mars suivant ;
30 Lettre de M. Dufils à M. le Préfet, du 1 3 décem-
bre i883;
40 Lettre de M. Héquet, maire de la Cerlangue, à
M. le Sous- Préfet du Havre, du 20 décembre i883 ;
50 Délibération du Conseil municipal de la Cerlan-
gue^ du 1 2 janvier 1884 ;
34«
60 Lettre de M. le Maire de la Cerlangue à M. le
Sous-Préfet du Havre, du 24 janvier 1884 ;
70 Lettre de M. Grenier, sous-préfet du Havre, à
M. le Préfet.
Après avoir pris connaissance des pièces concernant
les travaux exécutés en 1880 à Téglise de Saint-Jean-
d' Abbetot et en avoir délibéré ;
Considérant que les dépenses, quoique entachées à
Porigine d'une irrégularité qui ne devra pas se renou-
veler, étaient nécessaires, et que Texécution des tra-
vaux ne laisse rien à désirer;
La Commission est d^avis qu'il y a lieu de solliciter,
de la bienveillance de M. le Préfet, l'allocation, sur les
fonds départementaux, d'une somme supplémentaire,
soit de 1,901 fr. i3, y compris les honoraires de l'ar-
chitecte, évalués à 143 francs, soit de 1,758 fr. i3,
non compris lesdits honoraires, destinée à parfaire le
solde des dépenses faites pour réparations exécutées
en 1880 à réglise Saint-Jean-d^Abbetot.
Extrait du procès-verbal sera transmis d'urgence à
M. le Préfet par les soins du Secrétaire de la Com-
mission.
Objets en bronze et enfer dragués dans la Seine.
— M. Léon de Vesly met sous les yeux de la Com-
mission différents objets provenant des dragages de
la Seine, dirigés par M. Tingénieur G. Lechalas.
Parmi les objets, désignés par M. de Vesly, dans
Tordre chronologique, il faut citer :
Un poignard, deux javelots et une épée pistilliforme
de répoque morgienne ; une belle pointe d'épieu de
l'époque larnaudienne.
Après Tâge de bronze, le fer donne de curieux spé-
cimens.
349
Cest d^abord une bouterolle de fourreau datant de
la conquête romaine ; puis des scramasaxes, des épées
normandes et deux fauchards, dont Tun peut remon-
ter au xin* siècle, tandis que l'autre est certainement
du xv«. Enfin un fer de lance, couvert de dessins, et
plusieurs pointes de flèche, terminent la série des ob-
jets provenant du bief d'Oissel et choisis par M. de
Vesly pour être soumis à l'examen de la Commission.
M. Pelay demande à M. de Vesly s'il peut fournir
quelques indications sur les emplacements oîi ces ob-
jets ont été extraits du lit du fleuve.
M. de Vesly répond que les deux points qui ont
fourni la plus grande quantité d'armes sont :
1° Un passage situé à l'aval du pont d^Oissel et cor-
respondant à la descente des Authieux ;
2° Le Câtelier ou Clos-Gosse, vis-à-vis le château
de Bédanne, où l'on a pratiqué un dragage en amont
du banc Saint-Martin.
Au Clos-Gosse on a découvert, il y a quelque vingt
ans, des sépultures franques. Plusieurs auteurs et no-
tamment notre collègue, M. Tabbé Tougard, disent
qu'il y existe un tumulus, et la tradition y voit le fom-
beaud*un chef. Quant à Bédanne, M. de Vesly croit
que le nom de ce hameau, voisin de Tîle d'Oissel
[VOscellum des Normands), est la traduction de
Beccus Danorum, la rivière des Danois.
M. de Beaurepaire remercie M. de Vesly de son
importante communication.
Une discussion critique, à laquelle prennent part
plusieurs membres de la Commission, et notamment
MM. Maillet du Boullay, l'abbé Tougard, Pelay,
Tabbé Loth et Gaston Le Breton, s^engage sur les
objets anciens dragués dans la Seine et qui s'élèvent
35o
jusqu^à présent, ajoute M. de Vesljr, au nombre d'en-
viron cinquante. Il serait à désirer que ces objets, dont
s'est entretenu particulièrement M. le Préfet avec un
des membres de la Commission, fussent déposés tous
au Musée départemental. Mais la question de droit se
précise ainsi : tous les objets trouvés hors de Teau,
épars ou enfouis sur la berge même du fleuve, appar-
tiennent au département, tandis que ceux que Ton
recueille au fond du fleuve, c^est-à-dire sous Teau,
sont du domaine de TÉtat. En conséquence, la Com-
mission ne peut que renouveler un pressant appel à
la bienveillance, qui ne lui a jamais fait défaut, de
MM. les Ingénieurs préposés aux travaux de dragage.
Déjà M. Tabbé Lx>th a devancé la pensée de la Com-
mission en conférant de ces découvertes avec M. Le-
chalas, qu'il a trouvé animé des meilleures disposi-
tions.
M. Le Breton propose de placer, sur les objets dra-
gués cédés au département, la mention suivante :
Donné par MM. les Ingénieurs au Musée d'anti-
quités.
En résumé, la Commission charge notre collègue et
directeur du Musée d'antiquités, M. Maillet du Boul-
lay, d'être l'interprète de ses vœux auprès de l'admi-
nistration des ponts-et-chaussées, et de recommander
de nouveau à sa bienveillance la double cause de This-
toire normande et de notre collection départemen-
tale.
La Commission fera adresser, en outre, par son
secrétaire, à M. l'ingénieur Lechalas, une lettre de
remercîments.
Devant d'autel du XVIP siècle. — M. Gouellain
35i
donne quelques détails sur un devant d'autel prove-
nant de Péglise Notre-Dame-du-Val, canton de Beuz&-
ville, arrondissement de Pont-Audemer (Eure), offert
au Musée d'antiquités par MM. A. Faroult et P.Tou-
tain. Ce devant d^autel, en bois sculpté et doré, est
orné, au centre, d^un médaillon représentant la Cène.
Il appartient à la seconde moitié du xvn« siècle.
Le manoir Méry. — M. Paul Baudry donne lec-*
ture de la note suivante : ,
LE MANOIR MliRY
Les travaux du chemin de fer d*Orléans, qui ont cul-
buté presque toute la partie ouest de Saint-Sever, ont fait
disparaître Tancienne rue de la Petite- Chaussée et par
cela même un vieux manoir qui avait accès sur la rue.
Ce manoir, qui a plusieurs fois exercé le pinceau des
artistes, était séparé de la rue par un fossé que Ton fran-
chissait au moyen de deux petits ponts, dont un couvert.
Entre ces ponts, une claire-voie s'appuyait sur deux piliers
supportant des chiens sculptés en pierre, que plus d'un
amateur s'était proposé de joindre un jour à sa collection;
mais que leur possesseur, à juste titre, s'est réservé au
moment de l'expropriation de l'immeuble.
A l'intérieur du domaine, une avenue de tilleuls déno-
tait le soin et la régularité qui avaient présidé à la dispo-
sition d'un des jardins de plaisance dont le ^ubourg
Saint-Sever offrait autrefois et offre encore aujourd'hui
de nombreux spécimens.
Deux principaux corps de bâtiment, placés parallèlement
à la rue, non loin de l'entrée, se composaient chacun
d'une construction accompagnée, à droite et à gauche, de
paiv liions moins élevés que la construction centrale. Les
bois de charpentes étaient essentés. Quelques épis en
plomb pouvaient remonter au règne de Louis XIII.
?5a
La partie centrale du corps de bâtiment situé vers le
nord renfermait une salle haute décorée, sans doute à la
fin du xviii* siècle, de motifs en plâtre représentant des
lettres initiales et de petites figures dans des médaillons.
Dans la partie basse, attenante au sud de cette partie cen-
trale, on remarquait un plafond divisé en compartiments,
des fieurs modelées en plâtre sur le mur de séparation, et,
sur chacune des faces est et ouest, une sorte d'écusson
oval, tenu par un aigle, et chargé de deux poissons, avec
trois fieurs sortant d'une même tige.
Le manoir de la Petite-Chaussée était entré vers 1743
dans la famille Méry. Au moment de rétablissement du
chemin de fer, il appartenait encore à Tun des membres
de cette honorable famille.
Françoise Blondel, qui avait épousé en 171 7 Nicolas-
Claude Méry, négociant, paroisse Saint- Vincent, s'y était
retirée à cause du bruit de la ville, qu'un long et doulou-
reux état d'infirmité lui rendait insupportable. Mais,
comme elle y était trop éloignée de toute église pour ac-
complir ses devoirs religieux, son mari avait demandé à
Mgr Nicolas de Saulx Tavannes, archevêque de Rouen, et
avait obtenu le 6 septembre 1758, la permission d'y établir
une petite chapelle ou oratoire privé.
Les enquête et rapport préalables, présentés à l'arche-
vêché, portent que le local proposé pour l'établissement
de l'oratoire est muni des objets nécessaires à la célébra-
tion du culte, qu'il est près du corps de logis à gauche, que,
par sa construction et sa propreté, il semble destiné à
Tusage que Ton désire, et qu'il sera orné d'un plafond très
propre, sans aucun logement au-dessus, ni communica-
tion avec une grande salle existant à côté.
La permission comprenait celle de faire célébrer une
basse messe toutes les fois que M™« Méry aurait dévotion
de l'entendre, à l'exception des jours de fêtes solennelles
et de la fête patronale, jour où l'on ne pourrait célébrer
la messe sans une autorisation écrite. En outre, les messes
353
ne devaient pas être dites aux heures de l'office paroissial,
auquel les domestiques et les autres personnes, non infir-
mes et empêchés, étaient tenus d'assister. Dans tous les
caS) la permission n'avait d'autre durée que celle de Tin-
fîrmité ou de l'existence de M™« Méry.
Charles- Nicolas Blondel, d'Hardouville, prêtre curé de
Cidetot, doyen du doyenné de Pavilly, avait été chargé de
la bénédiction du modeste sanctuaire, et nous croyons
avoir retrouvé la place de celui-ci dans le pavillon situé
au sud du bâtiment septentrional. De même que le bâti-
ment auquel il était attenant, ce pavillon se trouvait en
effet à gauche par rapport à l'entrée. Il était orné d'un
beau plafond et sans logement au-dessus.
Si peu considérable que soit ce souvenir local, nous
avons pensé qu'il serait peut-être permis de lui accorder
une courte mention.
Urne à ustion romaine, — M. Billiard présente à
la Commission une belle urne cylindrique en verre,
trouvée àOuainville, près Cany, vers 1820, en labou-
rant la terre, par M. Gédon, fermier de M. Huë-Ba-
nois, de Bolbec, et offerte, le 22 janvier dernier, par
M. Huë-Quesnel, aussi de Bolbec^ son petit-fils, au
musée d'antiquités.
Cette urne, d^une forme et d'une dimension uniques,
était remplie d^ossements incinérés. La pâte est lisse
et sans nom de verrier. Sans l'authenticité avérée de
son origine, on croirait plutôt cette urne de fabrica-
tion moderne. Elle doit appartenir à la dernière pé-
riode de Pustion.
Des remercîments sont adressés au donateur.
Arcade romane. — La propriété située à Rouen,
dit M. Pelay, ancienne rue Tuvache, n^ 4, actuelle-
ment Alsace-Lorraine, dans la muraille de laquelle se
354
trouve une arcade romane, appartenait, en 1829, à un
sieur Thomas Lemare, qui Thabitait,
Elle passa ensuite entre les mains d'un sieur Cou-
sin, marchand droguiste et fut occupée par le sieur
Duforestel jeune, épura teur d'huiles, jusqu'en i883,
époque où, par suite d'expropriation, elle devint la
propriété de la ville de Rouen, qui la revendit à
M. F. Lancesseur, entrepreneur, rue Bihorel, n® 9.
A Tappui de sa communication, M. Pelay dépose
sur le bureau de la G)mmission un calque à l'encre et
teinté, comprenant :
lo Extrait du Plan général de la ville de Rouen
déposée la mairie (1884) ; 2» extrait du Livre des
Fontaines, de Jacques Le Lieur (i525).
Dessins de la Commission, — M. Bouquet rap-
pelle que M. Dutuit, toujours considéré comme notre
collègue, quoiqu'il ait donné, depuis longues années
déjà, une démission demeurée caduque, puisqu'elle
n^a jamais été acceptée, et que chacun de nous vou-
drait voir reparaître à nos séances et y prodiguer les
trésors de son érudition, a fait relier à ses frais, en
deux magnifiques volumes, les dessins offerts à la
Commission. M. Bouquet demande si tous les dessins
communiqués à la Commission^ depuis sa fondation,
et qui doivent se trouver, tant dans les albums de
M. Dutuit qu^ailleurs, ont été scrupuleusement con-
servés. Il s'agit ici, dit avec raison notre collègue,
d'une œuvre^ non pas artistique, mais historique.
M. le Vice-Président répond qu'une commission
spéciale a été nommée pour le classement et la conser-
vation des dessins. Cette commission a cru devoir pro-
céder par voie d'élimination. Les plus beaux dessins
355
sont collés et mis à l'abri de toute détérioration ou
déplacement quelconque.
Un membre propose d^apposer le cachet de la Pré-
fecture ou un timbre particulier sur tous les dessins
devenus propriété de la G)mmission»
Le secrétaire, M. d'Estaintot, observe M. le Vice-
Président^ a Phabitude de mentionner, sur chaque
dessin produit au cours de nos séances, à côté de Tes-
tampille — Commission des antiquités — le nom du
donateur et la date de la réunion.
Tous les dessins dont il s^agit, à en croire le Secré-
taire-adjoint, devraient, sans distinction d^art ni de
mérite, corrects ou informes, être conservés et classés
dans Tordre du procès-verbal. L^utile prime le beau.
Monnaies romaines. — M. Pelay signale une dé-
couverte de monnaies romaines qui a eu lieu, il y a
huit jours, dans la forêt de la Londe.
Ossements, — Uamas d^ossements humains décou-
verts rue Saint-Lô, en face la rue Boudin, pourrait
provenir, au sentiment de M. de Beaurepaire, de la
suppression d^un de ces pieux charniers si communs
dans nos cimetières au moyen âge, et dont M. Le
Breton a rencontré encore en Bretagne, tout récem-
ment, de curieux spécimens.
Bas^reliefs dits de Michel-Ange, — M. Brianchon
s'excuse sur ce que les bas-reliefs dits de Michel-Ange,
dont il a été question dans la dernière séance, appar-
tiennent en quelque sorte à la Normandie, od ils ont
trouvé asile depuis vingt ans, pour refaire, d'une ma-
nière un peu trop longue, l'historique de ces chefs-
d^œuvre de la sculpture du xvi^ siècle, et du tombeau
r
de Glande de Lorraine, dont ils faisaient le principal
ornement. L'origine de ces bas-reliefs est avérée, leur
mérite est indiscutable, mais à quelle main les attri-
buer en définitive? Adhuc subjudice. Des probabili-
tés existent, mais la certitude manque. Étrange abné-
gation de ces grands artistes qui savaient tout, et qui
savaient si bien, dessiner, bâtir, sculpter, peindre,
et qui oubliaient de signer de pareilles merveilles ! La
légende qui les fait sortir du ciseau de Michel-Ange ne
prouve qu'une chose, c'est qu'ils sont dignes de ce
puissant génie, et que, par l'harmonie de la composi-
tion, la hardiesse des attitudes, la pureté des lignes ei
la suavité des contours, le naturel et le mouvement
des groupes, par le sentiment vrai, profond, exquis en
un mot, qui se dégage de chaque personnage et de
Tensemble des tableaux, Buonarroti les eût admis
sans conteste au nombre de ses enfants, et, qui sait?
de ses enfants privilégiés même. Les auteurs du Voyage
pittoresque, d'après des renseignements recueillis sans
doute à Joinville, disent bien que le « beau monu-
ment », comme ils appellent le tombeau de Qaudede
Lorraine, a été exécuté par un artiste italien, Dome-
nico Florentîno, plus connu sous le nom de Domi-
nique del Barbieri, et deux sculpteurs français, Jean
Picard dit le Roux, et Richier. Mais des preuves ?
Nodier, Taylor et de Giilleux n'en donnent pas.
Claude- Joseph Benoist, peintre des Vosges, auteur
d'un inventaire manuscrit des sculptures du château
de Joinville en 179 1, se contente de dire qu'il ne com-
bat ni la tradition qui attribue le tombeau du premier
duc de Guise à Michel-Ange, ni la tradition qui en
fait honneur à Girardon.
Pernot est plus précis. Dans sa Notice sur les tom-
357
beaux du château de Joinville) il dit textuellement :
V Ce fut à Joinville qu^on exécuta ce monument.Trois
sculpteurs y furent employés : Dominique Florentin,
Jean Picard dit le Roux, et Richier. . . Des mémoires
et des comptes assurent que les dépenses montèrent à
7,000 francs. »
Mais, ces mémoires et ces comptes, ot sont-ils? où
Pernot les a-t-il vus ? Il ne le dit pas. C'est cependant
le noeud de la question. M. Brianchon ne les a pas
encore découverts. Mais ils sont Tobjet de ses re-
cherches.
L'auteur termine en disant que, en Tabsence de
témoignages certains, examen fait de Tœuvre de Ri-
chier et renseignements pris auprès dé plusieurs maî-
tres de la science, il est porté à conclure, au moins
provisoirement, que les bas-reliefs du tombeau de
Claude de Lorraine, dits de Michel-Ange, ne sont pas
de l'école française, mais italienne ; que le célèbre
sculpteur lorrain, Richier, n'y est pour rien, mais
qu'il y a lieu, au contraire, jusqu'à nouvel ordre, de
retenir le nom de Domenico del Barbieri, l'un des
nombreux stucateurs, au rapport de Vasari, qu'em-
ployait le Rosso dans le château de Fontainebleau,
affectionné particulièrement de Maître Roux, « grand
dessinateur et le plus habile de tous les artistes 9.
Le Jeu de paume des Braques, — M. de Beaure-
paire donne lecture de la communication suivante :
SUR LES JEUX DE PAUME DE ROUEN
On sait que Molière vint à Rouen en i658, et qu'il y
donna quelques représentations au jeu de paume des
Braques. Les recherches de M. Bouquet, publiées sous ce
358
titre : La Troupe de Molière et les deux Corneille à
Rouen en 1 658, ne laissent aucun doute à cet égard.
<c Le jeu de paume des Braques^ dit notre savant col-
lègue, était au bas de la rue du Vieux- Palais qui débou-
chait en face et à peu de distance dé la forteresse, aujour-
d'hui détruite, d'où la rue tirait son nom... Il représen-
tait un carré long, dont les quatre murs étaient construits
en pierre de taille et en moellons. Il avait 94 pieds de
longueur et 3i pieds de largeur de dedans en dedans. L'in-
térieur était divisé en théâtre, en amphithéâtre et en
loges, construites en bois peint à Thuile, avec cloisons en
bois de sapin, recouvertes de toiles gommées. »
En i6o3, ce jeu de paume appartenait à noble homme
Absalon de Claire, seigneur du Bosc-Isambart à Monville,
Tun des anciens conseillers de la ville, domicilié sur la
paroisse de Saint-Éloi. Le 26 juillet de cette année, on
voit ce particulier € bailler à rente et fîeffer à fin d'héri-
tage, pour lui, ses hoirs et ayants cause, au nommé An-
toine Delaunay, maître racquetier, un tènement de mai-
sons de jeux de paulmes, vulgairement nommez Bracques^
assis en la dicte paroisse, lesquels consistoient en maisons,
édifiîces, petites courtz et jardin, y comprins trois petits
louages de maison assis en la dicte paroisse, rue du Vieux-
Palais, ... à prendre lesdits héritages fieffez le long des
héritages retenus par le bailleur ; iceulx héritages bornez,
d'un costé, les Filles- Dieu dudict Rouen, et, d'autre
costé, les représentans Pierre Trencart et la maison du
Hault-Pas ; d'un bout, une maison en la rue du Vieux-
Palais» et, d'autre bout, ledict sieur bailleur, à cause d'un
bâtiment façon d'appentis, d'une grande court et d'un
corps de maison. » L'entrée et la sortie des jeux se disait,
non par la rue du Vieux-Palais, mais par la rue Saint-
Éloi. Le plus grand des jeux était seul couvert. Le prix
de la fîeife nous paraît considérable pour le temps : il était
de 800 livres de rente, racquittables par 14,000 livres, sans
compter 60 sous à payer, chaque année, à la recette du
3S9
Domaine du Roi, et pareille somme à payer également,
chaque année, aux Filles-Dieu (i).
Le II octobre i554, le grand jeu de paume dit vulgai-
rement le tripot de Bracques était baillé à ferme pour
douze ans par Nicolas de Cleremuet et par Marie Huil-
lard, sa femme, à Alain Fontaine et à Etienne Dauge. Il
comprenait alors deux petits corps de maison, une grande
salle qui servait de despouille^ des cours, des galeries et
un ouvreur qu'un nommé Pierre Malebranche avait fait
construire assez récemment, et où Ton avait pratiqué une
porte qui ouvrait sur ]a rue du Vieux- Palais. Le prix de
location était de 80 livres par an (2).
Ce jeu de paume passait pour un des mieux achalandés
de toute la ville, t On voyait s'y rendre, dit M. Floquet (3),
montés sur leurs mules, tels conseillers qui s'étaient &it
excuser au Palais comme atteints d'une indisposition su-
bite, » Ce fut un des abus (ce n*était pas le plus grave) que
l'on eut à reprocher aux magistrats de la fin du règne de
François I^',
Le jeu de la paume était en grande faveur d^^ns l'ancien
temps. On ne doit donc pas être surpris du nombre des
établissements qui furent fondés à Rouen à l'usage des
joueurs. Il en était de même dans toutes les villes. On
voit aussi qu'il n^y a pas eu de résidence royale sans un
jeu de paume. Un théâtre eût paru moins indispensable.
Plus tard les représentations théâtrales prirent le dessus,
et finirent par faire négliger les jeux de paume dont elles
occupèrent les vastes locaux.
Pour nous en tenir à Rouen, nous citerons le jeu de
paume de VAigle-cTOr entre la rue de l'Aumône, en hce des
murs de Saint- Lô, et la rue Ganterie, sur laquelle était la
porte d'entrée. M. Gosselin parle d'un assassinat qui^
(i) TaMlhnage de Rouen, meubles.
(a) Ibidem,
(3) Histoire du Parlement de Normandie^ t. I, p. 5ia.
36o
y fut commis, en iSgi, sur la personne du capitaine Les-
mons par un autre capitaine, Bailleul, seigneur de Beau-
vais. Il émet l'opinion que ce jeu de paume dut dispa-
raître en 1668, lorsque l'on ouvrit la rue Neuve-Saint- Lô;
mais c'est à tort, puisqu'on le voit figuré sur un plan pos-
térieur à cette date, comme situé à droite de cette rue en
allant à la rue Ganterie. Il était séparé de la nouvelle rue
par l'hôtel de M. de Frettemeule (i).
Les jeux de paume :
De la Grande et de la petite hête^ jeu de paume cité
par M. Périaux, d'après M. Gosselin, sans détermination
de la place qu'il occupait ;
Du Carolus d'or y cité par le même. Je vois un tène-
ment à l'enseigne du Carolus d*or^ signalé comme situé
rue Grand- Pont, dans un titre de 1625 ;
Du Chat qui veille^ cité par le même, sans détermina-
tion de son emplacement;
Du Château" Rouge, sur la paroisse Sainte-Croix-Saint-
Ouen. Il appartenait, le 16 novembre 1584, à Marc-
Antoine Seghizo, sieur de Bouges. Il fut vendu, en 1 584,
a Jean Desnoz, maître d'un autre jeu de paume dit le
Pélican, Le jeu de paume du Château-Rouge se trouvait
derrière les murs de Saint-Ouen, et n'était séparé que par
une maison d'une rue qui portait alors le nom de rue
Boudin. 11 fut successivement possédé par Pierre Mor-
lière, Nicolas Longer et David Salingant. Ce dernier, peu
de temps après l'avoir acquis, le vendit aux Ursulines,
auxquelles il ne porta pas bonheur, puisqu'il fut détruit
dans un incendie, en i655 (2);
<i) Arch. de la S.-Inf., F. du prieuré de Saint-Ld.
(2) Georges Le Roy» pelletier, au ChSteau-Rouge, pénul. de
mars 1483. Palais de Justice, Reg, du hailL de Rouen, — Jean
Brière, psllotier, vendit ce jeu de paume à Zègre De Hault de
Bruges, i3 fév. 1493 (Tab. de Rouen).
36 1
De la Cigogne ou de la Grue^ derrière les murs de
Saint-Ouen, 1616, 1626(1);
De la Cloche, rue Martainville, paroisse Saint-Maclou (2) ;
Des Cochonnets, rue Notre-Dame, même paroisse (3) ;
Du Coquet, près du portail Saint-Godard (4) ;
Du Corbel ou du Corbeau^ rue Beauvoisine, paroisse
Saint-Laurent (5) ;
De la Cornière^ rue Dinanderie (6) ;
De la Cuiller à pot^ autrement dit du Métayer^ où Mo-
lière joua, en 1643, avec la troupe de Tlllustre théâtre. Il
était situé sur la paroisse Saint-Martin, près de la Grosse-
Bouteille (7) ;
Du Cygnot (ou Signot), paroisse Saint-Sauveur, devant
la Poissonnerie. Il fut transformé, en 1793, en salle de
spectacle, et est devenu le Théâtre Français. Il était tenu,
en 1772, par le sieur Toussaint, qui fit insérer cette
année-là une réclame dans les Affiches de Normandie afin
d'y attirer la pratique (8) ;
Des Deux Maures^ paroisse Saint- Éloi, 1625. C'était un
(i) Cité par M. Périaux et mentionné dans le Registre des
contrats de la fabrique Sainte-Croix-Saint-Ouen.
(2) Cité dans un acte du 1 1 février 1462 (v. s.). Tabellionage
de Rouen .
(3) Cité dans un acte du 8 avril 1464. Ibidem.
(4) Cité aux années 161 1, 1699. Arch. de la S.-Inf. G. 4758,
48 1 3 . Ce jeu de paume donna son nom à la rue du Coquet, dite
encore, en 161 1, rue de la Harpe.
(5) « Ostel, trippot, jeu de paume du Corbel, » i4déc. 1483.
Reg, du bailliage de Rouen; 16 mars 1485. Tabellionage de
Rouen .
(6) Cité par M. Périaux.
(7) Cité par le même.^ « La Cuiller à pot, ruelle de TAbre-
veur aux chevaux, » 27 décembre 1434. Tabellionage de
Rouen, reg. 24 f» 91 ; la Cuiller à pot, rue Vatier-Blondel, 1621.
Arch. de la S.-Inf. G. 4719.
(8) Cité par Iç même.
a4
365
des plus connus au xyii^ siècle. Comme le jeu de paume
des Braques, il servit fréquemment aux représentations
théâtrales, et finit même par devenir le véritable théâtre
de Rouen^ après que celui-ci eut été affecté à Topera et à
TAcadémie de musique (i) ;
De ï Étendard, paroisse Saint-Maclou, en face de la
fontaine des Augustins. Il fut adjugé par décret, en 1 597,
a Jacques Marlet, qui fiit, je ne saurais dire pour quel
crime, condamné à la peine capitale. Il fut réédifîé, en 161 3,
par Tavocat Jacques Pradon et par sa femme Marguerite
Delaste, qui n'eurent point trop à se féliciter de leur spécu-
lation (2) ;
Du Fer à cheval, dont je ne saurais dire l'emplacement,
vers 1 543 (3) ;
Du Héron^ dont mention a été faîte par M. Gosselin (4);
Du Patirty rue de la Seille (5) ;
Du Pélican y précité ;
(i) Cité par le même.
(2) Arch. de la S.-Inf.^ F. des religieuses du Saint-Sacrement.
(3) Ibid.
(4) Le Cartulaire de Saint-Maclou mentionne, dans un acte
de z 5x0, le tripot du Héron, près des murs de Saint-Ouen.
Cest peut-être le même que le jeu de paume de la Cigogne ou
de la Grue. Pour s*expliquer ces différentes appellations, il faut
se rappeler que les rues n'avaient pas de noms officiels,
qu'on les désignait généralement par les enseignes qui s*y
trouvaient, et que la même enseigne pouvait être pour l'un une
Grue, pour un autre une Cigogne, pour un troisième un Héron.
(5) Mention, le 4 janvier 1483, « du tripot du Patin où l'on
joue à la paume. Archives du Palais de Justice. Registre du
bailliage de Rouen ; en 1 542, « du tripot du Patin derrière les
murs de l'abbaye de Saint-Ouen, paroisse Sainte-Croix-Saint-
Ouen, où pend l'enseigne Saint'Julien. » Arch. de la S.-Inf.
Comptes de la par. Saint'Étienne^deS'Tonneliers, i555, 1592.
Le 2 septembre 1600, sentence portée pour blasphèmes, contre
un particulier qui remplissait, dans ce jeu de paume, la fonction
de marqueur.
365
Des Penteurs, cité par M. Pénaux, sans détermination
d'emplacement ;
Du Petit Maur, cité par le même, sans détermination
d'emplacement ;
Du Renard, t L'hôtel du jeu de paulme où pend pour
enseigne le Regnard hors la porte Cauchoise, i habité par
un pellotier, i3 juillet 1487(1);
De Saint-Eustache, paroisse Saint-Sauveur, rue aux
Chevaux, derrière la maison occupée, rue de la Pie, par
la famille Corneille (2) ;
De Saint-Jeariy paroisse Saint-Godard ; baillé à louage
par frère Martin de Troyes, commandeur de Coulombiers,
pour lors administrateur de la maison de Saint-Antoine
de Rouen, 14 novembre 1478(3) ;
Des Trois Queues de Renard, cité par M. Périaux,
sans détermination d'emplacement ;
De la Truie qui file, rue Martainville, 8 avril 1464 {4) ;
Du Verdelet^ paroisse Saint-Godard, près du Marché
aux chevaux. Il appartenait à Marc-Aurèle de Giverville,
qui le bailla, pour six ans, à David Salingant, le 1 1 avril
i653 (5). En 1721,11 était acheté, par les Pauvres- Prêtres
de Saint- Louis, de M. Louis de Cotton, chevalier, sieur
(i) xg juin 1487, Jean Le Gros, pellotier, prend à rente de
Jean Enguerran, dit Gault, cordouennier, un tènement de mai-
sons de jeux de paulme ayant pour enseigne le Regnard, pa-
roisse de Saint-Andricu hors la porte Cauchoise. Mention du
tripot du Regnard, comme propriété du Chapitre de la cathé-
drale, 26 mars i557; fieffé le 7 novembre i558 ; cité le 21 no-
vembre i563, Registres capitulaires , C'est de ce tripot que la
rue du Renard tire son nom.
(2) « Pour la sépulture d*un jeune garçon, fils du maître du jeu
de paulme de Saint-Eustache, 10 sous. » Arch. de la S.-Inf.,
Comptes de la paroisse Saint'Sauveur,
(3) Tahellionage de Rouen,
(4) Ibidem,
(5) Ibidem, Minutes de Crosnier.
364
de Verdois, vendeur au nom de ses enfants mineurs.
Il y avait aussi, sur la paroisse Saint-Paul, un grand jeu
de paume dont les propriétaires, MM. Brice, prétendaient,
en 171 8, faire un fief noble sous le nom de fief de Mar-
tainville, contrairement aux droits des Chartreux, substi-
tués à Tabbaye de Sainte -Catherine (i).
Le 26 septembre i554, demande avait ctc faite à la Ville
par un particulier d'établir un jeu de paume dans les fos-
sés de Cauchoise. Les échevins avaient décidé que l'auto-
risation pourrait être accordée, mais moyennant un prix
d'argent (2).
A la date du i5 juillet iSSy^ on voit figurer, dans un
acte du tabellionage de Rouen, Jacques Du Bosc, ccuyer,
varlet de chambre du cardinal de Bourbon, archevêque
de Rouen, lequel Du Bosc s'intitule c garde et usufruitier
du jeu de paume assis en la cour de la dite abbaye au
droit du don à lui fait, sa vie durante, par ledit cardinal ».
La nombreuse clientèle de tous ces jeux de paume
explique l'importance assez considérable qu'avaient alors
deux métiers aujourd'hui presque inconnus^ les métiers
de pellotier et de raquettier. Le pellotier fabriquait les
éteufs ou balles qui servaient au jeu, le raquettier fabri-
quait les raquettes (3).
Les pellotiers formaient à Rouen une communauté vers
la fin du xv^ siècle. Le vendredi, 4 mai 1484, Martin Cote-
rel, sergent, rapportait, devant le lieutenant général du
bailli, que, ce jour-là, en plein marché, à la Vieille-Tour,
(i) Les Chartreux produisirent un titre de iSgi, où ce prétendu
fief n'était qualifié que jeu de paume.
(2) Délibérations de la Ville.
(3) Les raquettiers formaient un corps de métier distinct.
12 mars i552, Etienne Le Pelletier, raquettier, paroisse Saint-
André-hors-ville. ^ 14 juillet 1 5 16, Pierre Piquelley, du métier
de raquettier, paroisse Sainte-Croix-Saint-Ouen. — Pénultième
d'octobre i558, Jaspar Chardon^ raquettier, même paroisse >
près de la Rougemare. Registres du Tabellionage de Rouen,
365
accomplissant le contenu du mémorial par lui présenté,
c il avoit fait bruyr et ardre vi grosses et demie d'esteurs,
que les gardes du mestier a voient pris naguères et mis
en arrest comme faux, et dont ils avoient trouvés saisis
certains marchands forains (i). » Le 23 octobre i552, Blan-
chet Nouel, f faiseur d'esteurs », de la paroisse Saint-Godard,
prenait en apprentissage, pour quatre ans, un nommé Jac-
ques Bréard, âgé de quatorze ans. Les éteurs figurent
assez fréquemment dans les aveux, parmi les redevances
que les vassaux devaient à leurs seigneurs, ce qui doit
faire supposer que le jeu de la paume était en vogue aussi
bien dans les campagnes que dans les villes, dans les rangs
de la haute société aussi bien que dans ceux de la bour-
geoisie.
Les registres de Tofficialité viennent à Tappui de cette
supposition. On y voit aussi que les jeux de paume étaient
souvent le théâtre de scènes violentes, et que certains
ecclésiastiques ne résistaient pas à l'attraction que ces
luttes de force et d'adresse exerçaient sur la foule (2).
Mais, en dépit de ces abus, auxquels, de même que les
(i) Archives du Palais de Justice, Registre du bailliage de
Rouen. ^ Le 2 juin 14S0, Jean le Pilleur faisait don à la fabrique
de Saint- Vincent, sa paroisse, de 16 sous provenant de la vente
des éteurs tombés dans sa maison d*uu jeu de paume voisin.
Quelques mois après, sa femme venait offrir 3 sous 5 deniers
qu'elle s*était procurés de la même manière. Ârch. de la S.-Inf.
Comptes de Saint- Vincent.
(2) Mention de jeux de paume à Auffay, Brémontier, Montfort,
1450; à Beuzemouchel, 1453 ; à Longchamp, Lyons-la-Forêt,
1455 ; à Saint-Georges-de-Gravenchon, 1456; à Étables, Fours,
Muids, 1458; à Appsville, Guénonville^ 1464; à Susay, 1472;
à Omerville, 1484; à Pitres, 1485; à Liancourt, 1488. Les
autres jeux usités dans les camppgnes étaient ceux des barres,
du batailleur, de la boule, de la choule, des croisettes, des
épées (épées de bois), de la pile et de la quintaine. On voyait
avec défiance les jeux de hasard, spécialement les jeux de cartes,
de dés, de rabatues, de taxilli et d*apipa.
366
meilleures choses du monde, les jeux de paume pouvaient
donner lieu, il est constant qu'ils furent toujours vus avec
faveur par l'autorité publique (i).
Par une exception assez remarquable, des lettres-paten-
tes de Frs^nçois I^^^du 9 novembre 1 527, portaient que
€ tout ce qui se passeroit au jeu de paume seroit payé à celui
qui gagneroit, comme une dette raisonnable^ acquise par son
travail. » Cette disposition paraît avoir été inspirée par l'é-
quité à un législateur bienveillant. Mais ce qu'on y ajoute
sent la fiscalité : f Pour éviter les procès qui pourroient naître
de ce jeu, le Roi établissoit un maître gardien général des
gages par toutes les villes du royaume, lequel commet-
troit gens solvables par tous les jeux de paume, dont il
répondroit. » Il est juste de remarquer, avec le président
De la Mare, que cette invention resta à l'état de projet (2).
Le jeu de la paume, connu de toute antiquité, a eu et mé-
ritait d'avoir ses historiens, ses législateurs, ses prôneurs
et ses poètes. Parmi eux il suffît de citer M. Bajot, auteur
d'un livre intitulé : Éloge de la paume et de ses avantages
sous le rapport de la santé et du développement des facul-
tés physiques.
Dans cet ouvrage, sérieusement composé, M. Bajot dis-
tingue la longue paume de la courte paume, la première
qui se jouait dans un espace découvert et avec des bat-
toirs, la seconde qui se jouait dans un espace couvert,
d'abord tout simplement avec la paume de la main, plus
(i) « Entre les jeux, dit Fortin de la Hoguette, Testament d'un
père à ses fils, ceux qui ne sont point sédentaires comme la
longue et la courte paume, le mail et le ballon, sont plutôt
exercices que jeux, qu'on aime ou qu'on néglige selon l'âge où
l'on se trouve et selon la disposition ou l'attache qu'on y a. Tout
le mal que ceux-là peuvent faire en leur excès est de lasser le
corps sans incommoder que bien peu l'esprit et la bourse. Les
sédentaires, qui sont les échets, les dez et les cartes, sont plus
dangereux, m
(2) Traité de la police^ livre III, titre iv, chapitre v.
367
tard, à partir de la seconde moitié du zv* siècle, à Taide
de la raquette.
A la suite du témoignage d'Etienne Pasquier, le savant
auteur cite celui d'Erasme, duquel il résulte que, du temps
de ce célèbre écrivain, la raquette, bien que fréquemment
employée, n'avait point encore un avantage marqué sur la
paume de la main, Tarme des temps héroïques (i).
Ce que nous pouvons dire à l'appui de l'assertion de
M. Bajot, c'est que le métier de pelottier paraît avoir pré-
cédé à Rouen celui de raquettier, dont nous ne trou-
vons de mention qu'au xvi^ siècle.
On a inséré dans le Recueil des Ordonnances des rois
de France les statuts des faiseurs de balles à jeu ou éteurs,
autrement dit pelottiers, statuts confirmés par Louis XI
en 1480. D'après l'article vi de ce document, les gardes de
ce métier avaient droit de visite chez les maîtres et ou-
vriers € des jeux de paulme et tripots de Rouen et ban-
lieue, pour visiter les esteufs et saisir, si mauvais, avec
amende de i5 sous contre les contrevenants (2). » Les fai-
seurs de balles à jeu formaient une confrérie sous le titre
de Notre-Dame et de Saint- Louis, dont le siège était à
l'hôpital (sans doute l'Hôpital du Roi), en la chapelle du
Jardin .
Au xviii^ siècle, cette communauté avait complètement
disparu. Les balles à jeu n'étaient plus qu'un objet de
(i ) Érasme, dans un de ses colloques, met en scène deux joueurs
de paume :
Nicolaus, — NuUa res melius exercet omnes corporis partes
quam pila palmaria.
f(ytfronimi<5.<— NuUum anni tempus nobis panim accommodum
est ad ludendum.
Nicolaus, — Minus sudabitur, si ludamus reticulo.
Hyeronimus, — Imo reticulum piscatoribus relinquamus ; ele^
gantius est palma uti.
(2) Cité par M. Tabbé Ouin-Lacroix, dans son Histoire des
corporations d'arts et métiers à Rouen.
368
commerce trop insignifiant pour que ceux qui les fa-
briquaient pussent être réunis en corps de métier. On les
confondait, ainsi que les raquettiers, avec les brossiers
qu'on laissait eux-mêmes en pleine liberté, à raison du
peu d'importance de leur industrie (i).
Les jeux de paume ne purent résister à la concurrence
que leur firent les jeux de hasard, et aussi les billards, les
cafés et les théâtres.
Dès 1772, le maître du Cj^gnot se plaignait, dans une
réclame, de l'abandon que Ton faisait des jeux de paume.
Son établissement paraît avoir été le dernier que Ton ait
connu à Rouen (2).
Pour les derniers partisans de la paume il ne restait
plus, au commencement de ce siècle, que l'avenue de la Ma-
deleine. On combattait à ciel ouvert : c'était un retour aux
usages primitifs, moins par amour de l'ancienne simplicité
que faute de spectateurs et de combattants (3).
Après les jeux de paume, il serait assez naturel de parler
des jeux de mail ou de palle-mail, qui n'étaient guère
moins en honneur, et que les Anglais ont conservés. Nous
nous contenterons de citer un jeu de mail ou de palle-
mail qui était situé à Sotteville, près de Grandmont, et
qui fut très achalandé pendant tout le xvii« siècle et pen-
dant une partie du siècle suivant.
En i6o5, Henri IV avait octroyé t à Marguerite Fleury,
veuve de Michel Le Boullenger, cornet dessus et hautbois
de la maison royale, le droit de faire construire des jeux
de palle-mail publics, privativement à tous autres, pour
elle, ses enfants, ses successeurs et ayants-cause, en
(i) Arch. S.-Inf., F. de l'Intendance.
(2) M. Périaux, au mot Jeux de paume.
(3) Ibid, On peut consulter sur les jeux de paume à Rouen,
spécialement dans leurs rapports avec le théâtre, un très inté-
ressant article de M. Bouquet, inséré dans la Revue de Nor-
mandie de 1869.
369
dedans et dehors des villes de Caen et de Rouen, en pre-
nant de chaque personne 4 sous par jour, sans avoir à
fournir autre chose que la place dressée et accommodée
comme il appartenait».
Ce privilège, assez singulier par sa nature, n^était pas
concédé à titre purement gratuit. C'était un expédient
qu'un financier avait imaginé afin de permettre au Roi
de s'acquitter, sans bourse délier, de 480 ccus qui restaient
dûs audit Le Boullenger (sans doute un musicien célèbre
à la cour), pour ses gages des années 1599 et 1601 et de
55o écus en plus pour ses accoutrements.
Mais en accordant le privilège, Henri IV fit une réserve
en faveur de son aumônier, Jacques de Bernage, qu'il
avait gratifié du prieuré d*e Grandmont, parce que Ber-
nage, dès 1602, avait établi pour les bourgeois de Rouen,
près du manoir prieural, un jeu de palle-maîl dont il
tirait bon parti. Un arrêt du Conseil déclara que le prieur
pourrait achever l'installation de ce jeu et en toucher les
profits pendant toute sa vie.
On pense bien que le prieur n'eût pu songer à l'exploi-
ter directement. Il le bailla à ferme, à un nommé Engue-
hard, sous condition de laisser jouer gratis, toutes fois et
quantes qu'il leur plairait, lui prieur, ses frères, les sieurs
bailli, procureur fiscal, greffier et receveur de la haute-
justice de Grandmont.
Plus tard, après la mort de Bernage, le palle-mail fut
compris dans la manse priorale de Grandmont, qui devint
une partie 4e la dotation du collège des Jésuites.
Bien des années après, on voit ces religieux prendre fait
et cause pour leur fermier qu'on voulait assujettir aux
droits d'aides, parce qu'à l'occasion il donnait à boire aux
joueurs. A les en croire, « le jeu de mail importait à la
décoration et embellissement de la ville, et toujours le fer-
mier avait eu la liberté de distribuer à ja jeunesse qui
37?
jouait au mail, un coup à boire pour les rafraîchir pendant
la fatigue du jeu (i). »
Je n'ai point recherché quelle suite fut donnée à cette
réclamation. On ne m'eût point tenu compte de ma peine;
et, à dire vrai, cela n'importe guère.
La séance est levée à quatre heures.
Le Secrétaire- Adjoint,
Rrianchon.
(i) Arch. de la S.-lnf., F. du collège de Rouen.
J
Î7I
SÉANCE DU 7 AVRIL 1884
La séance est ouverte à deux heures, sous la prési-
dence de M. Ch. de Beaurepaire, vice-président.
Étaient présents : MM. Adeline, Paul Baudry,
Billiard, Bouquet, Gouellain, Maillet du Boullay, de
Merval, Pelay et Tabbé Tougard, faisant fonctions de
secrétaire.
S'est excusé : M. Briarichon.
Le procès-verbal de la dernière séance, rédigé par
lui^ est lu par M. Gouellain et adopté.
M. le Président revient sur l'importance de la con-
servation desarchives et des dessins delà Commission.
Le classement de ces derniers ne peut se faire que plu-
sieurs mois après chaque séance, sinon même Tannée
suivante. Mais des mesures sont prises pour assurer le
classement exact de toutes les pièces importantes, et
M. de Beaurepaire lésa même soustraites aux chances
d*incendie.
La correspondance imprimée comprend : Listofthe
Society of Antiquaries of London, juin 1881 et juin
1882; — Proceedings des mêmes, avril-décembre
1880; — Les mêmes, décembre 1880 et juin 1881 ; —
Les mêmes, novembre 1881 et janvier 1882 ; — Mé-
moires de la Société des Antiquaires de Morinie,
vol. XVIII (1882-1883); Bulletin du Comité des
Travaux historiques, i883 ; — Société industrielle
d'Elbeuf, i883, août-octobre ; — Bulletin de la Soc.
des Antiquaires de l'Ouest, juillet-septembre i883;
— Bulletin de la Société des Amis des Sciences na-
turelles de Rouen, 1882, 2« semestre; — Bulletin de
372
la Société historique et archéologique de Langres,
i883.
Porche de la VieuX'Rue. — Demande de classe-
ment. — L'objet principal de cette séance est une lettre
de M. le Préfet qui soumet à la Commission une de-
mande de classement du porche de Téglise de la Vieux-
Rue, qui a été adressée à l'Administration départe-
mentale par le maire conjointement avec le curé.
M. Pabbé Tougard objecte Tinconvénient qu'il y
aurait à trop multiplier les classements. Néanmoins,
plusieurs membres estiment qu'il est impossible de
rejeter cette demande sans examen ; et la Commission
délègue, pour la visite de Péglise, MM. Gouellain et
Pelay^
Académie de Musique et la Comédie à Rouen, —
M. Bouquet fait la communication suivante :
Messieurs,
A la dernière séance, notre honorable vice-président a
pu préciser, à l'aide d'un document nouveau, remplace-
ment du Jeu de Paume des Braques, qui servait aux comé-
diens de passage pour la représentation de leurs pièces, à
Rouen, et qui tint, pendant longtemps, une place consi-
dérable dans cette partie de notre histoire locale, jusqu'en
1696, comme nous avons eu l'honneur de vous le dire.
Par une association d'idées toute naturelle, Tun de nos
collègues a demandé si l'on savait ce qu'étaient et où
étaient, à Rouen, une Académie royale de musique et la
Comédie^ dont il est souvent fait mention, vers la même
époque.
Nous avions dit que la réponse à la question se trouvait
dans les Simples notes sur les anciens théâtres de Rouen
du xvi^ au xvii« siècleSy rassemblées par un laborieux et
373
consciencieux travailleur, M. E. Gosselîn, qui les donna à
la Revue de la Normandie, en i863.
Elle y est, en effet; et c'est en profitant de ses recher-
ches et en y joignant quelques détails nouveaux, que nous
espérons pouvoir préciser remplacement et le rôle de cette
Académie royale de musique et de la Comédie, avec la
date de leur apparition.
Ainsi que notre honorable vice-président Ta rappelé, le
Jeu de Paume des Braques, où avaient lieu, au xvii« siècle,
les représentations théâtrales, était situé au bas de la rue
du Vieux-Palais et voisin des Filles-Dieu, nom donné aux
religieuses chanoinesses de Saint-Augustin, à cause de la
régularité de leur vie ; et il avait un rival dans le Jeu de
Paume des Deux- Maures, que les comédiens prenaient
aussi pour y représenter leurs pièces, surtout au milieu de
ce même siècle.
Or il règne quelque incertitude sur l'emplacement oc-
cupé par le Jeu de Paume des Deux-Maures, transformé
en théâtre.
En février 1863, M. Gosselin a commencé par dire : t Le
Jeu de Paume des Deux- Maures était situé rue des Char-
rettes, au bas et à l'encoignure delà rue Herbière. • Mais,
peu de temps après, il se corrigea lui-même en disant :
f Vis-à-vis la rue Herbière et non pas â l'encoignure,
ainsi que cela a été dit par erreur dans le numéro de la
Revue de la Normandie de février i863, page 34. •
Nous ne savons d'après quelle autorité M. Gosselin avait
introduit cette note rectificative au bas de son texte, à la
page 139 de la Revue de la Normandie. Mais un texte
contemporain et surtout les constatations postérieures
permettent d'afHrmer que sa rectification était bien fondée.
Le texte contemporain a été connu de M. de Beaure-
paire, qui l'a publié, en 1859, dans un numéro du iVoi/-
velliste de Rouen, que nous n'avons pu retrouver.
C'est M. Eudore Soulié, l'auteur des savantes Recherches
sur Molière et sur sa famille, qui nous l'a révélé, quand il
374
nous a permis de le publier, en 1 86 3, dans la Revue de la
Normandie.
L'exploit d'un sergent, du nom de Vincent, signifié le
lo août i652, à la requête des administrateurs de THôtel-
Dieu de la Madeleine de Rouen, parle de l'emplacement
du Jeu de Paume des Deux-Maures. « J'ay sommé noble
homme Laurens Conseil sieur d'Argil commedien estant
de présent à Rouen et parlant à sa personne viron Midy
estant au jeu de paulme des Deux Mores au bas de la rue
Herbière de paier, compter ausd. sieurs administrateurs...
les deniers qu'ils ont receus.., pour les pauvres dudit
Hôtel-Dieu. • (Revue de la Normandie, année i865,
p. 3o8.)
Ces mots : c Au bas de la rue Herbière » ne signifient
pas c au coin n, et ils peuvent très bien s'entendre aussi
par « au débouché » ; ou bien : t vis-à-vis de la rue Her-
bière. »
On se demande comment, au Heu de cette périphrase :
« Au bas de la rue Herbière », le sergent n'a pas mis le
nom même de la rue des Charrettes. C'est que tel n'était
peut-être pas alors son nom. La rue que nous appelons
aujourd'hui rue des Charrettes, depuis la rue Grand-Pont
jusqu'à la place Henri IV, avait porté précédemment plu-
sieurs noms. Elle s'est appelée de quatre noms, sur son
parcours. En commençant par l'est, on avait la rue des
Charrettes ; puis, la rue aux Noix ; à la suite, la rue de
devant le Pont Tiretaigne ; et enfin, la rue du Palais^ dans
la partie aboutissant au Vieux-Palais. Le plan de Gom-
boustde i655 donne bien le nom de € rue des Charrettes»
depuis la rue Grand-Pont jusqu'à la rue de la Vicomte.
Mais il est sans indication aucune pour le reste de la rue.
Ensuite il montre, au bas de la rue Herbière, un grand
quadrilatère compris entre la rue de la Vicomte, à l'est ;
la rue Saint-Eloi, à l'ouest; les murs de la ville, au sud;
disant face au quai, entre les portes de îa Vicomte et Saint-
Eloi, et enfin, au nord, la suite de la rue des Charrettes,
\
!
375
dont le nom était peut-être encore : < La rue de devant le
Pont Tiretaigne > ; car tout ce quadrilatère est appelé, par
Gomboust: c Ponttaritaine •.
Taillepied cite parmi < les ponts qui servent commodé-
ment pour passer de rue en autre, le pont de Taritaine, >
(Les Antiquités de Rouen, p. 34). C'était en 1 587 que ce
pont servait encore à passer, sinon un cours d^eau que
nous ne connaissons pas, au moins les grosses eaux pro-
duites par les débordements ou les marées de là Seine,
voisine de cet endroit et très fréquents alors, avant la
surélévation des talus qui rencaissaient mal, comme on le
voyait, jusqu'au commencement de notre siècle, tout le
long de la ligne des quais de la rive droite.
Dans la partie du quadrilatère ou itot de malsons appelé
€ Pontaritaine » et faisant face à la rue Herbière, se trou-
vait donc le Jeu de Paume des Deux-Maures, dont il était
souvent question dans les Archives de T Hôtel-Dieu, à
propos de la perception du droit des pauvres, de i65o à
1660, comme cela résulte de témoignages postérieurs, que
nous allons rappeler.
Ainsi que M. Gosselin nous l'apprend, < c'était, en 1682,
un grand bâtiment qui avait la porte d'entrée dans la rue
des Charrettes, mais non sa façade ; car il fallait, pour y
parvenir, suivre une longue et étroite allée, qui traversait
tout le corps de logis derrière lequel il se trouvait. Il était
« entouré et enfoncé de toutes parts par des maisons im"
médiatement contiguès, » (Arrêt du Parlement du 27 jan-
vier 1682). Tout était en bois; les murailles étaient com^
posées de poteaux très distants les uns des autres et dont
les intervalles étaient garnis de clayes légèrement en-
duites de plâtre, > (Simples notes sur le théâtre, ibid. ,
p. 140.)
Mais ce nom de Jeu de Paume des Deux-Maures ne tarda
pas à disparaître, et voici dans quelle circonstance. En dé-
cembre 1688, un nommé Bernard Vaulticr, seigneur des
chants^ présenta une requête au lieutenant général du
376
Bailli de Rouen, Marc Antoine deBrèvedent, pourTinfor-
mer < qu'il avoit le dessein d'y établir une Académie
royale de musique, vulgairement dite opéra >. Il le sup-
pliait de lui accorder < la permission de s^établir en quel
lieu il lui semblerait bon être ; y faire construire un
théâtre avec toutes ses dépendances ». (M. Gosselin, l'^t'i.,
p. 38.)
Le 8 janvier 1689, la permission fut accordée dans les
termes de la requête, et Vaultier n'en profita que dans une
certaine mesure pour la construction du théâtre projeté.
L'argent lui faisant défaut, au lieu de bâtir un nouveau
théâtre, il se rabattit sur le Jeu de Paume des Deux-
Maures, et le disposa pour servir aux représentations ly-
riques qu'il avait en vue. Quand tout fut terminé, « on
plaça au-dessus de la porte d'entrée une plaque en marbre
noir avec ces mots gravés en lettres d'or : Académie royale
DE MUSIQUE. » Depuis ce temps, le nom de Jeu de Paume
des Deux-Maures disparut pour faire place à celui d! Aca-
démie royale de musique, au lieu à'Opéra^ qui en était
synonyme.
A son tour, le Jeu de Paume des Braques avait égale-
ment reçu une dénomination nouvelle. Comme depuis
i658, date de la venue de Molière et de sa troupe à Rouen,
on y avait représenté presque exclusivement la comédie,
nom donné alors a toutes les pièces du genre dramatique,
l'habitude s'établit de l'appeler « La Comédie. »
La preuve en est fournie par un compte des Recettes de
l'Hôtel-Dieu, au profit des pauvres, dont M. Ch. de Beau-
repaire vient de publier le fragment que voici, dans son
Rapport au Conseil général^ en i883. « lo* février 1690.
Délibéré que les deniers qui seront reçus, à VOpéra et à
la Comédie, seront partagés également entre les deux
hospices, comme il a été arresté en l'hôpital des Valides,
par délibération du 3o novembre dernier. »
Voilà bien les deux théâtres que Rouen possédait alors
et que les comptes de l'Hôtel- Dieu appelaient autrefois
377
Le Jeu de Paume des Deux-Maures et Le Jeu de Paume
des Braques.
. Aussi M. Périaux a-t-il eu bien raison de dire : c A la
date du 24 janvier 1691 a été constatée l'existence à Rouen
d'une Académie royale de Musique : tel est le nom qu'avait
pris une troupe d'opéra qui était venue s'installer, en
1689, au Jeu de Paume des Deux-Maures, dans la rue des
Charrettes, en face de la rue Herbière, en concurrence
avec une autre troupe qui jouait ta comédie au Jeu de
Paume des Braques, situé au bas de la rue du Vieux-Pa-
lais. » (Histoire de Rouen^ p. 5o5.)
De toutes les pièces lyriques jouées sur l'ancienne scène
du Jeu de Paume des Deux-Maures, transformée en Opéra,
nous n'en connaissons qu'une seule, en la possession de
Tun de nos collègues, M. Pelay, qui nous Ta obligeamment
transmise. En voici le titre complet : Proskrpine, tragédie
en musique ornée d'entrées de Ballet, de Machines et de
Changemens de Théâtre, Représentée par TAcadémib
ROYALE DE MUSIQUE établie à Rouen. Imprimée pour ladite
Académie à Rouen, chez Jean-B. Besongne, ru6 Ecuyere,
au Soleil Royal. M.DC.XCV. > C'est un in-40 de 64 pag.
Cette < Tragédie en musique », comme on disait alors, se
compose d'un prologue et de cinq actes, les deux derniers
fort courts.
Quand le Jeu de Paume des Braques, situé au bas de la
rue du Vieux-Palais, eut été détruit par un incendie, le
17 mars 1696, le Jeu de Paume des Deux-Maures, trans-
formé en Académie royale de musique, resta le seul
théâtre de la ville de Rouen.
Peu de temps après, pour un motif resté inconnu, mais
vraisemblablement parce que l'opéra n'y réussit guère,
Tancien Jeu de Paume des Deux-Maures changea encore
une fois de nom. Il abandonna celui à' Académie royale
de musique pour prendre celui de : La Comédie^ devenu
libre par l'incendie du Jeu de Paume des Braques. Car, à
.partir du xviu^ siècle, on trouve constamment : La Co^
a5
3/8
médie^ pour désigner Tunique local où se donnaient alors,
a Rouen, toutes les représentations théâtrales, quel qu'en
fût le genre, tragédie, comédie, opéra, Êarces, vaudeville,
etc.
Cest là que Voltaire vit une troupe d'opéra, dont il parle
dans une de ses lettres, adressée à Thiriot, en 1723 : < Je
suis actuellement à Rouen... où je passe fort bien mon
temps. Il y a ici nombre de gens d'esprit et de mérite,
avec qui j'ai vécu, dès les premiers jours, comme si je les
avais vus toute ma vie. On me fait une chère excellente ;
il y a de plus un Opéra dont vous serez très content \ en
un mot, je ne me plains à Rouen que d'y avoir trop de
plaisir ; cela dérange trop mes études, et je m'en retourne
ce soir à la Rivière, pour partager mes soins entre une
ânesse et Marianne, » Sa santé fort délicate avait besoin
du lait d'ânesse, et il fit en grande partie, à la Rivière-
Bourdet, chez le président et la présidente de Bemières, la
médiocre tragédie dont il parle.
C'est sur ce théâtre aussi que, suivant l'un de nos anciens
collègues, M . De la Quérière, se firent entendre deux des
plus grandes célébrités théâtrales du xviii^ siècle. € Quand
Lekain et W^^ Clairon, dit-il, vinrent à Rouen, la salle de
spectacle existait dans la rue des Charrettes, en face de la
rue Herbière, précisément à côté de l'entrepôt réel du
commerce. On dit que, par sa forme, sa petite étendue et
son peu d'apparence, elle avait beaucoup de rapport avec
la salle du Vieux-Marché. » (Rouen, Revue monumentale^
historique et critique^ i835, p. 76.) M*'* Clairon était ac-
trice de la Comédie de Rouen, en 1739.
Enfin, M . De la Quérière nous apprend encore que Tun
des premiers cafés ouverts à Rouen, fut voisin de la Co-
médie établie dans le Jeu de Paume des Deux-Maures,
c Nous tenons de source certaine, dit-il, qu'il existait au
moins un café dès l'an 1730, lequel était placé près de
l'ancienne Comédie, située rue des Charrettes, en face de
la rue Herbière. Ce café était moins fréquenté par les
3/9
bourgeois que par les acteurs et les habitués du théâtre, d
(Revue rétrospective rouennaise, i853, p. 25.) Pour ce
motif, il portait le nom de « Café de la Comédie. »
Les choses se passèrent à Rouen comme elles s'étaient
passées précédemment à Paris, quand Alexandre- Procope
Couteaux, limonadier, avait fondé, au début du xvin* siècle,
le café célèbre qui devait porter et retenir son nom, dans
la rue de TAncienne-Comédie, à deux pas de la Comédie-
Française, établie, en 1688, dans le Jeu de Paume de
l'Etoile, rue des Fossés-Saint-Germain-des-Prés.
La salle de la Comédie resta l'unique théâtre de Rouen,
pendant toutle xviii^ siècle, jusqu'au 29 juin 1776, où elle
fut remplacée par le Théâtre-des-Arts, que nous avons
tous connu et dont l'ouverture eut lieu, ce jour-là, en
l'honneur du patron de Corneille.
Dès lors, le vieux Jeu de Paume des Deux-Maures ne fit
plus que végéter, recevant des comédiens ambulants^ des
physiciens ou des acrobates, jusqu'au jour où il disparut
complètement, en 1 836, pour permettre d'élever, sur une
partie du quadrilatère de Pontaritaine, la Douane, les
magasins et la cour des Entrepôts et d'ouvrir la rue du
même nom, qui va de la rue des Charrettes sur le quai du
Havre.
Telles furent les destinées de ce Jeu de Paume des
Deux'Maures^ appelé successivement Académie royale de
musiquCy Opéra et La Comédie^ où nos pères allèrent cher-
cher les distractions du théâtre, pendant près d'un siècle et
demi, et dont le souvenir avait si bien disparu que son em-
placement était devenu un petit problème d'histoire locale,
aussi bien que les noms divers qu'il a portés.
L'intérêt qui vous fait accueillir, à chacune de nos
séances. les plus minces détails sur l'histoire de Rouen,
nous donne lieu d'espérer que vous accueillerez le déve-
loppement de ceux-ci.
La commission vote des remerciements à cette très
38o
intéressante lecture. M. de Merval fait observer qu'un
Jeu de Paume fut ouvert à Rouen peu d'années avant
le Révolution. M. de Beaurepaîre donne quelques
détails sur plusieurs Jeux de Paume cités à Rouen
dès le xv« siècle. Ils y ont été, croit M. Bouquet, jus-
qu'au nombre d'une trentaine. Selon la remarque de
M. le Président, ce jeu est resté en grande faveur
parmi les Anglais, qui en ouvrent fréquemment sur
nos côtes, au voisinage des stations de bains.
La Londe. — Monnaies romaines. — M. Gouel-
lain revient sur la découverte de monnaies romaines
annoncée dans la précédente séance. Il donne lecture
d'une lettre de M. Drouet, de Caudebec-lès-Elbeuf, en
date du 17 mars dernier, qui résume la trouvaille.
Elle comprend 120 bronzes, la plupart grand module
(dont plusieurs sont très frustes), de Trajan, Adrien
{14 pièces), Antonin, les deuxFaustine, Marc-Aurèle,
Vérus, Lucille, Commode (i3), Crespine, Septime
Sévère, Julia Domna, Postume (14 pièces). Un Com-
mode porte ce revers rare Pietati senatus,
M. Drouet, non content de décrire ces pièces, offre
au musée départemental quelques-uns de ces bronzes.
Des remerciements lui sont votés.
Place de la Calende. — Chapelle de Morgny. —
Sous ce titre, M . de Beaurepaire lit une note dont
voici le résumé :
PLACE DE LA CALENDE.
Je suis très porté à supposer que le portail de la Calende
tire son nom de rassemblée dite Calende, parce que l'ap-
pel ou, comme on disait, la vocation des ecclésiastiques,
tenus à comparaître à cette assemblée, se faisait des degrés
38i
ou marches de ce portail. Le même nom de Calende au-
rait été assez naturellement donné à la place voisine.
On appelait petite Calende l'assemblée annuelle des
ecclésiastiques d'un doyenné, par opposition aux assem-
blées générales de tout le clergé du diocèse, qui se tenaient
deux fois par an, à des époques réglées, et qu'on appelait
synodes. Mais Calende, sans autre qualification, pourrait
bien avoir été^ plus anciennement, un terme générique
pour designer les assemblées ecclésiastiques.
Quoi qu'il en soit, au point de vue étymologique, je ne
saurais voir, dans ce mot, une autre signification que celle
de vocation ou d'appel.
A une époque ancienne, le même mot de Calende dési-
gnait aussi, à Rouen, une confrérie de prêtres de la ville
de Rouen, dont le siège, pendant longtemps, fut fixé dans
l'église de Saint-Nicolas. On conserve aux Archives de la
Seine-Inférieure, dans le fonds de Jumièges, une charte de
Richard, curé de Saint-Sauveur, et des prêtres de la Ca-
lende de Rouen : « Ricardus, ecclesie S. Saîvatoris près-
byteTy et tune decanus^ et compresbiteri Kaîende que est
apud Rothomagum. 1^ La Charte est de i2o5. Il est fait
mention, dans une autre charte de 1201, d'un achat de
rente fait par le Chapitre, concessione sacerdotum de Kalen-
da (j).
Nous ne nous occupons, dans cette note, que de la
place dite de la Calende.
Le 2 juillet 1 504, la Ville accordait à Richard Perchart,
curé de Saint-Gervais de Paris et chanoine de la cathé-
drale de Rouen, la permission de fiaire élever une croix de
pierre sur cette place, sous réserve toutefois que cela ne
(i) Arch. de la S.-Inf., F. du Chapitre. — « Nos decanus et
presbyteri Kalende Rothom. tradidimus Galtero de Bosco Guil-
lelmi, fabro, . . . juin i23i, Cart. de S.-Ouen, n» 29, f" 47 v».
Andréas, clericus, procurator Kalende Rothom. avril 1254, Ibid,
f» 41. — Decanus et fratres Kalende Rothom,, août 1280, F. de
S.-Amand.
382
pourrait « porter aucun préjudice à la Ville ni aux libertés
d'iccUe ». De son côté, le même jour, le Chapitre avait
donné à Perchart, la même permission et à peu près dans
les mêmes termes, ce qui nous oblige à conclure que, dès
ce temps-là, la propriété de cette place était un sujet de
litige entre le Chapitre et la Ville.
Le 1 3 septembre suivant, cette croix était achevée, et les
chanoines décidaient que le lendemain, jour de l'Exalta-
tion de la Sainte Croix, une procession se ferait autour de
ce monument dû à la piété de leur confrère. La même céré-
monie eut lieu, chaque année, à la même fête, conformé-
ment au contrat de fondation de Perchart.
Pommeraye dit que cette croix fut posée aux dépens
d^un honorable bourgeois nommé Flandrin. Il n'a point
fait attention que ce particulier, Michel Flandrin, n'était
que le mandataire de Perchart (i).
Cette croix, ajoute Pommeraye, demeura sur la place
de la Calende depuis Tan i5o4 jusqu'à l'an 1614 (2),
« que la Calende, qui a tant de fois changé, fut fort embellie
d'un grand bâtiment qui fait face à ce portail, et qui sert
d'une grande salle pour les pauvres deTHôtel-nieu. »
Il désigne ainsi le bâtiment qui fut élevé en vertu d'une
délibération des compagnies souveraines, du 8 mars 1676,
confirmée par un arrêt du Conseil, du 9 janvier 1677, et
dont la construction fut confiée à l'architecte Gravois. Ce
bâtiment subsiste encore, mais il a perdu un de ses pavil-
lons.
Une nouvelle croix, moins haute et moins large que
celle de Perchart, fut placée en vertu d'une délibération
du 16 février 1680, ainsi conçue :
« M. Cathelan, administrateur en charge (de l'Hôtel-
Dieu), fera mettre une croix au milieu de la place de la
Calende, avec quatre bornes aux quatre coins, pour mar-
(1) Voir Délibérations capitulaires, 2 juillet 1504.
(2) Elle figure sur le plan du Livre des fontaines de Le Lieur.
383
quer la place commune entre MM. du Chapitre et THôtel-
Dieu et un lieu de cimetière, suivant qu'il est porté par
le contrat d'acquisition fait par ledit Hôtel-Dieu de MM. du
Chapitre. »
La croix de la Calende figure sur les plans de Rouen du
dernier siècle. Ce monument religieux et les bornes de
pierre qui entourent la place indiquent que le terrain avait
été bénit. Mais, à cette époque et depuis longues années
déjà, les chanoines avaient beaucoup de peine àendéfendre
le caractère sacré, non seulement contre le Domaine et
contre la Ville qui voulaient y établir un marché (i), mais
encore et surtout contre les profanations de la foule. «Les
charlatans et vendeurs de chansons, lisons-nous dans une
sentence de 1716, s'oubliant du respect dû aux lieux
saints, avaient l'insolence de se placer au pied de la croix,
et, pour se procurer le débit de leur mauvaise marchan-
dise, y chantaient des chansons profanes et assez souvent
capables d'offenser les oreilles chastes. » Le bruit de ces
chants troublait l'office divin qui se fiaisait dans les cha-
pelles des Vœux, du Saint-Esprit et de Saint-Romain. Sur
la plainte du procureur fiscal, le bailli de la haute-justice
du Chapitre autorisa, en 1716, l'huissier des chanoines à
chasser ces chanteurs, à saisir leurs enseignes, leurs livres
et leurs feuilles. Plusieurs années après, mêmes abus et
mêmes plaintes. On voyait encore sur cette place, comme
si c'eût été un marché public, au jour des halles, des char-
(i) Aream in qua venduntur casei et ova prope ecclesiam Ro-
thomagi, 1 2 mars 1 29 1 . M. Chéruel, Histoire de Rouen, I, p. 204.
— Plateam vacuam in qua venduntur ova, dictant la Calende,
xve siècle. Cart. de N.-D., no 9, f» 56 v«. — i5 février i5o8,
ordre aux marchands de hareng blanc et sor sur la place de la
Calende d'aller à Tavenir à la place de la Basse-Vieille-Tour. Ils
devaient être remplacés, sur cette place, par les marchands de
fruitage, qui seraient retirés de la Basse- Vieille-Tour. On allègue
comme raison de ce changement Tinfection causée par le hareng.
Arch. de la Ville, Délibérations.
384
latans, des vendeurs de chansons, des joueurs de gobelet,
qui s'installaient au pied de la croix et qui y attachaient
même leurs tableaux. Il s*y engageait des querelles qui
troublaient le repos des malades de T Hôtel-Dieu. Souvent
aussi des manœuvres se permettaient de ranger là leurs
charrettes, leurs brouettes et leurs hottes, et les enfants
s'y donnaient des rendez-vous pour leurs divertisse-
ments (i).
Aux deux derniers siècles, c'était autour de la croix de
la Calende que le clergé de la cathédrale faisait l'adoration
à la procession des Rameaux et la commémoration des
morts le jour de la Toussaint (2). Aune époque antérieure,
ces cérémonies s'étaient faites dans la portion du cimetière
attenante à la nef méridionale, que Ton appelait le grand
aître, près de la loge aux maçons (3).
ANCIENNE CHAPELLE A MAUDÉTOUR.
Dans sa Géographie de la Seine-Inférieure, notre col-
lègue, M. l'abbé Tougard, fait mention d^une chapelle,
située en ce lieu, et qui aurait été détruite auxvi* siècle.
Il y avait longtemps, d'après la tradition conservée dans
le pays, que cette chapelle avait cessé d'exister, lorsque
M. Pierre Duval, secrétaire du Roi, maison et couronne
de France, sollicita de l'archevêque la permission d'en éta-
blir une autre, en remplacement, sous le même titre, dans
son château de Morgny.
Uautorité ecclésiastique prescrivit, au préalable (1728),
une information, dont il fut dressé un procès-verbal au-
quel nous empruntons quelques renseignements, qui pour-
(i) Arch. de la S.-Inf., F. du Chapitre, G. 2423.
(2) 2 nov. 1604, on revient « à l'usage de toute antiquité de
faire, à Tentour de la croix de la Calende, la procession du jour
des morts. » Délibérations capitulaires.
(3) Arch, de la S.-Inf. G. 2639. Ces processions s'y faisaient
encore en i583.
385
raient bien être les seuls que Ton ait conservés pour
rhistoire de cette chapelle.
L'édifice en question était situé à cent pas environ du
manoir seigneurial de Maudétour.
Près de là était une grosse butte de terre qui avait,
disait-on, servi d'emplacement au château primitif. En
fouillant on y avait trouvé un escalier de pierres de grès,
du charbon et des fragments de poterie.
Anciennement la chapelle et la butte étaient entourées
de larges fossés. M. Duval les avait fait combler, et avait fait
abattre de fort gros arbres qui avaient poussé sur les
ruines.
En démolissant le restant des murs, on avait mis à jour
« plusieurs corps, à rengée les uns des autres, dont la tête
et les ornements se tenoient en leur entier. » Un de ces
corps n'avait pas moins de 6 pieds 2 pouces, d'après la
mesure qu'en prirent les ouvriers.
Au XVII* siècle, le château de Maudétour avait appar-
tenu à la famille de la Bazoge, dont les représentants
se réfugièrent en Hollande pour cause de religion (1).
(i) Le fief de Maudétour, demi-fief de haubert, relevant du
Roi à cause de sa vicomte de Rouen, situé en la paroisse de
Crevon, avait été vendu, le 26 mai i53i, par Antoine dePoissy,
à Denis Hédou. Le 22 octobre 1564, il appartenait à Jacques
Gallet, écuyer, dont un des descendants, des mêmes nom et
prénom, eut pour héritier son neveu, Guillaume de la Basoge,
conseiller au Parlement de Normandie, qui en rendit aveu le
10 avril 1669. Bans Taveu de Philippe de la Basoge, seigneur
du dit lieu de la Basoge, de Chèvreville et de la Vallée, pour le
fief de Maudétour, qui lui appartenait en sa qualité de fils et
héritier de Guillaume de la Basoge. conseiller au Parlement, on
signale, comme ayant été incorporé au fief de Maudétour, une
portion de fief dit le fief de Sainte-Marguerite, contenant
26 acres en 3 masures, « sur lequel il y avoit place de chapelle
ancienne, au droit de laquelle le curé dudit lieu de la Pomme-
raye perce voit la dixme... et à ce moyen sujet de dire ou faire dire
386
C'était à eux qu'on attribuait la suppression de la cha-
pelle. On les accusait d'avoir, par leurs mauvais traite-
ments, oblige le chapelain à se retirer ; d'avoir employé le
fût de la croix comme support pour le cadran de leur châ-
teau ; d'avoir fait perdre à la cloche son usage sacre, en la
faisant servir à l'appel des vassaux le jour des plaids.
Un meilleur sort avait été réservé à la statue de sainte
Marguerite, sous le vocable de laquelle la chapelle était
dédiée : cette staïue se retrouvait dans Téglise de Quin-
campoix.
Il est assez extraordinaire qu'on ne sut dire au juste sur
quelle paroisse cette chapelle était située. Les uns disaient
que c'était sur Crevon, d'autres que c'était sur La Pom-
meraye.
Le Pouillc du diocèse de Rouen de lySS place la cha-
pelle de Sainte-Marguerite à La Pommeraye,et lui donne
pour patron l'archevêque de Rouen.
Armoiries du manoir Méry. — M. Paul Baudry
complète dans les termes suivants sa communication
de la dernière séance :
Dans la séance dernière, je vous ai signalé, à propos de
l'ancien manoir Méry, de Saint-Sever, des armoiries en
plâtre, que la bienveillance du dernier propriétaire de cet
immeuble, M. Quesnel, m'a permis de recueillir, lors de
l'expropriation faite par le chemin de fer d'Orléans.
Je m'étais contenté de dire que ces armoiries portaient
deux poissons et trois fleurs sortant d'une même tige.
M. Gouellain, qui possède et qui a su interpréter ces
mêmes armoiries sur un plat, daté de 1650, lequel fait
messe en ladite chapelle aux jours de dimanche et aux festes
solennelles et livrer au seigneur une poignée de chandelles de
cire le jour Sainte Marguerite, » 20 février 171 5.— Archives de
la Chambre des Comptes. La Basoge et Chèvreville sont deux
communes de Tarrondissement de Mortain (Manche).
387
partie de sa riche collection, m*a mis à même de compléter
mes renseignements.
Ce sont celles des Legendre, sieurs de Romilly, dont un
représentant, Guillaume, fut conseiller au Parlement de
Rouen en 1695. L'Armoriai de M. de Merval, qui donne
cette dernière indication, traduit ainsi TÉcu : « Coupé
d'azur et d'argent ; l'azur chargé de deux poissons d^ar-
gent, posés en fasce, l'un au dessus de l'autre, le second
contourné ; l'argent chargé d'un rosier de sinople à trois
branches, chaque branche terminée par une rose de
gueules. »
Voilà donc un nouveau titre de gloire pour les annales
du manoir Méry.
Rouen. — Poteries et autres fragments. — M. Pelay
fait passer sous les yeux de ses collègues divers objets
recueillis par lui, le 2 1 mars dernier, dans la nef de
Tancienne collégiale Saint-Georges. Ils lui ont paru
provenir d'une sépulture. La ferrure peut appartenir
à un cercueil; un gros clou est d'attribution moins
aisée.
M . Gouellain pense que les vases sont en grès et de
la fabrication de Martincamp, près Neufchâtel. Ils
doivent dater du xvi« siècle et avoir servi à la phar-
macie.
Eglise Saint-Sever. — M. Paul Baudry a recueilli,
sur la place de Téglise Saint-Sever, plusieurs frag-
ments de pierre, qu'un œil exercé pourrait sans doute
dater. Il les croit appartenir à Tune des églises primi-
tives de Saint-Sever et antérieure à celle qui a disparu
vers 1860.
Cimetière antique à Etrépagny. — A la fin du
mois dernier, un cimetière qui peut être mérovingien,
s'est révélé à Etrépagny. Le Patriote, dans un de ses
y^
388
premiers numéros d'avril, y signale environ 25 sar-
cophages en pierre de Saint-Gervais, généralement
orientés. Tous avaient été violés. Ils étaient accom-
pagnés de fragments céramiques de toute sorte et de
deux épées.
Vierge en ivoire. — M. Bligny, de Rouen, ancien
agent de change, offre aux archives de la Commission,
par rintermédiaire de M. Maillet du BouUay, la belle
héliogravure d'une statue de la sainte Vierge, achetée
par lui à Aix. Elle ne mesure pas moins de 45 centi-
mètres de hauteur. C'est une des plus grandes pièces
d'ivoire que Ton connaisse. La Commission remercie
M. Bligny du bon souvenir qu'il conserve de sa ville
natale.
La séance est levée à quatre heures moins le quart.
Le Secrétaire intérimaire,
A. TOUGARD
389
SÉANCE DU 3o MAI 1884
La séance ouvre à deux heures, sous la présidence de
M. Ch. de Beaurepaire, vice-président.
Étaient présents : MM. Adeline, Paul Baudry, Bil-
liard, de Glanville, Gustave Gouellain, Lefort, Tabbé
Loth, de Merval, Pelay, Pabbé Robert, de la Serre et
Tabbé Tougard, chargé du procès- ver bal.
Il donne lecture du procès-verbal de la dernière
séance [du 7 avril), qui est adopté sans observation.
Se sont excusés : MM. Maillet du Boullay, retenu
par l'organisation de l'Exposition ; et Brianchon, qui
informe la Commission de divers faits dont il sera pris
connaissance au cours de la séance.
La correspondance imprimée comprend : Société
des Antiquaires de France, vol. XLV (1882); —
Discours de M. Fallières au Congrès des Sociétés
Savantes, le 19 avril 188 5, 11 pp. in-40 ; — Bulletin
de la Société archéologique de r Orléanais, n® 118;
— Bulletin historique et archéologique des Anti-
quaires de la Morinie, n® 129; — Bulletin de la So-
ciété des Antiquaires de Picardie, année i883, n® 4;
— Bulletin du Comité des travaux historiques et
scientifiques, année i883, n® 2; — Bulletin delà
Société des Antiquaires de l'Ouest, i883, no4; —
Académie de Besançon, 1882 ; — Mémoires de la
Société historique de Langres, vol. III, 1884. —
Enfin, cinq brochures in-80 et une brochure in-40
(avec figures), en norvégien et en latin, sont venues de
Christiana. La Commission offrira un Bulletin en
remerciement et par voie d'échange.
Clocher de Caudebec-lès-Elbeuf. — Demande de
classement. — La correspondance manuscrite consiste
en une lettre de M. le Préfet, demandant Tavis de la
Commission sur le classement du clocher de Caudebec-
lès-Elbeuf, réclamé par la fabrique de cette église.
Les explications données par M. Lefort démontrent
que cette tour est intéressante et mérite la faveur qu^on
veut obtenir. MM. Tabbé Loth et le chanoine Robert
parlent dans le même sens : cette tour aurait été par
deux fois menacée de démolition, puis on aurait résolu
de ne point la réparer afin de la laisser tomber de sa
belle mort : mais un certain nombre d'habitants tient
à ce reste des anciens âges et veille à sa conservation.
M. de Glanviile estime que cette tendance est louable
et trop rare pour qu'on ne la favorise pas énergique-
ment. En conséquence, la Commission décide, à une
très grande majorité, qu'il y a lieu de prendre en consi-
dération la demande de classement.
Porche de la Vieux-Rue. — Avis favorable au claS'
sèment, — M. Gouellain rend compte de la visite qu'il
a faite, le 19 avril dernier, avec notre collègue M. Pelajr,
à l'église de la Vieux-Rue, en vertu de la délégation
qui lui en avait été confiée par la Commission.
Sans être fort beau, le porche de cette église est à
conserver. Ses sculptures accusent Tépoque d'Henri III
ou d'Henri IV, et ont beaucoup d'analogie avec celles
de la maison qui termine la rue de la Vicomte dans la
Grande-Rue. Ses parties principales sont solides; il
faudrait seulement supprimer l'arcade de brique et
pierre qui a remplacé les deux poteaux de bois de l'en*
trée. La clef de voûte est datée 1753 (et non 1752,
comme le dit le Répertoire archéologique). Nos con-
39 1
frères ont conseillé au mairedes^adresserà la personne
qui a réparé le porche de Ry et de lui demander un
devis estimatif.
Ils souhaiteraient qu'à Toccasion du classement du
porche, on classât également le baptistère qui date du
xin^ siècle, et présente sur ses trois grandes faces une
curieuse suite de personnages non encore expliqués.
La Commission entre dans cette pensée. M. le Prési-*
dent prie donc M. Gouellain de rédiger un rapport
motivé, qui sera soumis à M. le Préfet pour appuyer la
demande de classement.
Morgny. — Inscription funéraire, — Au cours de
leur excursion, nos confrères ont relevé dans l'église
de Morgny Tinscription suivante :
Cx devant gist M, Pierre Mulotin, natif de St Valéry en
CauXy Prêtre, Curé de Morgny, décédé le 3 May
1707^ lequel laissa 680 /. po^ payer les contretables du
chœur et des 2 chapelleSy avec j56 L 2 s. 6 d. po^ fonder
une basse Messe à perpétuité en cette église,
Lillebonne, — Découvertes archéologiques, — La
lettre de M. Brianchon signale à la Commission un
fond de poterie romaine en terre rouge, trouvé en avril
dernier près du manoir d'Alincourt, et qui laisse lire
à rintérieur CARANTINL Non loin de là s'est révélé
une sorte de puits absorbant, à pierres perdues, d'en-
viron un mètre de diamètre, qui semble également
romain. Enfin deux monnaines d'argent ont été cou-
ramment interprétées par le conservateur-adjoint du
musée départemental.
Lillebonne. — Théâtre romain, — La précinction
inférieure appelle d'urgentes réparations, sans les-
392
quelles les étrangers pourraient croire que ce curieux
monument est laissé à Pabandon. M. de Glan ville
appuie cette demande en faisant observer que, lorsque
la réparation nécessaire devient trop considérable, elle
prend les proportions d'une reconstruction partielle,
et court ainsi grand risque de défigurer les restes qui
en sont Tobjet.
Lillebonne, — Clocher, — Notre collègue s'applaudit
du beau travail de consolidation exécuté à la tour de
Téglise par notre confrère M. Sauvageot, avec autant
de talent que de célérité. Commencé en octobre der-
nier, il a été terminé en février suivant.
Saint'GeorgeS'de'Boscherville, — Dalle tumulaire,
— Enfin, M. Brianchon signale au nombre des objets
qui mériteraient un emploi opportun du reliquat du
crédit des monuments historiques, la belle pierre tom-
bale de Saint-Georges « qu'il serait si facile de recou-
vrir d'une glace biseautée assujettie par des baguettes
de cuivre. » M. Tabbé Tougard observe qu'elle est
ordinairement recouverte d'un tapis. Mais M. Pelay
pense que les dangers de détérioration sont sérieux, et
propose de la relever contre un des murs de l'église.
Graville-Sainte-'Honorine. — La liquidation du
compte des dépenses faites au tombeau de Malet, de-
mandée par M. le chanoine Robert, lui est renvoyée
pour modification et complément du dossier.
Dalles du Musée d'Antiquités. — La mention du
tombeau de Saint-Georges amène M. Lefortà déplorer
les dégradations qu'ont subies, du fait des intempéries
de Tair, les splendides dalles adossées à la muraille
.extérieure du musée départemental. Mieux eût valu,
cent fois, les laisser à leur emplacement primitif que
■•^i.
393
de les soumettre ainsi à des chances fatales de destruc-
tion. La pluie en fouette les parties supérieures; et
régoût, en rejaillissant du sol, mine avec plus de
dommage encore le bas de ces merveilleuses sculp-
tures. On a bien proposé de munir le bâtiment de
gouttières; mais comme la construction appartient à la
ville, cette dépense devient un sujet de contestation
entre elle et le département.
Mais pourquoi la Commission ne solliciterait-elle
pas de Tadministration départementale un crédit spécial
pour protéger les dalles au moyen d'auvents, et les
mettre à Tabri des infiltrations du sol à Taide d'une
lame de plomb ? Il y a urgence, vu le peu de temps
qui reste pour préparer le dossier de la prochaine
session du Ck>nseil général. Aussi la Commission
donne-t-elle à l'unanimité pleins pouvoirs à M. le
Président pour s'entendre avec M. Lefon, aux fins de
présenter à très bref délai une demande motivée, des-
tinée à prendre place dans le rapport du Préfet au
Conseil général.
Collections normandes au XVIIfi siècle, —
M. Tabbé Tougard croit utile de transcrire pour le
Bulletin deuj, pages du livre écrit sur V Utilité des
Voyages par l'académicien Baudelot de Dairval (édi-
teur des Voyages du Rouennais Lucas), réimprimé à
Rouen en 1727 avec notes de Mahudel, autre membre
de l'Académie des Inscriptions.
L'auteur termine son tome II par la liste des plus
célèbres collections de France, et en signale dans les
villes de Saint-Denis, Reims, Châlons-sur- Marne,
Amiens, Dijon, Besançon, Strasbourg, Lyon, Avi-
gnon, Aix, Marseille, Nîmes, Montpellier et Toulouse.
26
394
Mais Rouen est la seule ville oîi il en compte jusqu'à
huit.
Il faut regretter qu'il ne se soit pas alors trouvé
quelque zélé publiciste qui nous ait laissé une descrip-
tion assez détaillée de ces collections, comme M. de
Lérue Ta tenté naguère pour les plus belles pièces de
nos confrères, MM. Gouellain, d'Iquelon ei P. Bau-
dry. A son défaut, nous recueillerons avec soin ces
lignes par trop sommaires (vol. II, pp. 447-449).
Rouen. — M, de Pontcarré, premier Président au Par^
lement de Rouen^ a une bibliothèque fort belle et considé-
rable par le nombre et le choix des livres, et un recueil
des plus amples de tous les auteurs qui ont écrit de This-
toire de PYance. Son cabinet de curiosités mérite aussi
d'être vu ; mais son médailler qui est très riche et très
ample, est estimé des connaisseurs comme le plus parfait
sans contredit en argent qu'il y ait en Europe. Il est entre
autres composé de celui de M. Foucault, conseiller d'Etat,
de celui de M. le marquis de Seignelai, et de plusieurs
autres. Le grand nombre de médailles rares et uniques
qui s'y trouvent, et que cet illustre magistrat se fait un
plaisir de montrer aux savants ; ses conversations savantes
et ses manières obligeantes dédommageront amplement la
peine de ceux que leur curiosité fera venir en cette ville.
Le R. P. de Grainviîle^ Jésuite du collège^ a aussi un fort
beau médailler et bien assorti (i).
Les PP. Capucins ont un recueil d'estampes considé-
rable, et outre cela quantité de coquillages, de curiosités
et d'animaux, qui ornent bien leur bibliothèque.
M. Le François a un assez beau cabinet, où l'on trouve
(i) Cet habile antiquaire, né à Rouen où il mourut en lySo, a
publié une quinzaine d'ouvrages dont la plupart sont des mé-
moires archéologiques, insérés dans le Journal de Trévoux et
parfois réimprimés.
39 5
quantité de coquillages, de pétrifications, de marcassites,
d'habits et d*armes de sauvages ; plusieurs agathes et autres
pierres gravées et non gravées : des couteaux pour les
anciens sacrifices, et quelques tableaux des plus habiles
maîtres, comme du Titien et autres, etc.
M. Le Moyne a aussi un cabinet très riche en livres de
conséquence, et autres curiosités différentes très recher-
chées, avec nombre considérable de volumes d'estampes
reliés très proprement.
M. Lucet a assemblé beaucoup de coquillages, et a un
choix de fort beaux tableaux.
Af. Guérin mérite aussi d'être cité pour avoir nombre
de beaux tableaux.
M. de Laisemontj maître apothicaire et très habile
artiste, a plusieurs préparations chimiques très curieuses.
Dieppe. — M.Féret, apothicaire, sedistingue dans la ville
par un amas de diverses curiosités naturelles, auquel il
ajoute quelques médailles et monuments antiques.
M. de Beaurepaire constate que Rouen devait être
assez pauvre, en tableaux du moins, puisque Descamps
affirmait vers 1 760 qu'il n'y en avait pas à Rouen
pour 3o,ooo fr. M. Paul Baudry fait observer qu'il y
en eut peu après une belle galerie dans la famille
Ribard. Descamps contribua plus que personne à
propager ici Testime des bonnes toiles.
Souvenirs de pèlerinages. — M. Gouellain fait
passer sous les yeux de ses collègues deux figurines en
argent représentant saint Michel terrassant le dragon.
Les connaisseurs les datent du temps de Louis XI H.
Elles sont rares en ce métal.
M. de Beaurepaire donne lecture des notes sui-
vantes :
396
COLONIE ROUENNAISB A ARRAS.
Le document qui suit, emprunté par nous à un re-
gistre du cahier de nos archives municipales, indique
pour quelle part la ville de Rouen fut appelée au repeu-
plement d'Arras, après que le roi Louis XI, en punition
de ses révoltes, eut supprimé son nom, auquel il voulait
que fût substitué celui de Franchise, c Le Roi, dit Duclos
{Histoire de Louis X/, t. I, p. 38o), pour s'assurer des
nouveaux habitants et obliger les villes d'où il tiroit des
ménages entiers à faire de bons choix, fit avancer par
chacune de ces villes cinq cents écus, à ceux qui en sor-
toient pour venir s'établir à Ârras ; ainsi elles choisirent
des gens laborieux afin qu'ils pussent rendre les sommes
qu*on leur avançoit. i
€ En ung cahier de parchemin est contenu comme, Tan
M. un c un zx^ le Roy envoia en la ville d' Arras, qui est
là appellée la ville de Franchise plusieurs mesnagiers pour
y demeurer, ausquelz fust à ceste fin baillé argent par
ceulx de leurs estatz, ce qui fust amesnagé par les com-
missaires que le Roy envoia audit lieu ; et, de la dite part
de la ville de Rouen, furent lesdicts commissaires M. Guil-
laume de Serizey, conseiller du Roy et Tung des dictz
commissaires, sire Mahieu Du Reaulme, Tung des conseil-
lers de la ville de Rouen, et Pierre Daré, secrettaire du
Roy.
Les mesnagiers y envolez de Rouen comme il ensuit :
Denis de la Vallée, Jehan Le Cordier, Jehan Coignon,
CoUin Le Bourg, Guillaume Le Lorry, tisserans de draps.
Jehan Baillemont, Henry Bonhomme, Robin Pépin,
Guillaume Dupire, Jehan de Villiers, Collin Morice, Chris-
tophe Miche, foulions, lesquels recongnoissent que par les
dicts commissaires leur avoit esté faict bailler S60 livres
de fine laisne, au prix de trente 1. vallans 108 1., et oultre
preste la somme de 36 1., pour paiement desquelles
397
sommes ils promettent, tous ensemble, livrer les draps
qu'ilz feront pour estre sur ce paiez.
Tous lesquelz autres mesnagiers cy-après nommez ne
sont tenus à restitution, ains reçoivent pour composition
les sommes cy-après :
Pierre Le Thiais, dinant, lx 1.;
Robinet Hedin, sainturîer, xl 1. ;
Denis Vastel, Collin Maugart, taverniers, chacun iiii» l.;
Robinet Dufour, paticier, xxx 1. ;
Adam Louvel, poulaillier, xl 1. ;
Guillaume Guillos, tireur de fil de fer, xl 1. ;
Jehan Credes, tisseren en thoilles, xx 1. ;
Guillaume Auzoult, ballencier, xl 1. ;
Geuffroy Guilebert, plastrier et couvreur de pierre,
xxx 1. ;
Cardinot Hugues, savatier, xxx 1. ;
Jehan Le Moine, mesguicher, xxx 1. ;
Oliivier Blondel, hostelier, xxx 1. ;
Geuffroy Babou, hostelier, iiii« 1. ;
Jehan Du Douit, chandelier, iiii" 1.;
Colin Le Bas, esguilletier, xl 1. ;
Guillaume Asselin, boursier, xl 1. ;
Pierre Grout, paticier, xl 1.;
Robin Autrefoy, couvreur, xl 1. ;
Jehan Desprez, mareschal, xl. ;
Robinet Le Maignen, cordonnier, xxx 1. ;
Thomas le Thieullier, potier de terre, xx 1. ;
Guillaume Delisle, cuisinier, xx 1. ;
Anthoine Roussignol, artillier, xx 1. ;
19 ouvriers delaisne, chacun lx s. ;
Pierre Mauger, mareschal, Girrart Fossart, sellier, Ul-
fran Callot, orfebvre, Jehan Gaudray, broudeur. Robinet
Perquin, miroier, chacun xl s.
Jacques More, bastier, Jehan Le Portier, tanneur, Au-
gustin De la Mare, tapissier, Pierre Dupont, charon,
Ëstiennot le Fourmagier, estaimier, Pierre Des Hayes,
398
mesquicher, Pierre du Liais, faiseur de traict, Jacques
Turgis, cordonnier, Jehan Du Buse, cordier, Jehan Guerin,
casublier, Jehan Feré, chacun xl s.
Le tout jouxte une quittance passée devant Guillaume
Escoullant, clerc et greffier des eschevins de la dite
ville t.
La ville de Rouen fournit à Ârras, quelques années
après, des entrepreneurs et des artistes, pour des fêtes qui
furent offertes à la Reine. La dépense fut considérable et
ne fut pas payée sans difficulté. Etienne Ponchel ou Pin-
chon, de Caen, échevin d'Arras, se trouvait de passage à
Rouen, les entrepreneurs firent arrêt sur ses biens, ce qui
donna lieu à un long procès devant le lieutenant général
du bailli de Rouen. Il en fut question en plusieurs au-
diences (i).
L'affaire n'est indiquée avec quelque clarté que dans le
jugement provisoire du 22 décembre 1483, dont voici les
termes :
« Dudit jour de relevée, devant P. Raoulin (lieutenant
général du bailli).
( Sur un arrest fait par Robinet Diquelon, sergent, à la
requeste de Robinet Pinel et maistre Guillaume Le
Maretz par vertu du privillège aux bourgois de ceste ville
de Rouen (2), pour la somme de i ic 1. t. sur deux chevaulx
[sic) et autres biens apparienans à Estîenne Ponchel, de
Caen, l'un des echevyns de la ville de Franchise, estans en
la maison de Guillaume Viel, de Sainct Estienne aux Ton-
neliers, et laquelle somme les dessus dits demandeurs
disoient leur estre deue pour raison de l'Entrée que ledit
Pinel et autres ses compagnons et complices disoient avoir
faiz, à la requeste dudit Ponchel au joyeux advenement de
noire très redoublée et très honnorée dame la royne de
(i) Archives du Palais de justice, Registres du bailliage.
(2) Privilège des bourgeois de Rouen de ne pouvoir être
distraits de leurs juges naturels.
399
France, lequel arrest ledit Pînchon (sic) voulloit deffendre
par plusieurs raisons, en demandant délivrance desdits
biens arrestez, lesdictes parties ouyes, appoincté fut que
ledit Michel aura délivrance des dicts chevaulx et autres
biens arrestez, en baillant piège audict Dicquelon, sergent,
de respondre dudict arrest, et en surplus ladicte matière
fut continuée jusques aux prouchains plés à ma ce d'aprez
Noël prouchain, pour apporter leurs fais, sauf aprez les-
dicts fais baillés, à mectre et traicter ladicte matière en
extraordinaire, se faire se doibt. Et, ce fait, ledict Guil-
laume Viel pleiga et cauxionna ledict Ponchel d*ester à
droit sur ledict arrest, dont ledict Robinet Diquclon,
sergent, fut content (i). »
Robert Pinel fut à Rouen l'organisateur des fêtes que
nos échevins offrirent à Charles VIII lors de sa joyeuse
Entrée. C'était un poète, un machiniste et vraisemblable-
ment un compositeur de mystères, ainsi que ses associés
maistre Gaultier Mareis ou Marais ou du Marais et Jean
Mareis ou Marais ou du Marais. Il m'a paru indispen-
sable de faire connaître leur nom sous sa véritable forme.
Le fait dont il est ici question, intéressant à noter pour
l'Histoire de Rouen, n'avait pas échappé à l'attention de
M. Edouard Gosselin (2).
TABLEAU DONNÉ A LA VILLE DE ROUEN PAR M. DE LA
BOURDONNA YE.
Louis-François de la Bourdonnaye, chevalier, marquis
delà Bourdonnaye, seigneur de Launay, Loyselinière, etc.,
(i) 7, 29 janvier, 6, 7, 10 février, 5 mars i683 (v.) 22, 23 mars
1484. Le nom de maître n*est donné qu*à Gaultier Marais, qui
pourrait bien avoir été le poète de la compagnie. ^ Robinet
Pinel paraît avoir joui d'une certaine fortune et d'une véritable
considération à Rouen.
(2) Voy. Recherches sur les origines et l'Histoire du Théâtre
à Rouen, 1868, p. 17.
400
conseiller du Roi en ses Conseils, et maître des Requêtes,
fut Intendant de la Généralité de Rouen de 1733 à lySS.
Il était fils dTves-Marie de la Bourdonnaye qui avait été
Intendant de la même Généralité à la fin du xvn« siècle.
Il composa deux Mémoires, Tun sur rutilitédes machines
propres à suppléer le travail des hommes ; Tautre, intitulé :
Réflexions sur ce qui pourroit contribuer à la perfection
des édifices publics.
Peu d'Intendants ont laissé à Rouen de meilleurs sou-
venirs, et ont fait preuve de plus de capacité.
M. de la Bourdonnaye était né à Bordeaux le 12 juillet
1700. Il mourut au château de la Bourdonnaye, en Bre-
tagne, le 12 juillet 1779 (i).
En quittant Rouen, il avait fait don à cette ville d^un
grand tableau de Mignard représentant Louis XIV à che-
val. La lettre par laquelle il priait les échevins d'agréer
cet hommage fut insérée dans les Registres des délibéra-
tions. Elle mérite d'être conservée parce qu'elle peut mettre
sur la voie d'une oeuvre d'art remarquable, qui n'est, peut-
être, qu'égarée.
A Paris, le 23 juillet 1755.
V J'ay à Rouen, Messieurs, un tableau que j'imagine qui
pourra convenir, tant à cause de sa grande proportion, que
du sujet qu'il représente, dans une des salles du nouvel
hôtel-de- ville, à l'élévation duquel vous allez commencer
à donner vos soins. C'est un portrait de Louis XIV à che-
val, peint par Mignard. Le Roy le donna luy-mesme dans
le temps à M. le premier président de Novion, mon ayeul
maternel, de qui il me vient. Je ne puis en faire un meil-
(i) La famille de la Bourdonnaye portait pour armes : de gueules
à 3 bourdons d'argent en pal. Le marquisat de la Bourdonnaye
avait été érigé par lettres de février 1717, en faveur d'Yves-Marie.
On peut voir Téloge de Louis-François de la Bourdonnaye dans
les Mémoires de l'Académie de Rouen, t. IV.
40I
leur usage que de le destiner â un lieu dont les portraits
des rois doivent faire Tornement le plus naturel et le plus
décent. Je vous prie de recevoir le présent que j'en fais à
Phôtel-de-ville. C'est un témoignage du zèle que j'ay tou-
jours eu, et que je ne perdray jamais, pour tout ce qui se
raporte au bien et à l'avantage de cette ville, et j'espère
qu'il pourra servir quelquefois à vous faire souvenir de
moy et à vous rappeler -la mémoire du temps que j'ay
passé avec vous.
Si MM. de Sassetot et Bigot veulent consentir à garder
ce tableau pendant quelque temps dans la maison que
j'occupois, je crois que le mieux que vous puissiez faire
est de Ty laisser jusques à ce que vous ayiez un endroit
où pouvoir le placer à demeure.
Je suis plus parfaitement que personne, Messieurs, votre
très humble et très obéissant serviteur.
De la Bourdonnaye.
Suscription : < Messieurs les Maire et esche vin s de
Rouen •.
HOTEL DES SOCIÉTÉS SAVANTES.
L'hôtel des Sociétés savantes, situe rue Saint- Lô, em-
prunte quelque intérêt des hauts personnages pour lesquels
il fut construit, et des divers services publics qui y ont été
successivement installés depuis la Révolution.
Jusqu'aux premières années du règne de Louis XV^ le
premier président du parlement n'eut pas de maison qui
lui fût particulièrement affectée. Les Intendants eux-
mêmes, ce qui était plus fâcheux, se logeaient où ils vou-
laient et où ils pouvaient; et ce ne fut qu'en 1781, que fut
construit, pour eux, Thôtelde Tlntendance, sur une partie
de remplacement des Jacobins.
La construction, aux frais de la Ville, d'un hôtel pour le
premier président fut ordonnée par un arrêt du Conseil
402
d^tat du 17 avril 1717. Les éctievins furent autorisés à
pourvoir à la dépense au moyen d^un octroi. Le plan et
les devis furent dressés par l'ingénieur Jean Martinet, qui
avait pour inspecteur M. Guillouet. Les adjudicataires des
travaux furent les frères Etienne-Nicolas et Jacques Bar-
jolie. En 17 19, on décida de compléter cet hôtel, en y
adjoignant 3 remises de carrosses et une nouvelle écurie.
Les travaux entrepris pour ces divers bâtiments furent
reçus par Tarchitecte les 6 février 1 719, 24 janvier, 10 juillet
1720 et 14 mars 1721.
En 1722, la grande écurie, voûtée en pierres de taille,
s*écroula et écrasa quelques-uns des chevaux du premier
président Camus de Pontcarré. Cela donna lieu à une de-
mande en indemnité : l'ingénieur et les entrepreneurs
furent mis en cause.
Un procès-verbal fut dressé, après visite des lieux, par
M. Le Carpentier, maître des ouvrages de la Ville, et par
les architectes Millets Desruisseaux et Pierre Jarry. Ils
concluaient à la responsabilité de ceux qui avaient été
chargés de la construction (19 mars 1722).
Un autre procès-verbal fut dressé quelque temps après
par M. Louis Darneuse Dessablonnières, ingénieur du
Roi, qu'un arrêt du Conseil avait commis pour faire la
visite, non seulement de l'écurie écroulée, mais aussi du
grand corps de logis, sur la solidité duquel on concevait
quelques inquiétudes. Cet ingénieur reconnut (4 mai 1722)
que ce dernier bâtiment était construit suivant les règles
de l'art (i), mais que l'écurie prêtait à de justes reproches.
Ce fut d'après ses devis qu'elle dut être relevée, ce qui
indique que, bien que protégé par l'Intendant de la Géné-
ralité, M. Martinet fut reconnu coupable, sinon d'inha-
bileté, tout au moins de négligence (2).
(1) V Histoire de Rouen, édition 173, irc partie, p. 91, appelle
cet édifice, ce magnifique hôtel,,..* ce superbe bâtiment.
(2) Archives de la ville de Rouen.
40 3
Dans ce temps-là, les ingénieurs n'étaient pas distingués
des architectes comme ils le sont de nos jours : aussi le
choix qui avait été fait de M. Martinet n'avait-il rien
d'extraordinaire.
La dépense totale s'éleva à 400,000 1., d'après V Histoire
de Rouen de lySi.
Les constructions entreprises avaient nécessité Texpro-
priation de plusieurs immeubles appartenant à MM, Ro-
bert Le Cornier de Cideville, Pierre Bouchart, sieur de
Contremoulins, Jean- Baptiste Ango de Lézeau, comme
représentant sa femme Catherine Du Moustier (maison à
l'enseigne de Bacchus), M. de Mesnilbus, avocat-général
au parlement, Jacques Le Cesne, curé de Léry (maison à
renseigne de la Bastille), Marguerite Ferrand, les religieux
de Saint-Antoine, les religieux de Jumièges, pour une
partie de jardin qui dépendait de leur hôtel de la Poterne.
L'arrêt du Conseil d'État avait évalué les acquisitions de
terrains à 78,440 1.
On peut juger par l'écurie de M. de Pontcarré de ce que
devait être le train d'un premier président du parlement.
Encore feut-il remarquer que ce haut fonctionnaire avait
un hôtel à Paris, qui ne devait pas être moins somptueux.
Au moment de l'accident dont nous venons de parler, il
s'y trouvait 6 juments, i cheval de carrosse, un cheval de
selle, un cheval de suite et un petit hidet, tous animaux
de prix d'après l'estimation des experts.
Les premiers présidents qui ont résidé dans cet hôtel
sont MM. Nicolas Camus de Pontcarré, Geoffroi Camus
de Pontcarré, Armand-Thomas Hue de Miroménil, Ni-
colas de Montholon.
L'hôtel du premier président dépendait de la paroisse de
Saint- Lô.
Le premier président était trésorier d'honneur de la
paroisse. C'est le titre qui lui est donné dans les Tableaux
de Rouen de 1 774-1 779.
L'hôtel du premier président a changé d'aspect. On n'y
404
voit plus, le long de la rue, ces longues barres de bois aux-
quelles les plaideurs et les juges avaient l'habitude d'atta-
cher leurs chevaux quand ils venaient au palais pour leurs
affaires ; on n'y voit plus ce pont qui permettait au premier
président d'entrer de son appartement dans le palais sans
passer par la rue et sans être vu.
Bien antérieurement, probablement à la Révolution, on
avait fait disparaître une inscription sur marbre noir qui
ornait le vestibule à droite de l'entrée. Elle était ainsi
conçue :
Anno Domini M. DCCXVII Mensis Junii XXV. Hœc
Domus in habitationem hujusce Provinciœ senatus prin-
cipum destinata, Jussu Ludovici X VFranciœ et Navarrœ
Régis ^ Philippi Ducis Aurelianensis Regni Regentis con-
silio, Nicolao Petro le Camus Domino de Pontcarré milite
Neustriœ Proto Prceside ; sumptibus Urbis Rothomagen»
sis ; Leonoro du Bosc équité Domino de Radepont ejusdem
Urbis tune majore^ Jacobo Roland^ Michaele de Mojr,
Thoma Planterose, Petro le Marquier^ Mellone Cécile^
Nicolao Pommeraye Mdilibus^ Francisco de Bailleul pro'
curatore Régis et Urbis ^ construi ccepit.
L'Histoire de Rouen, qui nous fournit le texte de cette
inscription, nous apprend encore qu'aux deux côtés du
marbre étaient deux bustes, posés chacun sur un piédestal,
Tun représentant Louis XII, roi de France, l'autre Georges
d'Âmboise. Sous le premier était écrit, sur un marbre noir,
Louis XII^ Roy de France^ et sous l'autre : Georges
d'Amboise, cardinal.
Epéeavec inscription. — Notre compatriote, M. Lo-
quet, possède une très belle épée du xni« ou même du
xii^ siècle trouvée dans la Seine près de la Mivoie. Elle
porte une inscription incrustée en argent. Bien que
très lisible, même en des mots entiers, cette inscription
est absolument énigmatique, comme M. le Président
4o5
en convainc la Commission en lui offrant un fac-similé
exact de ce petit monument épigraphique.
M. Gouellain rappelle que ces sortes d^Inscriptions
étaient fréquemment une prière ou le début d^n
psaume. Ce doit être une utile ouverture pour l'inter-
prétation de ces caractères obscurs.
La séance est levée à trois heures et demie.
Le Secrétaire intérimaire,
A. TOUGARD,
4o6
SÉANCE DU 10 JUILLET 1884
La séance ouvre à deux heures un quart, sous la
présidence de M. Ch. de Beaurepaîre, vice président.
Etaient présents : MM. Adeline, Paul Baudry,
Billiard, Bouctot, Lefort, ''abbé Loth, de Merval,
Pelay, chanoine Robert, de la Serre, de Vesly et Tabbé
Tougard, faisant fonction de secrétaire.
Il lit le procès-verbal de la précédente séance
(3o mai), qui est adopté sans observation.
Se sont excusés: MM. Bouquet, Brianchon, Félix et
Maillet du Boullay.
La correspondance imprimée se compose de : Mé-
moires de la Société archéologique de Rambouillet,
vol VII; — Bulletin de la Société archéologique de
Nantes, vol. XXU]— Bulletin de la Société des An-
tiquaires de Picardie, 1884, n<> i; — Mémoires de la
Société d'Emulation d'Abbev'Me, vol. XV; — Bulle--
tin de la Société des Antiquaires de P Ouest, 1884,
i^' trimestre.
Dalles de l'enclave Sainte-Marie, — A propos du
procès-verbal de la dernière séance, M. Gouellain
proteste contre les différents moyens de préservation
proposés en faveur des dalles tumulaires adossées au
mur extérieur du musée des Antiquités. Il estime que
leur translation à Tintérieur du musée s'impose comme
une nécessité qui sera possible dans un délai assez
rapproché. M. Pelay partage entièrement cette manière
de voir.
M. Lefort explique que, conformément au vœu delà
Commission, il avait préparé un projet de devis,
407
s'éievant à 600 francs environ, pour installation de
petits auvents distincts au-dessus de ces magnifiques
images. Mais au moment où il allait le présenter à M. le
Préfet, il en a été détourné par le conservateur du
musée, qui prévoit, lui aussi, Tintroduction prochaine
de ces pierres tombales dans les galeries de la collection
départementale.
Devis de Graville. — M. le chanoine Robert dépose
sur le bureai) le compte des travaux de Graville, qui
doit être envoyé à M. le Préfet.
Porche de la Vieux-Rue. — L'affaire de cet intéres-
sant monument est en bonne voie. Son classement est
appuyé par M. le conseiller d^arrondissement Benner;
Tadministration locale a voté 3 00 francs pour sa res-
tauration, laquelle est confiée aux entrepreneurs qui
ont exécuté celle de Ry.
La Vieux-Rue, — Inscription de la cloche, —
M. le curé de Morgny a communiqué à nos confrères
qui ont visité le porche, Tinscription de la cloche dont
suit le texte :
Lan I jSg^ fai été bénite par Af» Charles Len/ant, curé
de Saint-André^Hors-la- Ville, de Rouen, et nommée
Marie-Thérèse /y^rA/e Guillaume Bigot, marchand, ancien
administrateur de V Hôpital-Général de Rouen, et par dame
Marie-Thérèse La Vigne , bourgeoise de Rouen, — M' Jo-
seph Beux, curé de Vieille-Rue, et Pierre Gilles, trésorier
en charge.
Morgny, — Inscription obituaire. — L'église de
Morgny renferme Pobitque voici, relevé par M. Pelay.
Pour perpétuelle mémoire à Tadvenir.
Vénérable et discrète personne M« Charles Le Bourgeois
natif de Magny-le-Fréville, diocèse de Bayeux, prêtre curé
4o8
de cette églize de Morgny, a fondé en icelle â perpétuité,
tous les ieudîs de chaque semaine une messe basse en Thô-
neur du très Saint Sacrement de l 'autel, en laquelle sera
aussy fiaiite mémoire dudit fondateur par une oraison con-
venable pour la rémission de ses péchez, et à la fin de la
messe, un libéra^ de pro/undiSy et oraison sur le lieu de
sa sépulture, avec un obit par chaque année au iour de
son deceds arrivé le 27* mars 1680, où sera chanté un noc-
turne des trépassez avec deux hautes messes, la première
du très Saint Sacrement de Tautel, et la dernière des dé-
functs, durant laquelle on sonnera en voilée la grosse
cloche de la ditte églize, et à la fin du dit obit le libéra^ de
profundis et oraison sur la sépulture du dit fondateur avec
un cierge ardant pendant le dit obit, le tout conformément
au con... o... devant n... Las... ve et Robert Le Tellier,
notaires à... 1678.
Restent six lignes indéchiffrables.
A propos de cette inscription, M. de Beaurepaire fait
remarquer qu'il serait possible d'en compléter le texte au
moyen du testament du curé Charles Le Bourgeois. Ce
document existe aux Archives du département, parmi les
papiers de la fabrique de Morgny.
Voici quelques extraits de ce document :
« Je Charles Le Bourgeois, presbtre, curé de la parroisse
de N.-D. de Morgny, doyenné de Ry, diocèse de Rouen,
reconnoissant qu'il n'est rien plus certain que la mort, ny
rien plus incertain que l'heure d'icelle, et ne désirant
partir de ce monde sans avoir disposé de telz biens qu'il a
plu à Dieu me donner, fais et ordonne mon testament et
dernière volonté ainsy qu'il ensuit. Premièrement je re-
commande mon âme à Dieu le père tout puissant, à Jésus-
Christ, son filz unique, notre Sauveur et médiateur, et au
divin et St-Esprit, trois personnes en un mesme Dieu; à la
glorieuse Vierge Marie, mère de nostre mesme Rédempteur,
ma principale advocate auprès de son cher fils, à mon ange
409
tutélaire et fidèle gardien, et à tous les espritz bienheureux,
aux Sts patriarches, apostres, martyrs et confesseurs, spé-
cialement au glorieux St Charles Borromée, mon patron,
avec le chœur des vierges et martyres, particulièrement à
la bienheureuse Ste-Quiltère, vierge et martyre, réclamée
pour patronne en lad. église, et généralement à tous les
saincts et sainctes de Paradis, que je prie de vouloir estre
intercesseurs envers Dieu pour la remission de mes
péchez. Et je veux que mon corps, aprez mon décedz, soit
inhumé dans le milieu du chœur de Tcglise de Morgny, le
tout conformément au contract de la fondation que j'ay
^icte d'une messe du St-Sacrement de Tautel, le jour de
jeudy de chaque semaine, à perpétuité, recours aud. con-
trat passe devant Nicolas Cave et Robert Le Tellier, no-
taires garde nottes royaux, commis par S. M. en la
vicomte de Rouen, sergeanterie de Cailly, branche de
Blainville, le 3^ juillet 1678, deuement accepté et lecture,
mis et reposté dans le coffre du Trésor... Et, pour mémoire
de lad. fondation, je désire qu'il soit pris sur mes meubles
les deniers nécessaires pour acheter une pierre de taille de
la grandeur requise, sur laquelle sera fait sommairement
mention de lad. fondation. » Suivent certaines dispositions
en faveur de son frère Etienne \^ Bourgeois, chanoine de
Motteville (1), de ses nièces, filles de son autre frère Louis
Le Bourgeois, 8 mars 1 680.
Charles Le Bourgeois avait été nommé à la cure de
Morgny, en remplacement de Denis Coquin, décédé le
25 mars i635 (2).
(i) II Tavait eu comme vicaire à Morgny en 1670 et 1671.
(2) Ce curé, originaire de la Feuillie-en-Lyons, avait &it une
fondation en faveur de réglise de Morgny. (V. son testament
du 3 avril 1634.) Il avait été premier témoin synodal du doyenné
de Ry. Il mourut à Tâge de 62 ans, après avoir été curé de
Morgny pendant 23 ans. Comme Ch. Le Bourgeois, il avait
voulu être inhumé sous la lampe, au milieu du chœur. Il avait
succédé au curé Noël Le Clerc^ dès 1606.
»7
410
Il eut pour successeur Pierre Mullotin dont l'inscription
funéraire nous a été signalée par notre collègue, M. Gouel-
lain, dans la séance du 3o mai de cette année.
L'an 1728, la paroisse de Morgny ne contenait que
35 feux et i3o communiants.
Ce qui donnait de b valeur à ce bénéfice, c'est que le
curé était seul décimateur.
On a conservé les comptes de la fabrique de Morgny
des XVII® et xviii* siècles. Nous y relèverons quelques
indications qui ne sont pas sans quelque intérêt.
Le i3 oct. 1609, M. Behotte, grand archidiacre, visitant
réglise, renouvelle la défense de louer le cimetière pour
en faire un pâturage, « à peine, aux prestres y consentans,
de suspense, et, aux laïques, d'excommunication. »
Le 25 juillet 1 602, dans le cours d'une autre visite archi-
diaconale, le même Behotte faisait défense au curé, c de
permettre que la terre de son église fût ouverte pour
inhumer aulcune personne, que au préalable le thrésorier
ne l'eût fait certain qu'il avoit reçeu 60 s. pour le droit du
thrésor. •
Un passage de ces comptes établit clairement que les
obligations du trésorier, obligations auxquelles nulle part
on ne pouvait se soustraire, s'étendaient, dans les cam-
pagnes, fort au-delà de ce qu'on pouvait réclamer d'un
comptable ou d'un administrateur.
t Le lundy 3oe jour de mars 1671, Tendemain du jour
de Pasques, aud. an, heure et yssue de la messe parroissiale
de Morgny, nous Charles Le Bourgeois, presbtre, curé
dud. lieu, et les thrésoriers et parroissiens soubssignez,
procédant, ainsy qu'il est accoustumé en pareil jour, à la
nomination et ellection des thrésoriers de l'église dud.
Morgny, avons esleu et nommé la personne de Pierre
Vallot, y demeurant, pour aider et assister la personne de
Marin Du Busq, entrant thrésorier présentement en
charge, en ce qui concerne le service et toutes les fonctions
qui se rendent au dedans de l'église, comme à cueillir et
porter les plats, tant à la première qu'en la grande messe,
les dimanches et festes, allumer et esteindre les luminaires,
apprester les choses nécessaires au divin service, comme
Teau et sel à bénir, servir à Taspersion de Teau béniste,
recepvoir et distribuer ou faire distribuer le pain bénist le
dimanche, assister aux processions accoustumées, et y
porter la croix et banière, et généralement rendre tous les
services nécessaires en la célébration du divin office par
leurs personnes ou autres par eux commis en leur absence,
et mesme assister charitablement aux inhumations et y
porter la croix , de tous lesquels services nous avons fait la
déclaration et lecture ausd. trésoriers, à ce qu'ils n'en pré-
tendent cause d'ignorance, et, en cas de manquement,
négligence ou refus, avons protesté ausd. thrésoriers et
tous autres à l'advenir de les y faire contraindre par justice,
multer d'amende leur négligence et les faire respondre de
tous intérestz et despens du thrésor de lad. église, auquel
cas, nous trésoriers soubssignez avons prié et donné pou-
voir, par les présentes, de faire toutes poursuites et instances
au nom dud. thrésor, contre les thrésoriers délinquanz,
devant tous juges à qui la connoi.ssance en appartient, aud.
sr curé de Morgny, sans requérir autre délibération que la
présente. »
Les mêmes comptes font mention d'achat par la fabrique
de vin, pour les Pâques, jusqu'en 1640 (i). Dans les
comptes postérieurs, cet article disparaît, et Ton ne men-
tionne, comme dépense ordinaire, que Tachât de buis
pour les Rameaux.
Mais constamment on voit figurer, au chapitre des
recettes, deux sortes d'aumônes, les gerbes de Notre-
Dame, que les paroissiens offraient, à la fête de la Nativité
(i) Pour un pot de vin à Pâques 8 s., 1626. — Pour le vin de
Pâques, 3 s. 6 d., 1 63 2. — Pour le vin de Pâques^ 8 sous,
i635. — Pour le vin de Pâques, 5 s., 1639. — Pour le vin de
Pâques, 5 s., 1640.
412
de la Sainte- Vierge, et les œufs de Pâques, qui souvent
étaient vendus aux enchères au profit de la fabrique (i).
On acheta, en i636, un missel romain, 3 1. de papier
peint et du parchemin (pour quel usage, je ne saurais le
dire), 53 s.; un canon et 2 évangiles, 12 s.; en 1666,
5 aunes de messeline (2) à fleurs à faire le pavillon du
tabernacle.
Parmi les travaux mentionnés, je ne vois à noter qu*une
chaire à prêcher et un lutrin (lectrin), et des confession-
naux faits en 1671; — les 2 contretables des autels des
chapelles, pour lesquelles ont eut à payer àNoél Jouvenet,
sculpteur à Rouen, une somme de 48 1., 1670; — la vitre
du milieu du chœur, qui paraît avoir été en verre blanc
losange, avec une ovale où se trouvaient représentées les
armes du marquis de Monteclair et de Madame sa femme,
donateurs de lad. vitre: la dépense totale pour cet objet fut
de 59 1., sept. 1664.
Cette dame était Marie Langlois, fille de Georges Lan-
glois, chevalier de Tordre, sieur de Motteville, premier
président de la Chambre des Comptes de Normandie. La
seigneurie de Morgny lui était échue en sa qualité d'héri-
tière de son aïeul maternel, Robert de Hanyvel, seigneur
de la Chevalerie et de Saint- Etienne -du-Rouvray, décédé
le 23 novembre 1645.
Ce Robert de Hanyvel est auteur d'un opuscule intitulé :
€ Jésus Christus, Maria Virgo, de Sanctis Hymni, quos
Jesu Christi summo in terris vicario Beatissimo, sanctissi-
moque Patri nostro Urbano Papse octavo, Dei ejusdem
(i) Gerbes de N.-D., 8 1., i636. — En sept., gerbes données à
réglise, à raison de 10 s. 6 d. la gerbe, 4I. 4 s., 1672.^ Œufs
de Pâques, 25 s., i636. — Œufs donnés à Téglise à Pâques
1669, vendus et enchéris par Louis Lamoureux, à 60 s. —
200 et un quarteron d'œufs, à raison de 19 s. 6 d. le cent^ 44 s.,
X673.
(2) M. Lîttré ne cite pas d'anciens exemples de ce mot messC"
Une ou mousseline.
4i3
misericordia compositos a se offert, dicat et consecrat
Robertus de Hanyvel, Miles, nativitate Parisîensis, civitate
Rothomagensis, origine vero uterque, et de la Chevalerie,
S. Stephani de Rouveré, necnon aliorum Dominas et pa-
tronus locorum. — Rothomagi ex officîna Laurentii
Maurry, cum approbatione et priviiegio. M.DCXXXIX (i).>
Cette famille de Hanyvel, alliée à des familles espa-
gnoles (2), était originaire du diocèse d'Auch, où le culte
de sainte Quitaire était très répandu. Je suppose que ce
fut Robert de Hanyvel qui l'introduisit dans Téglise parois-
siale de Morgny, sur laquelle il avait des droits de seigneur
patron.
Le curé Charles Le Bourgeois paraît avoir eu la pensée
de composer une notice historique sur cette sainte, qu'il
appelle la seconde patronne de son église. Je ne relèverai,
dans l'ébauche qui a été conservée de ce travail, que l'in-
dication d'un manuscrit qu'on possédait dans ce temps-là,
en l'église de Saint- Vivien de Rouen, où il y avait une
chapelle dédiée à sainte Quitaire. € Dans la ville de
Rouen, en l'église parroissiale de St- Vivian, il y a une
chapelle et une célèbre et fort ancienne confrérie de Ste-
Qu itère, où, parmi les tiltres d'icelle, il se trouve deux
manuscrits fort antiques, Tun françois^ dans lequel la vie
de cette saincte est rapportée amplement, et l'autre, latin,
au commencement duquel est escrit : a Ce livre est de la
parroisse de St- Vivian de Rouen, fait et parfait Tan mil
trois centz quatre-vingt douze, » dans lequel il se trouve
(i) Petit vol. in-32 de 19a pages, qui m*a été communiqué par
M. l'abbé Sauvage.
(2) Robert de Hanyvel était cousin de Fernand de Salinas,
prochancelier de Tarchiduc Albert. Fernand de Salinas mourut
en i3go. Robert Hanyvel a composé son épitaphe. La fille de
Robert de Hanyvel, Madeleine, avait épousé Georges Langlois,
dont elle n'eut qu'une fille, mariée au marquis de Monteclair.
Robert de Hanyvel avait été l'exécuteur testamentaire du curé de
Morgny, Den. Coquin.
414
neuf leçons de la vie de Ste-Quitère, pour l'office ecclé-
siastique de sa feste, suivant le vieil usage du diocèse de
Rouen. >
Nous voyons qu'après la marquise de Monteclair, la sei-
gneurie de Morgny fut possédée par Louis Puchot, maître
ordinaire en la Chambre des Comptes, demeurant à Rouen,
rue de la Pie, paroisse St-Sauveur, 25 juin 1682; — par
Louis Puchot des Alleu rs, sieur de la Pommeraye, con-
seiller en la Cour des Comptes, Aides et Finances, 1 71 3 ; —
par ses héritiers, Nicolas Puchot des AUeurs, conseiller au
Parlement, et le comte des AUeurs, ambassadeur de France
a Constantinople, 171 3. Les enfants de ce dernier la ven-
dirent, vers la fin de Tannée 1725, à Yves-Michel Duval,
seigneur de Vimont, Maudétour, Pubeuf, Dieulois dit Cu-
verville, président en la Cour des Comptes, Aides et
Finances.
De son fils Augustin-Marc-Prosper Duval de Maudé-
tour, ancien capitaine au régiment de Bourbon-Infanterie,
elle passa à M. Belhomme de Franqueville, qui la possé-
dait encore en 1 789.
A M. Pierre Mullotin, décédé le 3- mai 1707, dont
Louis Puchot fut l'exécuteur testamentaire, succédèrent,
dans la cure de Morgny, Jean-Claude Marc, 1 707-1 741,
Huet, 1749; — Jacques-Nicolas Farel, 1 755-1791.
Adrien Balesdent, vicaire de cette paroisse, était en
même temps maire de la commune en 1791.
Le seigneur de Morgny présentait à cette cure.
Cléon. -- Fourneaux gallo-romains, — M. de Vesly
donne lecture de la note suivante, accompagnée d'un
plan et d'une vue de Péglise.
Il y a quelques jours, M. Tabbé Cottey, curé de Cléon,
faisant réparer le pavage du porche de son église, eut
ridée de pousser la fouille un peu profondément afin de
s'assurer s'il n'y existait pas de sépultures.
4i5
•
La tranchée qu'il ouvrit perpendiculairement à Taxe de
régiise ne révéla pas la présence de tombeaux, mais mit à
découvert plusieurs petites constructions de briques. Il
informa de cette découverte MM. de Beaurepaire et l'abbé
Loth et les invita à venir la visiter.
J^eus rhonneur d'accompagner M. de Beaurepaire lors
de sa visite, et c'est le résultat de notre examen que je
rapporte ici.
La fosse pratiquée par M. l'abbé Cottey mesure 2°^oo
de longueur et o™8o de largeur ; elle permettait de recon-
naître à i^iS de profondeur, une aire en argile battue,
sur laquelle reposaient 4 petites coupoles (x) en briques
lices par un mortier d'argile. La forme hémisphérique de
ces coupoles, mesurant 0^70 de diamètre extérieur, est
obtenue par le retrait des six assises de briques posées à
plat, et la forme rayonnante par la taille de chaque brique
à l'une des ses extrémités seulement. A l'intérieur un revê-
tement, en mortier d'argile, pratiqué par l'ouverture laissée
au sommet de la coupole, permettait d'obtenir une calotte
parfaite.
Le croquis joint à ce rapport permettra d'ailleurs de
juger les curieux détails que présentent ces constructions,
ainsi que leurs dispositions, etc., etc..
Lorsque je visitai la découverte de Cléon, quelques
heures avant M. de Beaurepaire, je crus être en présence
de petits monuments destinés à protéger des urnes ciné-
raires, et je plongeai ma main à l'intérieur, cherchant si je
ne trouverais pas l'olla des gallo-romains; mais je ne
retirai que des charbons et des fragments d'argile cuite et
noircie, provenant du revêtement intérieur.
L'hypothèse des cupules destinées à protéger des urnes et
à remplacer le dolium, devait donc être écartée. D'ailleurs
il n'eût pas été nécessaire de construire une aire d'argile
(i) Une de ces coupoles a été détruite par l'ouvrier lors de la
fouille.
4i6
et d'employer cette terre refractaire pour liaison ; un
mortier ordinaire en ciment quelconque eût suffi. Les
cupules de Cléon ont été destinées à faire ou à recevoir
du feu et c'est ce caractère bien démontre qui nous a
amenés, M. de Beaurepaire et moi, à nous demander si
nous n'étions en présence de fourneaux d'un hypocauste ou
de substructions d'une de ces salles appelées concamerata
52/ia/io. Cependant cette hypothèse ne peut pas être admise.
Les ruines de thermes antiques, ainsi que les découvertes
faites en Gaule, ont toujours montré Thypocauste chauffé
par un fourneau unique répandant la chaleur au moyen
de tuyaux prismatiques et les salles situées au-dessus des
hypocaustes ont leur pavage soutenu par une série de
petits pilastres ou piliers de terre cuite. Le texte de
Vitruve, si souvent obscur, se trouve, pour cette partie des
constructions antiques, conforme aux découvertes faites
par les archéologues.
Aussi est-on amené à voir dans les cupules de Cléon des
récipients où étaient déposés les charbons provenant du
bois consumé dans le fourneau proprement dit et destinés
à chauffer une étuve ou laconicum.
On pourrait ainsi, la folle du logis aidant, émettre et
développer de nombreuses hypothèses. Nous avons préféré
vous exposer simplement la découverte de Cléon et vous
demander de voter un crédit afin d'entreprendre quelques
fouilles sommaires.
La question ainsi étudiée pourra vous être soumise avec
détails et mériter un intérêt que vous pouvez déjà pré-
juger.
M. le Président expose que la Commission n'a point
précisément de fonds dont elle puisse disposer pour
cet objet, mais que Tallocation de M. Maillet du
BouUay comprend un crédit qui peut être affecté aux
fouilles et aux recherches de monuments archéolo-
giques. Il Ta pressenti à ce sujet, et croit savoir que le
417
conservateur du musée affectera volontiers une somme
de 200 francs pour continuer Texploration. Les
travaux pourraient être surveillés par M. du Boullay,
assisté de M. de Vesly.
M. de Beaurepaire s'étonne queces débris si anciens
et si peu résistants niaient point été altérés par réta-
blissement des fondations du porche. M. de Vesly
répond que malgré sa proximité, le porche n^a pu leur
faire courir aucun risque.
Les mêmes membres signalent dans Féglise de
Cléon plusieurs vitraux intéressants, dont l'un est
daté de i538; et un curieux lutrin que l'on croit pro-
venir de Saint-Étienne-d^Elbeuf.
Jubé de la Cathédrale. — A propos de la suppres-
sion de ce monument, M. P. Baudry lit la note
suivante.
Messieurs,
On a beaucoup parlé depuis quelque temps de la démo-
lition prochaine du Jubé de la Cathédrale de Rouen, et
plusieurs journaux ont proteste contre cette démolition.
La Commission départementale des antiquités a-t-elle à
se prononcer dans cette question, et à prendre un parti
pour ou contre ? Je Tignore. Mais, quelle que puisse être
son opinion à cet égard, comme il serait trop tard, — si
cette opinion était favorable à la conservation du monu-
ment, — d'attendre, pour se prononcer, que le monument
fût abattu, peut-être est-il à propos d'en dire un mot dès
maintenant.
Or, malgré Thabîtude généralement admise aujourd'hui,
de répéter que, en principe, les jubés et clôtures des chœurs
doivent être bannis de nos églises, et que le jubé de la
Cathédrale de Rouen doit d'autant plus l'être, que son
style est en désaccord avec l'ensemble de l'édifice, je
4i8
demanderai à la Commission la permission d'exprimer ici
un avis complètement opposé.
Et contrairement à plusieurs personnes qui jugent la
question autrement que moi, je n'apporterai ici aucune
passion, aucun parti pris. Je l'examinerai simplement avec
vous, Messieurs, si vous le voulez bien. La chose en vaut
la peine.
En dehors même des traditions liturgiques et des sou-
venirs religieux que je pourrais invoquer à l'appui de mon
sentiment, une commission, chargée comme la nôtre, de
la conservation des œuvres d'art que nous ont léguées nos
devanciers, hésitera beaucoup, je l'espère, à déclarer que,
désormais, nos églises seront privées de hautes stalles,
grilles, ambons, jubés, clôtures de toute sorte, qui ne
permettent pas aux regards des fidèles de plonger, sans
obstacle, dans l'intérieur du chœur. Si l'absence de toute
clôture était admise en principe, il faudrait, en effet, ren-
verser près d'ici, les jubés d'Arqués et de Moulineaux, et
ailleurs les splendides sculptures de Chartres, d'Amiens
et de tant d'autres cathédrales.
Est-ce, — ce qui est plus probable, — parce que le jubé
de Rouen forme, par son style, relativement moderne, une
opposition trop marquée avec le style primitif de la
Cathédrale, qu'il doit être sacrifié ? Mais alors, sauf peut-
être la base de la tour Saint-Romain, il faut successive-
ment sacrifier aussi tout ce qui constitue ce vieil et véné-
rable édifice, auquel tant de siècles ont apporté le tribut
de leurs inspirations variées, et de leurs travaux qui,
malgré les plus incontestables beautés, offrent, entre eux,
des différences de style considérables.
Rien n'est plus aisé que d'abattre ; rien de plus fecile à
décider. C'est une mode qui dure depuis longtemps. Mais
abattre pour ne rien faire de mieux, est, au moins, très
téméraire. Si l'on doit faire mieux, voyons ce que l'on a à
nous proposer. Si l'on ne doit rien faire du tout, respec-
tons ce que les autres ont fait.
419
Je n'admets qu*une réserve, — sérieuse il est vrai, •— à
Texpression de mon sentiment : ce serait le cas, où les
piliers sur lesquels s'appuie le jubé, auraient été entamés
pour recevoir celui-ci, et où, vu la charge énorme de la
flèche qu'ils supportent, il serait à propos de supprimer le
jubé pour les consolider et leur rendre toute la plénitude
de leur force.
M. Bouctot s^est préoccupé de cette question et a
étudié rhistorique des jubés de N.-D. dans le mémoire
de Tabbé Langlois. Il voulait introduire le débat
devant le Conseil général ; mais, après avoir pressenti
quelques membres, il a reconnu que la discussion n^
aurait aucune chance de succès. Il demande à M. le
chanoine Robert de faire connaître l'historique de la
campagne entreprise contre ce monument.
Notre collègue répond que, malgré sa qualité d'in-
tendant de la Métropole, il a toujours été tenu à Pécart
dans cette entreprise. Le clergé de la cathédrale n'est
pas favorable au maintien dePétat de choses actuel; et
quand le Chapitre a été consulté, le jubé n'a recueilli
que 4 suffrages en sa faveur, tandis que g voix Pont
condamné.
La Commission constate que Popinion publique
n'est pas mieux disposée. Malgré le bon accueil fait par
le Nouvelliste aux notes de M. Baudry, la presse
locale préfère s'abstenir. La Commission n'en croit
pas moins devoir protester contre la destruction de cette
œuvre d'art, et en formuler ses regrets les plus
profonds.
Plusieurs membres réclament notamment contre
deux conséquences probables de cette mesure : le dépla-
cement de l'autel du Vœu, si intéressant par le souvenir
historique qu'il rappelle, et la suppression de quatre
420
des stalles, qui sont admirées de toute I*Europe.
M. le Président propose de constituer pour la défense
du jubé, une commission pour laquelle il désigne
MM. P. Baudry, Bouctot, l'abbé Loth et le chanoine
Robert. Malgré Tinsistance de nos collègues sur la
compétence que leur donne leur titre d'ecclésiastiques,
MM. Loth et Robert déclinent la délégation qu'on
leur confie.
M. Tabbé Robert émet alors la pensée de tenter une
démarche auprès de Mgr Tarchevéque, qui ne fait que
poursuivre le projet de son prédécesseur. Après quel-
ques pourparlers, la Commission nomme, à cet effet,
MM. P. Baudry, Bouctot et Gouellain.
La séance est levée à quatre heures moins le quart.
Le Secrétaire intérimaire,
A. TOUGARD.
421
SÉANCE DU 9 OCTOBRE 1884
La séance ouvre à deux heures, sous la présidence
de M. de Beaurepaire, vice-président.
Étaient présents : MM. Billiard, Félix, Gouellain,
de la Serre, de Vesly, et Tabbé Tougard, faisant fonc-
tion de secrétaire.
Il donne lecture du procès-verbal de la précédente
séance, adopté sans observation.
Se sont excusés : MM. Adeline, Bouquet, P. Bau-
dry, Le Breton, Maillet du BouUay et Brianchon. Ce
dernier fait connaître que s'il avait assisté à la der-
nière séance, il eût été d'avis « formellement contraire
à la conservation du jubé de la cathédrale ».
M. le Président observe à ce propos que la mention
des membres présents dégage entièrement la responsa-
bilité des absents dans les questions sur lesquelles la
Commission émet un avis.
Correspondance imprimée. — Elle comprend :
Bulletin du Comité des travaux historiques ; Archéo^
logie, 1884, no 3 ; — idem, Histoire et Philologie,
1884, n® I ; — Répertoire des travaux historiques,
vol. III ; — Bulletin archéologique de Tarn-et^Ga-
ronnCy i883 ; — Mémoires de la Société historique
du Cher y 1 884 ; — Bulletin de la Société académique
rf^Laon, vol. XXIV; — Bulletin de la Société archéolo-
gique de l'Orléanais, n®* 1 1 9 et 1 20 ; — Mémoires de la
Société archéologique de l'Orléanais, vol. XVIII et
atlas ; — Bulletin de la Société archéolog. de Nantes j
1 883 ; — Bulletin de la Société des Amis des sciences
naturelles de Rouen, 19» année, i883 ; — Mémoires
422
et Documents publiés par la Société Savoisienne,
vol. XXII; ■— Mémoires de la Société d'Émulation
d'Abbeville^ vol. XV ; — Mémoires et Documents
publiés par la Société archéologique de Rambouillet^
vol. VII ; — Bulletin de la Société des Antiquaires
de Picardie^ 1884, u9 \\ — Mémoires de la Société
académique de l'Aube, vol. XLVII ; — Mémoires de
la Société Eduenne, nouv. série, vol. XII ; — Annales
de la Société historique de Château-Thierry, 1882.
Second centenaire de Corneille. — L^objet de la
présente réunion est de communiquer à la Commis-
sion rinvitation qui lui a été faite, par M. le Préfet et
M. le Maire de Rouen, de se faire représenter dans le
cortège de la manifestation qui se prépare en l'hon-
neur du grand Corneille. Sont délégués à cet effet,
MM. Billiard et de Vesly.
Hommage de M, Hardy, — Notre savant corres-
pondant, M. Michel Hardy, offre à la Commission
un intéressant mémoire qu*il vient de publier à
Rouen, chez Métérie : Le Cimetière franc d'Eu et la
Tombe d'un Monétaire (32 pp. in-80 avec planches),
oti sont résumées plusieurs découvertes notables faites
Tannée dernière. Des remercîments lui sont adressés.
Sépultures de Saint-Lô, — M. Gouellain obtient
ensuite la parole au sujet des cercueils de plomb que
les tranchées ouvertes dans Pancienne École normale
ont mis à nu dans ' un caveau funéraire, comme la
presse locale Va enregistré avec plus ou moins d'exac-
titude le 14 septembre dernier. Ces sépultures datent
du xvi« au xviii« siècle et appartiennent à la famille de
Brinon, comme Ta dît Farin. Elles portent des épi-
taphes gravées sur cuivre, dont la conservation est à
423
désirer. Le procédé d'embaumement était assez défec-
tueux, quoique plusieurs cadavres fussent encore bien
conservés. Les tranchées ouvertes jusqu^alors ont mis
à jour des murs romains très larges et en parfait état,
qui ont pu être l'enceinte primitive de la ville. La mu-
nicipalité a imposé à Tentrepreneur Tobligation de
réserver tous les débris pouvant offrir quelque intérêt.
M. le Président remarque à ce sujet que la topogra-
phie du prieuré de Saint-Lô et de son voisinage est
souverainement importante pour ^histoire de Rouen.
La porte Sainte- Apolline, supprimée vers i53o, s'ou-
vrait entre Phôtel de France et la rue des Fossés-
Louis-VIII. Ce dernier nom rappelle que les rem-
parts de la métropole normande se dressaient encore
entre la rue Ganterie et Saint-Lô, quand on éleva
dans la rue de l'Aumône ces maisons qui constituaient
en plein xni« siècle une véritable cité ouvrière, assise
sur les fossés de la ville. Il serait donc à propos de
relever avec soin le plan du terrain : sur l'invitation
de M. le Président, M. de Vesly veut bien accepter
cette mission.
Ceci amène M. de Beaurepaire à regretter qu'on
n'ait pas exécuté une vue intérieure de la grande église
des Cordeliers, comme de récents travaux en ont
fourni une occasion qui ne se représentera plus.
Fouilles de Cléon. — M. de Vesly expose que les
découvertes faites à Cléon n'ont pas été explorées avec
toute l'entente désirable. Elles n'ont pas encore dit
leur dernier mot et se distinguent par des particulari-
tés qui n'ont point encore été signalées dans notre ré-
gion. Au milieu de fragments de poteries mérovin-
giennes et du moyen âge se sont rencontrés quatre
424
petits dômes formés de briques et d^un diamètre
de o"40 à o"*5o, avec traces de charbon. Ils étaient
terminés par des sommets en bronze. Notre confrère
a voulu laisser absolument intact un de ces mysté-
rieux réceptacles et en livrer l'exploration complète
aux maîtres de Tarchéologie souterraine, notamment
à M. Alexandre Bertrand.
M. l'abbé Tougard fait les deux communications
suivantes :
Projet d'ambons à la Cathédrale. — Un détail peu
connu qui se rattache à la suppression du jubé de la
Cathédrale, a été rcvclé par une source absolument au-
thentique.
Le cardinal de Bonnechose se proposait de remplacer
le jubé par deux ambons. En ce qui le concerne, notre
collègue est loin d^approuver cette idée, non à cause de
l'effet à produire, sur lequel il serait peut-être difficile de
se prononcer, mais surtout parce que ces ambons eussent
introduit dans Tédifice un élément étranger à la construc-
tion primitive, et ainsi tout à fait discutable en principe ;
pouvant en un mot renouveler la critique la plus fondée
contre le jubé disparu.
AuFFAY. Restauration des fenêtres, — La fenêtre prin-
cipale du chevet de la belle église d'Auffay a été entière-
ment restaurée au mois de juin dernier. La dépense est
considérable et s*élève à 3,400 francs. Notre confrère espère
que la Commission applaudira à ce bon travail, et qu'elle
en souhaitera la continuation en Tappuyant au besoin au-
près de l'administration départementale.
M. le Président estime que les habitants d'Auffay ont
effectivement le devoir de dresser les devis de la restau-
ration des autres fenêtres, projet qui a toutes les sympa-
thies de la Commission.
425
Fontaine-Jacob. — A nciennes mœurs judiciaires. —
Sous ce titre, M. de Beaurepaire lit le mémoire ci-
après :
«
Au bas de la côte Sainte-Catherine, sur le bord de la
rivière d'Aubette, il y avait un lieu nommé, de toute an-
tiquité, la Fontaine- Jacob (i). Jusqu'à Fépoquedela Révo-
lution, il fut connu comme le siège d'une de ces hautes-
justices seigneuriales, si nombreuses au moyen âge, mais
devenues assez rares au xvmc siècle, par suite des atta-
ques réitérées des officiers royaux et des légistes, qui ne
manquaient pas de voir de mauvais œil, quand ils ne la
qualifiaient pas de pure usurpation, toute autorité qui
n'émanait pas immédiatement du chef de TÉtat. La juri-
diction dont nous parlons avait pour territoire un fief du
même nom, lequel s'étendait sur plusieurs paroisses, quel-
ques-unes assez éloignées, et qui, après avoir dépendu de
l'office de l'aumônier de l'abbaye de Sainte-Catherine,
passa, en 1670, entre les mains des Chartreux de Saint-
Julien, en conséquence d'un accord conclu entre ceux-ci
et les représentants de la vieille communauté bénédictine.
Pendant longtemps, les maisons comprises dans cette sei-
gneurie avaient toutes été marquées d'une croix : c'était
le signe de la tenure en pure aumône; mais cette pratique
avait cessé d'être en usage au dernier siècle.
S'il fallait en croire un feudiste de i636, qui n'a fait
vraisemblablement que copier, en tête de son terrier, un
document d'une date beaucoup plus ancienne, l'origine
de cette juridiction serait assez bien éclaircie.
Après nous avoir parlé d'un Lucas Le Chevalier, qui
fut grand chambellan de Normandie et eut l'honneur
d'accompagner le duc Robert en Terre Sainte, il nous ra-
(1) /m vîco de Fonte Jacob, s. d. — Ante Fontem Jacob, ah
Albeta usque ad vivarium domini Régis , 1237, Fonds de Sainte-
Catherine.
»8
426
conte que le fils de ce personnage, Jacob Le Chevalier (i),
amiral et grand-maître de l'artillerie de Guillaume le Bâ-
tard, obtint, en 1090, l'érection d'une haute-justice pour
son fief Vassal près de Rouen, dans l'enclave duquel était
assis le monastère de Sainte-Catherine.
c Cette haute- justice, poursuit notre auteur anonyme,
ledit Jacob Tomosna, en pur don, à perpétuité, à l'ofRce de
Tomosnier de ladicte abbaye, avec ses circonstances et
deppendances, par une seule féaulté audit duc, laquelle
fut nommée depuis le noble fief et haute- justice de la
Fontaine de Jacob, de laquelle la glèbe ou chef-mois et
domaine non fieffé est assis en la paroisse de N.-D. de
Blosville dit Bonsecours, où il étoit désigné sous le nom de
fief de Tomosnerie de Tabbaye de St«-Catherine-du-Mont. >
S'il y a lieu de mettre en doute certains points, par trop
fabuleux et naïfs de cet exposé, ce qui suit nous paraît à
l'abri de toute contradiction sérieuse.
« A remarquer que le lieu destiné à tenir la juridiction de
ladite baronnye et haulte justice est assis en la paroisse de
Saint-Paol, au faubourg de Martainville, au bas de ladite
coste, dans une maison bastie sur une masure apparte-
nant à présent à Jean Thierry, à droict de fieffé Êiicte par
lesdits abbé et religieux à Laurent Le Vasseur, demeu-
rant en ladite paroisse de Saint-Paol, ladicte masure con-
tenant de longueur sur rue 70 pieds ou environ..., devant
laquelle maison a lieu de juridiction et encore une belle
fontayne et source, où il vient ung gros bras d*eau, la-
quelle se meslange avec Teau de la rivière de la Grande-
Aubette^ qui porte encore à présent le nom de la Fon-
taine de Jacob.
(x) Jacobus, comme nom d*homme, aurait dû former Jacques.
On ne voit pas d'ailleurs pourquoi le nom de lieu viendrait du
prénom plutôt que du nom. Jacob employé, dans ce cas, comme
qualificatif du mot fontaine, nous paraît inspiré par des souve»
nirs bibliques, à dessein peut-être d'eifacer la trace de supersti-
tions payennes.
427
« Celte baronnye et haulte justice de la Fontaine de
Jacob s'estent en plusieurs paroisses et lieux de la vicomte
de Rouen, tant en ladite paroisse de Saint-Paol, faubourg
de Martainville, dans la ville de Rouen, en plusieurs par-
roisses d'icelles, la paroisse et faubourg de Saint-Hilaire,
Saint-Gilles de Répainville, Saint -Pierre-de-Carville, Der-
nestal, Saint-Légier-du-Bourdeny, Bloville, Pont-Saint-
Pierre, Roumilly, Orgeville, le Mesnil-soubz-Verclive,
Sayneville et autres lieux.
c Icelle jurisdiction est fournye d'un bailly, un viconte
ou lieutenant, procureur fiscal ou d'office, greffier et deux
sergents, ausquels offices à présent les religieux, prieur et
couvent d'icelle abbaye pourvoient de plain droit et capi-
tulairement.
c Ladicte juridiction se tient, tous les lundys de chaque
sepmaine, dont l'appel, pour le civil, ressortist par devant
M . le bailly de Rouen, et, pour le crime, au parlement ;
et est appelé ledit bailly, tous les ans, aux assises mercu-
riales tenues audit bailliage après l'appel du bailly de
Jouy et de Gauciel. i6 mai i636. i
Un droit de haute justice était assurément une noble
prérogative, et qui relevait singulièrement la dignité d'un
fief; mais, pour le profit, il était nul. Si les religieux, pro-
priétaires de la baronnie de la Fontaine-Jacob, se mon-
trèrent attachés à cette juridiction, il faut convenir, cepen-
dant, qu'ils ne se mirent jamais en grands fi'ais pour en
rendre, aux magistrats de leur choix et à leurs justiciables,
l'exercice honorable ou aisé.
 la Fontaine-Jacob, en effet, point de prétoire qui, par
sa construction ou par sa décoration intérieure, ait jamais
pu avoir la prétention d'exciter l'intérêt de l'artiste le plus
indulgent. Mais si l'archéologue, naturellement moins diffi-
cile à satisfaire, cherche dans les monuments ou dans les
textes, non pas une expression de l'art^ mais la forme ha-
bituellement donnée aux œuvres qui sortent de la main des
hommes et servent à leurs besoins physiques ou moraux,
428
ce qui nous reste à dire pourra bien ne point paraître ab-
solument indigne de son attention.
Le 14 février 1484, Gervais Le Danois, aumônier de
Sainte-Catherine, baille, pour neuf ans, à un tanneur du
nom de Richard Le Ruays, « un hôtel et tènement es
faubourgs de Martainville, près la Fontaine-Jacob, d'un
costé Robin Pinel, d'autre costé, un nommé Barate, d'un
bout la rivière d'Aubete, d'autre bout les prés Martin Le
Verdier et sa femme. • L'aumônier retient la faculté de
pouvoir faire tenir dans cet hôtel ses plaids et sa juridic-
tion (i).
Le même hôtel fut, non plus seulement baille à ferme,
mais fieffé, le 26 mars i SSg, à un toilier du nom de Lau-
rent Le Vasseur, avec obligation à celui-ci d'y garder à
ses périls les malfaiteurs qui « seroient pris et appréhendés
sur ladite justice, et de quérir et trouver chambre pour
faire les examens et informations desdits malfaiteurs tou-
tes les fois que mestier en seroit. 1
Cet hôtel fut brûlé pendant les troubles de 1 562, et, peu
de temps après, rétabli, vraisemblablement aux moindres
frais qu'il fut possible.
En 1622, Jean Le Carpentier, avocat, qui remplissait les
fonctions de procureur fiscal en cette haute justice, re-
montrait « qu'il y avait dans le jardin dudit lieu plusieurs
lézards, aspics, et autres bestes venimeuses qui se nour-
rissaient et cachaient dedans les herbes et autres choses
putréfaictes estans audict jardin, qui apportoient une
(i) Les prétoires et les prisons des justices inférieures étaient à
peu près partout dans de pareilles conditions. — Guillaume
Adens et Jeanne, sa femme, vendent à Jean Titaire « une maison,
le fons de la terre sur quoy elle siet en bourgage de Ducler, en
laquelle est le cep du Roy pour prison, avecque le droit qu'ils
avoient ou chemin royal à aler à la rivière pour mener les pri-
sonniers, et certains droits d*usage en la forêt du Roy à cause
d*icelle maison. » Le prix de la vente ne s'élevait qu'à 6 1. t.
18 mars 1483. Fonds de Tabbaye de Jumièges, Duclair.
429
grande incommodité au public et autres personnes entrans
dans le prétoire de la juridiction, mesmes aux personnes
qui seroient mises au cachot dudit lieu ». Le propriétaire
de la maison, qui était en même temps, aux termes du
contrat de fiefTe, le concierge de la juridiction, fut con-
damné à faucher les herbes du jardin, et à prendre quel-
ques dispositions pour rendre le prétoire propre, com-
mode et habitable. Mais je ne sais sUl n'arriva pas à se
faire dispenser de foiirnir le mobilier, assez élémentaire
pourtant, qu'on avait eu la pensée de lui réclamer.
Croirait-on que plus de cent ans après, en plein règne
de Louis XV, ce prétoire fût encore tel qu'on Pavait vu
dans ces temps où c'était sous l'orme que se tenaient les
justices de village ?
Qu'on en juge par la requête suivante :
« A Monseigneur le procureur général du parlement de
Normandie supplient humblement les bailly, officiers et
avocats de la haute justice de la Fontaine-Jacob,
« Et vous remonstrent que les devoirs de leur état les
mettent dans la nécessité d'accéder tous les lieux où ils
doivent les remplir.
« Mais ils sont obligez d'abandonner le prétoire de la
haute justice de la Fontaine- Jacob, si vous n'avez la bonté
de leur subvenir.
« En effet, l'état de ce prétoire, certifié par le procès-
verbal joint à la présente, vous démontre. Monseigneur,
qu'à tous égards il est indécent, presque inaccessible et
inhabitable.
« Dans l'hiver, il faut que la porte soit ouverte, puisque
c'est de là qu'on reçoit le jour.
« C'est dans cet endroit que, la porte ouverte sur le
bord d'un grand chemin très fréquenté (i), on est obligé
de faire toutes les opérations de la justice, même les plus
(i) C'était une des routes que Ton suivait pour se rendre de
Rouen à Paris.
43o
secrettes« faire enqueste et informations, ei faire prester
les interrogatoires.
€ Pour y entrer, comme pour en sortir, il faut se tenir
par la main ; le plus petit homme est obligé de se cour-
ber en deux, s'expose à tomber, et, s'il se relève trop
tost, court les risques de se casser la teste contre le lin-
teau de la porte.
€ Lorsque Ton est dedans, le plus petit homme est en-
core obligé de se courber pour passer dessous le sommier.
Les juges et les avocats sont obligez de passer dessous
pour prendre place.
c Le greffier ne peut être placé ailleurs que sous ce
sommier, et il est autant occupé à veiller pour avertir les
plaideurs de se garantir de ce chemin qu'à remplir les
devoirs de ses fonctions.
€ Luy-mesme est le premier exposé. Aussy s'est-il sou-
vent blessé.
« Lorsqu'on est en place, les avocats plaident d^assis,
parce qu'ils ne peuvent plaider debout ; les basques de
leurs habits portent à terre dans l'eau et dans la boue.
t Et maintenant, Monseigneur, que par votre prudence
et votre attention pour l'honneur de l'État, le bon ordre
est rétabli, les robes longues, dans ce prétoire, en ramas-
sent l'eau et les ordures. C'est un fait éprouvé depuis la
lecture et enregistrement de l'arrêt de la Cour rendu sur
votre réquisitoire.
f Dans ces circonstances, et n'y ayant plus lieu d'habi-
ter le prétoire, n'y ayant point de chambre de Conseil, les
suppliants se flattent que vous les dispenserez de toutes
les difficultés avec les propriétaires de la haute justice, et
que vous leur subviendrez de votre authorité pour ré-
clamer pour eux le droit général. Pour quoy ils ont
recours à votre autorité, à ce qu'il vous plaise, Monsei-
gneur, indiquer aux suppliants des lieux convenables et
décents, dans lesquels ils puissent remplir leurs devoirs,
soit provisoirement, soit définitivement, afin que le cours
43 1
de la justice ne soit pas interrompu. Et vous ferez jus-
tice. » Signé : Malfilâtre, Harel^ procureur fiscal, Delà-
cour, De TocqueviUe, Guillibaud (avocats).
L'information faite le 28 avril 1750, dont le procès-
verbal était joint à cette requête, constatait, en effet, que
la Chambre du Conseil, extrêmement petite, servait de
passage à un appartement qui n'avait pas neuf pieds car-
rés, mais dont on n'avait pu prendre exactement la me-
sure p>arce qu'il était encombré de mauvais meubles de
toute sorte. Il constatait encore que le prétoire était situé
sur le bord du chemin qui longeait la rivière d'Aubette,
chemin étroit ne permettant strictement que le passage
d'une charrette, et élevé de deux pieds au-dessus du sol
du prétoire ; que le prétoire contenait environ dix pieds
carrés ; qu'on y entrait par une porte de trois pieds huit
pouces de hauteur ; qu'il n'avait pas de plancher, que son
aire était la terre nue ; qu'il y pénétrait un jour très in-
suffisant par une croisée de trois pieds carrés qui faisait
face à des bâtiments trop rapprochés ; enfin que le cachot
n'était pas autre chose qu'une cave à laquelle on accédait
par un appartement où se faisaient les lessives. >
Ce déplorable état avait été depuis longtemps signalé
aux Pères Chartreux : ils alléguaient, pour s'exempter de
toutes dépenses, qu'eux ou leurs auteurs avaient aliéné
un fonds pour fournir tout ce qui était nécessaire aux
suppliants, et que c'était, en bonne justice, aux proprié-
taires du fonds, suivant les termes du contrat de fieffé
de 1339, à fournir au prétoire une Chambre de Conseil
décente et une prison convenable.
Le prétoire fut réparé vaille que vaille, et resta tou-
jours attaché au terrain fieffé. Le propriétaire de ce ter-
rain, Jean \.e Barbier, dans son aveu de 1788, se recon-
naissait obligé à garder les malfaiteurs, à fournir et quérir
une Chambre du Conseil pour faire les informations. Le
fonds de terre, qu'il qualifie la Cour Souveraine, où se
tenait la juridiction, était borné, suivant sa déclaration,
432
par le chemin qui passait le long de la Grande-Aubettc
et par le fosse de la Petite-Aubelte.
Quelques années auparavant, cette juridiction avait failli
être supprimée au profit de la compétence des officiers du
bailliage. Après de longues procédures, un arrêt du Par-
lement, du 8 mai 1783, cassa et annula une ordonnance
du bailli du 8 octobre 1781 et maintint les sieurs prieur
et religieux de la Chartreuse en possession de leur haute
justice.
Leur droit avait été exposé dans un savant mémoire
où Ton retrace l'histoire de cette juridiction particulière,
et où Ton s'efforce de prouver la légitimité des hautes
justices en général.
Ce factum est intitulé :
c Mémoire pour les sieurs prieur et religieux de la
Chartreuse de Saint-Julien de Rouen,
« Contre le substitut de M. le procureur général du
bailli de Rouen. >
La pièce est fort étendue, et il n'en pouvait guère être
autrement) eu égard à l'importance de la question, qui
devait être élucidée par Texposé des principes du droit
féodal.
Nous n'en citerons que quelques passages :
c Les Chartreux de Saint-Julien de Rouen possèdent,
au droit des religieux de l'ancienne abbaye de Sainte-Ca-
therine, le fief et la haute justice de la Fontaine- Jacob,
dont le prétoire est au faubourg Martainville. Cette haute
justice a une existence de plus de sept siècles, attestée
par l'histoire et par les monuments les plus anciens.
L'exercice s'en est fait publiquement sous les yeux de
tous ceux qui auroient été intéressés à l'interrompre, et
il a toujours été paisible. Le droit des Chartreux repose
sur une possession dont l'origine est si reculée qu'on n'en
peut découvrir l'époque, possession contradictoire avec le
Roi par les déclarations qui lui ont été rendues à la Cham-
bre des Comptes, contradictoire avec ses officiers souve-
433
rams en cette cour par les arrêts de dernière main-levée
qu'ils ont rendus après vérification, contradictoire avec
le bailliage de Rouen qui, depuis dix-sept ans, reçoit les
baillis de la Fontaine-Jacob, connoit des sentences ren-
dues, en cette juridiction, et y a plusieurs fois renvoyé,
sur la réclamation du procureur fiscal, des causes dont il
avoit été saisi en première instance. Cest ce droit de
haute justice, établi sur un fondement aussi respectable,
que les officiers du bailliage de Rouen, ont osé attaquer
en 1781, avec autant d'irrégularité à la forme que d'injus-
tice au fonds, i
L'auteur signalait dans cette attaque contre les Char-
treux l'essai d'un plan plus vaste formé contre les sei-
gneurs propriétaires de hautes justices dans les bourgs et
dans la banlieue de Rouen. Les hautes justices étaient
nombreuses et importantes. Outre celle des Chartreux au
faubourg Martainville, madame Tabbesse de Montivilliers
en avait une à Saint-Paul^ les religieux de Fécamp avaient
celle de Saint-Gervais au faubourg Cauchoise. Il y en
avait trois au faubourg Saint-Sever : celle d'Emendreville
appartenant à M. le prince de Soubise, celle de Grandmont,
et celle des religieux de Bonne-Nouvelle.
Au bas du mémoire on lit le nom d'un homme qui plus
tard parvint à la célébrité, et ne peut pourtant figurer
parmi ceux des défenseurs des institutions de l'ancien
r(*gime. Nous voulons parler de l'avocat Thouret qui fut
syndic de l'Assemblée provinciale de la Haute-Normandie
et député à l'Assemblée nationale (i).
(i) II est curieux de rapprocher de câ mémoire ce que le
même auteur dit des justices seigneuriales dans ses Observa-
tions sur l'Histoire de France.
« La Révolution a détruit les justices seigneuriales. Nous avons
vu que cette institution avoit pris son origine, d'une part, dans
l'ambition et dans la violence des leudes, et d'autre part, dans la
lâche complaisance des Rois, obligés de leur céder une partie du
butin qu'ils faisaient en société dans le pillage de la nation.
434
A vrai dire, le barreau devait bien quelque reconnais-
sance aux hautes justices, puisque, grâce à elles, il était
permis à ses membres de cumuler les avantages d^une
profession lucrative avec les honneurs de la magistrature.
Aussi les concurrents ne manquaient pas, et les places
étaient-elles souvent briguées par des praticiens qui
s'étaient fait un nom au bailliage ou dans les cours sou-
veraines, et qui plus tard siégèrent dans des justices
royales.
Il est aisé de le reconnaître par la liste que nous avons
dressée, bien qu'elle soit loin d'être complète.
Robert Langlois, bailli, 1376.
Carados Garin ou Guerin, bailli, 22 novembre 1457,
17 février 1460.
Pierre Gyel, bailli, 1 3 novembre 1487.
GuifTroi Marie, bailli, 18 avril 1529.
Martin Dubosc, seigneur d'Emendreville, bailli, 1 3 mai
1 583- 1394. Il fut consulte comme représentant de la
haute justice de la Fontaine-Jacob, pour la réformation
de la coutume de Normandie.
Nicolas Corneille, écuyer, licencié ès-lois, bailli, 8 jan-
vier, 2 mars 1597.
Charles Duval, avocat en la cour, bailli vicomtal, der-
nier août 1598, 2 décembre 1606.
Robert Belin, avocat en la cour, bailli vicomtal, 23 no-
vembre 161 5.
Jacques Throsnel, avocat en la cour, bailli vicomtal,
17 septembre 162 1-1624.
« Outre l'injustice de cette origine, comment auroit-on pu
tolérer plus long-temps que de simples citoyens possédassent
en propriété, comme un droit foncier de leurs terres, une des
plus importantes fonctions du gouvernement, celle de faire exé-
cuter les lois par Texercice du pouvoir judiciaire. • Abrégé des
révolutions de l'ancien gouvernement françois, édition de 1800,
pp. 80,81.
435
Jacques Onfifroy, licencié ès-lois, bailli vicomtal, 1627,
28 avril 1637.
Pierre de Cahagne, avocat en la cour, bailli vicomtal,
3 novembre 1 637-1 665, année de son décès.
Jacques Bigot, avocat en la cour (i), bailli vicomtal,
1 665- 1667, après avoir été procureur fiscal, à partir du
2 juin i632.
Pierre Loynel, licencié ès-loîs, avocat en la cour, bailli
vicomtal, i5 juillet 1669-1695.
Jacques Noël, licencié ès-lois, avocat en la cour, bailli
vicomtal, 7 octobre 1678- 17 19.
Jacques-Nicolas Guillard, licencié ès-lois, avocat en la
cour, bailli vicomtal, 1728, — 2 août 1741.
Louis Malfilâtre, licencié ès-lois, avocat en la cour,
bailli vicomtal, 1746- 1764.
Gaspard- Guillaume Lavenu, licencié ès-lois, avocat en
la cour, bailli juge criminel et de police, à partir de
1783.
Au dernier siècle, le bailli tenait la juridiction tous les
mardis, à deux heures de l'après-midi. Il tenait aussi les
plaids et gage-pièges de la seigneurie aux jours indiques
par les Chartreux, pour y recevoir les déclarations de
leurs vassaux.
Pendant quelque temps, il y eut concurremment avec
le bailli, et à l'imitation des juridictions royales, un vicomte
à la haute justice de la Fontaine- Jacob. Nous pouvons
citer les noms de Nicolas Le Comte, vicomte, i385, 16 no-
vembre 1391 ; de Guillaume Toustain, vicomte, 2 juillet
1460, 8 octobre 1464 ; de Charles Marais, écuyer, licencié
ès-lois, vicomte, 2 mars i526.
Plus tard, le vicomte disparaît, et le bailli, qui le rem-
place, s'intitule bailli-vicomtal.
Mais toujours il y eut, au-dessous du bailli, un lieute-
nant, comme lui, licencié ès-lois et avocat en la cour.
(i) Avait été reçu avocat le 10 janvier 1647.
436
Laurent Martel, docteur ès-droits, fut nommé lieute-
nant général civil et criminel du bailli de la Fontaine-
Jacob, le 4 juin 1817, et fut remplacé, le 19 avril 1627, par
Jacques Pauger, licencié ès-lois, avocat en la cour, qui eut
lui-même pour successeur, en 1670, Noël Germain.
La venu, bailli précité, n'avait été pendant longues
années que le lieutenant de Malfîlâtre (i).
Il y eut de plus, constamment, dans cette juridiction,
un procureur fiscal. Citons Jacques Bigot, avocat en la
cour, nommé à cette charge le 2 juin i652 ; encore en
fonction en i655.
François Vereul, i656-i657.
Jacques-Nicolas Guillard, nomme le 7 septembre 1697.
Jacques Noël, 1695-1696.
Richard Harel, 1730- 1745.
De Tocqueville, 1774-1779.
Plusieurs de ces procureurs fiscaux devinrent baillis.
Il y avait aussi un greffier.
Tous ces officiers avaient été nommés par Taumônier de
Fabbaye de Sainte-Catherine et, plus tard, par les Char-
treux, lorsque cette abbaye eut été définitivement réunie
â la Chartreuse de Saint-Julien-lès-Rouen. Mais, il im-
porte de ne pas s'y tromper, une fois nommés, ils étaient
inamovibles : tout lien cessait entre eux et ceux à qui ils
devaient leur titre. C'est même une remarque à faire, que
parfois on les vit affecter, à l'usage de ces derniers, une
indépendance qui ressemble à de l'impolitesse.
De cette haute justice dépendait un tabeliionage parti-
(i) Parfois le bailli était remplacé par un avocat qui ne prend
pas le titre de lieutenant : Pierre de Bethencourt, avocat, licen-
cié ès-lois, tenant la juridiction pour l'absence du bailli, 8 fé-
vrier i656; — Jean de La Faye, écuyer, avocat, vicomte pour
Tabsence du bailli, 4 juin, i5 juillet 1659; — François Semé-
laigne, licencié ès-lois, avocat au parlement, exerçant pour le
décès du bailli, 16 avril 1697.
43/
culier qui fut exercé pendant quelque temps par deux
tabellions. Les plus anciens contrats qui y furent passés
sont intitulés du nom du bailli de la haute justice en sa
qualité de garde du scel, suivant un usage alors général
en Normandie.
Notons, en finissant, que sur le territoire de la Fon-
taine-Jacob, considéré comme faubourg de Rouen, il exis-
tait quelques communautés d'arts et métiers qui préten-
daient n*être point confondues avec celles de la ville.
Un arrêt du Parlement, du 5 juin lySy, régla leurs
rapports réciproques. Il défendait aux juges haut-justiciers
de la Fontaine-Jacob, aussi bien qu'à ceux d'Émendre-
ville, Grandmont et Sotteville, de recevoir désormais à la
maîtrise aucun ouvrier,qu'il n'eût fait apprentissage suivant
les statuts reconnus, et présenté chef-d'œuvre devant les
gardes de la ville, ou eux dûment appelés en même temps
que les gardes des hautes justices, et n'eût été conduit au
serment, au prétoire des dites hautes justices, par les
gardes réunis. Les gardes de la ville étaient maintenus
dans le droit de faire, concurremment avec ceux de l'ex-
térieur, la visite des maîtres des faubourgs ; d'assister aux
chefs-d'œuvre, sans pouvoir cependant rien exiger, ni
accepter de repas, sous peine d^amende arbitraire et d'être
destitués des fonctions de gardes.
Ce règlement, qui a été imprimé, nous reporte à un état
de choses tout aussi éloigné de nos mœurs que l'était la
juridiction même de la Fontaine-Jacob.
En levant la séance à 3 heures 1/2, la Commission
décide qu'elle va sur l'heure explorer le chantier
de la rue Saint-L6.
L'examen des tranchées écarte la probabilité qu'on
y ait sous les yeux les anciennes murailles de Rouen.
M. Gouellain remarque, avec sa haute compétence de
céramiste exercé., que les derniers procédés de fabrica-
tion n'arrivent point à obtenir une pâte aussi fine ni
438
une cohésion aussi fortes que celles qui se peuvent
admirer dans les briques romaines dont le sol est jon-
ché. La Commission se promet d'interroger les nou-
velles tranchées que Ton doit ouvrir dans ce soi,
auquel plusieurs rattachent les temples païens, le
lupanar et Pamphithéâtre mentionnés dans la vie de
plusieurs saints pontifes de Rouen, tandis que d^au-
tres les reportent entre la rue Beffroi et celle du
Cordier.
Le Secrétaire intérimaire,
A. TOUGARD.
439
SÉANCE DU 22 NOVEMBRE 1884
La séance ouvre à deux heures un quart, sous la pré-
sidence de M. Ch. de Beaurepaire, vice-président.
Étaient présents : MM. Adeline, P. Baudry, Billiard,
Bouctot, Gouellain, Lefort, de la Serre et Pabbé Tou-
gard, faisant fonction de secréaire.
Se sont excusés ; MM. Bouquet, Brianchon, Maillet
du Boullay et Pelay.
M. Tabbé Tougard donne d^abord lecture du procès-
verbal de la précédente séance qui est adopté sans obser-
vations, et pour lequel des remerciements lui sont
adressés par M. le Président.
Eglise d'Auffay. — Fenêtres du chevet. — M. le
Secrétaire informe la Commission que le vœu de M. le
Président, relativement à la continuation de la restau-
ration des fenêtres du chœur, a été transmis par lui à
M. le Doyen d'Auffay. Ce vœu a été entendu, et le
Conseil municipal, aussi bien que la Fabrique, en ont
délibéré et ont voté ensemble une somme de 900 fr.
pour la restauration des deux fenêtres latérales. L'ar-
chitecte a préparé ses plans et devis ; et le projet n^attend
plus, pour entrer dans la période d'exécution, que
Tallocation qui sera vraisemblablement votée par la
Commission départementale.
Eglise des Cordeliers. — La Commission est in-
formée que des dessins de cet édifice ont été conservés
par MM. Paul Baudry et Simon : M. de Beaurepaire
en réclame un pour les archives de la Commission; il
insiste sur les souvenirs historiques qui se rattachent
440
à cet édifice, où eurent lieu, à la dernière Assemblée
provinciale, d^i m portantes réunions populaires, ainsi
que sur le rôle de ses religieux, docteurs en théologie
ou prédicateurs, ce qui donnait à ce couvent une im-
portance plus considérable que n'en eut même l'ab-
baye de Saint-Ouen.
Correspondance imprimée. — Elle se compose
comme il suit : Mémoires de la Société des Anti"
quaires de France, 5« série, vol. IV, i883 ; — Bulle-
tin de la Société des Antiquaires de Normandie,
vol. XI et XII ; — Mémoires de la Société des Anti^
quaires du Centre, vol. XI, 1884; — Bulletin delà
Société académique de F arrondissement de Boulogne--
sur-Mer, vol. III, liv. 3, 4 et 5; — Bulletin de la
Société archéologique de Nantes, vol. XXI II, pre-
mier semestre de 1 884 ; -r Bulletin de la Société des
Antiquaires de Picardie j 1884, n^ 3 ; — Commission
des Antiquités de Seine-et^Oise, fasc. 4 ; — Société
industrielle d'Elbeuf, 1884, n*»s i, 2 et 2 b. ; — Con-
cours agricole à Broglie, i3 et 14 septembre 1884-
Caudebec4ès-Elbeuf. — Arrêté de classement. —
M. le Président donne lecture d'un arrêté de M. le
Préfet, en date du 18 novembre 1884, qui classe au
nombre des monuments historiques la tour de Téglise
de Caudebec-lès-Elbeuf, conformément à Tavis favo-
rable donné par la Commission des Antiquités.
Le Préfet de la Seine-Inférieure, Officier de Tordre
national de la Légion d'honneur, Officier de l'Instruction
publique.
Vu:
La pétition en date du 3o avril 1884, par laquelle les
.membres du Conseil de fabrique de Péglise de Caudebec-
441
lès- Elbeuf demandent le classement parmi les monuments
historiques, de la tour de Téglise de cette commune ;
Les avis fevorables de la Commission des Antiquités et
du Conseil municipal de ladite commune ;
Considérant que ce monument est digne d'intérêt, tant
au point de vue artistique qu'au point de vue historique ;
Qu'il est le seul reste de l'église primitive construite
dans le pur style roman secondaire (xii^ siècle), et qu'il
offre tous les caractères de cette période architecturale à
l'époque normande,
Arrête :
Art. i". — La tour de l'église de Caudebec-lès-Elbeuf
est classée au nombre des monuments historiques du dépar-
tement.
Art. 2. — Une expédition du présent arrêté sera adressée
à M. le Maire de Caudebec-lès-Elbeuf; une deuxième
expédition sera remise à la Commission départementale des
Antiquités.
Rouen, le i8 novembre 1884.
Le Pré/et,
Signé : E. Henblé.
Pour expédition conforme :
Le Secrétaire général^
Beverini-Vico
Porche de la Vieux-Rue. — M. Gouellain rappelle
à ce propos le projet de classement de cet intéressant
monument, et demande quelle suite lui a été donnée.
M. le Président est invité à rappeler Tafifaire à l'atten-
tion de M. le Préfet.
Fontaine-le-Bourg. — Déplacement de la Fontaine-
Nourrice. — M. de Beaurepaire expose que le petit
édicule, connu à Fontaine-le-Bourg sous le nom de
29
442
Fontaine- Nourrice f est menacé de destruaion par
suite de travaux de voirie.
M. Bouctot ajoute que les habitants tiennent beau-
coup à ce souvenir du passé; ils en réclament la recon«-
struction sur un autre point, et on a même parlé d'une
demande de classement.
M. Lefort estime que le moyen le plus simple comme
le plus sûr de donner satisfaction au légitime désir de
la population est d'imposer aux entrepreneurs du
chemin Tobligation de démonter avec soin cette fon-
taine pour la relever ensuite en lieu convenable. La
Commission émet à l'unanimité, en ce sens, un vœu
qui devra être transmis à M. le Préfet.
Portail deSaint'Lô. — Le même membre a adressé
à M. le Président une lettre où il expose l'intérêt du
portail de Saint-Lô, en ce moment menacé de des-
truction; et la possibilité qu'il y aurait d'employer le
jubé de la Cathédrale à la décoration d'une autre
église.
En ce qui concerne le portail de Saint-Lô, la Com-
mission, après avoir échangé diverses observations, est
unanimement d'avis qu'il soit réédifié à Tune des
entrées du jardin Sainte-Marie.
Jubé de la cathédrale. — Quant à ce dernier monu-
L ent, la Commission remarque qu'il appartient à
l'État, qui en peut toujours réclamer les fragments.
Elle craint que les sanctuaires indiqués par M. Lefort
ne soient point, parleurs proportions, en rapport avec
l'hôte qu'on voudrait leur donner. Aussi, sur la pro-
position de M. Bouctot, se borne-t-elle à en voter la
conservation dans son intégrité et dans chacune de
ses parties.
443
Emmurées, — M. Paul Baudry a demandé aux
héritiers de M. L. Leclerc une pierre provenant des
Emmurées, pour le Musée des Antiquités. M. le Pré-
sident constate que cette sculpture présente quelque
intérêt, et qu'il est à désirer de la voir entrer dans la
collection départementale.
Le même membre lit la notice suivante :
Portail de Bonne-Nouvelle, — L'église du prieuré de
Bonne-Nouvelle étant menacée d'une ruine complète et
prochaine, par suite des travaux considérables qui vont
avoir lieu pour transformer en caserne d'infanterie le
quartier de cavalerie qui s'était installé dans cet ancien
prieuré, ne serait-il pas à propos de faire des démarches
pour obtenir au moins la conservation ou la réédification
du portail?
Ce portail, dont la première pierre fut posée par D. Da-
vanne, au nom de la duchesse de Longueville, le i6 février
i655, et qui porte la date de i656, est en pierre et très
richement sculpté. L'entrée est surmontée d'un fronton
triangulaire percé d'une niche et reposant sur quatre
colonnes corinthiennes. Plus haut, quatre pilastres alter-
nent avec des bouquets de fruits et de fleurs, accompagnés
de deux cartouches, sur l'un desquels est inscrit le mot
PAX. Au milieu, dernier souvenir de la période ogivale,
une longue fenêtre supporte, à la pointe, un acrotère
chargé d'un vase, et est divisée par des meneaux émoussés
qui se terminent par une grande fleur de lys. La surface
supérieure est occupée par TAnnonciation de la sainte
Vierge, au-dessus de laquelle se trouve le symbole du
Saint-Esprit. Enfin, les côtés de l'amortissement, con-
tournés en ailerons, formaient autrefois un fronton circu-
laire que dominait la croix.
La Commission appelle la sollicitude de Padminis*
tration départementale sur ce portail aux dimensions
444
importantes et d'un aspect vraiment monumental.
Un beau bâtiment conventuel en pierre, du xviie ou
xvriic siècle, et qui contient encore une partie du cloître
de Bonne-Nouvelle sera aussi compris dans les nouvelles
destructions qui vont s'exercer là, comme elles s*exercent
si fréquemment dans notre ville.
Dalle tumulaire du Vénérable de la Salle. — J*ai pu
obtenir indirectement, de l'entrepreneur des travaux exé-
cutés pour l'installation de l'Ecole normale dans lancien
asile de Saint-Yon, un fragment de dalle tumulaire en
marbre noir, portant une inscription sur chacune de ses
deux faces, et qui offre un véritable intérêt pour l'histoire
de notre ville.
Cette dalle a recouvert successivement deux sépultures ;
et les deux inscriptions se rapportent à deux personnages
différents.
La première inscription, détériorée à dessein, lorsque le
marbre changea de destination, est celle d'Agnès Lopez,
femme d'Emmanuel Dias Sanchez, marchand bourgeois de
Rouen, lequel décéda le i3 août 1643.
Nous restituons, grâce à Farin, les lignes dont nous
trouvons des traces plus ou moins considérables.
D. O M.
[Hic] jacet Agnes Lopes,
[vlissip]one Lusitanise ex illustri
[familia or]ivnda Emanvelis Dias
[Sanchez A]nno MDCV digna vxor,
[Charitatis a]c Beneficentis exemplv[m],
[pudicitiae ac mod]estise typvs, côivgal [isque]
[benevolentiae et cjoncordise simbolv[m]
[obiit die 23 junii an [CMDCXXXVI[I]
[œtatis 52 in cœlo quiescat].
La dalle tumulaire était primitivement placée dans le
petit chapitre du couvent des religieux Cordeliers, où furent
445
inhumés plusieurs seigneurs et marchands d'Espagne, de
Portugal et d'autres nations.
Par je ne sais quel concours de circonstance, cette dalle
a recouvert, en second lieu, des restes autrement illustres
que ceux de Agnès Lopez. Elle a servi, ni plus ni moins,
au vénérable Jean- Baptiste de la Salle, instituteur des
Frères des Écoles chrétiennes, mort, comme on le sait, le
7 avril 1719, dans la maison de Saint- Yon qu^il avait fondée,
et où il reçut la sépulture, le 16 juillet 1734, après avoir
momentanément reposé dans l'église Saint-Sever.
Les caractères, très bien tracés, quoique très incomplets
aujourd'hui, ne peuvent laisser à cet égard aucun doute.
Nous les reproduisons tels quels, sans pouvoir ajouter ce
qui leur manque, aucun document, de nous connu, ne
nous en ayant jusqu'à présent révélé la teneur :
[re]pose, messire Jean [Baptiste]
[de La Sal]le, prêtre, Docteu[r en]
[théol]ogie, ancien chano[ine]
[de n]otre Dame de Re[ims]
[instit]uteur des Frère[s]
[des Ecole]s chrétiennes ; qu[i zé]
lé dans la pratiqu[e]
s les vertus c[hrétiennes]
[ch]arité qui
r tous ses
X e
Messieurs les membres de la Commission des Antiquités
n'ont pas oublié sans doute qu'une première pierre tumu-
laire, que la tradition disait avoir été celle qui marqua
dans l'ancienne église Saint-Sever le lieu de sépulture du
vénérable instituteur, a été reportée dans l'église nouvelle,
en 1860, et que l'inscription latine qui en avait disparu,
y a été restituée par les soins du digne abbé Cochet.
La seconde pierre du vénérable, celle que j'ai l'honneur
de vous signaler, a dû être brisée et rejetée hors de la
446
chapelle de Saint -Yon, à Tcpoque de la Révolution.
En i835, lors de rintroduction du procès de canonisation
de Jean- Baptiste de la Salle, les précieux restes de celui -ci
furent exhumés de Sainc-Yon et transférés dans l'ancienne
chapelle de l'école normale, rue Saint- Lô, dirigée par les
Frères des écoles chrétiennes. Ils doivent être aujourd'hui
conservés dans la maison des Frères, rue Saint-Gervais.
M. L. De Boutteville, alors directeur de rétablissement
de Saint- Yon, devenu hospitalier en 182 5, assistait à l'exhu-
mation, et nous tenons de lui que la sépulture fut rencon-
trée vers le chevet de la chapelle. Elle était derrière la
place primitivement occupée par Tautel, lequel, à cette
époque, se trouvait à l'entrée et non au fond du chœur.
« Le corps était représenté par un squelette à peu près
complet, crâne entier, os longs des bras et des jambes, etc.
f 11 n^existait pas de caveau. Le corps, renfermé dans
un cercueil en bois, dont il ne subsistait plus que des ves-
tiges, était déposé dans la terre. Avec le corps, on trouva
un crucifix en cuivre, semblable à ceux que portent les
Frères des écoles chrétiennes, détaché de la croix, dont le
bois avait été détruit par la pourriture, et quelques frag-
ments des ornements sacerdotaux dans lesquels le corps
avait été enseveli, des franges surtout. »
Il n'est, dans tous ces détails, aucunement question
d'une épitaphe quelconque, et celle qui est arrivée entre
mes mains est une véritable relique, et semble avoir été
jusqu'à présent ignorée.
Pavilly. — Chapelle Saint-Pierre, — Enfin M. de
Beaurepaire communique surTancienne église Saint-
Pierre, à Pavilly, le mémoire suivant :
Notice sur le prieuré de Sainte-Austreberte de Pavilly,
Un des plus anciens établissements religieux du diocèse
de Rouen était, sans contredit, le monastère de Sainte-
Austreberte de Pavilly, dont il reste encore une chapelle
447
que M. Tabbé Baudet, doyen de Gères, par respect pour
de pieux souvenirs, a rachetée, il y a quelques années, qu'il
a &Lt restaurer^ qu'il a consacrée à une œuvre charitable,
et où il se fait encore, au moins de fois à autre, quelque
exercice du culte.
M. Tabbé Cochet en a^ fait une description sommaire
dans son Répertoire archéologique de la Seine-Inférieure.
Cest assez pour exciter la curiosité, peut-être pas assez
pour la satisfaire.
Voici en quels termes un bénédictin, D. Hilaire Belin,
raconte la fondation de ce monastère :
t Le prieuré de Sainte-Austreberte de Pavilly, de
l'ordre de S^ Benoist, a été fondé par Amalbert, seigneur
de Pavilly, l'an de l'incarnation de Notre-Seigneur 664.
t La fille de cet illustre seigneur, Aure, ou Aurée
d'après d'autres documents, s'estant vouée à Dieu et dési-
rant estre relligieuse, communiqua son desseing à son
père, lequel l'approuva, et au mesme temps vouUut le
seconder, et, pour cet effet, par Tentremize et conseil de
s» Phillebert, pria sainte Austreberts qui pour lors de-
mouroit au monastère du Port, diocèze d'Amiens, et y
vivoit en réputation de grande piété et saincteté de vye,
de vouloir venir gouverner le monastère qu'il avoit faict
bastir et construire en son territoire de Pavilly.
« Sainte Austreberte,apprès avoir consulté s» Omer, son
principal directeur, et receu ses ordres, s'achemina audit
lieu de Pavilly, où, par le consentement de s« Ouen,
archevesque de Rouen, elle fuct establye abbesse de ce
nouveau monastère, et apprès l'avoir gouverné 16 ans et
avoir receu 24 religieuses, elle y rendit Pesprit à Dieu, le
loc de febvrier 680.
« Elle fut inhumée dans l'église de son abbaye, en la
chapelle de S. -Pierre, où son corps a reposé long temps,
et Ton y veoit encore, dans ladicte chapelle, son sépulcre,
qui est visitté journellement en grande debvotion par un
grand concours de peuple, Dieu y ayant faict et faisant
448
encore journellement plusieurs miracles évidens par l'in-
tercession de ceste saincte.
« Aprez son decedz, Benoiste fuct esleue abbesse de
Pavilly, et donna Thabit et admict à la profession Jullianne,
pauvre fille du bourg de Pavilly, qui est aussy décédée
audict lieu et inhumée en l'église de lad. abbaye. Le Père
Hugues Menart et M. Du Saussay la publient sainte en
leurs martyrologes.
c Les corps de ces saintes ont esté conservés en ladicte
abbaye de Pavilly jusques en l'an 841, qu'ils furent trans-
portés à Montereul, ville du diocèse d'Amiens en Picardie, à
cause que les Normans, soubz la conduite de Hastan, leur
capitaine, homme barbare et inhumain, faisoient grands dé-
gastz en Normandie, bruslant et pillant touttes les églizes^
en telle sorte qu'il ne resta, d*un monastère bien basty et
bien construict, que les marques d'une vieille mazure.
c Et ne se treuvant plus ny abbesse, ny relligieuses, es-
glise, ny monastère, les seigneurs de Pavilly se remirent
en possession des biens et revenus dont Amalbert l'a voit
dottc, et en ont jouy jusques en l'an 1090, auquel temps
Thomas de Pavilly le redonna à Gaultier, 3^ abbé de l'ab-
baye de la Très-Saincte-Trinité, fondée au Mont de Sainte-
Catherine-lès-Rouen, à la charge de rebastir led. monas-
tère et y envoyer des religieux de son abbaye pour y faire
l'office divin et prier Dieu pour les fondateurs.
c Le tout fut exécuté, et, depuis ce temps-là, ladicte ab-
baye est devenue prieuré de Tordre de s» Benoist, membre
deppendant de ladicte abbaye de Sainte-Catherine, à la
collation de l'abbé dUcelleplenojure, vacation advenant. »
Un manuscrit du xve siècle, conservé aux Archives du
département, fournit à peu près les mêmes renseignements
sur la fondation de ce prieuré. Malheureusement ce ne
sont que des notes dont l'exactitude ne peut pas être véri-
fiée, parce que les documents anciens ont péri depuis fort
longtemps.
« L'an de grâce Vie XLVI, eu temps de Louis, filz du
4<9
noble roy de France Dagoubert, quart roi chrétien après
Clovis, qui fu le premier roy de France chrétien et bap-
tisé de monsr st Rémi Tan de grâce IIIIc IIIl» XIX, et
resgna xxx ans,
t Aimabert, chevalier, sire de Pavelli, funda sur son fief
et seigneurie ung monastère en Touneur et révérence de
notre Dieu, et y ordonna religieuses de Torde Mons' st
Benest et y mist une sienne fille nommée Alvrée. Et
estoit pour icellui temps, mons^ s< Ouen, archevesque de
Rouen, et mons^ s< Philiebert, abbé de Jumièges.
« L'an de grâce Vie LXIIII, madame s^e Austreberte,
religieuse du monastère nommé Port, sur la rivière de
Somme, fu abbesse dudit lieu de Pavelli, par Tordenance
de monsr s^ Phillebert, adonc abbé de Jumiègez^ lequel
gouvernoit et enseignoit en foy et en saincte religion les
religieusez dudit monastère de Pavelli, au nombre de vingt-
chinq religieuses.
« L'an de grâce VIIc et III, trespassa madame st« Aus-
treberte, le x« jour de frevier, jour de dimence, laquelle fu
enterrée audit monastère en la chapelle fundée de mons'
s» Pierre apostre, au senestre costé du grant autel. Moult
sainctement se gouverna, et par ses mérites et prières
moult de miracles nostre créateur y voulut faire et dé-
monstrer, comme il appert d'une fontaine, laquelle est
auprès de ladicte chappelle où est enterrée.
f L'an de grâce Ville LI, fu brullé et destruit ledit mo-
nastère de Pavelli par les danois sarrazins ; semblablement
le moustier de S* Pierre et S* Paul de Jumièges, par plu-
sieurs aultres de Normandie et de France, et demoura en
ruine ledit monastère Tespasse de Ile XXI III ans.
« L*an de grâce mil et trente. Gosse le viconte funda
le monastère de S«e Trinité au Mont de S»» Katherine prez
Rouen, et régnoit le duc Richart chinquieme de Norman-
die, lequel donna la place dudit monastère, bois, terres et
aultres pocessions, et, aprez sa mort, son frère le duc
45o
Robert omosna et donna moult de ses biens, et fii à la
dédicasse, qui est le xxvi* jour de juing.
f Lan de grâce mil IIII" et onze^ fu translate de Pa-
velli véncrablement et honorablement le corps de madame
s»* Aubstreberte, vierge, au monastère de S*e Trinité prez
Rouen, eu Mont de S<e Katherine, eu temps de Waltier,
tiers abbé du dit monastère» lequel Waltier, père abbé,
commencha à rédiffier ledit monastère de Pavelli.
€ Uan de grâce mil Ile resgnoit Thomas de Pavelli,
chevallier, sire dudit lieu, lequel conferma tout ce que ses
prédécesseurs a voient donné et omosné audit monastère
de Pavelli, présens Eustache de Pavelli, chevallier, son
frère, et Reynaus de Pavelli et plusieurs aultres. N* que
depuis la fundacion dudit monastère n'ay veu ne trouvé
aucun ensaignement ne escripture dudit prieuré précé-
dent. »
La pièce suivante nous paraît être la copie d'un placard
qui aurait été affiché dans un endroit apparent du monas-
tère pour être lu par les visiteurs ou les pèlerins.
€ Sachent toux voians cestescript que, eu temps de très
noble Dagoubert, quart roy de France chrétien, qui res-
gnoit Tan de grâce VJc XXXII, Almabert, chevalier, sei-
gneur et baron de Pavelli, constitua, funda et édifia sur
son fieu et seigneurie de Pavelli, Tan Vie XLI, ung mo-
nastère en Touneur et révérence de la glorieuse vierge
Marie et y fist plusieurs chappelles et entre les aultres,
Tune de mons' s^ Pierre, et Tautre de mons"" s^ Martin, et
y ordonna et mist religieuses de Torde mons. s^ Benest,
et y mist une siene fille nommée Avrée, lequel Almabert
pria mons. s< Philebert, adonc abbé du monastère de Ju-
mièges, qui luy plust visiter et instruire en foy et doctrine
et en saincte religion icelles religieuses ; donc après long
temps fu madame s^* Aubstreberte abbesse dudit monas-
tère par Tordennance de mons^ s« Philebert en Tan de
grâce Vie LXIIII, uquel lieu moût sainctement se gou-
verna, et XXV religieuses avec elle, et par ses mérites et
45i
prières moût de miracles nostre créateur y voulut faire
et demonstrer ; et y donna ledit Almabert, en pure omosne,
rentes, terres, dismes, pocessions et revenues, sans aucunes
choses retenir, excepté prières et oraisons pour le salut de
son âme, ses parens et amis ; et semblablement aprez,
mons. Guillaume d'Esneval, chevallier, y donna et aumenta
moût ledit monastère pour le salut de son âme, parens et
amis. Cy est assavoir que le siège dudit monastère est
fundé de sy long temps et créé sur ancienne et pure omosne,
que le Roy, ne le prince ou seigneur de la terre ne peuvent
par droict faire leur justice laye pour quelque crime ou
chose que ce soit dedens les mectes dudit monastère de
lad. vierge, se ils ne veulent encourir la sentence divine
ou ecclésiastique.
€ N> que nulz ne doivent édifier, mectre ne empeschier
aucunement près des murs de la cloison dudit prieuré, que
le prieur et ouvriers ne puissent aller et mettre leurs ma-
tières pour repparer ladicie cloison. •
L'église actuelle possède encore une ancienne inscription
lapidaire sur trois colonnes, ornée à sa partie supérieure
des effigies de saint Pierre, de saint Paul et de saint Ur-
bain, caractérisés, saint Paul, par deux épées croisées,
saint Pierre par deux clefs, saint Urbain, en sa qualité de
souverain pontife, par le même emblème. Au-dessus de
leurs têtes, on distingue des écussons ainsi décrits dans
une pièce que j*ai sous les yeux : « Écusson d'armes timbré
d'un casque soutenu par 2 sauvages, tenant chacun un
guidon avec écu, écartelé au i^r et 4*^; échiqueté au 2" et
3«, 12 annelets de 3 à 3 ; » « Écu chargé d'une croix fleur-
delisée, etc »
On remarque une fracture à Tune des pierres sur les-
quelles cette inscription a été gravée ; cette fracture est
ancienne : elle existait dès le milieu du xvii^ siècle. On voit
également, que dès ce temps-là, une partie des écussons
avait été enlevée.
Cest ce que ne manqua pas de constater Robert Dan-
452
dasne, commissaire aux Requêtes du palais, à Toccasion
d'un procès qui s'éleva entre Françoise de Pruneley, veuve
de M. Anne de Tournebu, sieur de Livet, président aux
Requêtes, et Elisabeth de Pruneley, comtesse de Mussy,
sa sœur, Tune et Tautre dames de Pavilly d'une part, et
François Louchard, prieur du prieuré, d'autre part. La
contestation avait pour objet la propriété d'un cours d'eau
et du marché de Saint -Laurent, autrement dit de Sainte*
Croix (i3 janvier i655).
L'inscription en question était alors placée f au coin
d'une paroi entre la nef et le chœur du côté de l'Épître,
sous la tour du clocher t. Il paraît qu'elle avait été posée
là en 1600, à la réquisition du seigneur d'Elsneval, Ch. de
Pruneley, du consentement du prieur Jean Le Cauchois.
J'aurais eu sans doute beaucoup de mal à en déchiffrer le
texte, parce que les lettres sont empâtées par la couleur et
qu'elles sont, d'ailleurs, hors de la portée de la vue. Par
bonheur, j'ai pu le relever dans une feuille imprimée à
laquelle les seigneurs d'Elsneval donnèrent dans le temps
une assez grande publicité.
Voici la teneur de cette inscription :
Fundatio seu dotatio hujus cosnobii, abbati Sanctissimœ
Trinitatis de Monte Sanctœ Catharinœ, ac religiosis
ibidem Deo famulantibus^ facta per dominos de Pavilly et
d*EsnevaL
Omnibus Christifidelibus^ tam futuris quam extantibus^
présentes litteras inspecturis, salutem, Noverit universitas
vestra quod ego Thomas de Pavilly^ miles, donavi et hac
carta sigilli mei munimine impressa conjirmavi, pro sainte
anima meœ^ et animarum antecessorum meorum, abbati
Sanctœ Trinitatis de Monte Sanctœ Catharinœ juxta Ro"
thomagum, et monachis ibidem Deo famulantibus^ eccle-
siam et monasterium de Paviliaco^ quod quondam prœde-
cessores mei in honorem Sanctœ Mariœ Virginis funda-
verunt^ et proprio censu construxerunt ,• ubi etiam beata
453
Austreberta, cum non parvo ancillarum Dei numéro^ prœ-
fuit, Sed quia a gentibus et paganis vastatum atque diru*
tum multo tempore jacuit ; nos^ charitatis intuitUy eidem
Abbati redificandum tradidimuSj atque quascumque posses-
Sîones terrarunty redituum^ decimarum atque libertatum
olim antecessores met eidem ecclesice contulerunt, prœdicto
abbati et monachisejus perpétua possidendum concessimus,
sub ea tamen conditione quod prœdicti abbas et monachi
tenebuntur mittere ad monasterium prcedictum Paviliaci
quatuor de confratribus suis ad faciendum servitium et
ibidem Deo sub regulari observantia perpetuo serviendum.
Huic donationi adfuit Guillelmus, archiepiscopus, qui et
consensum prœbuit et sigillo suo roboravit. Acta sunt hœc
anno ab Incarnatione Verbi divini millesimo nonagesimo
primo^ testibus Guillelmo^ fratre meo^ Reginaldo de Beau*
montf Hugone de Povilla^ Othone de Alvito et pluribus
aliis,
Confirmatio hujus cœnobii ac tuitio sanctœ sedis
apostolicce indulgentiœque huic loco in perpetuum con^
cessœ per dominum Urbanum II, pontificem maximum.
Urbanus episcopus^ servus servorum Dei^ venerabili
confratri nostro Guillelmo^ archiepiscopo, et cœteris ejus^
dem provinciœ fideiibus^ salutem et apostolicam benedic^
tionem. Cœnobium quod beata Austreberta virgo in pago
Paviliaco quondam constnixerat^ ut post a gentibus diru*
tum esty audivimus^ venerabilis abbatis Galterii studio^ et
quorumdum fidelium instant ia, noviter reparatum. Ut
igitur pia voluntas apostolicce sedis favore vires assumât,
dilectionem vestram ad ejusdem cœnobii reparationem
fit exaltationem litteris prœsentibus excitamuSy in quibus,
ex apostolica auctoritate^ prœcipimus ne quis deinceps
-eumdem locum temeritate qualibet infestare prœsumat.
Omnibus autem qui locum istum^ pro omnipotentis Dei et
sanctœ virginis Austrebertœ reverentia diligere^ adjuvare^
protegerCy et exaltare curaverint, ejusdem Dei et aposto^
lorum ejus benedictionem etgratiam imploramus, bene/a"
454
cientibusque et eumdem locum colentibus quartam pœni-
tentia partem ab episcopo sive a presbytero illis injunctœ
condonamus ; diripientibus pertinentia vel concessa loco
huic^ vi vel fraude aliqua^ usque addignam satisfaction efn
gladio anathematis ferimus. Datum Cossinii, quarto idus
octobriSy annoab Incarnatione Verbidivini millesimo nona^
gesimo primo.
Sunt et alia privilégia^ multœque indulgentice huic loco
impertitœ a summis pontificibus^ Adriano IV scilicet et
Nicolao F, illustrissimisqiie légat is Guillelmo de Toute^
villa et Alexandro de Mangiis atque strenuissimis equiti-
bus, magna pietate conspicuis, Almaberto domino de
Paviliaco, primo hujus cœnobii fundatore^ et Roberto^
barone d'Esneval^ quce brevitatis causa in hoc lapide non
sunt insculptœ. Ad perpetuam rei memoriam hoc affixum
est de mandato magni et potentis domini Caroli de Pru-
neléy equitiSj viri nobiliSy or dinar ii regiœ camerœ^ ducis
quinquaginta militum cataphractorum^ vice-domini Pavi-
liaci^ domini de Gas^eran et de Herbaut^ totiusque conventus
ejusdem abbatiœ et domini Johannis le Cauchois^ Prioris
cjusdem loci anno 1600 (i).
La charte de fondation ci-dessus rapportée fut très fré-
quemment alléguée dans un procès qui, sous des formes
diverses, dura plus d*un siècle, et qui avait eu pour cause
la suppression de l'abbaye de Sainte-Catherine-du-Mont
sous Henri IV.
Lorsque cette abbaye, ainsi que la forteresse qui y était
jointe, eurent été détruites par ordre de Henri IV, confor-
mément aux vœux, non-seulement de la ville de Rouen,
mais des États de la province, la partie des biens du mo-
nastère, afférente à la manse abbatiale, fut unie à la Char*
treuse de Bourbon-lès-Gaillon. Le reste, après bien des
(i) Je suis loin de vouloir garantir Fauthenticîté des documents
contenus dans cette inscription.
455
pourparlers et des réclamations, fut laissé comme par grâce
aux religieux Bénédictins, qui allèrent s'établir à Saint-
Julien et gardèrent pour eux le prieuré de Pavilly, devenu
depuis longtemps un bénéfice simple, de prieuré conven-
tuel qu'il avait été à l'origine. La communauté bénédictine,
mal à l'aise et comme dépaysée dans sa nouvelle résidence,
ne se recruta plus que difficilement, et il y avait bien des
années qu'elle traînait en quelque sorte une vie languis-
sante et sans édification pour le public, lorsque les der-
niers religieux (ils étaient en fort petit nombre) se déci-
dèrent, moyenant des pensions viagères et d'autres avan-
tages, à céder aux Chartreux leur monastère de Saint-
Julien avec toutes ses dépendances. Le concordat inter-
venu entre eux est de l'année 1661. Alors une contestation,
qui ne fut ni moins longue ni moins embrouillée que celle
qui avait suivi la suppression de l'abbaye, s'éleva entre les
nouveaux possesseurs, qui se prétendaient substitués aux
bénédictins, et les seigneurs de Pavilly, qui soutenaient,
en leur qualité de fondateurs, qu'on n'avait pu disposer
du prieuré de Sainte-Austreberte sans leur agrément. De
titres positifs, on n'en pouvait produire de bien clairs ni
de bien anciens, si ce n'est l'inscription qui précède. En
1667, le procureur général du parlement se détermina à
prendre en main la cause des seigneurs de Pavilly; dans
les conclusions qu'il donna, lors de l'arrêt d'enregistrement
du concordat passé entre les Chartreux et les Bénédictins^
il déclara s'opposer formellement à l'homologation de l'ar-
ticle relatif à l'extinction du monastère de Sainte-Austre-
berte. Ce ne fut que bien des années après, le ï " décembre
1713, qu'un traité put être conclu entre les parties. Aux
termes de cet accord, le président d'Esneval se désistait
de toutes les oppositions mises par lui à l'union du prieuré
à la Chartreuse. Les Chartreux s'obligeaient, de leur côté,
à l'entretien des bâtiments et du manoir du prieuré, et
consentaient à ce que le président et ses successeurs nom-*
massent le prêtre desservant qui serait chargé de dire tous
456
les jours la messe à la chapelle (i) ; ils lui assuraient un
traitement de 3oo 1. par an, outre le logement et le casuel ;
ils autorisaient, en ce qui les concernait, Tunion de la
petite cure de Pavilly, qui dépendait d'eux, à la grande
cure qui dépendait des seigneurs d'Esneval.
Ce traité ne réussit pas à terminer d'une manière com-
plète la lutte entre la communauté et la seigneurie. Pour en
finir avec les procès, les Chartreux, de guerre lasse, cédè-
rent, le 5 juillet 1773, à M. Elsprit-Robert-Marie Le Roux
d'Elsneval, président à mortier, « le sol, Téglise ou cha-
pelle et le manoir de Tancien prieuré de Sainte-Austre-
berte, à charge par lui de pourvoir à Tentretien et à la déco-
ration du lieu saint, ainsi qu'au desservice de la cha-
pelle. »
C'est ce qui explique pourquoi la chapelle ne fut pas
considérée comme un bien national et ne fut pas aliénée à
la Révolution.
Jusqu*à ce jour, elle a conservé son caractère antique.
C'est un des rares édifices romans de ce pays. Je ne serais
pas surpris que sa construction eût suivi de très près le
rétablissement du prieuré.
Les manuscrits des xvi^ et xvii« siècles, auxquels j'ai
emprunté quelques-unes de mes citations, contiennent en
outre un censier très intéressant du bourg de Pavilly (2)
(i) Jean-Baptiste-Ouen Baudet, oncle du propriétaire actuel et
du restaurateur delà chapelle, fut le dernier chapelain du prieuré
de Sainte-Âustreberte. Voir la Notice de M. l'abbé Baudet,
pp. 61, 62.
(2) Ce censier fut composé en latin par un nommé Le Fores-
tier. 11 en fut fait une traduction française qui commence
ainsi :
« L'an de grâce mil deux cents quattre vingts et unze, frère
Guillaume leForetier, religieux daustrier du monastère et abbaye
de Sainte-Trinité du Mont Saincte-Katherine-lès-Rouen, demou-
rant en la prieuré de Pavilly, ou temps de domp Robert dit
Cousin ou de Criquetot, adonc prieur dudit lieu, feist et composa
457
et quelques notes précieuses à recueillir, au moins pour
une histoire locale.
En voici quelques-unes :
f L*an mil II Ile LVIII, le vendredi xni« jour d'octobre,
fu fondue une cloque audit prieuré, nommée Marie, sans
faire nulz dons de cheulz de la ville, et la cuiderent des-
tourber le curé de la mendre porcion et le chappelain de la
grande, natifs de lad. ville, disans que c*estoit en leur pré-
judice. Celluy qui est vray rctributeur et la glorieuse
Vierge leur veuUent rétribuer, et tous les autres griefs et
dommages qu'ils ont fait audit prieuré !
ce petit ex traict, affin que quiconque soit prieur dudit lieusaiche
combien luy doibvent de rente tous ceulz ou celles qui tiennent
du fieu dudit prieuré de Pavilly. » Le censier se termine par ces
mots : « Cy fine le rouUe que frère Guillaume dict le Foretier,
natif de la parr. de S. Vandrille, feist et composa à ses propres
coustz et despentz. »
A la suite : « Et sachent tous que le pont de Rîchebourg (pont
d*un quartier de Pavilly) l'an mil deux centz quarante, estoit faict
de boys ; et quant il chayet, les tenantz et hommes du seigneur
du Plexis le debvoient trouver, lever et mectre sus. Or advint-il
une fois, que Villaume d'Yerville, adonc prieur de Pavilly, aux
despendz de ladicte prieuré de Pavilly, feist faire et réparer
ledit pont ; et fut faict et édiffié de pyere ; et, pour ce que il n*y
estoit point tenu et qu'il ne le debvoit point faire, mais le feist
de sa curialité et non mye par coustume, nous conseillons, en
bonne équité et bonne foy et fidellité, que, eu temps que ledit
pont cherra, que quiconques soit prieur en ce temps ne le face
faire ne reparer aux despentz de ladicte prieuré ; car ce seroit
péché mortel, quant il n'y est point tenu, de y despendre ainsy
les biens de l'esglise et de ladicte prieuré. Car, pour ce que ledit
prieur l'avoit faict au devant faire, advint que ledict pont chist
l'an mil deux centz quattre vingtz et deux, et les gentz de la
ville vouHoient que le prieur, qui estoit en ce temps, le feist
réparer et relever et raruner bien et deuement ; mais ilz labou-
rèrent en vain, car ilz ne peurent trouver ne droict ne coustume
que il le deust faire. »
3o
458
€ Le dimence iii« de décembre ensuivant (1469), Louys
de Dreux, maistre Franchais, son frère, enfTansd'Esneval,
firent prendre et mettre en criée tout le tenement du
prieuré et mettre en la main de la seigneurie, leur père
absent, deffendre le ciellir, recepvoîr le paie à toulx les
tenans, sur paine d'amende, pour eschever prossez donné
despence avec iceulx enfTans, recepveurs, procureur, pre-
vost et aultres, lxii s. m d.
c En Fan IIIIc LXX vint à Rouen mons. d'Esneval ; le
V* jour de juing fu devers lui plusieurs fois audit lieu de
Rouen devers sa femme et enffans pour avoir paiement de
XVII 1. d'arrérages de Tan IIIIc LXIV..,
< Le xnii« jour de novembre audit an vint ledit seigneur
à Pavelli ; retint d'icelle somme de xvii 1, viii 1.
< Item, despencé avec ledit seigneur, femme, enffans,
procureurs, receveurs et fermier, pour avoir paiement
d'icelle somme, audit an, xl s.
« Le dimence xvi de juin audit an (1471)) Louise de
Dreux fit prendre et mettre toute la reuenue et apparte-
nance du prieuré, son père absent, à Tessue de grant
messe par trois dimenches, rapport au plais, par le prévost,
et prinses dictes de tour le tenement dudit prieuré et
arrest sur les labours des terres et dismez.
L'an lîllc LXIIIL
« Item de mon hoste pour xxx mines de blé, vu 1. x s.
c Item de lui pour xv cares de foin, xlv s.
c Item de lui pour xiiii mines d'avoine, xlv s.
« Nota. — Le jeudi, ix de mars l'an dessus dit, partit
l'oste dessus dit nommé Pierres de Kdochennet, escuier
du pais de Bertangne, lequel fut logié au priouré, lui vi® et
VII chevalx, depuis le dimence vi« jour de novembre Tan
IIIIc LXIII jusques^iu jour dessus dit lxiiii, et me lessa
une queue de vin vermail, du pris de c sous, et une ceduUe
en papier qui riens ne m'a valu, et print moult des biens
de cest hostel et arrera le bien et empira moult le lieu.
« Nota. — En ce temps estoit le roy de France et le duc
459
de Bertaigne en discord, tant que tous Bertons vindrerent
hors de Tordenance du roy de France et de Normandie ;
et s'y en alla le duc de Berry, frère du Roy, le comte
punays et de Longueville et plusieurs seigneurs et cappi-
taines, dont fu grant pitié et douleur.
t Nota. — Le jeudi xxi de marsIIIIc LXIIII, vindrent à
Pavelli tenir les monstres soubz le comte de Maulé-
vrier, Richard Ville, commissaire, Louis De la Haie, Pierre
de la Salle, lieutenanz, et moustrèrent au pray du prieuré
XXX hommes d'armes et 4 escuiers environ, et firent sere-
ment de servir le Roy bien et loyalment envers tous et
contre tous, et leur fut commandé que ilz allessent logier
incontinent Avranches, et logièrent au prieuré viii che-
vaulx et X hommes, jusques au vendredi none, eurent
foin, avoine, pain, cervoise et moût d autres choses, pour
ce, VII s. VI d.
a Nota. — Le lundi, viii« de juillet, à la requeste du
seigneur d'Esneval, vindrent logier deux lances de Torde-
nance Monsr du Boul en Paveilli, l'un nommé Bertran
Daché, fourrier dud. seigneur, lequel logia au prieuré,
lui vi^ et VI chevalx et une femme, l'autre nommé Guil-
laume Daché, son frère, logia quelx Raoul Yve, lesquelx
venoient boire, mangoint toulz les jours ensamble, et
leurs gens au prieuré, n'esparnoient, ne leurs gens, choses
que peussent avoir. Moût en fu chargié l'ostel par ledit
seigneur, sa femme, son fîlz, maistre Franchais qui venoit
souvent etc., et y furent jusques au xxiui« jour d'avril
ensuivant IIIIcLXXIL
« Nota. — Le mardi iiiio de décembre LXXI, Pierre
Henri, prévost d'Esneval, et le clerc Blanchet de Bauque-
mare, procureur et recepveur, furent sur toux les lieux
tenans du prieuré, firent arrester et deffendre de paier lez
deniers deubz pour le fenestrage au jour de St* Austre-
berte.
€ Nota. — Le dimence ix« jour de frevier Iin<= LXXI.
vindrent après disner, de par le Roy notre sire, deux com-
4^0
missaires et ung sergent royal en Tostel d'Esneval, la
damoiselle et m de ses filles et plusieurs autres présens,
prindrent pocession dudit hostel, de toutes les rentes,
revenues et appartenances de la baronnie et de tout ce
que peut appartenir à Robert de Dreux, escuîer, absent,
après vespres devant l'cglise ; leurent cinq lestres royaulx,
contenantes qui faisoient assavoir que toulx ceulx qui
dévoient rentes, arrérages, deniers de fermes d'achas,
a voient ou sa voient où avoit aucuns meubles et immeubles,
vinssent devers iceulx commissaires le dire ou faire dire,
sur paine de confiscation de corps et de biens, dedens
trois jours, pour cause que ledit Robert de Dreux et chinq
de ses enffans soi estoient asentés hors du royalme et de
Pobeissance du Roy.
€ Nota. — Le mardi ensuivant, le xi« jour dudit mois,
fut crié en la ville de Rouen, à son de tronble, par le Roy
notre sire que on bennissoit ledit Robert de Dreux et
tiii de ses filz hors du royalme et de la duché, toutes ses
terres, rentes et revenues, seigneuries et appartenances,
avec toux ses meubles et immeubles, et là où ledit seigneur
et ses enffans seroient trouvez, que l'on les menast au roy
ou a justice. »
Liste des prieurs de Sainte^Austreberte de Pavilly^
d* après la notice de Belin^ complétée à Faide de mes notes,
D. Guillaume dTervile, 1240 (1).
D. Robert Cousin ou de Criquetot, 1292 (2).
D. Guillaume Jacob, i385-i395 (3).
D. Pierre Lambert, 1404 (4).
(i) Censierde Sainte-Austreberte.
(2) IbiJ.
(3) Qualifié dans le registre de TÉchiquier de Pâques iBgS,
fo i65 v « prieur de l'église de Sainte-Austreberte, fondée à
Pavilly, sous Tabbé et le couvent de la Sainte-Trinité-du-Mont-
lès-Rouen. » V. Tab. de Rouen, reg. 9, fo i33.
(4) Tab^. de Rouen, reg. 9, f<> 1 19, i33 ; reg. i3, f<> s5i.
46 1
D. Maignet Lambert, 1433.
D. Jean Quiessebout ou Quiseboult, 12 mai ' 1452,
i3 janvier 1478.
D. Jean des Allois, 1489-14 mai iSoy.
D. Julien Hamon, i5i7-i52i.
D. Pierre Le Carpentier, 1 522-1 524 (i).
D. Franc. Le Carpentier, 1649 (2).
D. Jean Ribault, religieux profèsdu Bec-Hellouin, abbé
d'icelle abbaye, puis abbé de Valmont et prieur de Pavilly
par la résignation de François Le Carpentier, en i55o —
9 juillet i55i.
D. Nicolas Duport, religieux profès en l'abbaye de Val-
mont, prieur de Pavilly par la résignation de Ribault, en
i556.
D. Nicole de Gustimesnil, bailli du monastère de la
Sainte-Trinité du Mont Sainte-Catherine, prieur de
Pavilly, 23 juillet iSSy.
M« Emile Mancenet, chanoine de la cathédrale de
Rouen, curé du Boisguillaume, grand vicaire de Mons. de
Brives, abbé de Sainte-Catherine, pourvu en commande
dudit prieuré par le décès dudit Duport, de l'an i558.
Messire Henri d'Escoubleau, protonotaire du saint siège,
fils de Jean marquis de Sourdis, prieur de Pavilly par la
résignation dudit Mancenet, i562; fut depuis abbé de
Sainte-Catherine et évéque de Maillezais.
Me Sébastien Le Grand, clerc du diocèse de Sens, prieur
de Pavilly par la résignation dudit d*Escoubleau, 1 572.
M^' Mathieu Le Thuillier, prieur par la résignation
dudit Le Grand, 1577.
M« Jean Deschamps, prieur par la résignation dudit Le
Thuillier, 1577.
(i) Était en même temps, en i522, grand prieur de Tabbaye
de Sainte-Catherine.
(2} Était en même temps grand prieur de Saint-Ouen de
Rouen.
462
M« Henri Le Thuillier, abbé de Saint-Maurice, prieur
de Pavilly, par la résignation dudit Deschamps, 1578.
M* François Le Thuillier, prieur par la résignation
dudit Henri Le Thuillier, 1 578.
< En conséquence de toutes les provisions et résigna-
tions en commande cy-dessus, s'ensuivit ung long procès
entre ledit Le Thuillier et Daomp Nicole Commère,
Anthoine Langlois et Jehan Le Cauchois, tous religieux
de ladicte abbaye de Sainte-Catherine, qui avoient obtenu
lettres en court de Rome en forme et dévoUut sur les
deffectuosités desd. provisions en commande des prieurs
commendataires sus-nommés, lequel procès fut termine
par arrest donné en la court de parlement de Rouen en
Tan 1608, par lequel ledit Le Thuillier fut débouté dudit
prieuré, et ledit Cauchois, envoyé en la pocession d'icel-
luy, et par ainsy ledit prieuré, en ladicte année 1608,
retourna en règle (i).
< Daomp Jean Le Cauchois, soubz prieur de ladicte
abbaye, pourveu par lettres de subrogation au droit dudit
NicoUe Commère, fut envoyé en possession, par arrest
de ladicte cour, d'icelluy prieuré audit an 1608.
c Daomp Guillaume EUyes, relligieux et omosnier de
ladicte abbaye de Sainte-Catherine, docteur en théologie,
aumosnier de la Reyne, prieur des prieurés de Cléville,
de Bréval, et cy-devant prieur de Villaines, a possédé
ledit prieuré de Pavilly, au droit de la permutation ^icte
d'icelluy avec ledit Le Cauchois pour l'abbaye de Lan-
vault en Basse-Bretaigne, de Tordre de Cisteaux, où ledit
Le Cauchois est décédé, après avoir esté bénit dans Tcglise
de Sain t-Jullien-lès- Rouen par messire Charles de Balzac,
évesque de Noyon et abbé de Saint-Georges-de-Boscher-
ville, en Tannée 161 5.
(i) Jean Le Cauchois, religieux de Sainte-Catherine, prend le
titre de prieur de Pavilly dans des actes du S mai i SgS et 18 juin
1597.
•463
« Messire Nicollas de Hacqueville, seigneur de Pon-
ponne, abbé de ladicte abbaye de Vallemont, par permu-
tation avec ledit EUyes d'icelle abbaye avec ledit prieuré
de Pavilly et ceulx de Cléville et de Bréval, celuy de Clé-
ville, dépendant de Tabbaye de Saint-Etienne de Caen, et
Bréval du Bec-Hellouin, en l'année 1622.
€ Daompt François Louchart, religieux, chantre de la-
dicte abbaye par provision /y/^wo^i/r^ du prieur et religieux
dUcelle abbaye, ledit prieuré ayant vacqué par le dccedz
dudit sr de Hacqueville, et par ce moien est rentré en
reigle en Tan 1648.
c Daomp Hilaire Belin, grand prieur et bailly de ladicte
abbaye de Sainte-Catherine par provision pleno jure des
religieux de ladite abbaye capitulairemeni assemblés, ledit
prieuré vacant par le decedz dudit Louchart, le xx^ dé-
cembre 1661 (i).
« Ledict Belin a pris l'habit de religieux de l'ordre de S.
Benoist en ladicte abbayede Ste-Catherine le 4e may 1626;
il a rendu ses vœux le 22 mars 1629, et fut pourvu à l'of-
fice de bailly le 20 febvrier i636, et esleu grand prieur le
17 juillet 1647, laquelle charge il exerce encore main-
tenant en l'année 1647. Il a été aussi prieur des prieurés de
S. -Nicolas de Caudecotte près Dieppe et de S.-Georges de
Mottelles au diocèse d'Évreux^ deppendant de Tabbaye de
St- Pierre de Chartres. Il a esté vicaire-général de messire
Jean de Croisilles et des abbayes de St-Riez et de Jumièges. i
Il eut pour successeur Jacques de Gaugy, religieux de
Sainte- Catherine, prieur de Remalard et prieur de Pa-
villy, 1674- 1686, décédé le 18 avril 1694.
Antoine de Gaugi, bénédictin de Troam, prétendant au
prieuré de Pavilly par droit de permutation.
Dom Jean Loir^ religieux de Cormeilles, prieur de Pa-
villy de 1701 à 1705.
(i) Adrien Lepelletier, religieux de Sainte-Catherine, prend le
titre de prieur, dans un acte de 1641.
464
Dom Jean Edeline, bailli prieur de Cormeilles, pourvu
du prieuré de Pavilly, par Claude Le Roux, abbé de
Bouge, au nom et comme tuteur et gardien noble du s'
d'Esneval, 171 3.
Charles Le Tellier de Vaulibert, prieur de Cormeilles,
prieur de Pavilly, 1717-1719 (i).
Estât du bien et revenu du prieuré de Ste-Austreberte de
Pavilly.
€ Ledict prieuré consiste en unne grande chapelle dédiée
à la bienheureuse vierge Marie et à SteAustreberte, dans
le cœur de laquelle il y a unne contretabie de pierre des
carrières de Caen, dans laquelle il y a ung tableau de
TAnnonciation, et a esté icelle contretabie faict construire
de neuf par ledict Belin, prieur, en la présente année
1667; et dans icelle chapelle, est unne autre petite cha-
pelle desdiée au prince des apostres S. Pierre, dans laquelle
est le tombeau de ladicte Ste Austreberte, lequel est vénéré
de tout le peuple du pays et d'une grande quantité de pè-
lerins; et au bout d'icelle chapelle, dans le jardin du
sr prieur, se veoit unne fonteyne de Teau de laquelle les
peslerins en boyvent par grande debvotion. Au costé de
ladicte chapelle est le manoir du prieur, consistant en
unne bassecourt, avec maison, où il y a salle, cuysine,
seulle, plusieurs chambres et antichambre, guernier et
caves. Au dessoubz et vis-à-vis de lad. maison, de l'autre
costé de la cour, vers le Septentrion, est unne autre lon-
gueur de bastiment qui se compose : une chambre, seulle
et caveau, qui est Tappartement que le prieur destine pour
son chappelain, au costé duquel sont les escuries, avec unne
remise de carrosse, et, au bout de ladict court, est unne
(i) Jean Chabert, religieux de Saint- Victor-1' Abbaye, nonnmé
au prieuré par les Chartreux, s'était démis le dernier juillet
1716.
465
vollièrc garnie de pigeons au costc de laquelle est ung vieil
bastiment.
Et devant la maison dudit manoir est ung jardin planté
de nains, avec deulx parterres à lad. fonteyne de Ste-Aus-
treberte, ledit jardin contenant viron demye acre, i
M. P. Baudry signale une vie manuscrite de sainte
Austreberte à la bibliothèque de Rouen.
M. Pabbé Tougard ajoute que le crâne de la sainte
est précieusement conservé dans Péglise Saint-Vivien,
oti il aura été porté après Pentière destruction de
Tabbaye de Sainte-Catherine. Il rappelle que Téglise
Saint-Pierre, fermée à la Révolution, fut rendue au
culte en 1860, grâce au zèle d'un prêtre, M. Tabbé
Baudet, aujourd'hui doyen de Clères. Il a publié à cette
occasion une petite Vie de Sainte Austreberte et
Notice sur son monastère; 72 pp. in- 18, avec une
vue de la chapelle.
La séance est levée à quatre heures moins le quart.
Le Secrétaire intérimaire,
A. Tougard.
466
SÉANCE DU 3o DÉCEMBRE 1884
La séance ouvre à deux heures, sous la présidence de
M. Ch. de Beaurepaire.
Sont présents : MM. Adeline, Baudry, le marquis
de Blosseville, Bouquet, Gouellain, d'Iquelon, Lor-
mier, Tabbé Loth, Maillet du Boullay, de Merval,
Pelay, de la Serre, Tabbé Tougard, et le comte
d^Estaintot, secrétaire.
M, de Vesly s'est fait excuser.
La correspondance imprimée comprend :
Compte-rendu de la Commission impériale de
Saint-Pétersbourg pour Tannée 1881, avec atlas; —
Société archéologique de Bordeaux, t. VI 1 1 ; — Annual
Report of the Smitsonian institution, 1882; — Aca-
démie des ScienceSy Belles-Lettres et Arts de Besan-
çon, i883; — Société académique de V arrondissement
de Boulogne-sur-Mer (2« et 3* trimestres 1884); —
Société d'histoire, d'archéologie et de lettres et
arts de r arrondissement de Beaune, année i883; —
Bulletin des procès-verbaux de la Société d'Emu-
lation d'Abbeville, années 1881, 1882, i883; —
Bulletin du Comité des travaux historiques et scien--
tifiqueSy section d histoire et de philologie, année
1 884, n® 2 ; — Mémoires de la Société d'' Emulation du
Doubs, 188 3; — Société d'histoire, d'archéologie et
de littérature de V arrondissement de Beaune, 1882 ;
— Comité archéologique de Senlis, années 1882-
i883; — Bulletin de la Société des Antiquaires de
rOuesty 2« trimestre 1884.
M. le Président donne ensuite connaissance d'une
circulaire de la Société nationale des Antiquaires de
467
France contenant communication d^un vœu émis par
cette société dans sa séance du 9 juillet dernier^ et
invitation à en adopter les conclusions.
Ce vœu est ainsi conçu :
« La Société des antiquaires de France^ reconnais-
sant que les dispositions prises jusqu^à présent pour la
conservation des monuments de Tantiquité, particu-
lièrement dans l'Afrique française, sont restées ineffi-
caces, parce qu'elles manquaient d^une sanction
légale, émet le vœu que le gouvernement prenne
auprès du Parlement l'initiative d'un projet de loi
destiné à assurer la protection des monuments anciens
dans toute l'étendue du territoire national et des pos-
sessions françaises, et charge son bureau de trans-
mettre l'expression de ce vœu à M. le Ministre de
l'Instruction publique et des Beaux- Arts.
« Elle décide, en outre, qu'un pressant appel sera
adressé aux Sociétés savantes en vue d'obtenir leur
adhésion. »
Un débat s'engage sur la solution à donner à cette
proposition.
Un certain nombre de membres, tout en étant très
sympathiques au but que poursuit la Société des Anti-
quaires de France, trouve que des dispositions légis-
latives seront difficilement applicables à la propriété
privée, et ne pourraient guère atteindre, en Afrique,
que les concessions émanant de l'Etat, dans lesquelles
une réserve pourrait utilement être introduite.
La Commission consultée donne son adhésion au
vœu émis par la Société des Antiquaires de France,
sous la réserve des droits de la propriété privée.
M. Dutuit fait hommage à la Commission pour son
portefeuille d'un dessin et de deux grandes aquarelles
46g
signées Rozieo représentant les deux faces du jubé de
la cathédrale récemment détruit.
La Commission, très reconnaissante de cette atten-
tion de notre savant collègue^ prie M. le Président de
lui transmettre Pexpression de ses remerciements em-
pressés.
Lettre de M, le Préfet relative au jubé. — M. le
Vice- Président a reçu de M. le Préfet une lettre ainsi
conçue :
Rouen, le 26 décembre 1884.
Monsieur le Vice- Président,
Vous m'avez communiqué le vœu cmis le 22 novembre
dernier par la Commission départementale des Antiquités
de la Seine-Inférieure, demandant la conservation du jubé
de la Cathédrale de Rouen dans son intégrité et dans cha-
cune de ses parties.
J'ai l'honneur de vous faire connaître qu'il résulte des
renseignements que vient de m'adresser M. Sauvageot,
architecte diocésain, que ce vœu sera en partie réalisé par
le transfert déjà opéré des deux autels complets dans les
chapelles de transepts de la (Cathédrale, par l'installation
du christ dans une autre chapelle et par l'emploi projeté
de la grille provenant du jubé pour servir de clôture à la
chapelle de la Vierge du même édifice; ce qui assurera la
consécration des parties essentielles dudit jubé.
Quant aux parties de Tédicule édifiées en plâtre sur
galandage, en charpente avariée, c'est-à-dire les deux
escaliers latéraux et le plafond, la nature de leur cons-
truction n'a pas permis de les conserver dans leur intc-
grité lors du démontage.
Je vous prie de porter cette communication à la con-
naissance de la Commission, lors de sa prochaine réunion.
469
Agréez, Monsieur le Vice- Président, l'assurance de ma
considération la plus distinguée.
Pour le Préfet de la Seine-Inférieure :
Le Secrétaire^Général délégué^
Beverini-Vico.
Un membre observe qu'aucun renseignement h*est
donné sur la destruction des parties essentielles du
jubé. La Commission persiste dans son vote antérieur.
Fouilles de Saint'Ouen. — M. d'Estaintot obtient
ensuite la parole pour communiquer à la Commis-
sion les résultats des constatations faites à Toccasion
des fouilles exécutées en ce moment dans la grande
nef de Téglise Saint-Ouen, pour la construction d'un
calorifère.
Il indique à la Commission que dès les premières
découvenes il s'est mis, de concert avec notre col-
lègue, M. de Vesly, qui a bien voulu consacrer à cette
œuvre ses connaissances spéciales d'architecte et son
talent de dessinateur, en mesure de donner à ces cons-
tatations un degré aussi absolu que possible de pré-
cision. .
Cinq plans successifs ont été levés aux niveaux di-
vers de la fouille, de i à 5 mètres, plans sur lesquels
remplacement des sarcophages est indiqué,' et ces di-
vers sarcophages sont munis d'un numéro d'ordre
qui permet de spécialiser les objets intéressants décou-
verts dans chacun d'eux.
Des coupes transversales ont été également dressées
par les soins de l'entrepreneur, M. Requîer, et de son
contre-maître Louis., qui a apporté un soin vigilant à
la surveillance des fouilles, et les objets ont été immé-
470
diatement recueillis et conservés à la sacristie par les
soins de la fabrique.
A cet égard, M. dTstaintot est heureux de faire part
à la Commission des intentions du Conseil de fabrique,
qui a la pensée d^offrir au département, pour son mu-
sée des antiquités, tout ce qui aura été trouvé d'inté-
ressant. Il sera heureux de reconnaître ainsi Tem-
pressement avec lequel le département s'est toujours
associé aux travaux de restauration de Téglise.
M. d^Estaintot ajoute que, pour donner aux plans
dont il vient de parler tout leur intérêt, il a l'intention
de rédiger avec M. de Vesly^ et à l'aide des notes que
Tun et l'autre ont journellement prises, une sorte de
procès- verbal racontant les constatations faites depuis
le commencement des travaux.
Aujourd'hui, il se propose seulement d'esquisser à
grands traits Pimpression générale qui se dégage des
fouilles, et d'indiquer les objets les plus précieux
qu'on y a rencontrés. Il espère qu'à Tissue de la séance
la Commission voudra bien se transportera la sacristie
oti il a fait déposer les différents objets en vue de sa
visite.
Ce qui a frappé dans les fouilles, c'est, d'une pan,
la grande quantité de sarcophages retrouvés dans la
partie de la fouille qui commence à peu près vis-à-
vis la chaire et s'étend vers l'entrée de la nef, et sur-
tout dans la profondeur de 2 à 4 mètres. Tous, à cette
profondeur, paraissent antérieurs à la période capé-
tienne, et les couches inférieures semblent incontesta-
blement remonter à la période mérovingienne.
Dans la profondeur de 2 mètres, un très petit
nombre d'inhumations, mais quatre d'une impor-
tance considérable, puisque ce sont les tombes de
47'
quatre abbés, dont on avait perdu la trace au dix-
septième siècle, et que, grâce à une inscription décou-
verte l'un d^eux a pu être daté et a permis de constater
qu'il abritait les restes de D. Rainfroy, que les annales
de Tabbaye font mourir en i i5o. (Voir p. \j de ce vol.)
Dans la profondeur de 2 à 4 m. tous les sarcophages
en pierre d'un seul morceau, à une seule exception
près, plus étroits aux pieds qu^à la tête, au couvercle
plus ou moins tectiforme, provenant des carrières de
Vergelé, constataient la persistance pendant plusieurs
siècles d^un même mode d'inhumation.
Une observation assez curieuse, c'est qu'en 1870,
lors des travaux de nivellements exécutés dans le
jardin deSaint-Ouen, notre regretté et savant collègue
M. l'abbé Cochet, a surveillé des fouilles analogues
exécutées aux environs du portail des Marmousets
(on trouvera son rapport dans le t. Il du Bulletin de la
Commission à la page 216); et dans ces fouilles, il a
rencontré, à une profondeur similaire, la même na-
ture de tombeaux.
Comme dans la fouille actuelle, c'est de 2'° 80 à
3" 40 que l'on rencontre les cercueils mérovingiens,
et comme il Tindique lui-même, ils sont agglomérés
et entassés les uns contre les autres.
Ce serait une question intéressante à étudier que
celle de savoir si les sarcophages nouvellement ren-
contrés avaient été déposés à l'origine dans Pintérieur
d'une église ou dans le cimetière qui Tavoisinait.
M. d^Estaintoc estime qu'il serait assez difficile de
résoudre la question ; il est également utile de consta-
ter que les fondations de la basse nef au nord paraissent
antérieuresL au dépôt des tombeaux, qui, de ce côté,
semblent juxtaposés; qu'au contraire, les fondations
472
de la nef, du côté du midi, sont postérieures aux inhu-
mations; que, de ce côté, les tombeaux sont boule-
versés; quelques-uns sont éventrés et contiennent des
ossements accumulés après coup; toutefois, il n*oserait
se prononcer, les fondations du côté du midi ayant
été remaniées par la construction de sortes d'éperons
enveloppant des piles intermédiaires aux piliers
actuels, sur lesquels il se propose d'appeler l'attention
de la Commission.
M. d^Estaintot ajoute que, dans les tombeaux, on
a trouvé un grand nombre d^armes, mais dans un état
d^oxydation qui les rend à peine reconnaissables^ sauf
un magnifique fauchard, dessiné avec le plus grand
soin par M. de Vesly, une hache d'armes et une sorte
de faucille.
En revanche, une collection fort intéressante de
boucles en bronze, ovales ou carrées, trois magnifiques
plaques de ceinturon, trois styles dont deux en argent,
l'un desquels, pièce hors ligne, est revêtu en partie
d'un fourreau d^or délicatement fouillé, et orné au
centre d'un renflement avec une croix gravée en creux,
deux magnifiques fibules en argent et or, avec incrus-
tations de pierres de couleur, des débris fort curieux de
galon (Tôt, trois ou quatre monnaies, dont une de
Probus, et une délicieuse fiole en verre à anse, tirée
intacte d^un tombeau brisé.
Il note encore la présence de deux œufs dans une
tombe d'enfant.
Tous ces objets passeront sous les yeux de la Com-
mission, ainsi que Tinscription de Tabbé Rainfroy,
et celle que Ton a trouvée dans le tombeau d'un moine
inhumé au xi« siècle, Hugues Tarchidiacre.
Avant de terminer, M. d'Estaintot insiste sur Tim^
473
portance des fouilles opérées par la canalisation des
bouches de chaleur, qui ont permis de constater entre
les piliers actuels la trace d'anciennes piles offrant, du
côté des nefs, un pilier isolé; du côté des arcatures^ un
double pilier : piles évidemment contemporaines de
l'église du xii® siècle, mais peut-être de celle du xi«,
peut-être même de Téglise primitive; l'embase des pi-
liers, la proportion des colonnes, et même trois ou
quatre anciens chapiteaux retrouvés dans les fonda-
tions, permettraient de retrouver la physionomie de
cette église antérieure, qui, on en a maintenant la
preuve, recouvrait l'espace occupé par l'église actuelle,
au moins jusqu^au petit portail latéral du midi.
On a également retrouvé l'emplacement du mur
extérieur du bas côté du midi.
M. d'Estaintot appelle encore Tattention de la Com-
mission sur les traces d'incendie retrouvées dans les
fouilles, à des hauteurs variées, qui correspondent
évidemment à des époques différentes.
Le sol de Péglise antérieure était de o^ 90 en contre-
bas du sol actuel de Tédifice. A cette profondeur
se retrouvent des fragments d^un ancien pavage en
pavés émaillés du xiii« siècle, rapprochés sans soin,
mais dont quelques-uns offrent des spécimens inté-
ressants, entr'autres celui qui représente un moine les
bras élevés dans une arcature trilobée; sa forme dé-
montre qu^il se rattachait à une rosace dont les dimen-
sions pourraient être déterminées.
M. d'Estaintot offre en terminante la Commission
une photographie de la vue des tombeaux des quatre
abbés et une photographie de Pinscription de Fabbé
Rainfroy.
M. le Président lui exprime tous les remerciements
3i
474
de la G)mmission pour son intéressante communica-
tion.
M. Bouquet, à propos des deux œufs retrouvés dans
le tombeau d'enfants, communique la note suivante :
Lœuf est un symbole dans les sépultures. — Chez les
premiers chrétiens Tœuf était un symbole, et on a trouvé
dans le tombeau d'un martyr et parmi les reliques de
quelques saints des œufs de marbre tout semblables à ceux
des poules. On a trouvé aussi des coquilles d'œufs natu-
rels dans les loculi des martyrs. Cest que l'œuf était re-
gardé, parmi les premiers chrétiens, comme un symbole
de régénération^ et en particulier de la résurrection des
corps. De là le pieux usage de manger Tœuf béni, avant
toute autre nourriture, le jour de la Pâque de résurrecîiony
appelée aussi, pour le même motif, Pâque de Vœuf.
S. Augustin considérait Tœuf comme un symbole d'es-
pérance. Dans un de ses sermons, il dit : « Restât spes^
quae, quantum mihi videtur, ovo comparatur. Spes enim
nondum pervenit ad rem; et ovum est aliquid, sed non-
dum est puUus. • L'abbé Martigny, auquel ces détails sont
empruntés, conclut justement en ces termes : € L'œuf,
dans les sépultures chrétiennes, était donc l'un des innom-
blables symboles de résurrection au moyen desquels nos
pères dans la foi échappaient à l'horreur que la mort
inspire à ceux qui n'ont pas d'espérance. » (Dictionnaire
des Antiquités chrétiennes^ p. 470.)
La Commission décide que le procès- ver bal que
M. d^Estaintot va dresser avec M. de Vesly sera annexé
au procès-verbal de la présente séance.
M. le Président lève la séance à quatre heures et les
membres se rendent à la sacristie de Saint-Ouen, sui-
vant le désir exprimé par leur collègue.
Le Secrétaire,
Comte d'Estaintot.
475
Procès-verbal relatif aux fouilles de Saint-Ouen, dressé
par MM. d'Estaintot et de Veslx.
La fabrique de Téglise Samt-Ouen de Rouen ayant
décidé Texécution d'un grand calorifère souterrain, placé
au centre de la grande nef de Tancienne abbatiale, entre
le second et le cinquième piliers â partir du transept, les
soussignés, comte d'Estaintot, correspondant du ministère
de l'Instruction publique pour les travaux historiques,
secrétaire de la Commission départementale des Antiquités
de la Seine- Inférieure, et de Vesly, architecte, professeur
à r école des Beaux- Arts et membre de la même Commis-
sion, nous sommes réunis pour tenir note, jour par jour,
des découvertes intéressantes auxquelles ces fouilles pour-
raient donner lieu.
Le 8 décembre, M. de Vesly, en présence de M. l'abbé
Biard, vicaire de la paroisse, et de M. G. Prévost, archéo>
logue, demeurant à Évreux, prend les dimensions d'un
cercueil d'enÊmt et d'un cercueil d'adulte, que le plan
joint au présent journal désigne sous les nos 5 et 6.
Tous deux sont en pierre de Vergelé. Le cercueil d'en-
fant (n<> 5) contient encore quelques traces de vêtement
ou plutôt d'orfroi.
Les sarcophages nos 21 et 22, également en pierre de
Vergelé, contiennent des ossements dont la présence ne
peut être expliquée qu'en supposant des inhumations
multiples.
La même observation s'applique au tombeau en maçon-
nerie no 7, où se rencontrent quatre fémurs.
Le même jour, on constate la présence dans les débris
476
provenus des fouilles, de fragments assez nombreux de
carrelages émaillés.
Ces carrelages paraissent se rattacher à un pavage dont
l'existence est facile à reconnaître encore à o^o en con-
trebas du dallage actuel, au-dessous du banc d'œuvre
situé en &ce de la chaire.
Deux de ces pavés méritent particulièrement de fixer
Tattention : l'un d'eux, ayant comme dimensions o,io5 à
la partie supérieure, 0,084 à la partie inférieure et 0,168
de longueur, représente un personnage monastique les
bras levés vers le ciel, sous une arcature trilobée.
Il s'enlève en jaune sur un fond brun.
Un autre pavé, mesurant comme dimensions 0,12 en
carré, représente une fleur de lys.
Le même jour, les fouilles ont été visitées par S. G.
Mgr Thomas, archevêque de Rouen. MM. Gouellain, Pré-
vost et de Vesly sont présents.
Les fouilles ont complètement dégagé quatre cercueils
en pierre, placés parallèlement à la hauteur de la chaire,
les pieds tournés vers l'autel.
Mardi g décembre. — En présence de M. le curé de
Saint-Ouen, de M. de Beaurepaire, président de la Com-
mission départementale des antiquités, de MM. l'abbé
Loth, Gouellain, d'Estaintot et de Vesly, membres de la
même Commission, il est procédé à l'ouverture des quatre
sarcophages de pierre placés sur la même ligne, portant
sur le plan les nos i, 2, 3, 4.
Le no I est du côté du midi.
On commence par le n<> 4, du côté du nord.
Le cercueil est en pierre de Vergelé. Les dimensions
sont 0,47 de largeur extérieure, aux pieds ; o,55 à la tête;
longueur 2™ 10. Le couvercle est tectiforme ; on y trouve
des ossements, quelques traces de vêtement de couleur
brune, qui tombent en poussière dès qu'on les touche ; la
semelle des sandales en cuir est bien conservée ; un bâton
477
en bois est placé le long des ossements, à leur droite ; La
tète du mort, dont il ne subsiste que des débris informes,
reposait sur un lit de sable.
Le cercueil n9 3 est en pierre dure, pierre de Cau-
mont ou pierre de Vernon, à couvercle plat ; ses dimen-
sionsy un peu supérieures à celles du cercueil précédent,
sont : longueur extérieure, 2,3o; largeur extérieure, à la
tête, 0,70; largeur extérieure, aux pieds, 0,62; sur
la droite du cercueil, la pierre est ébréchée et effritée ;
les ossements sont en petite quantité et désagrégés
par le temps ; les vêtements y ont superposé une lé-
gère couche de couleur brune. A la droite du défunt se
retrouve un bâton de bois en partie rongé, comme le pré-
cédent, par l'humidité, et dont la contexture, excessive-
ment poreuse, semble rappeler celle du tilleul ; les os du
crâne sont à peu près complètement disparus. Mais à la
tête du cercueil on retrouve une plaque en plomb, longue
de o"*320, haute de o"i55, offrant neuf lignes divisées par
un trait creux, contenant l'inscription suivante, tracée à
la pointe, en caractères offrant un mélange de majuscules
romaines, de minuscules, de cursives et de lettres on-
ciales.
Une partie de l'inscription se trouve rongée par la for-
mation de sels de plomb que semble avoir provoqués le
contact de la boîte crânienne.
Voici ce qu'il a été permis d'en lire :
j- HIC REQVIESCIT PIE MEMORIE DO
NNVS RINFREDVS MONCVS ET abbs HVJV
S LOCI QVI ECCLESIAM ISTAM POST
COMBVSTIONEM , .ESTAVIT MV
RO CINSIT ET ET ALIIS
BONIS DITAVIT
^ '
478
Le cercueil no 2 est en pierre tendre ; Tentrepreneur,
M. Requier, croit qu'il provient des carrières de Beaumont
(Oise) ; la forme du cercueil légèrement arrondie à la tête
a été constatée. Son couvercle, de forme plate, déborde de
omo5 de chaque côté.
Le cercueil n<> 1 est ouvert le dernier ; il est en pierre
dite roche de Saint- Maximin. Le couvercle fragmenté est
légèrement bombé.
A l'intérieur il récèle des ossements ; la forme des vêle-
ments est par&itement conservée ; ils forment surtout à
la hauteur de la hanche et du fémur gauche une série de
plis caractéristiques, indiquant que le défunt a été inhume
avec tes vêtements abbatiaux ; un galon décoré d'un léger
tissu d*or Pagrémentait ; malheureusement toutes les par-
celles de ces différentes couches de vêtements, qui tous ont
la couleur brune remarquée déjà dans les tombeaux pré-
cédents, tombent en poussière dès qu'on y porte la main.
A la droite du défunt est également placé le bâton ab-
batial en bois, dont il ne reste que des fragments, à ses
pieds, les semelles en cuir de ses sandales ; mais dans au-
cun d'eux ne se retrouvent de fragments de vases, de mon-
naies, ni de bijoux.
A 10 heures et demie, l'exploration est terminée. Tous
les couvercles de ces sarcophages n'ont pu être enlevés
que par fragments.
Nous mesurons les dimensions d'un beau sarcophage, à
entaille pour la tête, et en pierre dure, qui porte sur le
plan le n» 8. Il mesure 2,55 de long ; 0,90 à la tète, o,55
aux pieds. Il a été trouvé vide et sans couvercle, à côté du
caveau cimenté, dont la situation est accusée sur le même
plan. Ce caveau cimenté, dont les dimensions sont de 1,40
sur I mètre, avec une profondeur de plus de 2 mètres, pa-
raît formé à l'aide d'un revêtement en plâtre appliqué sur
la paroi des sarcophages contigus.
On retrouve dans les fouilles, aux environs, des frag-
ments de moulures en plâtre, archivoltes et colonnettcs.
479
paraissant appartenir à la période ogivale primitive et dé-
corées de peintures représentant des rinceaux tous gris et
noirs.
Ces moulures sont mises de côté.
Il en est de même de fragments en pierre revêtus d'une
sorte de stuc coloré en rouge.
On trouve également quelques fragments de dallage.
Constaté sur les .fouilles la présence de MM. Pabbé Loth
et P. Baudry, membres de la Commission.
Mercredi lo décembre, — Nous faisons procéder à
l'ouverture de deux sarcophages, le premier de forme rec-
tangulaire, en pierre deVergelé (no du plan), le second en
plâtre (no 24) ; le couvercle de ce dernier présente une
sorte de croix, dont la partie centrale offre un boudin
assez grossièrement exécuté, s'élargissant à son extrémité
supérieure, et dont les bras, placés diagonalement, et non
à angle droit, simulent le même renflement terminal.
A la tête du sarcophage, un dessin en relief, représen-
tant une croix inscrite dans un cercle avec quatre demi-
rayons partant de la circonférence, entre chacun des bras
de la croix.
Des dispositions sont prises pour consolider les frag-
ments brisés du couvercle et permettre d'enlever le sarco-
phage intact en dehors de la fouille.
M. Witz, photographe, prend la vue générale des fouilles.
Il se place du côté du chœur.
Les sarcophages en pierre (n®* IX et XIV du plan de
^^esly) sont visités. Ils ne contiennent que des ossements
et des fragments de vêtements.
Il en est de même du sarcophage placé obliquement
vers le midi (n^ VII du plan de Vesly, — 26 du plan Re-
quier). Ses dimensions sont : 2,o5 de long, 0,90 à la tête,
0,37 aux pieds ; l'ouverture en a lieu en présence de
MM. Tabbé Biard, Gouellain, Devaux. Le couvercle vient
en morceaux; l'intérieur est rempli d'un mélange de chaux
480
et de sable agglutinés avec les ossements ; les ossements
ont été déplacés, les fémurs occupent la place de la
tête.
M. G. Prévost trouve dans les fouilles un fragment de
poterie dite de Samos. On trouve également une défense de
sanglier.
Jeudi 1 1 décembre. — Dans un cercueil placé dans la
même direction, mais à l'extrémité ouest et en dessous
du n» 26 (plan Requier ci-dessus) et qui porte le n^ 27
(longueur, 2">oo, largeur, à la tête 0^70, aux pieds, o»4o)
avec couvercle en batière, cercueil placé a la limite des
fondations des piliers sud de la grande nef, on remarque
que, du côté droit, ce cercueil a été brisé et que, par l'ou-
verture ainsi faite, on a introduit quatre ou cinq crânes
jetés pêle-mêle.
Les sarcophages nos 19 et 25 ne présentent que des
ossements.
Le cercueil no 3o, en pierre de Saint-Leu comme les
autres, présentait un couvercle de forme très intéressante
et à peu près unique ; sa forme extérieure était tectiforme,
mais à forme polygonale, Tarète centrale étant accompa-
gnée de deux arêtes latérales, qui divisaient Textérieur du
couvercle en quatre pentes accolées, avec diminution pro*
gressive de hauteur en arrivant vers les pieds.
Cette disposition entraînant un excédant d'épaisseur du
couvercle, on en avait diminué le poids en Tévidant à Pin^
tcrieur ; et on avait assuré la clôture hermétique du sar-
cophage en Tentaillant intérieurement de manière à ce
qu'il s'emboitât sur la cuve.
En outre, aux deux extrémités, pour en rendre le ma-
niement plus facile, on avait réservé à même la pierre un
tenon carré, à arêtes abattues, faisant saillie de 10 centi-
mètres.
Cette disposition, fort intéressante, n'a pu malheureu-
sement être conservée, le couvercle, malgré les soins pris
48 1
pour le soulever, s'ctant littéralement émietté entre les
mains des ouvriers.
M. G. Prévost, qui a surveillé avec beaucoup de soin
Tenlèvement des terres accumulées auprès du gros bloc
de pierre, de i™io sur o"6o en carré, y découvre de petits
fragments d'inscription, en caractères romains, paraissant
de répoque carlovingienne, et qui s'enlèvent en blanc sur
un fond brun.
On distingue sur le plus considérable d^entre eux, long
de 20 centimètres, les lettres : NDI.
Sur les deux autres : A M et VII.
M. Prévost retrouve également un petit fragment de
mosaïque» fond noir.
Les ouvriers rencontrent des fragments nombreux de
plaques de marbre blanc paraissant avoir servi de revête-
ment. On y ajoute un fragment de médaillon en pierre de
Saint- Leu, dont la partie supérieure a été brisée. Le sujet,
encadré dans une moulure formant boudin, représentait
un enfant nu, les jambes écartées ; la jambe gauche avec
une partie de l'abdomen et les organes sexuels sont seuls
figurés sur le fragment conservé. On a également trouve
des fragments de tuiles à rebords.
Tous ces objets sont mis de côté.
Les ouvriers préparent l'enlèvement du cercueil en plâ-
tre no 24,
Vendredi t2 décembre. — Les ouvriers disposent le
palan à Taide duquel sont successivement enlevés le^cer-
cueil no 3, de l'abbé Rainfroy, le cercueil en plâtre n» 24,
et le cercueil à entaille no 8.
Malgré les précautions prises pour sauver un cercueil
en plâtre no 37, placé sous celui de l'abbé Rainfroy, il est
réduit en morceaux et irréparable. On conserve seule-
ment l'ornement qui se trouvait placé en tète du cercueil,
analogue à celui qui a été précédemment décrit. Nous
notons que l'ornementation du couvercle offrait les deux
482
bras de croix dans une situation à peu près horizontale
et que les bras et la partie supérieure de la croix se ter-
minaient en forme de croix pattée.
Dans ce cercueil on trouve deux crânes.
Nous procédons successivement à l'ouverture de diffé-
rents cercueils.
Le no 49 (profondeur de 3 à 4") offre, à côté des osse-
ments intacts, bras allongés, à droite des fragments oxy-
dés de lame d'épée et de poignard, un fragment de fer à
gauche, une boucle en bronze.
Nous prenons les mesures du cercueil, en pierre de
Saint-Leu, qui peut être considéré comme le type de
tous ceux trouvés au-dessous de 2 mètres du dallage de
réglise.
Longueur, 2'nio; épaisseur, o"o8; profondeur inté-
rieure : à la tète, o°i42; aux pieds, o*°33 ; largeur à la
tête, 0^72 ; aux pieds, o°»45.
Couvercle tectiforme :
Tête, épaisseur centrale... o"i5
— — latérale.... o™io
Pieds — centrale... o"i2
— — latérale.... o^oS
Le n» 5 1 (même profondeur, mêmes dimensions), placé
près des fondations, au midi, nous offre un squelette d'en-
fant admirablement conservé ; les phalanges de ses mains,
étendues de chaque côté du corps, sont intactes; la lon-
gueur du squelette est d'environ i mètre ; à sa droite,
deux objets ronds attirent notre attention et sont amenés
avec soin ; nous constatons deux écallesd'œufs ayant con-
servé leur forme ; à gauche du squelette, à la hauteur de
1 épaule, un objet en fer décomposé par Toxydation.
Du côté opposé des fouilles, contre les fondations du
pilier du nord, le no 1 5 (profondeur de 2"5o, couche infé-
rieure) nous réserve les découvertes les plus intéressantes
(présents : MM. d'Estaintot, Prévost et Geffroiin).
483
Les ossements se trouvent noyés sur une épaisseur de
5 à 6 centimètres, qui arrive à près de o^^io aux pieds^
dans un dépôt calcaire sédimenteux agglutiné et encore
tout imprégné d^humidité.
A droite, une boîte crânienne renversée, à droite et à
gauche de celle-ci, une mâchoire inférieure parfaitement
conservée avec ses dents, dont Témail est intact ;
A la hauteur des clavicules, un style fortement oxydé ;
Une plaque de ceinturon avec sa contre-plaque, une
série de lames de bronze de 5 centimètres de long parais-
sant un ornement de ceinturon, trouvées à la hauteur des
hanches;
Une autre plaque ajourée, avec ses quatre ardillons,
trouvée entre les genoux ; une petite plaque et contre-
plaque à jour, sans ardillons ;
A gauche, près du genou, les débris d'un vase en bois,
ayant o»o6$ de diamètre, avec ses cercles de bronze et
ses plaques estampées, paraissant avoir décoré le centre
du fond et le dessus ;
A gauche, un poignard avec l'ornementation en bronze
qui décorait la partie supérieure du fourreau à son atta-
che à la ceinture ;
Sur la droite, traces brunes, comme de bois décomposé;
à leur extrémité, objet en fer déformé par la rouille.
Les ouvriers posent les madriers destinés à soutenir le
treuil et le plancher de service.
Samedi i3 décembre, — Nous continuons Texamen des
cercueils, dont le travail des ouvriers exige Tenlèvement.
Les ossements continuent à être recueillis avec soin par
M. l'abbé Biard, pour être plus tard réunis dans un ca-
veau spécial.
Le no 52 (couche de 3 à 4 mètres) n*offre au milieu des
ossements qu'une petite boucle carrée en bronze avec son
ardillon et une pointe de métal.
Nous constatons a 3 mètres du niveau supérieur de
484
réglise les traces très accentuées d'une couche épaisse de
plusieurs centimètres, en terre cuite dans sa partie infé-
rieure (o<"i2), en charbons et cendres noires dans la par-
tie supérieure (o^ioé), et qui se continue à partir du centre
de la fouille, en passant au-dessous de la grosse pierre
rencontrée dans la fouille de 2 à 3 mètres.
Le no 53 (à 3"20 en contrebas) offre entre les fémurs
un anneau de bronze réunissant trois petites chaînettes de
même métal, longues de o°>io : Tune se termine par deux
petites lames de bronze longues de o™o5, recourbées à
leurs extrémités, fixées à la chaînette par leur centre et
disposées en croix ; elle paraissent avoir eu pour objet de
fixer un petit barillet dont le diamètre aurait été de o^^oS ;
l'autre chaînette eût pu soutenir une pince à épiler.
Le cercueil est percé dans le fond d'un trou circulaire
pour l'évacuation des matières putrides ; sous la tête du
squelette, étendu les bras allongés, un fragment de pote-
rie grise, un anneau et une petite boucle plate en bronze
avec un seul ardillon ; aux pieds, cendre et fragments de
bois avec écorce : couvercle du cercueil absolument plat.
Il est à remarquer qu^on a trouvé des squelettes sans
cercueils de pierre, Fun à 2"»20 de profondeur, Tautre
placé au-dessus du sarcophage n^ 52.
Le no 47 (dans la partie inférieure de la couche de 2 à
3 mètres) présente un squelette les bras allongés, la moitié
d'une agrafe en bronze argenté, des fragments de fer et de
verre aux pieds^ à gauche.
A gauche également, des fragments d'épée et anneaux,
un fragment rond.
A la hauteur du cou, un objet en fer allongé.
Le no 3o (partie supérieure de la couche de 2 à 3 mè-
tres), entièrement défoncé, contient une plaque de ceintu-
ron, un fragment d'épée ou de couteau, trouvé à la hau-
teur de la poitrine.
Dans le no 45 (partie inférieure de la même couche)
deux crânes.
485
Le 11062 (couche de 3 à 4 mètres) semble entouré d'une
couche de terre végétale ; au-dessus règne une ancienne
voûte qui se prolonge en allant vers le chœur et vers le
portail. Cest à peu près au-dessous de cette ligne que-
réapparaissent les traces d'argile cuite par masses ; le sque-
lette a les mains allongées.
Quelques menus objets ; un pendant allongé en amé-
thyste ou en verre teinté de violet, traversé par son centre ;
Trois petites monnaies en bronze, dont une de Probus,
une boucle rectangulaire à facettes ;
Des fragments d'armes décomposées par la rouille ; un
fer de lance à droite, le scramasaxe à gauche ; à la tète un
petit morceau de cuir, un silex à briquet, traces de char-
bon aux pieds.
No 54 (couche de 3 à 4 mètres vers le centre de la
fouille), deux crânes. Cette fouille, continuée par M. Tabbé
Loth, amène la découverte de deux plaques de ceinturon,
dont une fragmentée, des débris d'épée, un cabochon, des
débris d'armes et de cuir ; divers ornements argentés for-
mant méandre, un ornement en bronze sous forme de
cercle à trois partitions en S trouvé à la hauteur des épaules,
deux belles fibules en or, ornées d'incrustations de pierres
en couleur, quelques débris de poteries.
No 60 (cercueil en plâtre de la couche inférieure de 2 à
3 mètres) ; ce cercueil, menaçant de s'effondrer, est visité
par M. de Vesly.
Le squelette est complet ; les branches de la mâchoire
et les os de la tète sont dessoudés. Dans la partie corres-
pondant à la région iliaque se trouvent une boucle de
ceinturon en bronze et une petite bouclette avec ardil-
lon ; plusieurs rivets de bronze en forme de losange ; un
poignard en fer avec la coquille de sa garde, un fragment
de scramasaxe, et un fer de lance sont au côté gauche du
mort ; à sa droite était placée sa hache* dont le fer était
placé à la hauteur de la malléole.
No 64 (profondeur de 3 à 4 mètres). Deux squelettes
486
placés côte à côte, mais Tun, la tète aux pieds de l'autre.
Lundi iS décembre. — On découvre la partie anté-
rieure d'un cercueil dont le surplus reste engagé dans le
sol non fouillé de l'église, vers le portail ; il se trouve à
une profondeur de i^gS du dallage; on lui donne le no 73 ;
on reconnaît les traces d'un vêtement brun sur les osse-
ments. Aux pieds des sandales de cuir.
On commence les fouilles du tombeau n^ 63, placé à
côté du no 62 (couche de 3 à 4 mètres).
Aux pieds, une charmante fiole en verre blanc à anse ;
la panse est décorée haut et bas de deux rangs de doubles
filets, l'ouverture en forme de trèfle ; ce joli spécimen est
ramené intact, à la pelle, du milieu des décombres qui
ont envahi le cercueil effondré. A la gauche du squelette
on rencontre une lame de couteau en fer, des petites pla-
ques de bronze, des anneaux en bronze de o^^oS de dia-
mètre, reliés à du cuir fixé par des rivets et offrant la
plus grande analogie avec ceux trouvés dans le n» 14
(12 décembre).
A gauche, à la hauteur de la main, une chaînette de
cuivre terminé par un anneau fixé à un objet en ivoire,
fragmenté, paraissant offrir deux plaques d'ivoire fixées à
un montant de même matière par deux anneaux d'argent.
Les dimensions de cet objet, fournies par le rapproche^
ment de ses débris incomplets, donnent en hauteur 1 1 cen-
timètres, en largeur 7 centimètres. L'écartement des deux
lamelles d'ivoire est de 3 millimètres; on conjecture qu'il
était destiné à contenir une tablette de cire.
On trouve encore dans cette sépulture des restes de
charbon ; à la droite de la tète, une boucle de fer, quel-
ques débris informes de même métal et des menus frag-
ments de poterie.
Pendant ces découvertes, le comte de Rochemonteix,
archéologue du Cantal, l'abbé Allard et M. Devaux, sculp-
teur, sont présents.
487
Le cercueil n^ 17 (couche inférieure de 2 à 3 mètres)
donne un scramasaxe et des débris d'armes en fer.
Le soir, une plaque en bronze laissant apparaître des
parties dorées est retrouvée par les ouvriers dans les dé-
blais ; on suppose qu'elle peut avoir appartenu à la sépul-
ture n<> 62.
Le cercueil R, voisin des fondations des piliers de la
nef, au midi, ne contient que des débris de maçonnerie ;
ce caractère est commun à tous les tombeaux placés dans
la même situation.
Les ouvriers ont trouvé un fragment de fauchard aux
environs de remplacement du tombeau de Rainfroi.
Mardi r 6 décembre, — Dans un cercueil situé au cen-
tre de la fouille (no 57) (couche supérieure de 2 à 3 mè-
tres). MM. Tabbé Biard et G. Prévost trouvent les objets
suivants :
Une boucle elliptique de 0,06 de >long sur o,o35 de
large, une pointe en silex taillé adhérait à la boucle ;
Deux plaques de fer avec de petites pointes ;
A la hauteur de la poitrine, une croix pattée en argent,
légèrement concave ; des pointes apparentes servaient à
la fixer sur un support quelconque ;
Une petite boucle de bronze, avec ardillon à la hauteur
de la ceinture ;
Une épingle en métal blanc ;
Une sorte de style de même métal, avec tête plate
taillée à facettes ;
Une fermeture de collier en bronze et un petit morceau
de cuir.
Une petite pince à épiler en bronze, placée vers le mi-
' lieu du corps, de petits morceaux d'ivoire et une dent de
sanglier ; aux pieds, des fragments de charbon et des dé-
bris de poterie noire.
No 77, cercueil en plâtre défoncé, rien.
A une heure et demie, en présence de Mgr Thomas,
488
archevêque de Rouen, ouverture du tombeau n» 8i.
MM. de Beaurepaire, Gouellain et Sauvageot, présents
sur les fouilles.
M. de Vesly procède à la recherche des objets contenus
dans la sépulture. On y rencontre une boucle de ceintu-
ron en fer et des fragments d'armes décomposées par l'oxy-
dation ; puis un magnifique style en argent, long de 0,22,
décoré) sur une longueur de 0,08, d'un fourreau d*or or-
nementé d*anneaux délicatement fouillés. Il présente, a a
centre de cette ornementation, un renflement en argent
qui, sur deux côtés, offre une croix pattée gravée en
creux, le creux rempli par une sorte de pâte-émail, et, sur
les deux autres côtés, une croix en sautoir inscrite dans
un losange.
Les autres objets, recueillis dans la sacristie, ont été
successivement soumis à l'attention de Monseigneur par
M. d'Estaintot.
Les deux petits cercueils d'en£aints, nos 74 et 79 (couche
de 2 à 3 mètres), ne contiennent que du sable et du mor*
tier ; de nombreux fragments de poterie commune sont
trouvés aux environs (couche de 2 à 3 mètres).
Le cercueil n^ 82 ne présente également aucun détail
intéressant : les ossements sont déplacés, les fémurs sont
à la hauteur des épaules.
A l'extrémité est de la fouille, aux pieds de la tombe de
l'abbé Rainfroi et à une profondeur de 3 mètres, les ou-
vriers rencontrent de nombreuses pierres portant des tra-
ces d'incendie.
Mercredi 77 décembre. — MM. l'abbé Biard et G. Pré-
vost sont présents sur les fouilles.
Les cercueils 21 et 22 (de la couche de 2 à 3 mètres), 61
(de la couche de 3 à 4 mètres), fournissent, les premiers,
quelques objets en fer corrodés par la rouille; le second,
un clou et un morceau de verre irisé ; le troisième, un
morceau de corne et un clou de fer.
489
Le cercueil no 75 (couche de 2 â 3 mètfes), à demi en-
gagé sur le côté est, offre cette particularité de reposer
sur une couche de mortier épaisse de 7 à 8 centimètres,
qui se continue à droite et à gauche, offrant un développe-
ment total de plus de 3 mètres ; son niveau est à 3">io en
contre bas du sol actuel. Ce tombeau, rempli de décom-
bres, contenait un fragment de poterie noire d'un grain
très fin, un fragment d'os taillé et des fragments de pote-
rie blanche et rouge.
Un mur transversal est rencontré au milieu de la fouille ;
sa crête se trouve à 2">3o du sol actuel ; au côté de Touest
est placée une auge en pierre, longue de o">8o, large
de o"6o, profonde de o"i8, et remplie d'ossements.
Ouverture des cercueils nos 75 et 80 ; dans ce dernier,
fragments de scramasaxe et d'un couteau en fer, une grande
et une petite boucle de bronze, une pièce de monnaie en
bronze absolument fruste et un petit fragment de verre.
Sont venus aujourd'hui sur les fouilles : MM. G. Le
Breton, Pelay, Paul Baudry, les abbés Âllard et Dela-
fontaine.
Jeudi iH décembre. — Vers le centre de la fouille, dans
la profondeur de 3 à 4 mètres, rencontre de deux sarco-
phages d'une forme spéciale.
Le no 87, placé contre la limite nord en deux morceaux
à peu près égaux, aux côtés légèrement convexes, offrant
2^20 de longueur extérieure et 2°»oo de longueur inté-
rieure, avec une largeur de 0^36 à la tête et aux pieds, de
o™52 au milieu.
Le second, no 86, d*un seul morceau et de forme rec-
tangulaire, plus étroit aux pieds qu'à la tête, offre, vers le
milieu de son côté gauche, une ouverture circulaire pla-
cée à o™09 du fond, ayant 01^06 de diamètre, elle est bou-
chée par un tampon en pierre placé du dedans qui en
remplit exactement le vide.
Dans ce dernier cercueil, MM. l'abbé Biard et de Vesly
3a
490
découvrent une plaque de fer et une grande boucle de
bronze, une bague de bronze à la main gauche, un mor-
ceau de cuir à la hauteur de la ceinture.
A Touest, la paroi de la fouille dressée permet l'explo-
ration des cercueils portant les nos 7 3 (dans la couche de
2 à 3 mètres), 87, 88, 89 et 90 (dans la couche de 3 à 4 mè<-
tres).
Le no 73, déjà sigaalc sous la date du i5 décembre,
contient les restes d^un moine reconnaissable aux frag-
ments de vêtement de laine brune et aux sandales de cuir ;
à la partie la plus profonde, M. Requier fils aperçoit et
retrouve une plaque de plomb légèrement convexe par le
bas et fortement oxydée, large de o™i6, haute de 0^16.
Neuf traits horizontaux la divisent. Entre les 1*^ et 2®,
le 3« et le 4e, le 5* et le 6e, le 7« et le 8«, se Usent avec
difficulté, pour les deux dernières lignes, les caractères
suivants (i) :
XVI KL OCTO
RIS OBIIT HV
GO ARCHIDIACONI
AN NO DNI
MLVII XO
Dans la sépulture no 88, MM. de Vesly et Prévost dé-
couvrent le mobilier suivant : un scramasaxe, une pointe
de flèche et un couteau en fer, un conglomérat de fer,
que M. de Vesly considère comme un umbo de bouclier
ou l'extrémité d'un carquois ; tous ces objets à la gauche
dusque)ette;
A hauteur du bassin, une boucle en bronze trapézoïdale
et une contre-plaque à redans portant des dessins.
A droite, des débris en fer d'une lance ou angon,une pièce
de monnaie en bronze de petit module, très fruste, des dé-
(i) L'interprétation des deux dernières lignes nous a été don-
née par le comte Robert de Lasteyrie.
491
bris de poterie et de charbon complètent Pinyentaire de
cette sépulture.
Le cercueil no 90 est rempli de décombres.
Le no 89, en partie effondré, présente aux pieds une
forme de lanière ou lacet, une petite plaque de bronze
formant rivet ou attache, puis des fragments d'armes en
fer.
Le no 87 est complètement effondré et presque engagé
sous la paroi de la fouille. On y trouve cependant une
boucle de bronze enveloppée dans une gangue d'oxyde de
fer et un scramasaxe, sur lequel se voient de belles souf-
flures produites par le sulfure de fer. Une de ces poches
se vide et laisse couler un liquide blanc et transparent.
Vendredi ig décembre, — Quelques débris de poterie
sont retrouvés près du mur transversal. Sur Tune d'elles,
M. G. Prévost croit pouvoir lire : of pr.. i.
A onze heures, M. RiCard, maire de Rouen, accompa-
gné de M. Capelle, premier adjoint, vient visiter les
fouilles.
M. le Curé, plusieurs membres du Conseil de fabrique
sont présents.
On procède devant eux à l'ouverture des sarcophages
71 et 72 (profondeur de 3 à 4 mètres).
Le premier offre aux pieds les deux boucles attachant
la chaussure et une petite pièce de bronze paraissant
avoir orné l'extrémité des courroies ; à la droite du sque-
lette, un fauchard recourbé, tranchant à l'intérieur et
présentant au milieu de la partie extérieure un arrêt
coudé à angle droit, terminé par une sorte de volute
recourbée ; de nombreux fragments de tissu d'or et de
galons sont recueillis, mélangés aux détritus de la sépul-
ture.
Le second n'offre d'instruments d'aucune sorte ; mais,
sur les ossements qu'il contient, se remarque la présence
d'une frange d'or partant de l'épaule et se développant
492
sur la poitrine, pour se séparer ensuite à la hauteur de
la ceinture et contourner les fémur et se terminer de cha-
que côté â la hauteur des tibias. Le sarcophage, engagé à
moitié dans le sol non exploré de la nef, offrait comme
disposition anormale une largeur égale aux pieds et à la
tête; sa longueur était de i">90.
Les filigranes d'or provenant des deux tombes ci-des-
sus ont été recueillies et déposées avec les autres objets à
la sacristie.
Ordre avait été donné de conserver la disposition des
galons du no 72 jusqu'à ce que le dessin en eût pu être
relevé ; malheureusement, en notre absence, les ouvriers
ont vidé le sarcophage et réuni en bloc tout le galon, ce
qui a empêché d*exécuter le projet que nous avions
conçu.
Samedi 20 décembre. — Les ouvriers ramènent avec
la terre des fouilles une petite coupe en terre fine, dite
de Samos, un goulot d'amphore en terre blanche avec ses
deux anses, un grand fragment de poterie rouge com-
mune, ornée de torons, baguettes, etc.
A 4™40 au-dessous du pavage, couche de béton de
2in6o de large et de 3 à 6 mètres de développement ; elle
se prolonge dans Taxe de Tcglise, un peu plus rapprochée
des fondations du côté du nord et commence vers le troi-
sième pilier de la nef.
Lundi 22 décembre, — Quelques fragments de poterie
et trois, nouveaux sarcophages sont découverts.
Du mardi 23 décembre au 4 janvier. — Les différents
sarcophages découverts n^offrent aucun intérêt ; tous sont
remplis de décombres, paraissent aussi avoir été visités.
Dans les fondations du quatrième pilier de la nef ac-
tuelle (côté du nord à partir du chœur) se trouve encas-
tré un chapiteau, dont la proportion et la forme ont été
relevés avec soin.
493
Les galeries latérales du calorifère, ouvertes pour les
conduites de chaleur et de fumée, ont permis de consta-
ter entre chacun des piliers actuels les assises d'anciens
piliers, dont la base des colonnes est, du côté du midi, à
un niveau inférieur de 20 centimètres au côté du nord,
accusant ainsi entre les assises de ces piliers de même
époque une dénivellation dont nous avons dû nous bor-
ner à constater l'existence.
Voici les proportions de la pile rencontrée entre les 3»
et 4<» piliers (côté de T Évangile).
Elle se compose d'un massif offrant vers la grande nef
un front de i^iS sur une profondeur de i"58.
Vers la grande nef et le bas-côté, une demi-colonne
ayant o^^So de diamètre et 0^25 à o™3o de saillie se dé-
gage du milieu du massif.
Sur les deux autres faces se détachent deux demi-co-
lonnes juxtaposées et offrant les mêmes proportions.
Le massif rencontré dans l'intervalle des mêmes piliers,
côté du midi, présente des proportions plus fortes : i"4o
de face et i">88 de profondeur ; les dimensions des colon-
nes sont les mêmes.
Nous avons constaté la dénivellation des piles du midi
par rapport à celles du nord. Ces piles ont d'ailleurs con-
servé leurs assises horizontales.
Il faut ajouter à cette remarque ce fait, que les assises
du midi ont été à une époque postérieure, enveloppées
dans un massif en maçonnerie parementé, affectant la
forme d'un losange dont les pointes font saillie en forme
d'éperon du côté des nefs, et que les massifs avaient été
prolongés presque jusqu'au niveau du dallage actuel, en-
veloppant ainsi la base et une partie du fdt des colonnes
dont nous venons de signaler l'existence.
Les mortiers de cette enveloppe sont tout différents
comme aspect de ceux de la pile qu'ils enveloppent.
Nous avons pu constater les deux éperons du losange
rencontré sur remplacement de la galerie d'accès \ celui
494
qui Élisait face au mic^i offrait, à 11^3 1 au-dessous .du dal*
lage actuel les traces apparentes d'un ancien dallage.
Jeudi 6 janvier. — Le percement de la galerie d'accès
du calorifère à travers le bas>côté du midi fait remonter
à o^^SS en dedans du parement intérieur du mur actuel
le parement de l'ancien b?s-côté, dans lequel se trouve
encore engagée une demi-colonne faisant face à la demi-
colonne de la pile dont nous avons précédemment cons-
taté Texistence.
Cette colonne a oin40 de saillie. Elle se termine par une
double moulure séparée par une gorge. Ce motif de dé-
coration a 0^1 1 5 de hauteur.
Le dessous de cet ornement est à i^^iS du dallage ac-
tuel.
La colonne repose sur une base carrée, précédée d'un
chanfrein, le tout ayant oi^Si de hauteur, ce qui donne
pour niveau du dallage de Tédifice, auquel cette colonne
appartenait, i""66 au-dessous du dallage actuel.
Les fouilles faites dans les bas-côtés pour le passage des
bouches de chaleur, de la galerie d'accès ou du conduit
de fumée, ont permis de constater qu'aucune inhumation
n'y avait été faite.
Jeudi 1 3 janvier. — La fouille poursuivie sous l'empla-
cement du banc d'oeuvre (entre le second et le troisième
pilier, côté du sud) a mis à découvert une pile analogue à
celles rencontrées déjà; le massif de maçonnerie qui l'en-
veloppe, au lieu d'affecter la forme du losange, a ses pans
coupés sur les deux faces et celle qui regarde l'est vient
buter contre un ancien mur épais de o^^gS, qui se conti-
nue dans la direction du chœur et que l'on trouve assis
sur o"20 de déblais.
L'axe de la nouvelle pile indique un mouvement de
flexion marqué vers le nord.
Contre le mur dont nous venons d# parler, on retrouve,
495
à niveau de oi^go au-dessous du dallage, un fragment de
pavage composé de Tassemblage de pavés émaiPés ayant
o«i2 de côté, mais qui présente cette particularité, à Tex-
ception de deux ou trois pavés à peu près entiers, de n'of-
frir que la moitié gauche de pavés.
Quelques-uns sont simplement recouverts d'un vernis
brun uniforme.
Les autres présentent un demi-lion rampant à la queue
fourchetée, les autres, un demi-ccu losange, les autres,
des fragments de rinceaux s'enlevant en jaune sur un
fond brun. Un seul donne, sous une arcaiure trilobée^
une figure de moine à la tète rasée, les bras à demi- éten-
dus levés vers le ciel, que nous avois déjà signalé sous la
date du 8 décembre.
Vendredi 14 janvier. — Dans la contre-aîlée, derrière
le banc d'œuvre, on rencontre un dalbge à 0*90 en des-
sous du dallage actuel. La trrnchée ouverte entre les
3e et 4e piliers, du côté de l'Evangile, permet de consta-
ter l'existence dans les fondations, à la droite de ce der-
nier pilier, d'un ancien demi-chapiteau, haut de o^^S^
large de o^^So, dont la décoration consiste dans une suc-
cession de cannelures légèrement concaves, dont la partie
supérieure a o"i5 de haut, la partie inférieure o"25, entre
lesquels se dessine une ornementation en forme de dents
de scie de oi^^oS de haut, assez espacées pour que le péri-
mètre du demi-chapiteau n'en contienne que huit et
demi.
M. de Vesly veut bien en relever soigneusement le
dessin.
Mercredi 28 janvier. — La tranchée de prise d'air ou-
verte vers le chœur, sur une longueur de 6™,oo à partir
du calorifère et une profondeur de 2"»5o, révèle à 0^50 du
parement extérieur du mur du calorifère la présence d'un
gros mur transversal épais de ii^ôo.
496
A 11B07 de ce mur en avançant vers le chœur, on ren-
contre à I mètre de profondeur la partie saillante d'un
mur circulaire ayant i™35 de rayon et venant buter sur
un mur parallèle au gros mur.
Les parements constitués en appareil régulier sont ex-
posés vers Touest.
L'axe du mur circulaire est à S'^bo de Taffleurement
extérieur de la colonne qui décore le pilier du transept
sud et â 4"*95 du pilier du transept nord.
On trouve dans la fouille des fragments de moulures,
ornementées de blUettes, des parements de mur ornemen-
tés de larges traits à Tocre brune, des fragments de fûts
de demi-colonne présentant à l'extérieur de faux- joints à
Focre brune.
Cette demi-colonne a o™ 17 de rayon. Cette pierre, d*un
blanc très mat, d'un grain assez fin, est considérée par les
ouvriers comme pouvant provenir des carrières de Bi-
horel.
Le long du côté nord de la fouille se trouve un ancien
mur parementé dont les fondations sont de 0^80 en contre-
bas du dallage ; on remarque sur une de ces pierres des faux
traits à Tocre brune et une marque de tâcheron, haute
de o°*i5, présentant l'apparence d'une crosse légèrement
renversée.
Jeudi 2g janvier, — A 2"»5o du calorifère et à i™55 de
profondeur, on a trouvé un nouveau cercueil en pierre de
Saint-Leu, long de 1^90 à Tintérieur, couvercle tecti-
forme, large à la tête de 0^57, haut au milieu de o"2o.
Au-dessous, un autre sarcophage offre cette particula-
rité d'être absolument arrondi en tète et de présenter à
l'intérieur, sur la longueur de 2 mètres, une réserve pour
la tête constituée par un relief de o"04 sur le fond du
cercueil, commençant à o«3o de l'extrémité supérieure,
relief dans lequel on a circulairement creusé, sur un dia-
mètre de on^So et une profondeur deo"02, l'emplacement
497
de la tête avec ouverture de o" 1 8 pour le passage du cou.
Dans les fouilles pour la prise d'air, vers Touest, fouilles
qui, à leur extrémité, ont été approfondies de 2 mètres
pour la construction d'un caveau destiné à recevoir le sar-
cophage de D. Rainfroy et les restes des quatre abbés,
avec tous les ossements trouvés dans les fouilles (i), on
(i) Le cercueil de D. Rainfroy a été ultérieurement déposé
dans ce caveau par les soins du clergé de Saint-Ouen et du G>n-
seil de fabrique. Dans ce cercueil, divisé en quatre comparti-
ments, ont été replacés les restes des quatre abbés. Sur le
compartiment contenant les restes de D. Rainfroy a été mise
une plaque en plomb reproduisant Tantique inscription qui va
être déposée au musée des antiquités, et, au-dessus, cette men-
tion : « Reproduction du texte de Tinscription originale déposée
au musée des antiquités delà Seine-Inférieure, i885. »
Avant de clore le caveau, la Fabrique y a fait placer l'inscrip-
tion suivante sur une plaque de plomb.
L'an de grâce mdccclxxxv
au mois de Février
ont été précieusement déposés dans ce caveau,
par les soins du clergé et du Conseil de Fabrque
de la paroisse Saint-Ouen,
les ossements
trouvés dtmsla nef principale de cette église
pendant les 'fouilles faites pour la construction
du calorifère ;
parmi lesquels
ceux de D. Rainfroy, abbé de Saint-Ouen, mort en 1 1 5o
et de trois autres abbés demeurés inconnus,
ont été recueillis séparément
et placés dans le tombeau où reposent
les restes de D. Rainfroy.
Un service solennel pour le repos des âmes
de ces défunts
a été célébré à Toccasion de la translation
de leurs restas.
498
rencontre, à 5 mètres du mur du calorifère et à i">40 de
profondeur, un sarcophage placé contre un gros mur
transversal, dans un sol qui présente les apparences de la
terre végétale. Il est en pierre de Saint- Leu, à couvercle
tectiforme, la cuve en deux morceaux. A Tintérieur, des
ossements sans aucun objet permettant de dater la sépul-
ture.
Au-dessous, dans un autre sarcophage, ouvert en pré-
sence de M. Morton, ministre des États-Unis, a été trouve
un style en bronze très commun et fruste.
Mardi ! y février, — Les ouvriers, parvenus en face le
côté nord de la baie qui clôt la chapelle des Sept-Dou-
leurs, pour la conduite de fumée du calorifère, découvrent
deux anciens chapiteaux romans, que Ton dégage avec
soin. De cet endroit à la sortie par la petite porte du
transept, ils travaillent dans un massif plein de maçon-
nerie.
Fait et arrêté le 28 février i885.
C»< d'Estaintot, L. de Vesly.
TABLE DES NOMS D'HOMME
Abaquesne, 262.
Achéry (d'), 294.
Alexandre VII, 265.
Anard(rabbé), 210.
— (Paul), 206.
Alleurs (des), 264, 414.
AUiaume (Vabbé), 122.
Amalbert, 447, 449-451.
Amaury de Meulan, 66,
Amboise (cardinal d'), i3i.
249, 404.
Ancel, 123.
Ango (Roger), 1 2.
Ansbert (S.), 260.
Anselme (le P.), 191.
Asseline, 95.
Aubeaux (Pierre des), 106.
Aubert (S.), 18.
Augustin (saint), 474.
Aurée (sainte), 447, 449*
45o.
Austreberte (sainte), 447,
449, 450, 464, 465.
Auvray (Fabbé), communi'
cation, 3o4-3i2.
B
Balf, i38.
Bajot, 366, 367.
Barentin (Charles), 23.
Barthélémy, 122, 126.
Basilée (saint), 265.
Baudetot de Dairval 393.
Baudet (l'abbé), 446, 456,
465.
Becquet(R.), i5i.
Bedfort (duc de), 254.
Behotte, 410.
Belbeuf (de), 149, i55-i58.
Belhomme de Franqueville,
414.
Belin (dom Hilaire), 447,463-
464.
Bénédicte (sainte), 448.
Benoist (C.-J.), 356.
Bernage (de), 369.
Béthencourt (Jean de), io5.
Bigot, 89, 319.
Blanc (Ch.), 119.
Blanche de Castille, 1 3o.
Blondel, 353.
Bohier (D. Antoine), 281.
Boilly, 121.
Bonnechose (cardinal de),
420, 424.
Bordeaux (Raymond), 166-
168.
Boulanger, 206.
BouUenger (Le), 368-369.
Bourbon (Charles de), 235,
364.
Bourdaloue, 167.
5oo
!
Bourdonnaye (Je la), 14S,
399-401.
Bourgeois (frère N.), 344.
— (Le), 407-409.
Boutteville (de), 446.
Bréauté (J. de), 126.
Brèvedent (de), 376.
Brinon (de), 422.
Brument (Le), 148, 244.
Brun des Marettes (Le), i33,
141, 143, 147.
Bucy (S. de), 74.
Calizte III, i3o.
Carpentier (Le), 257-258,
402.
Carpentier (J. Le), 428.
Cal (Le), 68, 256.
Cavelier (Barbe), 287.
Célestin III, 229.
Chardon (Robert), 281.
Charles V, 76, 134.
Charles VI, 20, io5, 147.
Charles VII, 196, 258, 283.
Charles VIII, 238, 399.
Charles IX, 21, 28, i38, 236,
307.
Chéruel, 28.
Chevalier (Jacob Le), 426.
— (Lucas Le), 425.
Cideville (de), 4o3.
Cignerre (Le), 197.
Ci ville (de), 66, 94, 245.
Clerc (Le), 66, 67, 409.
Clovis, 18, 19.
Cochet (l'abbé), 47, 71, 72,
203, 211, 222-223, 281,
3oo, 304-309, 320-3x2,
390,445, 447,471.
Cœur (Le), i .
Coipel (Pabbé), 122.
Colbert, i5.
C0I20S (Jean), 283.
Commode, 38o.
Constance, 114.
Coppinger (M.), communica^
tion, 222-226.
Coquebourne (R. de), i36-
137.
Coquin, 409, 41 3.
Corneille (P.), I23, 422.
Cornu (L. Le), 79.
Cottey (l'abbé), 4 1 4-4 1 5 .
Couvet, 187.
Crcvel (l'abbé), 257.
Croix (le P. de La), 3o2.
D
Dagobert, 449, 45 o.
Dampierre (Xavier de), 89.
Davanne (dom), 443.
Delisle (Léopold), 129, 139.
Depoin, 3o2.
Descamps, 395.
Deschamps (F.), I23.
Desportes (Philippe), 119-
121.
De ville, 117.
Drouet, 227, 3 80.
Duclos, 396.
Du Guesclin, 197.
Dunois, 196* 199, 459.
Duplessis (D.Toussaint), 45-
47» 69, 82.
Dutuit, 354, 467.
5oi
Duval, 34, 7», 87.
Duval (Nicolas), architecte,
197.
E
Erasme, 367.
Esneval (les d*), 206, 45 1-
458.
Es tien ne (Henri), 263.
Estouteville (cardinale!'), i3o,
i36, 232, 235, 243, 454.
Farin, 8g, 91, i3o, i32, i36,
145, 148, 168-169, 228-
229, 242, 245, 246, 263,
265, 3i3-3i5, 327, 402-
404, 422, 444.
Faroult (A.), 35 1.
Paye (l'abbé), 275.
Feudriz, 283.
Fèvre (J. Le), 73-76.
Floquet, 12, 247, 357.
Florentin (Dominique), 356.
Fontenelle, 1 1 .
Forestier (G. Le), 456-457.
Fortin de la Hoguette, 366.
France (de), i53.
François 1er, i38, 366.
Fremont (Louis), docteur de
Sorbonne, 24.
Fromentin, 280.
Frontin (les), 169-173, 179.
Gaillard (Emm.), 309.
Galland, 1 3 8- 139.
Gallemand (le vénérable),
167, 288.
Galloway, 292-299.
Gaudefroid des Pois, 110.
Gautier, 448, 45o, 453.
Germont (de), 270-271.
Gilbert (Louis), 80.
Godard (saint), 17.
Godefroy (l'abbé), 122.
Gomboust, 233, 374-375.
Gosse, 449.
Gosselin, 227, 359, 36o, 373-
376, 399.
Goujon (J.), i5o, i58.
Grainville (le P. de), 394.
Guilbert, 327.
Guillaume Bonne-Ame, 17,
453.
Guillaume de Haucourt, i lo.
Guillaume de Tancarville, 66.
Guillaume du Bec, 77.
Guillaume - le - Conquérant,
70, 426.
Guilmeth, 70.
Guionnet, 34.
Guise (duc de), 356.
H
Hanyvel (R. de), 412.
Harcourt (les d*), 320-321.
Hardy (Michel), 21 5, 222-
223, 226, 422.
Hastan (Hasting), 448.
Hellot, 92.
Hendlé, io3.
Henri III, 1 20.
Henri IV, 21, 27, 47-5o, 56,
65, 119-122,3-26-335,368,
390, 454.
Henri V d'Angleterre, 258.
502
Hérodote, aao.
Hire (La), 197.
Horcholle, 140, 146.
Houel (Jean), 40.
Hue-Quesnel, 353.
Hugues de Haucourt, 110,
m.
Hugues d'Orges, 260.
— archidiacre, 472,490.
Hurel, i65.
I
Innocent X, 236.
Jadoulie, 268, 327-334.
Jarry, 8, 402.
Jean, duc de Normandie, 73.
Jeanne d*Arc, 2 1 .
Jolimont (de), 147.
Jouvenet, 146, 239,412.
Julienne (sainte), 448.
Leschevin, 271.
Lescollier, 285.
Lesguiilez, 328-329.
Levavasseur (Jacques), 27.
Licquet, 262.
Lieur (R. Le), 12.
— (J. Le), 354, 382.
Littré, 412.
Longpéricr (de), 322.
Lop^z (Agn^s), 444-
Loquet, 404.
Lorraine (Cl. de), 356.
Louf, 233, 235.
Louis (saint), 89, i29-i3o,
314.
Louis XI, 78, i3o, i3i, 367,
396.
Louis XII, 1 36-1 37, 404.
Louis XIH, i5, 145, i53,
181, 395.
Louis XIV, 43, 400.
Louis XV, 5, 44, 220, 401,
404, 429.
Lourdet (Michel), Notice, 95-
100, i52-i53.
Lourdet (Pierre), 97.
Lacaille, 71.
Langlois, 412-413.
Langlois (l'abbé), 419,
Lasteyrie(R. de), 490.
Lefebvre (Elie), 33o-334.
Legendre, 387.
Lejeune (le P.), 167.
Lemoyne (J.-B.), 220.
Lenfant, 407.
Lepautre, 226.
Lérue (de), 394.
Lesage, 35.
M
Marais ou Mareis, 399.
Mare (de la), 366.
Marguery (Albert), 279.
Mariette, 119.
Marigny (Enguerrand de), 26,
28, 82.
Martainville (de), 253.
Martigny (l'abbé), 474.
Martin (le P. A.), i23.
Masquerel (les), 90-94, 242.
5o3
Mathon, 67, ao3.
Mauconduit, 71.
Mazeline (Pierre), 98.
— (Robert), 98,
Ménard (dom H.), 448.
Miry (famille), 352.
Mesard (Guillaume), 1 3o-
i33, i36, i5o, i53.
Mignard, 400.
Milet des Ruisseaux, 146,
40a.
Millin, 334.
Miromesnil (de), 403.
Molière, 357, 361,376.
Monicault, 77.
Montalembert, laa.
Monteclair (de), 412.
Montholon (de), 4o3.
Montjay(de), 148-149.
Montgommery, 28.
Montmorency, 60.
Moreau (Frédéric), 59.
Motte-Lambert (de la), 264.
Moustier (Côme et Daniel),
Notice, 1 19-122.
Mulotin, 391, 410, 414.
Pardieu (de), 6a, 66.
Partiot, 84.
Pasquier (Etienne), 367.
Périaux (Nicétas), 47, 56,
329, 360-363, 368.
Pernot, 356,
PhiUbert (saint), 447, 449,
45o.
Philippe-le-Bel, 32 1.
Picard (J.), dit le Roux, 356-
357.
Pinel (Robin), 319, 398-3(.9.
— (Robert), 399.
Platon, 195.
Pommeraye (D.), 16-18, 22
24-26, 3i5, 382.
Pontcarré (de), 8, 394, 402-
404.
Poterat (les), 187-188.
Poultier, 146.
Poupel, 89.
Poussin, 146.
Prévost (A. Le), 261.
Puchot, 414.
N
Nicolas IV, 232.
Nicolas (l'abbé), 16, 17,
Novion (de), 400.
Quérière (de la), 128, 378.
Quesnel (Henri), 3o5.
Quiterie (sainte), 75, 409,
413-414.
Omer (saint), 447.
Oppien^ i38.
Ornay (d*), a66.
Ouen (saint), 447, 449.
Ouin-Lacroix (l'abbé), 367,
R
Rainfroi (l'abbé), 17, 471,
477» 497-
Resnel (l'abbé du), a75.
Rlbard, 395.
5o4
Richard [\c duc), 16,449.
Richard Cœur-de-Lion, 1 1 1 .
Richier, 356-357,
Rigaud (Eudes), iio, i%8,
lag, 134, ig3.
Robert (le duc), 425, 45o.
— de Dreux, 460,
Rochefoucauld (cardinal la),
189.
Romain (saint), 17, i5| i35.
Roque (La), 3a i.
Rosso (Le), 357.
Roux (Rouland Le), 1 2.
— (Guillaume Le) 249.
— (dom), 281.
Roy (baron Le), i23.
Sage (Gautier Le), i33.
Saint-Laurent (famille de),
3i5.
Saint-Romuald (le P. de),
X19.
Sainte-Croix (cardinal de),
20.
Saintigny, 275.
Salinas (de), 413.
Salle (Vénérable J.-B. de la),
444-446.
Sanchez (Emmanuel -Dias),
444.
Sarrazin, 29.
Saulx-Tavannes (Mg'), i32-
i33, 352.
Saussay (du), 448.
Sauvage (l'abbé), 260, 294,
296, 3o7, 413.
Seignelai, 394.
Séraphin (le P.), 242.
Siméon (saint), 3 1 5.
Sixte V, 236.
Soulié (E.), 373.
Stacpool, 294.
Sully, 48^^ 5o.
Suresnes (Michel de), 283.
Taillepied, 242, 375.
Talbot, 245, 254.
Tamizey de Larroque, 139.
Taylor, 356.
Thibaud, archevêque, 229.
Thieury, i63.
Thomas (Mgr), 420, 476,
487.
Thouret, 433-434.
Titelouze, i52.
Titien (Le), 395.
Tourte (Raoul), 16.
Trébons (de), 3i5.
U
Urbain [I (saint), 45 1, 453.
Urbain III, 229.
Valricher, 23o-23i.
Vanloo, 221.
Varin (Toussaint), 280.
Vasari, 357.
Vasse, 181.
Vaultier (Bernard), 375.
Vauquelin, 267-272.
5o5
Vergère, i38. W
Veris (N, de), 76.
Wace (Robert), 3o5.
Wailly (N. de), 12.
Vieil (G. Le), 239.
— (J. Le), 257.
Villain (Jean Le), i3o. Y
Vitruve, 416.
Voltaire, 378 Yolande de Flandre, 191,
33
TABLE DES NOMS DE LIEU
Aix, 388, 393.
Aiziers, 228.
Alincourt (manoir), 34, 86-
88, 106, 205,391.
Allouville, 261.
Ambourville, 102.
Amiens, 418, 447, 448.
Angerville-rOrcher, 209.
Arques, 8i, 114, 304,418.
Arras, 396-398.
Aubette (V), 425-428, 43 1-
432.
Auch, 41 3,
Auffay, 190-195, 365, 424,
439.
Aumale, 81, xi3.
Authieux (les), 1 14.
Avranches, 459.
B
Barentin, 3 10.
Beaubec, xio.
Beaunay, 114.
Beauvoir (Rouen), 229-232.
Bédanne, 349.
Bernay, 70.
Bertheauville, 243.
Bival, 82.
Blainville, 409.
Blanc-Mesnil, 114.
Bléville, 162.
Blosseville (Bonsecours), 1 7
27, 426-427.
Boissière (la), ix3.
Bolbec, 69, 320-32I.
Bondeville, 3i3.
Bonport, 83, 119-121,
Bonsecours, 17, 27, 122-123,
2l3.
Boos, 262.
Bordeaux, 400.
BouvUle, 3o3,
Breny, 59.
Bréval, 462-463.
Buchy, X14.
Caen, 369*
Cailly, 22, 409.
Campeaux, X14.
Canaries, xo5.
Canteleu, 3x4, 33o-334.
Caudebec-en-Caux, 35-44,
82,203-204,221,228,230,
304.
Caudebec-lès - Elbeuf, 227,
390, 440-44 X.
Charny, 11 3.
Chartres^ 418.
5o8
Cidetot, 353.
Cléon, 414-416, 423.
aères, 358.
Cléville, 461-463.
Cottévrard, 124, 174, 177.
G>urcelles, 11 3.
Crevon, 385.
Criquetot-sur-OuvilIe, 304-
3l2.
Criquiers, 112.
Croisset (château de)» Notice^
61-67.
D
Darnétal, 214, 427.
Dieppe, 95, 114, 196-198,
395, 463.
Digeon, 11 3.
Doudeville, 309.
Drosay. 1x4.
Duclair, 297, 428.
Ecouis, 82.
Elbeuf, 160.
EmendrevUle, 187, 190, 433,
437.
Envermeu, 82, 84, 86.
Ërmenouvilley 89*
Escles, II 3.
Etrépagny, 387.
Eu, 335-336, 422.
Evreux, 122.
Flamanville, 11 3.
Fontaine-Jacob (baronnie),
^oftce, 425-437.
Fontaine-le-Bourg, 441-442.
Fontaine-le-Dun, 11 3.
Fontainebleau, 357.
Forcenyes (Fourcigny), 11 a-
ii3.
Forges, 122.
Franqueville, 22.
Frettencourt, 112.
Falaise, 129.
Fécaipp, 55y i3o, 23o-23i,
280-281, 433.
Gahiffine (port), 29 t.
Gaillarde (la), 114.
Gaillefontaine, 67,82, iio,
112.
Gaillon, i65.
Gainneville, 85.
Gau ville, 11 3.
Genétel, m.
Gisors, 106-109.
Gors~A£ons, ito.
Gournay, 82.
Grainville- la - Teinturière ,
114.
Grammont, 368-369, 433,
437.
Graville - Sainte - Honorine ,
3 1-33, 392, 407.
H
Harfleur, 5i, 53, 286-292.
Havre (le), 60, 88-89, 106,
122, 344.
Haucourt, iio.
Haye de Neufmarché (la),
114.
5o9
Hénouville^ 275-278.
Hodenc-au-Bosc, 11 3.
Houssaye-Bérenger (la), 11 3.
I
Igoville, 79.
Illois, 112.
Imbleville (château d*), No-
tice, 89-95.
Ingouville, 280.
Ivry-le-Temple, 114.
Joinville, 356.
Jumiéges, 296-299, 3 1 3, 403,
449-450, 463.
Lamerville, X14.
Leure, 291.
Lézarde (la), 291.
Lillebonne, 34, 70, 72, 86-
88, 106, 180, 2o5, 294-
298, 320-322, 391-392.
Limésy, 23 1, 244, 246, 309.
Limoges, 57.
Lisieux, 83.
Londe (la), 355, 3 80.
Longue ville, 81, 190-202.
Luneray, 11 3.
M
Magny-le-Fréville, 407.
Martincamp, 387.
Maudétour, 385.
Mesnil-David, 112.
Mesnil-Esaard, 22.
Mesnil-Bous-Verdives, 427,
Mivoie (la), 404.
Mondeville (Calvados), 290.
Mont - aux -Malades, 5o-5 3 ,
82, 174, 176/ ï77i ïS'>
2i3, 214, 229, 3i4, 341.
Mont-Rôti, 114.
Mont-Saint-Michel, 97.
Montigny, 22.
Montivilliers, 5i-54, 239,
280-291, 433.
Montreuil, 448.
Monville, 358.
Morgny, 384-386, 391,407-
414.
Morvillers - Saint - Saturnin,
ii3.
Motteville, 221, 409.
Moulineaux, 418.
Moullineaux-sur-Longueville,
93.
N
Nesle-rHôpital, îi3.
Neuville (Dieppe), ix3.
Névillç, 126.
Nid-de^Chien, 23o.
Normare, 17} 22.
Notre-Dame-de-Grâce(prieu-
ré), 24.
NuUemont, xi2.
O
Octeville, 52, 54.
Oise (vallée de 1*), 12.
Oissel, 2ii-2i3, 348-349.
Orgeville, 427.
Ormesnil, 112.
5io
Ouainville, 353.
Ouville-l'Abbaye, 307, 3 10.
Paris, 235, 379, 38i, 429.
Pavilly, 17, 27, 236, 353,
446-465.
Perruque (la), 1 14.
Petit-Couronne, 83, i23.
Petit-Quevilly, i58.
Picardie, iio.
Pierreval, 22.
Pollet(le), 114,
Pommeraye (la), 385, 386.
Pont-Authou, 206.
Pont-Sainl-Pierre, i5, 427,
Port (monastère), 447, 449.
Port-Saint-Ouen, 82,
Poses, 214.
Préaux, 77,
Provins, 167.
Quevilly, 213.214, 265,
Raffetot, 21 5.
Rançon, 37.
Repentigny, 114.
Robec, 16.
Romaiy, 387, 427.
Ronchois, X12.
Rosay, 114.
Rouen, Académie de musique
Notice, 372-379.
— Basse-Vieille-Tour, 226,
383.
Rouen, Bonne<NouTelle,433,
443.
— Chapelle S.-Etien ne, a 3o-
233.
— — S.-Nicolas de Beau-
voir, 229, 23o.
— — des Trépassés, 233-
242.
— — de THospice-Géné-
ral. Notice, 263-
272.
— — Saint-Léonard, 339.
— — Saint- Yon, 275.
— Chartreux, 43 x -434,454-
456.
— Cimetière S.-Julien, 1 8g.
— — S.-Maur, Notice,
228-258.
— Collections anciennes ,
393-395.
— Collégiale S.-Georg., 387,
— Colonie à Arras, 396.
— Comédie (la), 376-379.
— CordeIiers,42 3, 439, 445 .
— Croix de la place de la
Calende, 380-384.
— Eglise Cathédrale, 12,
25, 95, 96, 164-165,
Ï77. i7«, aai, 3o3,
335, 417-420, 424,
442» 468-469,
— Eglise des Carmes, 97.
— — N.-D. de la Ronde,
96; Notice, 127-
i58.
— — S.-Cande-le-Jeune,
96.
"" — S.-Gervais, 10 1,
x63.
5ii
Rouen, Eglise S.-Herbland,
98, l^^.
— — S.-Hîlaire, 122,
427.
— — S. -Jean, 96, 1 39,
141, 255.
— — S.-Lô, 127, 275,
422-423, 437.
— — S.-Maclou , 96 ,
126, 169-173.
— — S.-Michel, 100.
— — S.-Nicolas, 124.
— — S.-Paul, 33, 59,
122, 287, 426-
427.
— — S.-Romain, 257,
262.
__ — S. -Vivien, 41 3,
465.
— Emmurées, 274,443.
— Entrée de Charles VUl,
399.
— Hôpital S.-Vivien, No-
tice, 73-81.
— Hôtel-Dieu, 228, 23o,
240-250 , 375, 382-
384.
— Hôtel-de-ViUe, 127-128,
144, 400.
— Hôtel des Sociétés sa-
vantes. Notice, 401-
404.
— Hôtel du Tôt, Notice,
168-173.
— Hôtel Ste-Catherine, No-
tice, 279, 3 12-3 19,
353.
— Ile Notre-Dame, 169,
X70«
Rouen, Jacobins, 319.
— Jeux de paume. Notice,
357-370, 372-379.
^ Maisons sculptées, 35,
88, io5, 162, 322.
— Manoirs. Voir ce mot,
^ Mont-Gargan, 16, 139.
— Monuments païens, 438.
— Notre-Dame - des - Prés
(prieuré), 68.
^ Palais-de-Justice (agran-
dissement), 2.
— Plans, 126, 354.
— Pont de bateaux, x8i.
— Porte Sainte • Apolline,
423.
— Prieuré S.-Michel, No-
tice, 14.
— Privilège des bourgeois,
398.
— Rue des Charrettes, 374.
— Saint-Gilles - de-Répain-
ville, 427.
— Saint- Amand (abbaje),
336-344.
— Saint-Ouen (abbaye de),
16-27, 174, 440, 469-
498.
— Saint-Sever (faubourg),
47-5o, 187-190, 387,
445,
— Saint- Yon, 444-446.
— Sépultures, rue Tabou-
ret, 127, 210-21 X.
— Topographie, 423.
^ Vieux « Palais (fontaine
du), Notice, 327-334.
Ry, 2, 391, 407-409.
5l2
Sainneville, 417.
Saint-Aubin (Elbeuf), 279.
Saint-Aubin^ur-Scie, aia.
Saint-Denis, 11 3.
SaîntoDenis (abbaye de), 23.
Saint • Etienne - du • Haut •
Prieur, 114.
Saint-Etienne - du-Rouvray ,
214.
Saint-Filleul (sources), 327.
Saint-Georges (abbaye de),
221, 3i3, 392, 462.
Saint-Gilles(léproserie), 286.
Saint-Jean - d*Abbetot, 86}
117-118, x86, 225, 347.
Saint-Jean-de-Folleville, 2o5.
Saint-Julien (chapelle), i58,
3 17, 425, 462.
Saint-Laurent-en-Caux, x36.
Saint-Léger-du-Bourg-Denis,
21 3, 427.
Saint-Leu, 74.
Saint-Martin-Ie-Galllard, 104,
180.
Saint-Pierre-Manneville^ 162
Saint-Pierre-le-Petit, 55.
Saint-Saens, 273, 278, 335.
Saint-Thomas du Louvre,
148.
Saint-Victor-l'Abbasp, 95,
464.
Saint-Vigor, 1x4.
Saint - Wandrille, 292-300,
3i3.
Sainte-Catherine (côte et ab-
baye), 14, 25-29,56, 126,
425-426 , 44a-45o, 454,
462-465.
Sainte-Marguerite, 1 14.
Sainte-Vaubourg (chapelle),
124, 280.
Sanxay (monuments de), 3oi.
Senlis, 346.
Sotteville, 21 3, 368.
Tocqueville, xi3.
Torcy-le-Petit, X23.
Touffreville, 11 3.
Trois-Pierres, 32 x.
Tronq (le), 40.
Tunis, 89.
U
Utrecht, 233.
Val-de-la-Haye, 1 24, 280.
Val-des-Leux, 2X, 22.
Valognes, 97.
Vatrival, 1x4.
Vatteville, X25, 299.
Vaudreville, 8x.
Veules, 1x4, 280.
Vieux-Rue, 372, 390, 407,
441.
Villedieu-la-Montagne, iio-
XI 5.
Yonville, 327.
Yquebeuf, 22.
TABLE DES PRINCIPALES MATIÈRES
Agrafe en bronze, 484.
Ambons projetés à la cathé-
drale, 424.
Amphore, 492.
Ampoule, 223.
Amulette, 223.
Ange pour lutrin, 147.
Anneau en bronze, 484, 486.
— en fer, 484.
— en argent, 486.
Antiquités préhistoriques ,
i65, 21 3-21 5, 348, 349.
Antiquités romaines, 6, 7,
34, 45-47, 58-59, 86-87,
160, 227, 279, 349, 353,
438.
Antiquités mérovingiennes,
7, 34, 87, 160-161, 207,
470.
Antiquités du moyen-âge,
161.
Antiquités d'époque incer-
taine, 161, i65, 474-498.
Arcade de crucifix, I23.
Ardoise, 197-198.
Arènes de Senlis, 346.
Armes gauloises, 160.
— gallo-romaines, 227,
349.
Armes mérovingiennes, 1 60-
161,207,274,348,
485.
Armoiries, 208, 386.
Art ogival, 122-123, 272.
Asile (droit d'), 286.
Auge en pierre, 489.
Aumônes en faveur des dé-
funts, 249, 3 16.
Aumusse, i3o-i32, x36-i37.
Autel à la romaine, 145.
B
Bas-reliefs dits de Michel-
Ange, 344, 350-357.
Bâton abbatial, 476-478.
Bestiaux normands, 192.
Béton, 492.
Bière de Dieppe, renommée,
198.
Boiseries, xvie siècle, 35, 88.
— xviic — 35 1.
Boisseau étalon de Bolbec,
Notice, 320-322.
Bollandlstes, 259-260.
Boucle en bronze, 482-485,
487-489,491.
Boucle à facettes, 485.
^~ en fer, 486.
5i4
Bourguignons; leurs ravages,
198.
Bouts rimes, 281.
Briques romaines, 438.
C
Cabochon, 485.
Cachet, 84.
Cichette monétaire, 162.
Cafés à Rouen, 378.
Calende, 38o-3l3i.
Calligraphie grecque, i38.
Carrelages émaillés, 262,
476.
Cartes à jouer, 341.
Céramique égyptienne, 220.
Cercueils en pierre de Ver-
gclé, 475, 476.
Cercueils en pierre de Cau-
mont, 477.
Cercueils en pierre de Beau-
mont, 478.
Cercueils en pierre de Saint-
Maximin, 478.
Cercueils en pierre de Saint-
Leu, 480, 496, 498.
Cercueils en plâtre , 48 1 ,
487.
— percés d'un trou,
484, 489.
— avec entaille pour
la tête, 496.
Chaînettes de bronze, 484.
— de cuivre, 486.
Chainture noire (litre) dans
des chapelles, 284.
Chaires anciennes, 166-168,
288, 3o3.
Chapelle Saint-Martin-du-
Vivier, 69-71.
Chapelle Saint-Pierre à Pa-
villy, 446-463 .
— Voir Rouen.
Chapiteau, 492, 49 3 , 498.
Charbon, 484.
— dans les cercueils,
485-487, 491.
Charniers, 240, 286, 333.
Châsses, 95-96, i5i.
Château Fontaine-Martel, 70-
71-
— du Bellay, 275.
Chaux dans les sarcophages,
479, 483.
Chronogramme, 29.
Cimetière gallo-romain, 222-
224.
— ? mérovingien, 387.
^ des protestants, 246-
248.
— de Champfleury (Har-
fleur), 286.
— de Brisegaret, 239,283.
— Saint- Maur, Notice,
228-258.
Classement de monuments
historiques, 372, 390-3gi,
407, 441.
Clergé constitutionnel, 272.
Collections locales, 204, 227,
393-395.
Colonne (demi-), 493-496.
Commanderie de ViUcdieu,
Notice, iio-i 17.
Commanderie de Repentigny,
114.
5i5
COMMISSION DES ANTIQUITÉS
Communications :
MM. Baudry (Paul), 56, 67,
i65, 187, 208, 35i,
386, 387, 417, 443,
465.
Beaurepaire(de), 14,47,
73, 95, 119, i63,
168, 189, 190, 228,
263, 279, 280, 3 12,
322, 355, 357, 395,
408, 441, 446.
Billiard, io6,2i3, 353.
Bouctot, 273,419, 442.
Bouquet, 27, 45, 67,
164, 262, 372, 474.
Brianchon, 14, 59, 69,
84,86, 117, 2i5, 221,
261, 320, 355, 391,
421.
Darcel (A.), 292.
Estaintot (d*), 89, 261,
469.
Félix, 275.
Girancourt (de), 57.
GlanviUe (de), 61.
Gouellain, 56, 226-228,
35o, 38o, 390, 395,
406, 422, 437, 441.
Guéroult, 35.
Le Breton (G.), 102,
122, 220, 225-227,
260, 262, 335.
Lefort, 2, 44, 3o2, 335,
392, 406, 442.
Lormicr, 319.
Loih (Pabbé), 164.
Maillet du Boullay, 34,
86, 88, 107, 161,
162, 2i5, 275, 388.
MM. Merval (de), no.
Pelay, 207, 21 5, 3 12,
353, 355, 387, 407.
Robert (chanoine), 392,
407, 419.
Roessler, 60.
Serre (de la), 204, 274,
278.
Simon, 58.
Tougard (l'abbé), 122,
179, 221, 258, 259,
279, 3o3, 335, 393,
424, 439, 465.
Vesly (de), 106, 160,
211, 348, 414, 423,
473.
Membres décédés, 61, 2o3.
Membres nommés, io3.
Hommages, 67, 60, 71, 90,
127, 162, 207, 211, 212,
259, 274, 278, 3 12, 588,
4o5, 422.
Bulletin, 226, 260.
Dessins, 354, ^7'-
Séances de la Commission
Pages
1882 janvier i
mars 3o
mai 58
juin 85
juillet io3
août 125
décembre i59
i883 février i85
mars 209
mai 225
5i6
i883 juin 269
octobre 277
décembre 3ot
— .... 326
1884 février 346
avril 371
mai 389
juillet 406
octobre 421
novembre 439
décembre 466
Confession n aire (confession-
nal), 284.
Confréries, 141, 233, 243,
284-285, 367, 38i, 413.
Coupe en terre fine, 492.
Coupelle romaine, 6.
Couvercles de sarcophages,
476-484, 498.
— entaillé, 480.
Croix, 425, 479, 482, 487.
Crucifix, 181, 288-290, 446.
Cupules en briques, 41 5.
D
Dallage ancien , 476-479,
494.
Dalles tumulaires, 89, 392-
393, 406-407.
Danois, 349, 448-449.
Défense de sanglier, 480,
487.
Devant d*autel, 35o.
Dorure, 487.
Dragages (découvertes par
les), 160-161, i65, 211,
274, 348-350.
Eglises conventuelles et pa-
roissiales, 282.
Epée Scandinave, 21 1>2 12.
— espagnole, 274.
— normande, 349.
— pistilllforme, 348.
^ avec inscription, 404.
— 388.
Epi en plomb, 275.
Epingle, 487.
Esquelle (cloche) de N.-D.,
75.
Etendard ennemi en ex-'VOto^
285.
Exécutions capitales, 1 95-
196.
Fauchard, 487, 491.
Faune (débris de la), 71, 1 6 x ,
i65.
Fer (fragments divers), 482-
484, 487-488,490,491.
— de lance, 485, 490.
Fermeture de collier, 487.
Feux de joie, 144.
Fibule en or, 485.
Fiefs (dans les villes), 173-
179.
Fief au Moutardier, 174,
Fiole en verre blanc, 486.
Fouilles du Palais de Justice,
5, 45.
— de Bolbec, 71.
— de Pont-Aulhou, 206,
207.
— duMusée(Rouen), 207.
i
5i7
Fouilles de Caudebec-lès-
Elbeuf, %2y.
— de Cléon, 414-417,
423.
— de Saint-Lô, 422, 437.
— de Saint-Ouen, 469-
498.
Fourneaux gallo-romains,
414-416.
Fourreau de style, en or, 488.
Frais d'inhumation, 199,342,
344.
Franchise (nom d'Arras) ,
396.
Franciscains, 44, i3o, 394.
Frange d'or, 49 1 .
Frapper à la porte (obligation
de), 172-173.
Gages desservit» (xvi* sièc),
200-203.
Galon, 478, 491.
Inscriptions, xie siècle, 490.
— xiie — 477.
— xiii« — 7
— xive ^ 92.
— xve — 89.
— xvi« — 7, 60,
95.
— xvii* — 208,
218, 444, 452-454.
— modernes, 2 5 3, 265-
271, 391, 407-408,
445.
— ? carlovingienne, 481.
Ivoire (plaque d"), 486.
— fragments, 487.
Jeu de paume. Voir Rouen.
Jubé de la cathédrale, 420,
424, 442, 468-469.
Juifs, i3, 127.
Justices (hautes), 432-433.
H
Hache en fer, 485.
Hanaps, 5o.
Hareng, 383.
Hématite d'oxyde de fer, 208.
Hôpitaux, 73-83.
Hospice Sainte-Anne, 40.
Lame d'épée, 482, 484.
— de couteau, 484, 486,
489, 490.
— de poignard, 482.
— de bronze, 483, 484.
Lépreux, 5o-55.
Lutrin, 147, 417.
I
M
Incendie (traces d'incendie),
488.
Incrustations en pierres, 485.
Maisons marquées d'une
croix, 425.
Manoir d'Alincourt, 34, 106.
5i8
Manoir de la Planquette, 35.
— de la Motte, 68.
— Méry, 35 1, 386.
Marque de tftcheron, 496.
Marqueurs, 252.
Médaillon en pierre, 481.
Mesquicher, 398.
Messeline, ^\%.
Mesure (double), 279.
Meule romaine, 279.
Mobilier d'un lépreux, 5o.
Mœurs judiciaires anciennes,
425-437.
Monnaies gauloises, 227.
— romaines, 6, 227, 279,
355, 38o, 391.
— en bronze, 485, 489-
491.
— modernes, 8, 1 8 1 , 2 74.
Monuments historiques ( Voir
classement), 2, 3i, 33, 59,
85, 104, iio, 117, 123,
125, 126, i58, 180, 186,
209, 217, 226, 261, 273,
281, 3o2, 335, 347, 407,
424, 439, 440.
Mosaïque, 481.
Motte (manoir de la), Notice,
68.
Moulures en plâtre, 478.
Muret de la Ronde, 144.
Murs romains, 6, 45, 58.
— anciens de Rouen, 268,
279.
Musée des Antiquités, i3, 86,
88, io5, i6i-i63, 212-
21 5, 226,274, 280, 320,
35o, 35 1, 353, 38o, 392-
393, 406-407, 470, 497.
N
Nivellement (défaut de), 493.
O
Ocre (traits à T), 496.
Orfroi, 475.
Ornements en bronze, 483,
485.
— argentés, 485.
— de moulures, 496.
Œufs de Pâques, 412.
•— symboliques, 474, 482.
Orgues, i5o-i52.
Paratonnerres, 210.
Pavés émaillés du xiii* siècle,
473.
Peigne mérovingien, 7.
Peintures, 479.
Pèlerinage^» (souvenirs de),
395.
Pendant d'oreille, 485.
Perles en os mérovingiennes,
7-
Peste, 43, 246-249, 25 1-
254.
Pichets, xve siècle, i3, 21 5.
Pince à épiler, 487.
Planquette (manoir de la).
Notice y 35-40.
Plaques de ceinturon, 483,
485.
— de marbre blanc, 481.
— de bronze, 486, 487.
— d'ivoire, 486.
— de fer, 487.
^w^^mt ■■*
5i9
Plaque commémorative, 8.
Poignard, 483, 485.
Poteries romaines, 7, 84, 87,
106, 222-223, 227, 391.
Poteries mérovingiennes, 87,
207, 423.
Poteries, xvie siècle, 7, 387.
^ fragments divers, 486-
488, 492.
Protestants, 236, 246-248.
Proverbe, 245.
Religieux morts au service
des pestiférés, 252-254,
258.
Responcion (contribution) ,
1x5.
Retables, 98-101, 285.
Revestiaire, i33, 134.
Rivets de bronze, 485*486.
Rondelle mérovingienne, 7.
Sable dans les sarcophages,
477, 480, 488.
Saint - Jean - de - Jérusalem
(ordre), iio.
Samos (terre de), 480, 492.
Sandales monastiques, 476,
478, 490.
Sceau, xiiie siècle, 7-
— xvie — 67.
— 319.
Scramasaxes, 485, 487, 489-
491.
Sépultures gallo-romaines,
2x0, 222-224, 227«
Sépultures franques, 206-
Serment canonial, 134.
Silçx taillés, 2x3-2X4, 487.
— à briquet, 485.
Statuettes, 7X.
Stuc, 479.
Style, 483, 487.
— en argent, 488.
— en bronze, 498.
Tabatière, 57.
Tabernacle, 142.
Tableaux, 395, 399-401.
Tapisseries, x53-x55, 192,
205.
Terre cuite, 484.
Terres portées à Saint-Maur,
255.
Testament, 408.
Têtes en marbre, 215-2x7.
Tissu d'or, 478, 49^ 49»-
Toile (fabrique de), 5o.
Tombeau circulaire, 102.
— en maçonnerie, 475.
Traduction française de la
Bible, X92.
Trésorier (fonctions de), 410-
411.
Truie inculpée de meurtre,
194.
U
Urne romaine, 353.
Valet de chainbre du roi,
119, X2I.